Il s’agit d’un scénario cauchemardesque, un monde où des armes autonomes, des robots tueurs, peuvent sélectionner et attaquer leurs cibles sans aucun contrôle humain. Urgemment, nous devons fixer des limites avant qu’il ne soit trop tard.
Les Nations unies, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), des prix Nobel, des milliers de scientifiques, des spécialistes de la robotique et des professionnels des technologies demandent depuis plus d’une décennie un traité ayant force de loi afin d’empêcher que les robots tueurs ne deviennent réalité. Les gouvernements doivent fixer des limites face à des machines capables de choisir de tuer.
Malgré cette mobilisation, aucun consensus n’a encore émergé sur la définition précise des armes autonomes, ni sur la façon de garantir un véritable contrôle humain. La résistance de quelques grandes puissances militaires qui développent ces armes retarde la conclusion d’un tel traité.
Une question de vie ou de mort
Permettre à des machines de trancher des questions de vie ou de mort constitue une atteinte à la dignité humaine, et risque en outre de causer des violations dévastatrices des lois de la guerre et des droits humains. Le remplacement de soldats par des machines rendra la décision de partir en guerre plus facile.
Par ailleurs, les machines ne peuvent pas effectuer de choix complexes sur le plan éthique dans des contextes imprévisibles comme les champs de bataille ou des scénarios du monde réel ; rien ne saurait remplacer une prise de décision humaine. Employer ces technologies sur les champs de bataille, dans le domaine de l’application des lois, du maintien de l’ordre ou de contrôle aux frontières, serait désastreux.
Cela exacerbera également la déshumanisation de la société sur l’espace numérique, qui réduit les personnes à l’état de données à traiter. Il nous faut un traité international robuste et juridiquement contraignant afin de faire cesser la prolifération des robots tueurs, avant qu’il ne soit trop tard.
Les pays qui développent ces armes
Certaines puissances militaires investissent massivement dans ces technologies et freinent l’adoption de normes internationales trop strictes.
C’est notamment le cas des États-Unis, leader mondial en la matière qui produit en masse des robots militaires, et des « essaims de drones autonomes » (Programme « Replicator ») équipés de « munitions rôdeuses » (loitering munitions) qui surveillent et frappent de façon autonome.
La Chine développe également un système d’essaim « intelligent » de millier de drones capables de submerger de façon synchronisée et autonome des défenses ennemies. Ce pays prévoit par ailleurs de produire des milliers de robots humanoïdes de combat. Cette tendance est particulièrement inquiétante.
Autres pays qui investissent et développent le plus activement les armes létales autonomes («robots tueurs»): la Russie, Israël, la Corée du Sud, l’Inde et les pays européens, dont la France, qui participent à la recherche, au développement et à la modernisation de systèmes d’armes autonomes dans le cadre de programmes conjoints ou d’initiatives européennes.
Les dernières avancées en matière de législation
Une résolution historique de l’ONU : l’Assemblée générale des Nations unies a adopté, le 2 décembre 2024, une résolution lançant officiellement des consultations pour négocier de nouvelles règles internationales sur les armes létales autonomes (LAWS). Ce texte pose le principe d’une approche à deux niveaux : interdire certains systèmes entièrement autonomes (en particulier ceux capables de cibler et de tuer des humains sans supervision relevée), et réglementer les autres usages.
Mobilisation croissante des États : en mai 2025, 96 pays ont participé à la première réunion de l’Assemblée générale de l’ONU sur ce sujet, et plus de 120 États soutiennent l’ouverture de négociations. Beaucoup se montrent préoccupés par le retrait du contrôle humain et l’imprévisibilité des décisions d’attaque prises par des machines.
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, ainsi que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), insistent sur l’urgence de conclure, d'ici 2026, un instrument juridiquement contraignant interdisant les armes autonomes sans contrôle humain « significatif » et réglementant toutes les autres.
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