Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles

L'activiste Phuon Keoraksmey est condamnée le 2 juillet 2024 au Cambodge pour ses actions de défense de l'environnement. Dix militant·es, dont six personnes du mouvement Mother Nature Cambodia, ont été condamné·es à des peines de six à huit ans de prison. © TANG CHHIN SOTHY / AFP
La carte des répressions des défenseurs de l’environnement dans le monde
Défendre la planète c'est risqué d’être menacé, agressé, poursuivi ou même assassiné. Les défenseur·es de l’environnement font face à une répression qui ne connaît plus de frontières. A travers une carte interactive, réalisée par Amnesty International France et WeDoData, nous illustrons cette réalité mondiale en montrant l’ampleur et la diversité des attaques dont ils et elles font l’objet.
Aucune région du monde n’est épargnée par la répression envers les défenseur·es de l’environnement. Elle est particulièrement rude, voire violente, dans les États autoritaires. En Europe, on ne tue pas, mais on punit. Tour d’horizon des attaques dans notre carte interactive.
L’offensive contre l’action climat
Cette carte témoigne des obstacles voire des dangers que rencontrent celles et ceux qui se mobilisent pour le climat. Être un·e défenseur·e de l’environnement c’est défendre le droit à un environnement et à un climat sain.
Mais c’est aussi prendre le risque d’être emprisonné pour avoir voulu empêcher une entreprise fossile de polluer la rivière à côté de votre domicile comme Bernardo au Guatemala. C’est recevoir des menaces ou des intimidations envers vous ou votre famille pour vous être érigé contre la déforestation de forêts primaires (les forêts qui n’ont pas été endommagées par les activités humaines). C’est subir des violences de la part des forces de l’ordre pour avoir manifesté contre une un projet destructeur de l’environnement comme les “écureuils” qui s’opposent à l’A69 en France. C’est aussi risquer d’être assassiné parce que votre voix et votre action dérange comme le militant Juan López au Honduras.
Partout à travers le monde, des militant·es sont pris·es pour cible. Par des lois et des tribunaux d’une part : poursuites judiciaires abusives, peines disproportionnées, longues procédures destinées à épuiser les militantes et militants.
Par la violence d'autre part : menaces, harcèlement, agressions, qui peuvent aller parfois jusqu'à l'assassinat.
En tout, notre carte distingue six formes principales de répression. Ces attaques s’accompagnent systématiquement d’atteintes à des droits fondamentaux.
Tous les droits attaqués : la stratégie de la France pour empêcher l’action climatique
En France, nous avons publié un rapport qui dévoile cette stratégie de restriction des droits des défenseur·es de l’environnement sciemment employée par les autorités pour empêcher l’action climatique.
Violences policières lors des manifestations des Soulèvements de la Terre, poursuites judiciaires contre les militant·es dits “les écureuils” qui s’opposent au projet d’autoroute A69, restriction des subventions à l’association Alternatiba, condamnation à six mois de prison ferme pour avoir aspergé l’hôtel Matignon de peinture lavable : les exemples d’atteinte aux droits sont nombreux et illustrent cette offensive.
Ces attaques témoignent d’une stratégie pour nuire à celles et ceux qui se battent pour le climat et l’environnement. Attaquer les droits des défenseur·es de l’environnement, c’est aussi mettre en danger nos droits à toutes et à tous. Les libertés fondamentales sont des piliers de l’État de droit et sont protégées par le droit international.
L’Amérique latine : le continent le plus dangereux pour les défenseurs de l’environnement
Si la répression est mondiale, elle est particulièrement impitoyable en Amérique latine. C’est la région la plus meurtrière du monde envers les défenseur·es de l’environnement selon les données de Global Witness. Sur les 146 défenseur·es assassiné·es en 2024, 82% l’ont été en Amérique Latine.
Au moins 146 défenseur·es de l’environnement ont été victimes de meurtres ou ont disparu en 2024 :

Nombre de défenseur·es de l’environnement mort·es ou disparu·es, Global Witness, 2025.
Bien souvent, les coupables de ces crimes commis envers les défenseur·es de l’environnement ne sont pas poursuivis par la justice en Amérique latine. Cette impunité encourage la répression de celles et ceux qui se battent pour le climat et l’environnement.
C’est le cas de l’activiste Juan López qui se battait depuis 2015 pour défendre les forêts et les rivières de la région de Tocoa, au nord du Honduras, face aux industries minières. Il a été froidement abattu le 14 septembre 2024 par un individu masqué, alors qu’il sortait d’une église. Les commanditaires de son assassinat restent à ce jour en liberté.
La Colombie est le pays où les défenseur·es de l’environnement ont le plus été victimes de meurtres ou de disparitions entre 2012 et 2024 :

Classement des pays où il y a eu le plus de meurtres et de disparitions des défenseur·es de l’environnement entre 2012 et 2024 (données de Global Witness).
A la deuxième place des pays les plus meurtriers envers les défenseur·es de l’environnement depuis 2012 se trouve le Brésil. Le pays accueillera à Belém la COP30 (la Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques) à partir du 10 novembre 2025.
Belém se trouve au cœur de l’Amazonie. Cette vaste région, recouverte en grande partie par la forêt amazonienne et traversée par l’Amazone, abrite une riche biodiversité et de nombreux peuples autochtones. Elle attise les intérêts des entreprises, des industriels et des groupes armés en raison des ressources naturelles dont elle regorge. Elle est ainsi le théâtre de nombreuses violences envers les défenseur·es de l‘environnement qui luttent pour préserver l’une des dernières forêts primaires dans le monde.
A l’occasion de la COP30 au Brésil, nous appelons à la protection des défenseur·es de l’environnement, à la sortie des énergies fossiles et à un accroissement considérable du financement climatique des pays à haut revenu pour aider les pays à faible revenu à faire face à la crise climatique.
Lire aussi : Women Wave,un voilier pour porter la voix des peuples à la COP30
Les peuples autochtones surreprésentés parmi les victimes
Les peuples autochtones jouent un rôle essentiel dans la défense de l’environnement. Ils entretiennent un lien étroit avec leurs terres ancestrales, dont dépendent leurs moyens de subsistance et leur identité culturelle.
Mais leurs droits sont régulièrement bafoués. Leurs terres, riches en ressources naturelles, notamment en pétrole, en gaz et en minerais, sont fréquemment accaparées, vendues, louées, pillées et polluées par les autorités et des entreprises privées.
31% des défenseur·es de l'environnement assassiné·es en 2024 sont issus de peuples autochtones. Ils ne représentent pourtant que 5% de la population mondiale. (Global Witness)
Leur répression, particulièrement aigüe dans les Amériques, s’explique aussi en raison de l’histoire coloniale, du racisme et des inégalités qui persistent dans la région. Au Canada, Freda Huson témoigne de ces violences aux relents racistes qui frappent particulièrement les femmes des communautés autochtones. Freda est une cheffe de clan Wet'suwet'en, un peuple autochtone qui se bat contre la construction d’un immense pipeline de 670km qui traversent et détruit ses terres. Les femmes de sa communauté sont en première ligne des violences commises par les forces de sécurité qui protègent le gazoduc « Coastal Gaslink » mais aussi par les forces de l’ordre canadiennes.
Derrière la répression, les intérêts des entreprises et des Etats
Si les défenseur·es de l’environnement sont réprimé·es dans le monde, c’est parce qu’ils et elles se battent pour défendre la nature face à des intérêts économiques et politiques. Des industriels cherchent à accaparer les terres et les ressources naturelles et ils sont souvent soutenus par les autorités.
D’après Global Witness, la majorité des meurtres des défenseur·es de l’environnement sont en lien avec les industries extractives.
Les industries extractives ont un lien avec 338 meurtres de défenseur·es de l’environnement entre 2012 et 2024 :

Nombre de défenseur·es de l’environnement assassiné·es entre 2012 et 2024 en lien avec des activités économiques. Ces trois industries sont les plus meurtrières selon les données de Global Witness.
Au Cambodge, des jeunes militant·es de Mother Nature Cambodia ont été condamné·es à des peines de six à huit ans de prison en 2024 pour s’être dressé·es contre des projets industriels dévastateurs pour la nature. Ce groupe avait réussi à convaincre les autorités cambodgiennes à renoncer à leur projet de construction d’un grand barrage hydroélectrique dans la vallée d’Areng en 2015 et à interdire l’exportation du sable côtier en 2016. Malgré ces victoires, les militant·es ont subi des campagnes d’harcèlement et six d'entre eux ont été déclaré·es coupables de complot et d’“outrage envers le roi”.
Face à l’impunité qui règne, la répression continue à déferler à l’encontre des défenseur·es de l’environnement. C’est pourquoi à Amnesty International, nous nous battons pour leur rendre justice et pour protéger leurs droits. Protéger les droits des défenseur·es de l’environnement c’est aussi se battre pour l’ensemble de nos droits et nos libertés.
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