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Sean Binder et Sarah Mardini

Sarah Mardini et Seán Binder : deux bénévoles jugés pour avoir sauvé des vies

Sarah Mardini et Seán Binder, deux bénévoles d’une ONG de sauvetage en mer, risquent la prison pour avoir sauvé des personnes exilées. Depuis quatre ans, la justice grecque les harcèle par le biais d’une enquête grotesque et d’accusations infondées. Retour sur un exemple typique de criminalisation de la solidarité.

En Grèce, on peut aller en prison pour avoir essayé de sauver une vie. C’est ce qui est arrivé à la syrienne Sarah Mardini, 24 ans, et à l’allemand Seán Binder, 25 ans, lorsqu’ils faisaient du bénévolat pour une ONG de sauvetage grecque sur l’île de Lesbos. Leur activité consistait à repérer et secourir les embarcations en détresse.

Aujourd’hui, alors que le procès s’est ouvert le 10 janvier dernier, la charge « d’espionnage » a été annulée. Mais nous restons mobilisés. Retour sur une histoire emblématique de la criminalisation de l’aide humanitaire en Europe.

Qui sont Sarah et Seán ?

Sarah

Sarah, originaire de Syrie, est arrivée à Lesbos en 2015 en tant que réfugiée. Lorsque le moteur du bateau sur lequel elle se trouvait est tombé en panne, Sarah et sa sœur Yusra ont sauvé 18 passagers en tirant l’embarcation, qui était en train de couler, jusqu’à un lieu sûr. Yusra a par la suite nagé dans l’Équipe olympique des réfugiés. L’histoire des deux soeurs a inspiré le film Netflix Les Nageuses.

Sarah est retournée en Grèce en 2016 et a fait du bénévolat au sein d’une organisation grecque de recherche et de sauvetage, où elle a rencontré Seán. Elle vit et étudie aujourd’hui à Berlin.

Seán

Seán Binder, citoyen allemand qui a grandi en Irlande, est un plongeur-sauveteur qualifié qui a passé du temps à secourir des personnes exilées dans la mer à Lesbos, en Grèce, l’un des principaux points d’entrée en Europe. Il travaille actuellement à Londres.

Procès grotesque et vices de procédure

Le 17 février 2018, Sarah et Sean sont arrêtés par la police grecque dans le cadre de leur activité bénévole. Ils sont notamment accusés d’espionnage, de trafic d’êtres humains et d’appartenir à une organisation criminelle. S’ils sont reconnus coupables, ils pourraient passer chacun 25 ans en prison. Ils y ont déjà passé plus de 100 jours avant d’être libérés sous caution, en décembre 2018.

En 2019, révoltés par cette injustice, nous nous mobilisons pour eux lors de notre opération annuelle 10 jours pour signer : plus de 60 000 actions de solidarité et d’interpellation auprès des autorités sont alors menées par nos sympathisants en France.

Le 10 janvier 2023, le procès de Seán et Sarah s’ouvre en Grèce. Ils risquent alors jusqu’à 25 ans de prison.

Le 13 janvier, la Cour d’appel de Mytilène renvoi l’acte d’inculpation pour "espionnage" devant le procureur du fait d’erreurs de procédure, notamment l’absence de traduction de cet acte.

Cette décision offre aux autorités une nouvelle occasion de mettre un terme à cette épreuve et de corriger leur faute en abandonnant toutes les charges, notamment celles de crime grave qui doivent encore être précisées. Les erreurs de procédure pointées par la Cour, notamment l'absence de traduction, ne font que renforcer l'absurdité des démarches des autorités grecques qui s'en prennent à des personnes qui défendent les droits des personnes exilées.

Les charges pour "espionnage" ont certes étaient annulées, mais nous demandons aux autorités grecques d’abandonner toutes les autres charges. L’acte d'accusation va maintenant être renvoyé au ministère public. Concernant Sarah et Seán, le délai de prescription pour les autres accusations de délits mineurs expirera en février 2023. L’enquête sur les accusations de crime grave portées contre eux, notamment pour facilitation d'entrée irrégulière, appartenance à une organisation criminelle et fraude, est toujours en cours.

Plus de quatre années se sont écoulées depuis l’ouverture de cette enquête grotesque, qui met en suspens les vies de Sarah et de Sean, livrés à l’incertitude. Les poursuites, pour des accusations infondées de crime grave qui continuent de faire l’objet d’investigations, soulèvent de graves inquiétudes quant aux véritables intentions des autorités. Cette affaire est caractéristique de la manière dont elles peuvent détourner le système de justice pénale dans le but de sanctionner le travail des défenseurs des droits humains et de les décourager.

La criminalisation de l’aide humanitaire

Ce qui est effrayant (…) c'est que cela peut arriver à n'importe qui parce que les États ne respectent pas les lois existantes qui protègent les droits humains.

Seán Binder

L’enquête criminelle contre Sarah et Seán n’est pas un cas isolé, elle est emblématique, en Grèce et en Europe, d’une utilisation abusive des lois pour criminaliser les personnes portant secours, ou agissant en solidarité avec les réfugiés et les migrants. Ces hommes et des femmes qui, fuyant un conflit, la torture ou d’autres exactions dans leurs pays, n’ont souvent pas d’autre choix que d’entreprendre des périples extrêmement dangereux pour trouver la sécurité.

Comprendre : Qu'est-ce que le délit de solidarité ?

« Si je peux être traîné en justice pour n’avoir fait guère plus que distribuer des bouteilles d’eau et des sourires, alors tout le monde peut se retrouver dans la même situation. Ce procès n’est pas celui de Sarah et de moi, ni même celui de nos 22 coaccusés. Il s’agit pour les autorités grecques de broyer toute compassion et d’empêcher les gens de rechercher la sécurité. Mais j’ai confiance en la justice, elle prévaudra, et nous pourrons poursuivre le cours de nos vies », a déclaré Seán Binder.

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Nos demandes

Nous demandons une nouvelle fois aux autorités grecques d’abandonner toutes les accusations et de permettre à Sarah et Sean de reprendre le cours de leur vie. Criminaliser ces défenseurs des droits humains au seul motif qu’ils ont aidé des réfugiés et des migrants dans le besoin témoigne du manque de sensibilité de la Grèce et de l’Europe à l’égard de ceux qui cherchent à se mettre en sécurité à leurs frontières.