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© UN Photo/Jorge Aramburu
Érythrée
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Érythrée en 2024.
Le pays a continué à avoir recours au service militaire obligatoire à durée indéterminée, qui s’apparentait parfois à du travail forcé et à de l’esclavage. Les personnes réfugiées renvoyées dans le pays risquaient de subir des atteintes à leurs droits humains. Le droit à l’éducation était bafoué. Le droit à la liberté d’expression a été réprimé et le sort de plusieurs personnes qui avaient critiqué le gouvernement et été soumises à une disparition forcée en 2001 restait inconnu. À la fin de l’année, le gouvernement n’avait pas mis en œuvre les recommandations de la Commission d’enquête de l’ONU qui l’invitaient à enquêter sur les crimes de droit international. Il a en outre refusé l’entrée sur le territoire au rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée.
TRAVAIL FORCÉ
Le service militaire obligatoire à durée indéterminée pour les personnes âgées de 18 à 40 ans, en vigueur depuis plusieurs décennies, était toujours appliqué et continuait d’être source de travail forcé et de violations des droits humains flagrantes. Les appelé·e·s devaient effectuer leur dernière année d’enseignement secondaire au tristement célèbre centre d’entraînement militaire de Sawa, où des informations faisaient état d’un recours au travail forcé équivalant parfois à de l’esclavage (voir Droit à l’éducation).
DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES
Des ressortissant·e·s érythréens ont subi des atteintes à leurs droits humains dans les pays où ils s’étaient réfugiés. Le gouvernement considérait le fait d’engager une procédure de demande d’asile à l’étranger comme un acte de trahison, et toute personne renvoyée de force en Érythrée pouvait être placée en détention. Selon le HCR, les personnes renvoyées risquaient également la torture, voire la mort. En mai, le rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée (rapporteur spécial sur l’Érythrée) a déclaré que les autorités érythréennes avaient contrôlé les activités politiques de la diaspora à l’étranger pour réduire au silence des militant·e·s en faveur de la démocratie, des journalistes, des opposant·e·s politiques et des défenseur·e·s des droits humains. Des Érythréen·ne·s réfugiés en Éthiopie ont été rassemblés, placés en détention et expulsés sommairement vers l’Érythrée. Au Soudan, des femmes et des filles, en particulier, ont subi des atteintes à leurs droits de la part des Forces d’appui rapide, entre autres, notamment des violences sexuelles et la servitude domestique. En août, la Turquie a renvoyé de force environ 180 Érythréen·ne·s dans leur pays, contrevenant ainsi à leur droit à la protection.
DROIT À L'ÉDUCATION
L’Érythrée avait un ratio dette/PIB de 211 %, l’un des plus élevés au monde. En 2022, le pays a consacré 33,4 % de son budget national au service de la dette, mettant en péril le financement de l’éducation et d’autres services publics. Selon les informations les plus récentes, les dépenses en matière d’éducation semblaient stagner en dessous de 2 % du PIB depuis 2020, soit moins que la moyenne en Afrique, qui était de 3 à 4 %. Cette situation a été aggravée par des facteurs tels que la corruption et le manque de transparence financière.
Selon les Nations unies, 48 % des enfants en âge d’aller à l’école primaire n’étaient pas scolarisés, et seulement 4 % des hommes et 3 % des femmes en âge d’aller à l’université étaient inscrits dans un établissement d’enseignement supérieur. Il n’y avait pas suffisamment d’enseignant·e·s qualifiés. En outre, la politique d’enrôlement forcé, qui pouvait obliger des enseignant·e·s à effectuer leur service militaire, a nui aux conditions pédagogiques et augmenté le rapport élèves/enseignant·e·s, qui était déjà élevé. Beaucoup de jeunes ont dû cesser leurs études pour rejoindre l’armée ou s’exiler. Certaines informations faisaient état d’enrôlements de mineur·e·s, ce qui bafouait de fait leur droit à l’éducation.
D’après l’UNESCO, le taux élevé de mariages précoces était l’une des principales raisons expliquant pourquoi nombre d’élèves ne terminaient pas leurs études.
LIBERTÉ D'EXPRESSION ET DISPARITIONS FORCÉES
L’Érythrée était encore l’un des rares pays à ne compter aucune forme de média privé officiellement reconnu. La presse libre a été démantelée en 2001, lorsque le gouvernement a arrêté 15 hommes politiques (appelés le « Groupe des 15 » ou « G-15 ») et 16 journalistes qui avaient demandé au président, Issayas Afeworki, d’appliquer le projet de constitution et d’organiser des élections libres. On ignorait toujours ce qu’il était advenu de 11 des hommes politiques et des 16 journalistes accusés d’avoir des liens avec le G-15.
DROIT À LA VÉRITÉ, À LA JUSTICE ET À DES RÉPARATIONS
À la fin de l’année, le gouvernement n’avait toujours pas appliqué les recommandations de la Commission d’enquête des Nations unies sur l’Érythrée, établie en 2014 par le Conseil des droits de l’homme [ONU]. La Commission avait conclu en 2016 que des crimes de droit international avaient été commis en Érythrée depuis 1991, y compris des crimes contre l’humanité et d’autres actes inhumains. En juillet, le rapporteur spécial sur l’Érythrée a rappelé que la plupart des recommandations formulées par des mécanismes internationaux et régionaux de défense des droits humains, dont la Commission d’enquête, demeuraient lettre morte. Par ailleurs, les autorités érythréennes refusaient toujours que le rapporteur spécial se rende dans le pays. Toujours en juillet, Amnesty International a exhorté le Conseil des droits de l’homme à intensifier ses efforts pour évaluer la situation des droits humains en Érythrée, et à réfléchir à des moyens de recueillir et de conserver des éléments de preuve en vue de futures poursuites pénales.

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