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Une manifestante se tient devant une lignée de policiers, place San Martin à Lima au Pérou, le 14 décembre 2022 / © MARTIN BERNETTI - AFP

Une manifestante se tient devant une lignée de policiers, place San Martin à Lima au Pérou, le 14 décembre 2022 / © MARTIN BERNETTI - AFP

Liberté d'expression

Au Pérou, une répression violente contre les manifestations

Les manifestations qui ont gagné le Pérou depuis décembre 2022 sont violemment réprimées par les forces de sécurité. Au moins 48 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations, dont des mineurs.  On compte plus de 1200 blessés. Le point sur la situation.

L’armée et la police péruvienne ont utilisé illégalement et sans discernement des armes meurtrières et autres armes à létalité réduite contre la population dans le cadre des manifestations qui ont démarré le 7 décembre 2022. Nous dénonçons également les attaques généralisées et le racisme systémique envers la population autochtone et paysanne, principale cible de la répression.  Sur la base de notre travail de recherche, mené par la mission d'enquête envoyée sur le terrain en janvier, nous dénonçons aujourd’hui de graves violations des droits humains.  

Le ministère de la justice péruvienne a déclaré le 18 février dans un communiqué qu’'il « n'existait au Pérou ni une politique de violation massive et systématique des droits de l'Homme, ni ce qui a été qualifié de 'racisme systémique' dans les actions des différentes autorités». Nos recherches attestent que ces déclarations sont fausses.

Rejoindre notre campagne pour défendre le droit de manifester

Comprendre les manifestations au Pérou

 Le Pérou traverse une crise politique de longue date qui s’est intensifiée au début du mois de décembre par des actions de protestation contre le nouveau gouvernement. Les manifestations en cours dans le pays  font suite à la destitution de l’ancien président Pedro Castillo qui avait tenté de dissoudre le Congrès national, le 7 décembre. Le Tribunal constitutionnel et le Congrès ont rejeté cette décision, et Pedro Castillo a été arrêté le jour même. En signe de protestation contre le Congrès et les nouvelles forces politiques en place, des mobilisations se sont répandues dans tout le pays.

Des morts et des blessés

Depuis le début des manifestations le 7 décembre, au moins 48 personnes ont été tuées, dont des mineurs : Romario Quispe Garfias, 18 ans, et un autre garçon âgé de 15 ans ont été tués le 11 décembre dans la ville de Andahuaylas. 

Majoritairement pacifiques, les manifestations ont été émaillées par quelques épisodes de violence ciblée de la part de certains manifestants, comme des jets de pierre avec des lance-pierres artisanaux et des feux d’artifice. Les éléments recueillis montrent toutefois que la police et l'armée ont tiré des balles aveugles et parfois dirigées contre des cibles concrètes, tuant ou blessant des passants, des manifestants et des personnes qui ont porté secours à des blessés. 

Les autorités péruviennes ont permis, pendant plus de deux mois, que l'usage excessif et meurtrier de la force soit la seule réponse du gouvernement face aux doléances de milliers de communautés qui réclament aujourd'hui la dignité et un système politique qui garantisse leurs droits humains. 

Erika Guevara-Rosas, directrice de la région Amériques à Amnesty International

Nous avons pu vérifier des images montrant des policiers tirant des grenades lacrymogènes directement et à faible distance sur des manifestants sur la place centrale de Lima. Nous rappelons que la force ne doit être utilisée que lorsque cela est strictement nécessaire et de façon proportionnée. Face à des actes de violence, les forces de l’ordre doivent réagir de façon individualisée contre les responsables des troubles et des agissements qui mettent en danger la vie ou l’intégrité d’autrui.

Voir : Reportage - Colombie, au coeur des manifestations

Lire aussi : Chili, des violences policières en toute impunité

Manifester, un droit menacé

Aujourd'hui, partout dans le monde, le droit de manifester est menacé. La répression violente au Pérou et la répression sanglante en Iran n'en sont que les derniers exemples. De trop nombreux États mettent en œuvre un large éventail de mesures pour réprimer les manifestations.

Population autochtone : première cible

Nos enquêtes sur le terrain ont permis de constater que le nombre de décès liés à la répression gouvernementale est concentré dans les régions où la majorité de la population est autochtone. Depuis le début des manifestations, 80% des décès ont été enregistrés dans des départements où les habitants sont majoritairement autochtones alors qu’ils ne représentent que 13% de la population totale du Pérou. Les autorités ont fait subir des préjugés racistes très marqués. Une forme d’acharnement exercée contre ces populations déjà largement discriminées dans l’histoire du pays.  

Le racisme systémique, enraciné dans la société péruvienne et au sein de ses institutions depuis des décennies, a été le moteur de la violence exercée comme sanction contre les communautés qui ont élevé la voix.

Erika Guevara Rosas, directrice de la région Amériques à Amnesty International

Les manifestants diabolisés

Les autorités péruviennes, même au plus haut niveau, tiennent un discours stigmatisant à l’égard des personnes qui manifestent. Elles affirment, sans preuve, que leur action est liée au « terrorisme » et à des groupes criminels. L’objectif de ces discours étant de décrédibiliser les revendications des manifestants et de justifier les atteintes à leurs droits fondamentaux. 

Or, les manifestants péruviens qui descendent dans la rue se battent, résistent, défendent des idées et protestent pour leurs droits. Leur droit de manifester doit être protégé et non réprimé. 

Besoin d'enquêtes indépendantes

Près de deux mois après le début des manifestations, les expertises ou le recueil de témoignages, n'ont toujours pas été accomplis par les organismes juridiques compétents.  

Cette répression contre les manifestants et des manifestantes appelle à une intervention rapide, impartiale et efficace des instances compétentes et spécialisées en vue d’enquêter sur les faits, d’identifier les responsables et de les amener à rendre des comptes dans le cadre d’une procédure régulière.

Retarder et négliger ce travail crucial contribue à créer un climat d'impunité qui ne fait que favoriser de tels actes.

Marina Navarro, directrice exécutive d'Amnesty International Pérou 

Nous réitérons notre appel à la présidente par intérim, Dina Boluarte, et aux autres représentants de l'État pour qu'ils mettent fin à la répression ; qu'ils répondent aux demandes légitimes des manifestants ; et qu'ils s'assurent que l'État s'acquitte de son obligation d'enquêter sur toutes les violations des droits humains commises par les forces de sécurité, et de traduire en justice les responsables présumés. 

Interpeller la présidente Dina Boluarte pour lui demander de mettre fin à cette répression. 👇

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