Benjamin Netanyahou est en visite officielle en Hongrie, en dépit d’un mandat d'arrêt international pour des soupçons de crimes de guerre et crimes contre l'humanité à Gaza. La Hongrie est tenue de l’arrêter pour le remettre à la Cour pénale internationale mais s’y refuse.
URGENT
La Hongrie a annoncé son retrait de la CPI quelques heures après avoir accueilli le Premier ministre israélien avec les honneurs militaires. Cette décision profondément regrettable ne dispense pas la Hongrie de son devoir d'arrestation et de remise de Benjamin Netanyahou à la Cour.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, est en Hongrie pour quatre jours sur invitation officielle de Viktor Orbán. C'est son deuxième déplacement depuis l’émission du mandat d’arrêt international à son encontre. En février, il s'était rendu aux États-Unis pour rencontrer le président américain nouvellement élu Donald Trump.
Benjamin Netanyahou, sous le coup d’un mandat d’arrêt international
La visite de Benjamin Netanyahou en Hongrie se déroule alors même qu’un mandat d’arrêt international a été émis à son encontre par la Cour pénale internationale (CPI), en novembre 2024. Le dirigeant israélien, et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, sont accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité présumés dans le cadre de l’offensive menée à Gaza. Il est soupçonné d’avoir utilisé la faim comme méthode de guerre, d'avoir attaqué intentionnellement des civil·e·s et commis des crimes tels que des meurtres, des persécutions et d’autres actes inhumains.
En le recevant, la Hongrie donne dans les faits son approbation au génocide israélien, à savoir la destruction physique du peuple palestinien, en tout ou en partie, à Gaza.
Agnès Callamard, Secrétaire générale d’Amnesty International
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Quelles sont les obligations des États vis à vis de la CPI ?
La CPI a été créée afin que les victimes de génocide et de crimes de guerre ou contre l’humanité obtiennent justice et que les crimes qui choquent la conscience humaine ne s’accompagnent "plus jamais" d’impunité.
Un principe fondamental du Statut de Rome est que toutes les personnes faisant l'objet de mandats d'arrêt de la CPI doivent être arrêtées et remises à la Cour sans possibilité d'immunité lorsqu'elles se trouvent sous la juridiction des États membres de la CPI, y compris sur leur territoire.
Toutefois, la Cour ne dispose d'aucun moyen coercitif pour procéder à une arrestation et ne dispose pas de force de police, et ne peut que potentiellement sanctionner un État membre non coopératif.
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Un criminel de guerre présumé accueilli les bras ouverts en Europe
A l'occasion de la visite de Benjamin Netanyaou, les autorités hongroises ont fait savoir qu’elles entamaient les procédures pour sortir du Statut de Rome. Viktor Orbán y avait fait adhérer son pays en 2001 lors de son premier mandat de Premier ministre.
Si ce retrait est possible en vertu de l'article 127 du Statut de Rome, il ne prend effet qu’un an après la notification au bureau des Traités des Nations unies à New York. Jusque-là, les obligations légales de la Hongrie envers la CPI ne changent pas. Le pays reste donc dans l'obligation d’arrêter le Premier ministre israélien, de le remettre à la Cour et d’assurer sa pleine coopération dans le cadre des enquêtes en cours.
Le retrait annoncé de la Hongrie de la CPI est une manœuvre éhontée et vaine de se soustraire à la justice internationale et de faire obstacle au travail de la Cour.
Agnès Callamard, Secrétaire générale d’Amnesty International
Viktor Orbán, fidèle allié d’Israël
L’invitation par Viktor Orbán du Premier ministre israélien envoie un message clair : la Hongrie sera le soutien indéfectible d’Israël au sein de l’Union européenne.
Depuis les attaques du 7 octobre, les relations entre la Hongrie et Israël se sont particulièrement intensifiées. Le gouvernement hongrois a exprimé son soutien à Israël à plusieurs reprises et régulièrement fait obstruction à toutes prises de positions diplomatiques de l’Union européenne.
Lors de l’émission du mandat d’arrêt par la CPI à l’encontre de Benjamin Netanyahou, le Premier ministre Viktor Orbán a déclaré qu'il ne le mettrait pas en œuvre, le qualifiant de "honteux et cynique" et accusant la décision de la CPI d'avoir été émise "à des fins politiques".
L’état de droit international sapé par les puissances occidentales
Plusieurs États membres de la CPI ont par ailleurs déclaré ou sous-entendu qu'ils n'arrêteront pas Benjamin Netanyahou s'il se rendait dans leurs pays respectifs. C’est notamment le cas de la France, de l'Allemagne, de l'Italie, de la Pologne mais aussi de la Hongrie.
A cela, s’ajoutent les sanctions imposées par le Président américain Donald Trump à l’encontre de la CPI, qu’il accuse d’avoir engagé “des actions illégales et sans fondement” contre les États-Unis et Israël. La Cour avait lancé des enquêtes sur des crimes de guerre présumés de soldats américains en Afghanistan et de militaires israéliens dans la bande de Gaza.
La CPI fait désormais face à un rejet mondial de la part des dirigeants puissants qui cherchent à saper la règle de droit internationale et à éliminer la possibilité de responsabilité pour les plus puissants. [...] La visite de Benjamin Netanyahou en Hongrie ne doit pas devenir un indicateur de tendance de l’avenir des droits humains en Europe.
Erika Guevara-Rosas, responsable de la recherche mondiale, de la défense et des politiques d'Amnesty International
Nos demandes :
Si la visite du Premier ministre israélien au sein d’un pays membre de l’Union européenne n’aboutit pas à son arrestation, cela envoie un très mauvais signal et encourage Israël à continuer de commettre des crimes contre les Palestinien·ne·s dans le territoire palestinien occupé. Les dirigeants accusés par la CPI de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité ne doivent plus bénéficier de l'impunité perpétuelle.
C’est pourquoi nous appelons :
L'Union européenne et tous les États membres de la CPI à demander sans délai à la Hongrie d'arrêter et de remettre Benjamin Netanyahou à la Cour
Aux États membres de la CPI à s'engager à défendre la Cour contre les menaces insidieuses qui pèsent sur la justice internationale
Le procureur de la CPI à enquêter et à poursuivre tous les crimes d'Israël. La Hongrie devrait également le faire en appliquant les principes de la juridiction universelle.
Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles !