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Réfugiés à la frontière hongroise vers la Serbie, septembre 2015 © Orsolya Jeney
Hongrie
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Hongrie en 2024.
Un nouvel organe public s’en est pris à des organisations de la société civile, des médias indépendants et des militant·e·s. Des milliers de personnes ayant fui l’Ukraine ont perdu le logement financé par l’État dont elles bénéficiaient. La Hongrie s’est vu infliger une forte amende par la Cour de justice de l’Union européenne pour avoir refusé d’appliquer la politique commune de l’UE en matière d’immigration et avoir empêché des personnes en quête d’asile d’accéder à la protection. Une loi répressive conservait son effet dissuasif lourd de conséquences pour les personnes LGBTI.
CONTEXTE
La Cour européenne des droits de l’homme a jugé que la Hongrie ne violait pas la Convention européenne des droits de l’homme en interdisant le suicide assisté ou l’euthanasie, y compris lorsque l’assistance était fournie à l’étranger. Après des années de conflit avec l’administration centrale des juridictions hongroises, 128 juges délégués ont élu en janvier 14 nouveaux membres du Conseil national de la magistrature, organe chargé de superviser la légalité du fonctionnement des tribunaux et de la Cour suprême.
LIBERTÉ D'EXPRESSION
Le nouvel Office de protection de la souveraineté nationale a commencé en février à ouvrir des enquêtes sur des organisations et des personnes considérées comme représentant une menace pour la souveraineté nationale. Il disposait de vastes pouvoirs lui laissant toute liberté pour jeter le discrédit et exercer une intimidation sur les voix qui critiquaient les autorités. L’Office a ouvert des enquêtes contre plusieurs ONG, notamment Transparency International Hongrie, et un journal d’investigation. Il a conclu que Transparency International et d’autres organisations de la société civile servaient des intérêts étrangers et portaient préjudice aux intérêts politiques, économiques et sociétaux de la Hongrie.
Préoccupée par les activités de l’Office de protection de la souveraineté nationale, la Commission européenne a engagé une procédure d’infraction contre la Hongrie et saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’un recours contre ce pays. Malgré de nombreux appels en ce sens lancés par la société civile, la Commission n’a pas demandé à la Cour l’application d’une mesure provisoire. L’affaire était toujours en instance à la fin de l’année.
CONDITIONS DE DÉTENTION INHUMAINES
Le Parlement a mis fin en novembre à une règle en vigueur depuis 2017 qui interdisait tout contact physique entre les détenu·e·s et les personnes leur rendant visite. Même si la présence d’une cloison en plexiglas restait possible dans certaines circonstances, les nouvelles règles allaient permettre à quelque 5 000 détenu·e·s d’avoir des contacts plus étroits et plus personnels avec leurs proches à partir de mars 2025.
Ces changements faisaient suite à une décision rendue en 2023 par la Cour européenne des droits de l’homme contre cette interdiction.
RECOURS EXCESSIF ET INUTILE À LA FORCE
La Cour suprême a annulé en avril la décision d’acquittement d’un policier mis en cause dans la mort d’un homme pendant sa garde à vue en 2018. Elle a ordonné l’ouverture d’une nouvelle enquête visant à déterminer si la police avait fait usage d’une force excessive.
DROITS DES FEMMES ET DES FILLES
Dans l’indice d’égalité de genres 2024 publié par l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes, la Hongrie était classée à la 26e place sur les 27 États membres de l’UE pour ses performances globales et à la dernière place s’agissant de l’égalité de genre dans les positions de pouvoir dans les secteurs politique et économique.
Il est ressorti d’un sondage de l’UE publié en novembre que 55 % des femmes hongroises avaient déjà subi des violences fondées sur le genre et que 8 % vivaient une relation violente.
SURVEILLANCE CIBLÉE ILLÉGALE
Dans une décision rendue en mars, le tribunal métropolitain de Budapest a jugé que l’Autorité nationale pour la protection des données et la liberté de l’information, en ne menant pas d’enquête efficace sur les plaintes déposées par quatre personnes ciblées par le logiciel espion Pegasus, avait porté atteinte aux droits fondamentaux de ces personnes.
DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES
La protection temporaire accordée aux personnes fuyant l’Ukraine a été prolongée jusqu’au 4 mars 2025. Cependant, le gouvernement a décidé que, après le 21 août, seuls les enfants, les femmes enceintes, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées de 65 ans et plus qui avaient fui des « zones de combat actives » en Ukraine pourraient bénéficier d’un logement financé par le gouvernement. Environ 3 000 personnes ont ainsi perdu leur logement ; il s’agissait en majorité de femmes avec de jeunes enfants, dont beaucoup de Roms.
En juin, la CJUE a infligé à la Hongrie une amende de 200 millions d’euros (environ 80 milliards de forints hongrois), lui reprochant d’« évite[r] délibérément d’appliquer la politique commune de l’Union » en matière d’immigration en empêchant les personnes de présenter une demande d’asile à la frontière. Cette amende était assortie d’une astreinte d’un million d’euros (environ 400 millions de forints hongrois) par jour jusqu’à ce que le pays modifie sa législation autorisant les renvois forcés, et souvent violents, de personnes en quête d’asile aux frontières du pays.
DROIT À UN PROCÈS ÉQUITABLE
La Hongrie n’a pas cherché à mettre en œuvre les recommandations du Rapport sur l’état de droit de la Commission européenne lui demandant de pallier les déficiences systématiques concernant l’indépendance de la justice, la liberté de la presse et le cadre national anticorruption.
En décembre, le président du Conseil national de la magistrature a démissionné après qu’environ 2 000 juges et membres du personnel des tribunaux ont manifesté contre un accord leur imposant d’accepter une proposition de réforme judiciaire formulée en des termes vagues pour pouvoir recevoir une augmentation de salaire. Des juges et organisations judiciaires ont qualifié cet accord de « chantage » et ont critiqué la proposition du gouvernement, craignant qu’elle compromette leur indépendance. Le Parlement a toutefois adopté certains éléments de cette réforme en décembre.
DROITS DES PERSONNES LGBTI
Poursuivant sa campagne anti-LGBTI, le gouvernement a imposé de nouvelles restrictions sur les publications et produits dont l’« élément constitutif » était considéré comme décrivant ou promouvant des thèmes ou une sexualité LGBTI. Ces changements ont amplifié le sentiment d’incertitude des entreprises, créant un effet dissuasif et augmentant la probabilité d’autocensure.
La CJUE a tenu en novembre une audience dans le cadre de la procédure d’infraction de la Commission européenne contre la Hongrie à propos de la « loi sur la propagande », un texte anti-LGBTI adopté en 2021. Cette loi avait toujours un effet considérable sur les personnes et groupes LGBTI, en consacrant des stéréotypes négatifs et des attitudes discriminatoires et en restreignant le droit à la liberté d’expression. Des représentant·e·s de gouvernements et du Parlement européen issus de 16 États membres sont intervenus lors de cette audience de la CJUE.
DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN
Classée au 45e rang mondial de l’Indice de performance climatique en 2024, la Hongrie figurait parmi les pays affichant un mauvais résultat, en particulier en ce qui concerne l’utilisation des énergies renouvelables. La politique climatique hongroise, certes en phase avec les objectifs de l’UE, était vague et manquait de mesures concrètes. Le nombre de panneaux solaires a augmenté et l’interdiction des éoliennes a été levée, mais la Hongrie prévoyait d’accroître sa production de gaz fossile et de prolonger jusqu’à 2030 la durée de fonctionnement d’une centrale au charbon, responsable de 14 % des émissions de CO2 du pays.

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