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Vaccin anti-Covid

six choses à savoir sur nos droits  

Un agent de santé se prépare pour les essais du vaccin candidat Covid-19. Crédit : Mehmet Ali Ozcan / Agence ANADOLU via Getty Images

La course au vaccin contre le Covid-19 s’accélère, et il semble qu’une lumière brille enfin au bout du tunnel. Cependant, alors que les pays riches accumulent les doses, le potentiel salvateur des vaccins risque d’être mis à mal par les inégalités, le manque de coopération, et les intérêts des entreprises.  

L’accès aux traitements et aux vaccins contre le Covid-19 sera l’un des enjeux les plus importants en matière de droits humains dans les prochaines années. Qui aura accès au vaccin ? Quand ? Dans quel ordre ? À quel prix et dans quelles conditions ? Les réponses à ces questions doivent se construire dans le respect des droits humains.   

1.     Nous avons tous le droit d’être protégés contre le Covid-19  

La question de savoir qui doit obtenir les vaccins en premier est complexe : nous avons tous le droit d’être protégés contre le Covid-19. Mais au départ, les approvisionnements seront limités, et la priorité doit être accordée aux personnes les plus à risque. 

Les personnes âgées ou atteintes de problèmes de santé font partie des personnes devant bénéficier d’un accès prioritaire, de même que les professionnels de santé. Et il est essentiel de prendre en compte toutes les personnes travaillant dans ce secteur : non seulement les médecins et les infirmiers et infirmières, mais aussi les ambulanciers, le personnel administratif, de ménage, le personnel des maisons de retraite, etc.

 A lire aussi : Covid-19 : les droits des soignants en danger

Les gouvernements doivent également prendre en compte la situation de vulnérabilité de certaines personnes et communautés.  

La pandémie exacerbe les inégalités préexistantes et a un impact disproportionné sur les personnes historiquement marginalisées et victimes de discriminations. 

Les personnes qui vivent dans des camps de réfugiés, dans des conditions insalubres, sont plus exposées au risque de contracter le Covid-19. Dans de nombreux pays, les personnes en situation irrégulière n’ont souvent pas accès aux soins de santé, y compris aux vaccins. Les communautés autochtones d’Amazonie sont elles aussi confrontées à un risque accru du fait du manque d’accès à l’eau potable, à l’alimentation, aux services de santé et aux tests de dépistage du Covid-19.  

Il faut donc examiner avec soin les facteurs de risque et d’exposition des populations au moment de décider de la politique de vaccination et de sa mise en œuvre. Les personnes qui ont le plus besoin de vaccins ne doivent pas être laissées pour compte.   

2.     L’accès des pays pauvres aux vaccins doit être une priorité

Personne ne doit être privé d’un vaccin qui peut lui sauver la vie simplement à cause de son lieu de résidence ou d’un manque de moyens financiers. Pourtant, en décembre 2020, la People’s Vaccine Alliance, un groupe d’organisations où figurent notamment Amnesty International, Frontline AIDS, Global Justice Now et Oxfam, tirait la sonnette d’alarme : près de soixante-dix pays pauvres ne pourront vacciner qu’un habitant sur dix contre le Covid-19 en 2021.  

Soixante-dix pays pauvres risquent d’être privés de vaccins. À l’opposé, les pays riches ont acheté en moyenne assez de doses pour vacciner trois fois l’ensemble de leurs populations avant la fin 2021.

À l’opposé, les pays riches ont acheté en moyenne assez de doses pour vacciner trois fois l’ensemble de leur population avant la fin 2021. En tête du palmarès, le Canada, qui a prévu suffisamment de doses pour vacciner chacun de ses citoyens cinq fois ! Cette approche du « moi d’abord », adoptée par certains gouvernements qui s’accaparent les vaccins, sape les efforts déployés à l’échelle mondiale pour faire en sorte que chaque individu soit protégé, partout, contre le Covid-19. Un nationalisme vaccinal dangereux qui prive des millions de personnes de leurs droits.    

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que pour atteindre l’immunité collective, il faudrait vacciner environ 70 % de la population mondiale. Réserver les vaccins à quelques privilégiés ne permettra pas d’enrayer la pandémie. 

Les gouvernements doivent dès à présent coopérer et faire en sorte que les stocks soient suffisants pour protéger toutes les personnes qui en ont besoin, quel que soit l’endroit où elles vivent. 

3.     La coopération internationale est indispensable  

En avril 2020, l’OMS et d'autres acteurs ont mis en place le dispositif Covax pour faciliter l'accès aux produits de santé liés au Covid-19 dans le monde entier. Le Covax vise à regrouper la demande mondiale de vaccins. Ce dispositif doit permettre la mise en commun des ressources des États, pour acheter et distribuer deux milliards de doses d'ici la fin 2021, de manière juste et équitable. Jusqu’ici, 178 pays s’y sont engagés, à l’exception des États-Unis et de la Russie.  

Reste à savoir comment le Covax compte atteindre son objectif de distribution juste et équitable. Le programme fait face à de nombreuses critiques.  

Les pays riches peuvent commander des doses correspondant à 50 % de leur population, tandis que les pays à faibles revenus ne peuvent en demander que pour 20 % de leur population.

D’une part, il permet aux pays riches de solliciter des doses correspondant à 50 % de leur population, tandis que les pays à faibles revenus ne peuvent en demander que pour 20 % de leur population. Les pays les plus riches peuvent aussi s’acquitter d’un tarif plus élevé à l’avance afin de sélectionner les vaccins de leur choix. Se dessine alors un système à deux vitesses, susceptible de compromettre l’objectif du Covax.

D’autre part, ce dispositif manque de transparence. C’est pourquoi les États qui rejoignent le Covax doivent réclamer la participation concrète de la société civile et des pays en développement dans les prises de décision, et respecter les principes de transparence et d’obligation de rendre des comptes.  

4.     Il faut faire passer la vie et la santé de tous avant les profits  

Les droits de propriété intellectuelle actuels permettent à une entreprise qui fabrique un nouveau médicament d’être la seule à pouvoir le produire pendant une certaine période et de fixer son prix. Mais l’accès à la vaccination contre le Covid-19 ne doit pas être dicté par les intérêts des groupes pharmaceutiques, qui ont un rôle essentiel à jouer dans la facilitation de l’accès au droit à la santé. 

Les normes internationales relatives aux droits humains sont claires : la santé publique l’emporte sur le droit des entreprises à protéger leur propriété intellectuelle. Les groupes pharmaceutiques doivent respecter les droits humains, ce qui les oblige notamment à rendre leurs vaccins accessibles et abordables pour autant de personnes que possible.  

« Le système actuel, dans lequel les sociétés pharmaceutiques se servent des fonds publics pour mener leurs recherches, mais conservent des droits exclusifs et gardent leur technologie secrète pour accroître leurs profits, pourrait coûter de nombreuses vies »

Dr Mohga Kamal Yanni, de la People’s Vaccine Alliance.  

Afin d’inciter les entreprises à partager leur savoir-faire, l’OMS a mis en place le Groupement d’accès aux technologies contre le Covid-19 (C-TAP). Ce système permet de partager les données et les brevets relatifs à leurs innovations, dans le but de produire plus de vaccins et d’en réduire le coût. Hélas, à ce jour, pas une seule entreprise pharmaceutique ne l’a fait ! Seule Oxford/AstraZeneca s’est engagée à vendre le vaccin à prix coûtant pendant la durée de la pandémie. D’autres doivent lui emboîter le pas, en utilisant des licences ouvertes et non exclusives, afin de veiller à ce que les vaccins anti-Covid parviennent au plus grand nombre.   

Nous appelons toutes les sociétés pharmaceutiques qui travaillent sur les vaccins contre le Covid-19 à partager ouvertement leur technologie et leur propriété intellectuelle par l’intermédiaire de l’OMS, afin que des milliards de doses supplémentaires puissent être fabriquées et mises à la disposition de toutes les personnes qui en ont besoin.   

5.     Les vaccins doivent être gratuits dans les centres de vaccination 

Le prix peut entraver l’accès aux soins de santé, particulièrement pour les personnes marginalisées. Actuellement, près de la moitié de la population mondiale n’est pas en mesure de payer des soins essentiels. Aussi est-il probable que les vaccins contre le Covid-19 ne soient pas accessibles pour la moitié de la planète, sauf s’ils sont gratuits dans les centres de vaccination. 

La People’s Vaccine Alliance appelle les gouvernements à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que le vaccin anti-Covid soit considéré comme un bien public international, gratuit pour la population, distribué équitablement et en fonction des besoins.  

Ainsi, les entreprises doivent tout mettre en œuvre pour rendre le vaccin accessible, afin que son prix n’affecte pas la capacité d’un État à le fournir gratuitement au moment où les personnes se font vacciner. Les États, quant à eux, doivent veiller à ce que le coût ne soit jamais un obstacle à l'accès au vaccin contre le Covid-19, et utiliser au maximum les ressources disponibles et l'aide internationale, si nécessaire, pour fournir les vaccins gratuitement. 

L’investissement en vaut la peine : il s’agit de sauver des vies. Et du point de vue économique, l’OMS a récemment estimé qu’un investissement de 38 milliards de dollars servant à favoriser l’accès mondial au vaccin serait rentabilisé en « moins de trente-six heures », rien qu’avec le rétablissement de la mobilité et du commerce ! 

6.     L’information et la sécurité avant tout !

Les vaccins doivent respecter les normes les plus récentes de la communauté scientifique en matière de sécurité et d’efficacité.

Les gouvernements doivent communiquer clairement sur les avantages de la vaccination, lutter contre la désinformation et faire preuve de transparence à toutes les étapes du développement des vaccins. L'ensemble de la population doit disposer d’informations précises, compréhensibles, facilement accessibles et fiables, afin de garantir le consentement libre et éclairé de chacun. C’est une composante essentielle du droit à la santé et un élément crucial pour assurer une participation maximale à la vaccination.

Aller plus loin : Tout savoir sur le Covid-19 et les droits humains

Nous sommes toutes et tous dans le même bateau. La pandémie de Covid-19 est un problème mondial qui exige une solution mondiale. Cette crise sans précédent ne pourra être résolue que par la coopération internationale et le respect des droits humains. Chaque individu a droit à la santé. Il est temps aujourd’hui d’exiger que les vaccins contre le Covid-19 soient disponibles pour toutes et tous, indépendamment du lieu de résidence, de l’identité ou des revenus de chacun. En faisant les bons choix, nous pouvons mettre fin au Covid-19 et façonner un avenir plus juste et durable.