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URGENCE ISRAËL-GAZA

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Des enfants Rohingyas © Amnesty International

Des enfants Rohingyas © Amnesty International

Conflits armés et protection des civils

Rohingyas au Myanmar : un régime d’apartheid

Les Rohingyas au Myanmar sont pris au piège d'un système de discrimination cautionnée par l'État. Une situation qui s'apparente à l'apartheid.

Notre nouvelle enquête replace dans son contexte la récente vague de violence au Myanmar, lorsque les forces de sécurité ont tué des Rohingyas, réduit en cendres des villages entiers et poussé plus de 600 000 personnes à s'enfuir et franchir la frontière avec le Bangladesh.

Lire aussi : une vie proche de la survie

Deux années d’enquête

Deux années d’enquête révèlent que les autorités restreignent quasiment tous les aspects de la vie des Rohingyas dans l'État d'Arakan et les confinent à une vie de ghetto, où ils doivent lutter pour accéder aux soins de santé et à l'éducation, voire dans certaines régions, pour sortir de leurs villages.

Les autorités du Myanmar soumettent les hommes, les femmes et les enfants rohingyas à la ségrégation et à l'intimidation dans un système d'apartheid déshumanisant. Leurs droits sont bafoués au quotidien et la répression n'a fait que se durcir ces dernières années.

Ce système semble conçu pour rendre la vie des Rohingyas aussi désespérée et humiliante que possible. La violente campagne de nettoyage ethnique des forces de sécurité au cours des trois derniers mois n'est que la manifestation extrême de cette politique scandaleuse.

La situation actuelle répond à tous les critères de la définition juridique du crime d'apartheid contre l'humanité.

L'État d'Arakan : une prison à ciel ouvert

Nos investigations révèlent que cette répression s'est nettement intensifiée depuis 2012, lorsque des violences ont éclaté entre les communautés bouddhistes et musulmanes.

Les Rohingyas qui vivent dans l'État d'Arakan sont fondamentalement isolés du monde extérieur. Leur droit de circuler librement est fortement restreint et ils sont confinés dans leurs villages et communes. Ces restrictions sont le fruit d'un réseau complexe de lois nationales, d'« ordonnances locales » et de politiques mises en œuvre par des représentants de l'État affichant ouvertement un comportement raciste.

Comprendre : Qui sont les Rohingyas ?

Une réglementation en vigueur dans l'État d'Arakan précise clairement que les « étrangers » et les « personnes de race Bengali », terme péjoratif désignant les Rohingyas, ont besoin de permis spéciaux pour se rendre d’une localité à l’autre.

Dans le nord de l'État d'Arakan, où vivaient la majorité des Rohingyas jusqu'à l'exode récent, un système de permis limite fortement les déplacements entre les villages. Depuis cinq ans, des couvre-feux arbitraires sont continuellement instaurés dans les zones à majorité rohingya.

La cible des forces de l’ordre

Pour les Rohingyas qui parviennent à obtenir la permission de se rendre dans le nord de l'État d'Arakan, les nombreux postes de contrôle, tenus pour la plupart par la police des frontières, sont une menace constante, car ils sont régulièrement harcelés, contraints de payer des pots-de-vin, agressés physiquement ou arrêtés.

Ils étaient quatre policiers au total. Deux d'entre eux ont frappé les hommes à coups de baguette sur le dos, les épaules et les cuisses. Un autre a giflé une dame quatre ou cinq fois avec la main. […] Après, ils les ont emmenés au poste de police. 

Un Rohingya

 Lorsqu’elle a mené ses recherches pour le rapport, l'équipe d'Amnesty International a vu un garde-frontière donner des coups de pied à un Rohingya à un poste de contrôle et a recensé au moins un cas d'exécution extrajudiciaire. En effet, des agents de la police des frontières ont abattu un homme de 23 ans circulant durant les heures de couvre-feu.

Durant les violences en 2012, des dizaines de milliers de Rohingyas ont été chassés des zones urbaines de l'État d'Arakan, en particulier de la capitale de l'État, Sittwe.

Aujourd'hui, quelque 4 000 Rohingyas vivent encore dans la ville, dans un quartier-ghetto, encerclé de barricades de barbelés et de postes de contrôle de la police. S’ils tentent de partir, ils risquent d'être arrêtés ou de subir les violences des communautés qui les entourent. 

Démanteler le système d'apartheid

En menant une analyse juridique en profondeur de ce grand nombre d’éléments de preuve, nous avons conclu que le traitement infligé aux Rohingyas par les autorités du Myanmar s'apparente à un apartheid, défini comme un crime contre l'humanité au titre de la Convention contre l'apartheid et du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

Le Myanmar est légalement tenu de démanteler le système d'apartheid dans l'État d'Arakan et doit veiller à amener les responsables d'actes qui constituent des crimes contre l'humanité à rendre des comptes.

L'État d'Arakan est une scène de crime. C'était le cas bien avant la violente campagne menée par l’armée ces trois derniers mois. Ce système de discrimination et de ségrégation imprègne tous les aspects de la vie des Rohingyas et, si des mesures ne sont pas prises pour le démanteler, il perdurera bien après la fin de la campagne militaire.

Les autorités ne peuvent pas s'appuyer sur des arguments creux quant au besoin de " sécurité " ou la lutte contre le " terrorisme " pour imposer de nouvelles restrictions aux Rohingyas.

La répression est illégale et totalement disproportionnée. Les crimes contre l'humanité ne sauraient être justifiés en invoquant des " mesures de sécurité " ni tout autre motif.

La communauté internationale doit ouvrir les yeux sur ce cauchemar quotidien et faire face à la réalité qui perdure dans l'État d'Arakan depuis des années. Si le développement est un volet important de la solution, il ne doit pas être accompli d'une manière qui renforce encore la discrimination.

La communauté internationale, et en particulier les donateurs, doivent veiller à ce que leur engagement ne les rende pas complices de ces violations.

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