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URGENCE GAZA

 Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles

Illustration pour la couverture du rapport d'Amnesty International "En Pologne, la communauté LGBTI+ visée par des violences fondées sur le genre facilitées par la technologie sur X" © Aleksandra Herzyk
Discriminations

En Pologne, X amplifie la haine contre la communauté LGBTI+

Menaces de violence physique, harcèlement en ligne, divulgation d’informations personnelles… En Pologne, le réseau social X a contribué à propager la haine à l’encontre des personnes LGBTI+. Face aux nombreuses violations des droits fondamentaux subies par cette communauté sur la plateforme, nous demandons la mise en place par X de réformes de toute urgence.

« [Ils disent] que les personnes LGBTQ finiront dans des chambres à gaz, ou ils parlent de nous comme si nous étions des déchets, et pensent qu’il faut nous “purifier”. », Lisza (pseudonyme)

« Des gens tordus, que nous sommes brisés, que nous sommes malades. Je crois que “malade” est le mot le plus utilisé. », Nathan Bryza

« [Ils disent] que ces personnes ne sont pas normales, qu’elles sont contre les familles polonaises, qu’elles détruisent les familles polonaises, qu’elles ne sont pas des êtres humains, mais une idéologie. », Jolanta Prochowicz

Ces propos haineux, les personnes issues de la communauté LGBTI+ y sont surexposées sur X en Pologne. Sur la plateforme, c’est le règne de la violence, de la haine et de l’impunité, particulièrement à l’égard des minorités de genre.

Dans notre rapport "En Pologne, la communauté LGBTI+ visée par des violences fondées sur le genre facilitées par la technologie sur X" nous analysons pour la première fois le modèle économique de X, anciennement connu sous le nom de Twitter. Nos conclusions révèlent comment le fonctionnement de la plateforme et le manque de modération des contenus ont permis la propagation de violence de genre en ligne. X est conscient de ces dérives. X, comme toutes les plateformes de ce type, a l'obligation d’évaluer et d’atténuer les risques de violations des droits humains au niveau européen. Mais X ferme les yeux.

 

L’ère de la violence et de l’impunité

« Il y avait des gens qui disaient que, s’ils me croisaient à la salle de gym ou ailleurs, ils me briseraient les os, qu’ils souhaitaient que quelqu’un me tue. » Artiste et femme asexuelle, Aleksandra Herzyk raconte l’ampleur des violences subies sur la plateforme X.

Harcelée pour avoir mentionné son opération de réduction mammaire sur la plateforme et prise à tort pour une femme trans, Aleksandra a finalement décidé de quitter le réseau social : « Les choses que vous lisez sur vous – elles ne sont pas vraies mais, d’une certaine manière, elles vous restent dans la tête. C’est comme mourir à petit feu, confie-t-elle.

Sur la plateforme, c’est l’impunité qui règne. Aucun contrôle n’est fait pour modérer les contenus violents ou haineux. Maja Heban, une femme trans de 34 ans raconte : « Quoi que vous [les autres utilisateurs et utilisatrices] puissiez dire, c’est bon – même lorsqu’il s’agit de comparer les personnes LGBT à des animaux, des violeurs ou des pédophiles. Tout passe. ».

Ces contenus haineux ont un impact extrêmement grave sur la santé des victimes. Jolanta Prochowicz, une femme lesbienne, explique ainsi : « Nous devrions reconnaître les réseaux sociaux comme faisant partie de notre vie sociale. Si nous disons quelque chose sur Internet, cela fait mal comme si c’était réel… C’est nuisible, c’est douloureux et cela peut être très puissant. Les réseaux sociaux n’affectent pas notre vie normale, ils sont notre vie normale, et ils ont une influence sur nous. »

Lire aussi : Sébastien, militant pour les droits LGBTI+ : "J’ai reçu 10 000 commentaires toxiques et haineux en deux mois"

Une modération quasi inexistante  

X a sous-investi de manière chronique la modération des contenus en polonais. Cela a contribué à un manque flagrant de traitement des contenus à caractère violent contre les personnes LGBTI+.

Dans ses propres rapports, l’entreprise indique qu’elle n’emploie que deux personnes pour la modération des contenus en Pologne, dont l’une pour qui le polonais n’est pas la langue maternelle.

À elle seules, ces deux personnes sont chargées de couvrir une population de 37,45 millions d’habitant·es, dont 5,33 millions utilisent X.

L’engagement, à tout prix

Le système de recommandation de X, qui alimente le fil « Pour toi », est conçu pour capter l’attention des utilisateurs. Pour cela, l’algorithme met en avant les contenus qui génèrent le plus d’interactions (likes, commentaires, partages…).

Ainsi, même si des protections existent, ce modèle peut contribuer à favoriser la diffusion de contenus violents ou haineux, dès lors qu’ils suscitent des réactions fortes et maintiennent l’engagement des utilisateurs·ices.

Ce cumul de moyens, de règles et de pratiques insuffisants a contribué à faire de X une plateforme inondée de contenus haineux ciblant la communauté LGBTI.

Alia Al Ghussain, chercheuse et conseillère sur l’intelligence artificielle et les droits humains pour Amnesty International.

 

X, un vaste modèle de surveillance

Par ailleurs, notre analyse du fonctionnement économique de X révèle un modèle fondé sur la surveillance. Ce dernier s’appuie sur une collecte massive et invasive des données personnelles des utilisateur·ices. Cela, de manière bien plus intrusive que nous le pensons.

En exploitant ainsi nos données, le système instaure une surveillance et un contrôle insidieux sur nos vies. Il permet à la plateforme d’établir des profils précis des utilisateur·ices, de déduire des informations les concernant qui n’ont pas été communiquées consciemment ou volontairement, comme nos origines ethniques ou notre orientation sexuelle, voire de prédire notre état d’esprit ou nos opinions politiques.

Non seulement il représente une menace considérable pour notre droit à la vie privée, mais également pour toute une série d’autres droits tels que la liberté d’opinion, d’expression et de pensée, notre droit à l’égalité ou encore notre droit à la non-discrimination.

Lire aussi : Facebook et Google, les géants de la surveillance

Conscients des dérives, X ferme les yeux

Depuis février 2024, les très grandes plateformes en ligne, telles que X, ont l’obligation d’évaluer et de limiter les risques de violations des droits humains. Ces obligations sont encadrées par le Règlement européen sur les services numériques (DSA). Ce dernier vise à protéger les citoyens européens face aux dérives des géants du web.  

Cette année-là, la plateforme reconnaît les risques de haine et d’intimidation sur sa plateforme mais passe sous silence les atteintes spécifiques envers les personnes LGBTI+. 

Un audit indépendant mené sur plusieurs mois en 2024 révèle que les mesures prises par le réseau social sont largement insuffisantes : peu efficaces, mal conçues, et sans réelle protection contre les dérives algorithmiques.

En d’autres termes, aucune mesure efficace n’a été mise en œuvre pour protéger réellement les droits des utilisateur·ices. X avait pourtant connaissance des dérives sur sa plateforme. Il est urgent que la plateforme respecte ses obligations envers le DSA.

Les groupes marginalisés, cibles privilégiées de contenus haineux les réseaux sociaux

Dans d’autres rapports, nous avons dénoncé le rôle des réseaux sociaux dans l’amplification de contenus haineux à la source de violences commises hors ligne. Lorsque les plateformes privilégient l'engagement et le profit au détriment des droits humains, ce sont souvent les groupes marginalisés qui en font les frais.

Nos demandes

Par ses pratiques de modération insuffisante des contenus et son absence d’application de la diligence requise en matière de droits humains, X a contribué à des atteintes violentes aux droits fondamentaux des membres de la communauté LGBTI de Pologne. C’est pourquoi nous appelons :

  • La Commission européenne à élargir l’enquête qu’elle mène actuellement sur X afin d’examiner la capacité de l’entreprise à atténuer efficacement le risque de violence liée au genre facilitée par la technologie.

  • La plateforme X à lancer des réformes pour arrêter de contribuer à des atteintes aux droits humains commises contre les personnes LGBTI en Pologne, prévoir des moyens suffisants pour la modération des contenus en polonais et mettre fin à son modèle économique fondé sur la surveillance.

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