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URGENCE GAZA

 Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles

Couverture du rapport d'Amnesty International intitulé « Lives at risk: Chaotic and abrupt cuts to foreign aid put millions of lives at risk » / © Amnesty International

Démantèlement de l’USAID : quelles conséquences observe-t-on déjà sur le terrain ?

L’administration Trump a gelé les financements de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). Ces coupes ont entraîné l’arrêt brutal de milliers de programmes humanitaires. Nos équipes se sont rendues dans 12 pays particulièrement impactés.

6,3 millions de personnes risquent de mourir dans les quatre ans à venir si l’aide américaine n’est pas rétablie, selon l’ONUSIDA. L'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), premier contributeur de fonds humanitaires au monde, agit dans un spectre très large d’aide humanitaire dans 177 pays.

En démantelant l’USAID avec une telle rapidité et brutalité, l’administration Trump provoque une onde de choc mondiale en mettant des millions de vie en danger.

63milliardsd'euros d'aide fournie par les États-Unis en 2024
32milliards d'euros d'aide fournie par l'Allemagne en 2024
18milliards d'euros d'aide fournie par le Royaume Uni en 2024
17milliards d'euros d'aide fournie par le Japon en 2024

Notre étude « Life at risks » montre les conséquences déjà dévastatrices de l’arrêt de l’aide américaine à l’échelle de 12 pays. Il s'agit d'une liste non exhaustive mais c’est dans ces 12 pays que nos équipes ont récolté des informations de terrain.

Voici les retours de nos équipes.

En Afrique du Sud, un impact dévastateur sur les enfants vulnérables au VIH

L'Afrique du Sud connaît la plus grande épidémie de VIH au monde. Dans le pays, 17% des personnes de 15 à 49 ans vivent avec le VIH. Des associations de terrain travaillent depuis des années auprès d’adolescents, d’orphelins et d’enfants vulnérables qui présentent un risque accru au VIH.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?  

Des cliniques destinées à ces populations ont fermé, limitant les interventions vitales visant à endiguer la transmission du VIH, selon l'ONUSIDA.

Un représentant de l’une des ONGs sur le terrain a déclaré à nos équipes que les États-Unis ont soutenu l'accès à la « prophylaxie pré-exposition », des médicaments très efficaces pouvant prévenir le VIH chez les personnes à risque élevé. En mettant fin au financement de l’USAID, l’accès à ces médicaments sera limité. L’administration Trump laisse des personnes vulnérables sans soins et des personnes sans emplois.

Pour l’Afrique du Sud, le démantèlement de l’USAID, c’est aussi la fin de financements dans les universités sud-africaines qui effectuaient des recherches sur le VIH et la tuberculose.

À Haïti, les enfants victimes des violences des gangs impactés

Les enfants subissent de plein fouet la violence des gangs dans le pays, qui font régner leur loi brutale depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021. 

Lire aussi : Haïti, une enfance volée par les gangs - notre rapport

Dans ce contexte, des associations œuvrent chaque jour à l’accompagnement de ces enfants qui ont subi des violences sexuelles et doivent notamment avoir accès à un traitement contre le VIH.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

En 2024, les États-Unis ont fourni près de 60 % de l’aide humanitaire d’Haïti.

Nos équipes se sont entretenues avec des représentant.es de structures associatives dans le pays. Alors qu’elles étaient sur le point d’obtenir un financement américain pour soutenir leur travail, l’administration Trump a démantelé l’USAID. Résultat : les services d’accompagnement d’enfant ayant subi des viols ont fermé, laissant des jeunes filles sans les soins de santé urgents dont elles avaient besoin pour prévenir ou traiter le VIH et autres infections sexuellement transmissible.

En parallèle, l'administration Trump a supprimé les protections en matière d'immigration pour les Haïtiens vivant aux États-Unis. Il risque donc d’y avoir une augmentation du nombre d'expulsions de personnes vers Haïti. Conjuguée à une diminution des capacités humanitaires sur le terrain, cela risque d’entraîner davantage de violations des droits humains.

Au Yémen, les femmes et les filles, les premières menacées

C’est un conflit qui est presque tombé ans l’oubli. Pourtant, le Yémen reste l’une des plus graves crises humanitaires en cours. On compte 4,8 millions de déplacés à l’intérieur du pays et plus de la moitié de la population yéménite dépend de l’aide humanitaire pour survivre. 

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Nos équipes ont rencontré dix spécialistes et employé.es du secteur de l’aide humanitaire ainsi que six représentants d’organisations locales de défense des droits humains.

« Nous avons été contraint·es de prendre des décisions portant sur des questions de vie ou de mort sans informations ou presque. Souvent, nous n’avons personne à qui nous adresser car l’USAID a été démantelée. Les gens à qui nous écrivons des courriels ne sont plus là. Cela a des conséquences sur nos subventions au Yémen comme sur beaucoup d’autres ailleurs. » confie l’une des personnes travaillant dans l'humanitaire.

Aller plus loin : Lire plus de témoignages des spécialistes rencontrés au Yémen

D’après les témoignages que nous avons recueillis, la réduction des financements américains avait déjà contraint à la fermeture de dizaines de lieux d’accueil sécurisés destinés aux femmes et aux filles en mars 2025.

Au Guatemala, les jeunes filles sans suivi après des violences sexuelles

Les violences sexuelles contre les filles sont omniprésentes au Guatemala. En deux mois seulement, 4 316 filles de 10 à 17 ans ont accouché au Guatemala, où l'accès à l'avortement est sévèrement restreint, y compris pour les enfants.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Nos équipes ont rencontré la représentante d’une organisation qui soutient les jeunes filles victimes de violences sexuelles âgées de 10 à 14 ans, contraintes de mener leur grossesse à terme après avoir subi des violences. Au moment des coupes de l’annonce des coupes de l’USAID, elle confie avoir perdu le financement de deux contrats qu'elle s'apprêtait à signer avec des fonds américains, ce qui aurait permis d'étendre la portée du projet à de nouvelles communautés.

Le projet facilite l'accès à un soutien médical, psychologique et juridique pour aider les filles victimes de violences à reconstruire leur vie après avoir subi des abus.

En Syrie, impact sur le camp d’Al-Hol

Des dizaines de milliers d'enfants syriens, irakiens et ressortissants de près de 60 pays tiers sont piégés dans l’enfer du camp d'Al-Hol en Syrie, depuis la chute de l’État islamique (EI) en 2019. Le camp compte environ 36 000 personnes, dont une majorité d'enfants.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Lorsque le secrétaire d'État Marco Rubio a annoncé l'arrêt des financements de l’USAID, plusieurs services essentiels à Al-Hol ont été temporairement suspendus, semant le chaos dans le camp.

Peu de temps après cette annonce, l'organisation humanitaire Un Ponte Per a fermé l'une de ses deux cliniques de soins primaires et a réduit ses services d'ambulance d'urgence.

Avant les coupures américaines, Jihan Hanan, la responsable du camp d'Al-Hol, avait déclaré : « Nous sommes surtout préoccupés par le secteur de la santé. En cas de crise cardiaque, ils [les résidents du camp] mourront sur place, car il n'y a ni ambulances ni équipement… [il n'y a] aucun processus d'orientation pour les évacuer. »

Au Soudan du sud, le secteur de la santé ravagé

Au Soudan du Sud, 1,8 million de personnes sont déplacées à l'intérieur du pays et, sur une population d'environ 11 millions d'habitants, plus de sept millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire aiguë, un enfant sur quatre souffre de malnutrition, selon le Programme alimentaire mondial. Dans la plupart des camps de personnes déplacées par les conflits, la sécheresse et les inondations, la population dépend du financement américain, directement ou indirectement, par l'intermédiaire d'autres acteurs humanitaires.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Le Soudan du Sud est l'un des plus touchés par les coupes budgétaires américaines.

Nous avons interrogé trois personnes travaillant auprès de réfugiés soudanais et éthiopiens au Soudan du Sud. Toutes nous ont confié que les projets en cours avaient été interrompus ou arrêtés : projets d’aide de services de santé, d’accompagnement pour les victimes de conflits armés, de soutien des victimes de violences sexuelles, soutien d'urgence pour les enfants en mal nutrition…

L’une des personnes interrogées nous a confié avoir accueilli un patient épileptique et un atteint de tuberculose, mais en raison de la fermeture des cliniques, ils ne pouvaient les accompagner. Un autre travailleur humanitaire a raconté que les personnes atteintes de maladies comme le VIH peinent à suivre un traitement à long terme et ont recours à des plantes médicinales.

En Afghanistan, danger plus fort pour les personnes déplacées

Depuis le retour au pouvoir des talibans le 15 août 2021, d’innombrables violations des droits humains sont commises quotidiennement en Afghanistan avec comme ennemi numéro un : les femmes. L’école leur est interdite et l’accès aux soins de santé est extrêmement difficile.

Lire aussi : La guerre des talibans contre les femmes afghanes

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ? 

En 2024, les États-Unis ont contribué à hauteur de 43,9 % au financement humanitaire en Afghanistan. La fin de l’aide étrangère américaine a eu de graves répercussions sur les personnes déplacées à l’intérieur du pays, avec des impacts encore plus fort sur les femmes et les filles.

Sur 23 centres, 12 ont été fermés. Ils fournissaient à environ 120 000 Afghan.es rapatrié.es et déplacés internes un logement, une aide alimentaire, une assistance juridique et un accès aux soins de santé.

Les principales organisations humanitaires ont suspendu leurs programmes de santé et d'approvisionnement en eau, ce qui a des conséquences dramatiques sur les femmes et les filles, déjà invisibilisées et dont les droits sont bafoués. 

Au Mexique, le désespoir des demandeurs d’asile à la frontière avec les États-Unis

Le Mexique est le dernier pays de transit pour des milliers de personnes exilées en quête de sécurité en route vers les États-Unis ; beaucoup d’entre elles fuient les persécutions et les graves violations des droits humains dans leurs pays d’origine, notamment le Venezuela et Haïti.

Le 20 janvier 2025, Donald Trump a brutalement mis fin à l’application CBP One, seule voie pour les demandeurs d’asile de prendre rendez-vous pour avec l’administration pour entrer légalement aux Etats-Unis. Il est maintenant impossible de demander une protection internationale à la frontière entre les États-Unis et le Mexique.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Nos équipes ont interrogé les organisations nationales et internationales sur le terrain. La perte de financement les conduit à suspendre plusieurs soutiens sur le terrain comme l'aide alimentaire mensuelle, l'accès à Internet, au téléphone, à l’électroménager ou à des mesures de sécurité.

Faute de financement, les organisations risquent de fermer ou elles risquent d’être contraintes de réclamer des contributions financières aux demandeurs d’asile eux-mêmes, déjà extrêmement vulnérables.

Des contrats de personnes employées dans des associations ont été suspendus. Asylum Access Mexico, association qui apporte un soutien juridique aux demandeurs d’asile, a dû fermer trois de ses bureaux et annuler des recrutements en cours. Le HCR Mexique a dû fermer quatre de ses bureaux dans le pays et licencier 190 membres du personnel.  

Au Costa Rica, moins de services essentiels pour les personnes déplacées

Depuis 2018, le Costa Rica est le principal pays d’accueil des personnes déplacées de force du Nicaragua. Le Costa Rica est aussi un pays important de transit de personnes en quête de sécurité venues du Panama ou de la Colombie, en route vers les États-Unis. Depuis le retour de Donald Trump à la maison blanche, le droit d’asile à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis à est devenu impossible. De fait, le Costa Rica accueille désormais un grand nombre de personnes refoulées de la frontière américano-mexicaine.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Au Costa Rica, les organisations locales venant en aide aux demandeurs d'asile et personnes exilées, sont contraintes de réduire, voire de fermer, leurs programmes d'aide alimentaire, d'hébergement et de soutien psychosocial. Des coupes qui affectent gravement la capacité du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) à fournir une assistance humanitaire aux réfugiés et aux demandeurs d’asile au Costa Rica.

Les coupes budgétaires ont contraint les grandes organisations à cesser leurs activités dans certaines régions du pays, notamment le long de la frontière entre le Costa Rica et le Nicaragua. Ce sont donc les petites organisations locales qui sont désormais en première ligne pour subvenir aux besoins vitaux des populations en déplacement.  

Nos équipes ont rencontré ces organisations de terrain qui décrivent des situations complexes auprès de personnes qui arrivant au Costa Rica, disposent de ressources extrêmement limitées, puisqu’elles ont épuisé toutes leurs ressources pour arriver à la frontière américano-mexicaine.

En République dominicaine, le calvaire des personnes expulsées vers Haïti

Depuis octobre 2024, plus de 180 000 personnes ont été expulsées de la République dominicaine vers Haïti. Les expulsions collectives d’Haïtiens de la République dominicaine sont des pratiques interdites par le droit international.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Les organisations le long de la frontière entre Haïti et la République dominicaine fournissent des services essentiels : nourriture, abri temporaire, aide au transport, soutien psychologique… elles ont toutes dû réduire leurs actions.

Nos équipes sont très préoccupée par la situation des femmes enceintes, celles qui viennent d’accoucher et des nouveau-nés qui sont expulsés de la République dominicaine et sont susceptibles d’avoir des besoins de soins essentiels à leur arrivée en Haïti.

À la frontière de la Thaïlande et du Myanmar, les réfugiés fragilisés

Depuis le coup d’Etat militaire de février 2021, la junte birmane au pouvoir mène une lutte sans merci contre toute forme d’opposition. Plus de 6000 personnes ont été tuées, plus de 20 000 personnes ont été détenues arbitrairement et on compte plus de 3,5 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays. La situation est particulièrement critique dans le sud-est du Myanmar et dans les camps de réfugiés et de déplacés internes le long de la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar.

La majorité des réfugiés birmans vivant en Thaïlande, le long de la frontière, y sont depuis des années, fuyant les précédentes vagues de violence survenues dans leur pays d'origine. Mais les camps ont pris de l'ampleur depuis le coup d'État de 2021.

Quelles conséquences des coupes de l’USAID ?

Les coupes brutales de l’USAID font peser de graves menaces sur la santé de plus de 100 000 personnes vivant dans les neuf camps de réfugiés du côté thaïlandais de la frontière avec le Myanmar.

Parmi les programmes suspendus : l'orientation vers des hôpitaux secondaires pour les blessures de guerre, les systèmes d'alerte en cas de frappe aérienne et le soutien psychosocial aux survivants d'attaques.

Nos équipes se sont entretenus avec des réfugiés vivant dans deux camps distincts le long de la frontière. Tous ont déclaré que les hôpitaux du camp, gérés par le Comité international de secours (IRC) grâce à un financement de l'USAID, avaient fermé brutalement. Les conséquences sont déjà dramatiques : dans le camp d'Umpien, les habitants ont déclaré que quatre personnes étaient décédées faute d'oxygène fourni par les hôpitaux. 

Les coupes brutales de l’USAID opérées par l’administration Trump mettent en péril le soutien humanitaire et les infrastructures permettant à des personnes déplacées de force dans le monde entier d’accéder à une protection. Cela expose des personnes déjà marginalisées à des dangers encore plus fort. Nous demandons au gouvernement américain de rétablir immédiatement ces financements, d’autant que l’administration Trump, a contourné la supervision exercée par le Congrès pour prendre cette décision, ce qui est contraire au droit national.