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Sébastien, militant pour les droits LGBTI+ : "J’ai reçu 10 000 commentaires toxiques et haineux en deux mois"

Depuis plusieurs mois, Sébastien Tüller, le responsable de la Commission Orientation Sexuelle et Identité de Genre (OSIG) à Amnesty International France est victime de harcèlement en ligne et de discours homophobes sur le réseau social X (anciennement Twitter) en raison de son militantisme en ligne en faveur des droits humains des personnes LGBTI+.

En deux mois, plus de 10 000 commentaires toxiques et haineux allant jusqu’aux insultes homophobes ou aux menaces de mort ont été diffusés sous ses posts. Ces attaques sont représentatives de l’émergence de nouvelles formes de violences en ligne, notamment fondées sur le genre. Voici notre alerte. 

Notre utilisation croissante des réseaux sociaux a permis l’émergence de nouvelles formes de militantisme, mais aussi engendré de nouvelles formes de violences. Certaines personnes se servent des réseaux sociaux pour propager la haine, la peur et la mésinformation dans une mesure sans précédent.  

Les violences en ligne : une menace alarmante  

Toutes les formes de violences fondées sur le genre, en ligne ou hors ligne, constituent des atteintes aux droits humains et sont considérées comme telles par le droit international. 

Nos recherches montrent que les femmes et les personnes LGBTI+ qui mènent des activités militantes subissent des attaques en ligne mêlant discours violents, propos misogynes, homophobes et transphobes, contenus sexualisés et d’autres formes de violence fondée sur le genre facilitée par la technologie. 

Et le problème, c’est qu’elles sont rarement amenées à rendre des comptes pour leurs actions. 

Pourtant, ces attaques portent atteinte à la vie quotidienne des personnes et ont un effet dissuasif sur la liberté d’expression. Elles ont de lourdes conséquences pour leur capacité à s’exprimer librement ou à mener des activités militantes. Elles peuvent aussi avoir de graves répercussions sur la santé mentale

Une armée de trolls

"Je n’ai jamais fait l’objet d’attaques en ligne avant cette année, ou alors, il s’agissait de commentaires isolés et ponctuels. Mon compte Twitter est essentiellement un compte de veille et de partage d’actualités sur les droits des personnes LGBTI+. Habituellement, les personnes suivent et commentent l’actualité" explique Sébastien qui milite bénévolement depuis plus de quinze ans auprès d’Amnesty International, notamment pour défendre les droits des personnes LGBTI+. 

Avec la résurgence de la panique morale transphobe en France, en quelques semaines, son compte a été pris d’assaut par une armée de trolls réactionnaires qui ont déversé des milliers de commentaires toxiques à caractère haineux, notamment homophobes et transphobes. 

Ce flux de haine ininterrompu se déversait sous chacun de mes posts, même les plus basiques, montrant un ciblage de mon compte qui avait pour objectif de me faire taire.  

Sébastien Tüller
Responsable de la Commission Orientation Sexuelle et Identité de Genre (OSIG) à Amnesty International France

3 jeunes militant·es sur 5 victimes de harcèlement en ligne

Nous avons mené une enquête auprès de 1400 jeunes entre 13 et 24 ans dans 59 pays. Le résultat est sans appel : trois jeunes militant·es sur cinq sont victimes de harcèlement en ligne dans le monde pour des contenus en lien avec les droits humains comme la défense des droits LGBTI+

➡️ 21% déclarent qu’elles sont harcelées ou menacées chaque semaine

➡️ 1/3 affirment avoir dû censurer leur publication face aux violences en ligne

➡️ 14 % affirment avoir complètement cessé de publier sur leur militantisme

De nombreux militant·es ont exprimé leur frustration face au manquement des plateformes de réseaux sociaux de répondre de manière adéquate à leurs signalements de harcèlement. Les personnes interrogées ont affirmé que les commentaires violents étaient laissés sur les réseaux longtemps après avoir été signalés.

Signez notre pétition demandant à Tiktok de protéger les jeunes de ses algorithmes surpuissants

Autocensure, angoisse, automutilations… 

Ce déchaînement de violence se déploie de plus en plus en ligne contre les femmes et les personnes LGBTI+. Les conséquences sont alarmantes.

La technologie numérique joue un rôle très important pour le militantisme, mais elle n’offre actuellement pas un espace sûr pour les personnes LGBTI+ et les femmes. 

Nitchakarn Wongwiset, personne non-binaire militante et défendant les droits humains 

Au fil du temps, ces attaques en règle risquent d’entraîner de l’autocensures et, dans certains cas, de mettre totalement fin au travail de défense des droits humains des militantes et militants victimes de violences en ligne. Nos recherches montrent que lorsqu’elles deviennent omniprésentes, les violences fondées sur le genre en ligne conduisent de nombreuses personnes, y compris des défenseur·es des droits humains, à s’isoler complètement des communautés en ligne. Les violences en ligne posent donc non seulement un problème de discrimination, mais elles portent également atteinte àla liberté d’expression. 

Je savais que tout ce que j’allais écrire était susceptible de susciter la haine. Je me suis mis à peser chaque mot de manière disproportionnée. Toutes ces attaques auraient pu m’arrêter et m’empêcher de parler librement. Paradoxalement, ça a renforcé mon besoin de lutter pour les droits humains dans cette période, mais l’impunité doit cesser.  

Sébastien Tüller
Responsable de la Commission Orientation Sexuelle et Identité de Genre (OSIG) à Amnesty International France

Bien souvent, ce muselage est intentionnel et déploie des tactiques destinées spécifiquement à réduire les gens au silence. Nos entretiens avec des défenseur·es des droits humains comme Sébastien qui ont été la cible de violences en ligne, reflètent ce que de nombreux spécialistes qualifient d’effet dissuasif.  

Cela peut également entrainer de graves préjudices psychologiques et avoir un impact sur leur santé mentale : syndromes de stress post-traumatique, paranoïa, dépression, angoisse, automutilations... Une part plus élevée de personnes transgenres et de personnes ne se conformant pas aux normes de genre ont déclaré que le fait d’être prises pour cible en ligne avait eu des conséquences très néfastes pour leur désir de vivre. 

Protéger les militant⸱es LGBTI+ sur X 

🔴 X doit faire plus d’efforts pour protéger les organisations et militant·es LGBTI+ sur la plateforme.

🔴 Selon les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme de l’ONU, la responsabilité de respecter les droits humains s’applique également à toutes les entreprises. Il est pour le moins décevant de voir que le problème des discours violents et haineux sur X ne cesse de s’aggraver depuis le rachat du réseau par Elon Musk. 

🔴 Enfin, Amnesty International France appelle les autorités françaises à protéger les militantes et militants et à enquêter sur tous les cas de violence fondée sur le genre facilitée par la technologie à l’égard des femmes et des personnes LGBTI+ militantes. 

Amnesty International France exprime tout son soutien à Sébastien et à l’ensemble des défenseur·es des droits faisant l’objet de violence numérique.