Aller au contenu
Agir
Faire un don
ou montant libre :
/mois
Grâce à la réduction d'impôts de 66%, votre don ne vous coûtera que : 5,1 €/mois
Soutenez nos enquêtes indépendantes

Chacun de vos dons rend possible nos enquêtes sur le terrain dans plus de 150 pays

©Mohammed Al Shaikhafp/AFP/Getty Images

©Mohammed Al Shaikhafp/AFP/Getty Images

Bahreïn

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Bahrein en 2024.

Les droits à la liberté d’expression et d’association ont cette année encore été réprimés, notamment au moyen de détentions arbitraires et d’interdictions de voyager. Des atteintes au droit à la liberté de réunion pacifique ont été constatées ; des manifestants pacifiques ont été jugés en même temps que des manifestants violents lors de procès collectifs iniques fondés sur des preuves non crédibles, notamment des « aveux » arrachés à des mineurs.

CONTEXTE

Au total, 2 586 détenu·e·s, dont plus de 750 personnes incarcérées pour des raisons politiques, selon des groupes d’oppositions chiites, ont été libérés à la faveur de trois grâces royales les 8 avril, 15 juin et 4 septembre. Le défenseur des droits humains et prisonnier d’opinion Naji Fateel a fait partie des bénéficiaires de la grâce du 8 avril. Cependant, d’autres défenseur·e·s des droits humains de premier plan, comme Abdulhadi al Khawaja et Abduljalil al Singace, étaient toujours en détention arbitraire.

LIBERTÉ D'EXPRESSION

Cette année encore, des personnes qui avaient critiqué le gouvernement ont été arrêtées et poursuivies. Le 5 mai s’est ouvert le procès au pénal du militant des droits humains Ali al Hajee, à qui les autorités reprochaient d’avoir contesté pacifiquement une interdiction de voyager qui pesait arbitrairement sur lui depuis sa sortie de prison en 2023. Il avait été libéré après avoir purgé une peine de 10 ans d’emprisonnement pour sa participation à des manifestations pacifiques. Il a finalement été acquitté le 29 mai, et son interdiction de voyager a été levée en août.

Les autorités ont poursuivi l’enquête criminelle visant Jasim Hussein al Abbas, ouverte en novembre 2023 à cause d’un article de blog qu’il avait écrit au sujet de la conversion de Bahreïn à l’Islam. Accusé d’avoir « diffusé de fausses informations historiques », il est resté sous le coup d’une interdiction arbitraire de voyager tout au long de l’année. Malgré ses demandes répétées, les autorités ont refusé de lui révéler quel organisme gouvernemental avait prononcé cette interdiction et comment la contester.

Le 25 mars, Ebrahim Sharif, l’un des dirigeants du parti d’opposition interdit Waad, a été placé en détention pour avoir critiqué sur les réseaux sociaux le choix du gouvernement d’investir des recettes de l’État dans l’entreprise McLaren Automotive plutôt que dans des logements sociaux. Il a été remis en liberté le 28 mars, mais les autorités n’ont pas officiellement clos l’enquête pénale le visant, ce qui leur laissait la possibilité d’ajouter ultérieurement d’autres charges à son dossier. C’était la deuxième fois en moins d’un an qu’Ebrahim Sharif était arrêté pour avoir exprimé ses opinions politiques en ligne.

Le 30 juillet, le ministère de l’Intérieur et le parquet ont placé en détention Hasan al Hayeki, Jamsheer Fairouz, Husain Id, Sayed Mohamed al Alawi et Saleh Sahwan pour avoir organisé, la nuit du 16 juillet, un rassemblement au cours duquel la foule a scandé « Nous exigeons la libération des prisonniers ! » et d’autres slogans politiques. Hasan al Hayeki a été remis en liberté le 3 septembre. Les autres ont été libérés le 22 septembre.

DÉCHÉANCE ARBITRAIRE DE LA NATIONALITÉ

Le 10 juillet, la Cour de cassation a privé Mohamed Rafeeq al Husaini, représentant de la première circonscription électorale du gouvernorat de Muharraq, de son siège au Conseil des députés (la chambre élue du Parlement) au prétexte qu’il avait la double nationalité bahreïnite et pakistanaise. Mohamed Rafeeq al Husaini vivait à Bahreïn avec la nationalité bahreïnite depuis plusieurs dizaines d’années et n’était pas reconnu par le Pakistan comme citoyen pakistanais. En août, la Cour de cassation a déchu le député de sa nationalité bahreïnite, et il a été expulsé au Pakistan. Les autorités ont engagé ces actions contre lui après qu’il eut demandé, le 30 avril, la libération d’Ali Salman, dirigeant du parti d’opposition interdit Al Wefaq, qui purgeait une peine de réclusion à perpétuité en raison de ses activités politiques et était considéré comme un prisonnier d’opinion par Amnesty International.

LIBERTÉ DE RÉUNION PACIFIQUE

Les autorités ont cette année encore arrêté, poursuivi et condamné à des peines d’emprisonnement, lors de procès iniques, des manifestants pacifiques et des personnes qui n’avaient fait que se trouver à proximité de manifestations. Le 25 mars, sept accusés ont ainsi été condamnés pour avoir participé à une manifestation propalestinienne organisée le 2 novembre 2023 dans le village de Sanabis. Le tribunal a prononcé des peines d’emprisonnement contre les sept prévenus, malgré l’absence totale de preuves crédibles de leur implication dans une quelconque infraction pénale reconnue par le droit international (voir Procès inéquitables).

Bien que de nombreux détenu·e·s aient été libérés à la faveur des grâces massives, 10 organisateurs des manifestations antigouvernementales de grande ampleur de 2011, dont des prisonniers d’opinion, se trouvaient toujours derrière les barreaux à la fin de l’année. Ces 10 hommes avaient été jugés par une juridiction militaire, qui les avait déclarés coupables de diverses infractions, dont la « création de groupes terroristes en vue de renverser la monarchie et de modifier la Constitution ». Leur déclaration de culpabilité et leurs peines avaient été confirmées en appel en septembre 2012.

PROCÈS INÉQUITABLES

Des affaires ont cette année encore été jugées au pénal dans le cadre de procédures qui, souvent, ne respectaient pas le droit à un procès équitable. Dans les cas de violences commises à l’encontre de policiers lors de manifestations, les prévenus étaient généralement jugés et condamnés collectivement, ce qui constituait une violation du droit à l’établissement d’une responsabilité pénale individuelle.

Par exemple, en février et en mars, un tribunal a jugé ensemble, dans un seul procès, trois hommes adultes et trois mineurs accusés d’avoir participé à une manifestation propalestinienne dans le village de Karzakkan le 17 novembre 2023, au cours de laquelle des violences contre des policiers avaient été commises par une partie seulement des manifestant·e·s. Lors d’un autre procès, concernant cette fois la manifestation propalestinienne du 2 novembre 2023 à Sanabis, les seules preuves utilisées pour condamner les sept prévenus ont été des déclarations d’agents du ministère de l’Intérieur et les soi-disant « aveux » de cinq des accusés durant leur interrogatoire. Quatre de ces « aveux » provenaient de mineurs, dont deux garçons âgés de seulement 15 ans.

DROITS DES PERSONNES DÉTENUES

En réaction aux sit-in de longue durée organisés à partir du mois de mars par des détenus de la prison de Jaww, les autorités ont limité les appels téléphoniques et les visites des manifestants, et ont coupé l’électricité de leurs bâtiments, ce qui a notamment entraîné un arrêt de la climatisation sous des températures estivales atteignant 44 à 46 °C.

Comme les années précédentes, des détenu·e·s et leurs familles ont été régulièrement privés du droit de consulter leurs dossiers médicaux.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Durant la COP29 en novembre, le ministre bahreïnite du Pétrole a annoncé que le pays s’engageait à réduire ses émissions de 30 % d’ici à 2035, et à atteindre l’objectif de zéro émission nette à l’horizon 2060. Cependant, Bahreïn avait contracté en février un prêt de 500 millions de dollars des États-Unis pour augmenter sa production en forant 400 nouveaux puits de pétrole et 30 nouveaux puits de gaz naturel.

Actualités