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Un camp de réfugiés Rohingyas © Andrew Stanbridge / Amnesty International

Un camp de réfugiés Rohingyas © Andrew Stanbridge / Amnesty International

Personnes réfugiées et migrantes

Myanmar : la crise s’enracine

La terrible campagne menée par les forces de sécurité du Myanmar contre les Rohingyas dans le nord de l'État d'Arakan est loin d’avoir pris fin. Les violations persistent et ont à nouveau forcé des centaines de personnes à s'enfuir de chez elles au cours des dernières semaines.

Les organisations humanitaires ont rassemblé des informations sur des milliers de cas de personnes arrivées au cours des mois de décembre et de janvier. Elles sont encore très nombreuses à franchir la frontière.

Nous nous sommes entretenus avec 19 Rohingyas arrivés depuis peu au Bangladesh, qui ont expliqué que les privations de nourriture destinées à les affamer, les enlèvements et les pillages les ont conduits à prendre la fuite.

Lire aussi : Rapatriement des Rohingyas, pourquoi une telle hâte ?

Forcer le plus grand nombre à fuir

Les forces de sécurité du Myanmar , comme à son habitude, éjectent violemment et en silence le plus grand nombre possible de Rohingyas encore présents dans la région.

Comprendre : Qui sont les Rohingyas ?

L'armée du Myanmar, qui cherche à se protéger derrière un mur de dénis et de mensonges, barre la route aux enquêteurs indépendants et continue de commettre en toute impunité des crimes contre l'humanité.

L’oppression vise semble-t-il à créer une situation intenable pour les dizaines de milliers de Rohingyas qui continuent de vivre dans le nord de l'État d'Arakan

Des personnes étaient restées au Myanmar malgré ces violences, afin de protéger leurs biens et leur droit de vivre dans leur village. Cela n’est maintenant plus le cas et elles ont dû, elles aussi, fuir le pays pour se réfugier au Bangladesh.

Enlèvement de filles et de femmes

Nous avons également rassemblé des informations sur trois cas récents de filles et de jeunes femmes enlevées par des militaires de l'armée myanmar.

Début janvier, des soldats sont entrés de force dans une maison du village de Hpoe Khaung Chaung, dans la municipalité de Buthidaung. Quand les soldats ont fouillé la maison, raconte Hasina, qui est âgée 25 ans, ils ont demandé à son oncle, en le menaçant d’une arme, de leur livrer sa cousine de 15 ans, Samida. Ils n'ont pas revu la jeune fille. Il en va de même pour d'autres filles et jeunes femmes qui ont été enlevées et qui sont ainsi victimes d'une disparition forcée.

Des familles rohingyas qui vivaient dans des villages où des femmes et des filles ont récemment été enlevées par des militaires ont expliqué qu'elles avaient fui car elles craignaient que ces enlèvements ne se multiplient.

Comme les précédentes campagnes militaires contre les Rohingyas dans le nord de l'État d'Arakan ont été marquées par des violences sexuelles systématiques, l'on craint fortement que les femmes et les filles enlevées ne soient victimes de viols et d'esclavage sexuel.

Les Rohingyas qui fuient doivent généralement marcher pendant plusieurs jours pour rejoindre la côte et gagner le Bangladesh par bateau. Pendant la fuite, les forces de sécurité volent systématiquement l'argent et les autres biens de valeur de chaque personne qui franchit leurs barrages.

Des femmes rohingyas, en particulier des jeunes femmes, nous ont aussi dit que des soldats de l'armée du Myanmar leur ont infligé des violences sexuelles au cours de fouilles pratiquées à des postes de contrôle.

Notre dossier spécial : La crise des Rohingyas

Des populations affamées

De nouveaux arrivants ont déclaré à nos chercheurs que les persécutions répétées ont finalement eu raison de leur volonté de rester chez eux, les poussant à s'exiler au Bangladesh.

Presque tous reprochent aux autorités du Myanmar d'affamer les Rohingyas afin de créer une situation de grave insécurité alimentaire visant au bout du compte à les contraindre à la fuite.

Un grand nombre de ces nouveaux arrivants ont expliqué que la situation a radicalement basculé quand l'armée a empêché ces populations d'accéder à leurs rizières pour les récoltes, en novembre et en décembre. Les forces de sécurité du Myanmar ont également participé à des vols de bétail appartenant à des Rohingyas, ou facilité ces vols, incendié plusieurs marchés et interdit l'accès à d'autres marchés. Tous ces agissements ont anéanti les moyens d'existence des populations rohingyas et causé une pénurie alimentaire.

Les autorités du Myanmar ont en outre aggravé l'insécurité alimentaire en soumettant l'aide humanitaire à de fortes restrictions dans le nord de l'État d'Arakan.

Lire aussi : Au Myanmar, l'armée reconnait un charnier

Une réaction internationale toujours aussi timide et inefficace

L'ampleur et la gravité des attaques qui continuent d'être menées dans le nord de l'État d'Arakan montrent que l'armée du Myanmar continue de s'en prendre non seulement aux individus, mais aussi à la dignité de la population rohingya dans son ensemble. C'est pourquoi les programmes de rapatriement sont malheureusement prématurés.

Depuis le début de cette crise, la communauté internationale n'a réagi que de façon timide et inefficace, ne tenant pas compte de la gravité de la situation dans le nord de l'État d'Arakan, et n'exerçant pas de pressions suffisantes sur l'armée du Myanmar pour que cesse ce nettoyage ethnique.

Il est nécessaire qu'un embargo sur les armes et des sanctions ciblées soient adoptés de toute urgence afin de faire clairement comprendre que ces violations ne sont pas tolérées. L'aide humanitaire doit aussi pouvoir de toute urgence être acheminée sans entrave et de façon durable dans tout le nord de l'État d'Arakan. Cela n’est toujours pas le cas.

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