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Marche civique contre l'antisémitisme. Paris, 12 Novembre 2023. © Romain De Sigalas / Hans Lucas via AFP
Qu’est-ce que l’antisémitisme ?
Des stéréotypes, des propos racistes mais aussi des agressions physiques affectent de nombreuses personnes juives ou perçues comme telles. La lutte contre l’antisémitisme fait partie de notre combat contre toutes les formes de discriminations et de racismes. Pour savoir ce que recouvre l’antisémitisme et s'emparer d’outils qui permettent de lutter contre, nous publions un livret “Agir contre les discours antisémites”.
Quelle est la définition ?
L’antisémitisme est défini par toutes les formes de discriminations, de préjugés, de stéréotypes et d’hostilité envers les personnes juives (ou les personnes perçues comme telles).
L’antisémitisme peut également cibler les biens, la communauté ou les institutions religieuses des personnes juives.
C’est une forme de racisme qui vise les personnes juives à cause de leur identité, qu’elle soit réelle ou supposée.
Lire aussi : Notre dossier sur le racisme
L’antisémitisme est-il puni par la loi ?
Les États ont pour obligation de prendre des mesures efficaces pour lutter contre les discriminations raciales, dont fait partie l’antisémitisme. Il existe trois textes de référence dans le droit international :
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques : Adopté par l’ONU en 1966, ce traité protège les droits fondamentaux comme la liberté d’expression, de religion ou le droit à un procès équitable. Il interdit, dans l’article 20, tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence.
La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CIEDR) : Adoptée en 1965, cette convention engage les États à interdire et combattre toute forme de discrimination raciale, et les oblige à mettre en œuvre des mesures de promotion active d’égalité raciale. Elle vise aussi les discours de haine et les groupes incitant à la haine raciale, en imposant des mesures concrètes.
Le plan d’action de Rabat sur l’interdiction de tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse. Publié en 2012 par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, ce texte non contraignant aide à distinguer un discours de haine, condamnable, d’une opinion protégée par la liberté d’expression.
Les actes antisémites peuvent être punis par la loi française en tant que discriminations et incitations à la haine fondées sur la race ou la religion.
Trois lois sur la discrimination raciale sont particulièrement importantes en France :
Loi Pleven de 1972 : elle vient mettre en conformité la législation française avec la CIEDR. La loi crée des délits spécifiques comme l'injure et la diffamation à caractère raciste, ainsi que la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale, punis par des peines allant jusqu'à un an de prison plusieurs milliers d'euros d'amende.
Loi Gayssot de 1990 : elle vise à réprimer les actes racistes, antisémites et xénophobes, ainsi que la négation des crimes contre l’humanité. Elle interdit également la discrimination sur des critères ethniques, nationaux ou raciaux.
La loi n° 2003-88 : la loi vise à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe. Elle considère le racisme comme une circonstance aggravante lorsqu'un crime ou un délit est commis en raison de l'appartenance raciale de la victime.
Quel est l’impact de l’antisémitisme sur les personnes ?
Les propos et actes antisémites ne sont jamais sans conséquences. Ils ont des effets profonds et durables sur la vie des personnes juives, ou perçues comme telles, tant sur le plan individuel que collectif.
Selon les résultats de l’étude Expériences et perceptions de l’antisémitisme par les personnes juives réalisé par l’Agence européenne pour les droits fondamentaux (FRA) en 2024, presque toutes les personnes juives interrogées déclarent avoir été confrontées à l’antisémitisme au cours de l’année passée et 8 sur 10 estiment que ce phénomène a augmenté ces dernières années.
Beaucoup de personnes juives disent éviter de porter des signes visibles de leur identité (kippa, étoile de David, mezouzah à la porte…), de peur d’être ciblées. Certaines renoncent à fréquenter leur synagogue, à afficher leur appartenance culturelle ou religieuse, ou même à dire qu’elles sont juives dans des contextes sociaux ou professionnels.
Expériences et perceptions de l’antisémitisme par les personnes juives, Agence européenne pour les droits fondamentaux, 2024.
L'antisémitisme augmente-t-il ?
Un pogrom est une attaque violente, souvent accompagnée de pillages et de meurtres, perpétré par une communauté sociale, politique ou religieuse et dirigée contre une communauté en raison de son origine, de sa religion ou de son appartenance ethnique.
L’antisémitisme est ancré dans l’histoire de l’Europe et produit encore ses effets aujourd’hui. Le premier pogrom remonte au premier siècle de notre ère, lors du massacre d’Alexandrie contre la population juive. L’antisémitisme a ensuite été nourri par des siècles de stéréotypes, de préjugés et de violences envers les personnes juives qui culminent lors du génocide de la seconde guerre mondiale où 6 millions de personnes juives sont assassinées par le régime nazi et ses collaborateurs.

Mémorial de l'holocauste, Berlin - ©Michal Lis
Mais l’antisémitisme ne disparait pas avec la chute du Troisième Reich. Les stéréotypes et les préjugés des siècles passés ont persisté et sont actuellement ravivés par un contexte de multiples crises économiques et géopolitiques.
En France, selon le rapport de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), les actes antisémites, et les actes racistes en général, ont connu une progression inquiétante depuis la fin de l’année 2023. Ce rapport s’appuie notamment sur les données du ministère de l’Intérieur qui comptabilise une “hausse exponentielle des actes antisémites” en 2023. Un niveau qui n’aurait jamais été atteint depuis le début des enregistrements de ces actes en 1992.
Selon plusieurs associations de lutte contre l’antisémitisme, cette augmentation des actes antisémites en France s’explique en particulier par les répercussions des attaques du Hamas du 7 octobre 2023 et de la riposte menée par l’État d’Israël à Gaza.
Des actes particulièrement violents ont été recensés dans le rapport de la CNCDH tel l’incendie de la synagogue de Rouen en mai 2024 et le viol collectif à caractère antisémite d’une enfant de 12 ans à Courbevoie en juin 2024.
Ces réserves découlent de plusieurs raisons :
Les chiffres de l’antisémitisme en France masquent une sous-déclaration par les victimes des actes antisémites.
Le rapport de la CNCDH s’appuie sur différentes données qui mesurent l’antisémitisme. Ces données ne sont pas harmonisées et empêchent une lecture claire de la mesure de l’antisémitisme en France.
La France ne recueille pas de données ventilées, sur la base du principe de l’auto-identification et de l’anonymat, sur la composition de sa population, ne permettant pas ainsi d’avoir une vision globale des discriminations par les personnes juives.
Les autorités françaises s’appuient sur la définition controversée de l‘antisémitisme établie par l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance) pour comptabiliser les actes antisémites en France. Nous rejetons la définition de l’IHRA qui a régulièrement été instrumentalisée par les autorités pour réprimer les critiques des politiques des autorités israéliennes, en qualifiant à tort ces critiques d’antisémites.
L'antisémitisme prend-il de nouvelles formes ?
Les réseaux sociaux et les plateformes numériques ont profondément transformé la circulation des idées et des discours, y compris ceux qui propagent le racisme. Leur interactivité et leur fonctionnement algorithmique permettent la formation rapide de communautés virtuelles et la diffusion de discours, où des personnes peuvent diffuser des idées antisémites à grande échelle, en toute impunité.
Depuis le 7 octobre 2023, nous avons documenté une augmentation préoccupante des contenus incitant à la haine sur les réseaux sociaux, visant à la fois les personnes juives et palestiniennes. Parmi ces contenus, certains appellent explicitement à la violence, à l’hostilité ou à la discrimination, en violation du droit international relatif aux droits humains.
Lire aussi : les réseaux sociaux entre censure des voix palestiniennes et démultiplicateur de haine
Comment réagir face à des discours antisémites ?
Les propos antisémites ne sont ni des “opinions”, ni des “polémiques”, ni des “débats”. Il s’agit d’une discrimination raciale qui est pénalement condamnable.
Face à une personne, voire à un proche, qui tiendrait ce type de propos, nous pouvons parfois être désarçonné et ne pas savoir comment réagir. C’est pourquoi nous mettons à disposition différents outils pour aider à réagir face à ce type de situation :
Notre livret pédagogique “Agir face aux discours antisémites”
Notre guide pour réagir quand un proche tient des propos racistes
Notre formation "Agir contre les discours toxiques en ligne"
Les critiques envers l’État d’Israël sont-elles antisémites ?
La critique envers un État est un droit garanti par la liberté d’expression. Ainsi, les critiques ou les actions pacifiques (manifestation, boycott...) à l'encontre de l’État d’Israël ou des autorités israéliennes, ne sont pas antisémites et ne devraient pas faire l’objet de restriction, tant qu’elles ne constituent pas un appel à la haine ou n’incitent pas à la violence, à l’hostilité ou à la discrimination.
Il n’est pas non plus antisémite de soutenir les droits du peuple palestinien, de remettre en question le sionisme en tant que nationalisme, ou de défendre une solution politique qui garantirait une égalité de droits pour tous les habitants de la région.
Un amalgame a tendance à être fait entre les personnes juives et les personnes israéliennes. Il est important de distinguer l’antisémitisme, qui constitue une discrimination fondée sur la judéité, des discours visant les personnes israéliennes, qui peuvent constituer une discrimination fondée sur la nationalité. Ces deux discriminations bafouent les droits fondamentaux et sont tout autant dangereuses.
Des personnes juives ou perçues comme telles et des personnes israéliennes sont régulièrement rendues responsables des actions du gouvernement israélien, notamment en lien avec les violations des droits des Palestinien·nes. Ce glissement est discriminatoire et expose ces personnes à des violences ou à des discriminations.
Les mots « sionisme » et « antisionisme » renvoient à des réalités politiques complexes et changeantes. Pour certains, le sionisme signifie le droit des personnes juives à avoir un État ; pour d’autres, cela inclut la question des frontières d’Israël ou les droits des personnes non juives dans cet État. De même, l’antisionisme peut désigner un rejet complet de l’État d’Israël, une critique de ses politiques actuelles, ou une opposition aux inégalités de droits au sein d’Israël.
Lire aussi : Critiquer la politique de l’État d’Israël relève-t-il de l’antisémitisme ?
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