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Nouvelle-Zélande. Le système migratoire discriminatoire ne répond pas aux besoins des populations du Pacifique touchées par le changement climatique
Un flot d’injustices
Déplacements climatiques des îles du Pacifique Tuvalu et Kiribati à la Nouvelle-Zélande
Les autorités de la Nouvelle-Zélande soumettent les populations des îles Tuvalu et Kiribati, dans le Pacifique, exposées à des risques liés au changement climatique, à des politiques migratoires discriminatoires qui déchirent les familles et bafouent les droits des enfants, déclare Amnesty International dans un nouveau rapport publié le 9 octobre, un mois avant la COP 30, la Conférence des Nations unies sur le changement climatique.
Le rapport, intitulé Navigating Injustice, révèle que les programmes migratoires basés sur un système de loterie mis en place par la Nouvelle-Zélande pour les personnes vivant dans les pays insulaires du Pacifique touchés par le changement climatique excluent certaines personnes en raison de leur âge, de leur handicap et de leur état de santé, en violation du droit international relatif aux droits humains. Le rapport présente également les cas de personnes qui n’ont d’autre choix que de dépasser la durée de validité de leur visa en Nouvelle-Zélande et qui sont exposées au risque persistant d’expulsion.
« Les populations du Pacifique subissent une double peine, tout d’abord avec la crise climatique dont elles ne sont pas responsables, et ensuite avec des systèmes migratoires qui violent leurs droits », a déclaré Agnès Callamard, la secrétaire générale d’Amnesty International.
Un système migratoire discriminatoire
Ces dernières années, alors que le changement climatique et les catastrophes naturelles accentuent les inégalités sociales et les difficultés économiques dans le Pacifique, nombreux sont ceux qui ont estimé que la migration était la meilleure solution. Pour nombre d’habitant·e·s des Tuvalu et de Kiribati, la Nouvelle-Zélande représente la destination la plus viable compte tenu des liens historiques et culturels étroits qui unissent ces pays.
Cependant, le système de migration de la Nouvelle-Zélande ne tient pas compte des effets du changement climatique et des catastrophes naturelles. C’est notamment le cas avec le visa Pacific Access Category Resident Visa (PAC), qui accorde la résidence permanente à un nombre restreint de ressortissant·e·s des îles Kiribati, Tuvalu, Tonga et Fidji.
Le programme PAC n’est accessible qu’aux personnes âgées de 18 à 45 ans, qui peuvent obtenir un emploi et prouver qu’elles ont « un état de santé acceptable ». Cela exclut toute personne présentant un trouble lié à un handicap, ainsi que toute personne atteinte de certains problèmes médicaux considérés comme coûteux pour la Nouvelle-Zélande.
« Pour de nombreux habitant·e·s des Tuvalu et de Kiribati, rester ou partir n’est pas une question de choix, car il en va de leur survie, a déclaré Agnès Callamard. « Les populations des îles du Pacifique font preuve d’une résilience extraordinaire en mettant en œuvre des stratégies d’adaptation et d’atténuation des risques afin de pouvoir rester sur leurs terres, mais le gouvernement néo-zélandais doit faire davantage pour les soutenir, sans discrimination. »
Il est tout simplement inacceptable qu’un pays à fortes émissions comme la Nouvelle-Zélande affirme ne pas pouvoir accueillir des personnes apparemment en raison des coûts que cela pourrait engendrer, en particulier quand on sait que les personnes en situation de handicap sont exposées à des risques accrus lors d’événements climatiques extrêmes.
Agnès Callamard
Amnesty International a rencontré plusieurs personnes en situation de handicap et des membres de leur famille qui ont été séparés en raison des exigences en matière de visa.
Alieta, une enseignante et mère originaire des Tuvalu souffrant d’une déficience visuelle, a dû retirer son nom de la demande de PAC de sa famille afin de permettre à sa fille de six ans et à son mari de partir en Nouvelle-Zélande en 2016. Elle vit depuis séparée d’eux.
Évoquant les effets du changement climatique, Alieta a expliqué : « Quand la marée haute est arrivée, elle a inondé toute la route et aussi la maison […] c’est pour cela que je veux m’éloigner de la mer. » Elle dit avoir accepté que sa fille parte en Nouvelle-Zélande parce qu’elle souhaite une vie meilleure pour elle, même si la séparation est très difficile à vivre.
« Au début, je n’étais pas en colère contre la Nouvelle-Zélande. J’ai continué à demander un visa […] Mais je suis triste pour ma fille. Je ne voulais pas être séparée d’elle. C’est difficile pour les enfants. »
Agnès Callamard a déclaré : « Il est tout simplement inacceptable qu’un pays à fortes émissions comme la Nouvelle-Zélande affirme ne pas pouvoir accueillir des personnes apparemment en raison des coûts que cela pourrait engendrer, en particulier quand on sait que les personnes en situation de handicap sont exposées à des risques accrus lors d’événements climatiques extrêmes. »


Dégradation des conditions de vie pour les habitant·e·s des Tuvalu et de Kiribati
Les Tuvalu et Kiribati, situés en moyenne à deux mètres au-dessus du niveau de la mer, sont particulièrement exposés aux effets de l’élévation du niveau de la mer. L’érosion du littoral, les inondations et les sécheresses, ainsi que la contamination et la salinisation de l’eau et des sols, limitent considérablement la disponibilité de l’eau potable et des terres pour les cultures de denrées alimentaires et la construction de logements. Cela a des répercussions particulièrement graves sur la santé des populations, en particulier pour les personnes âgées et celles vivant avec un handicap.
Aleki, qui vit avec son mari, ses quatre enfants et la famille de sa sœur à Funafuti, la capitale des Tuvalu, a déclaré à Amnesty International qu’il était devenu difficile de s’approvisionner en eau potable : « Nous prenons des seaux et allons chaque jour au bâtiment du gouvernement pour obtenir de l’eau filtrée que nous pouvons boire. »
Les vagues de chaleur, les sécheresses et les marées exceptionnelles ont détruit toutes les plantes.
Une habitante de Kiribati âgée de 56 ans
La contamination des sols par l’eau salée, qui les rend impropres à la culture de la plupart des plantes, est un problème tel à Kiribati que l’île dépend désormais presque entièrement des importations de denrées alimentaires, souvent limitées en variété et d’un coût prohibitif.
Une habitante de Kiribati âgée de 56 ans a déclaré à Amnesty International : « À Kiribati, il est difficile de trouver de la bonne nourriture. On ne trouve que du riz et des conserves. Il ne trouve pas de légumes ni rien de ce genre. Nous ne cultivons pas notre nourriture sur place. Les vagues de chaleur, les sécheresses et les marées exceptionnelles ont détruit toutes les plantes. »


Risque d’expulsion de Nouvelle-Zélande
La situation est également précaire pour les personnes qui parviennent à atteindre la Nouvelle-Zélande et qui se retrouvent en situation irrégulière après l’expiration de leur visa. N’ayant pas accès à des mécanismes de protection spécifiques, les personnes dans cette situation vivent dans la crainte constante d’être expulsées et ne peuvent pas bénéficier des services publics, notamment des soins de santé et de l’éducation.
Aux termes du droit international relatif aux droits humains, toute personne a le droit d’être protégée contre un renvoi forcé vers un lieu où elle courrait un risque réel de violations graves des droits humains, notamment en raison du changement climatique et de catastrophes naturelles.
« Amnesty International appelle la Nouvelle-Zélande à réformer d’urgence ses politiques migratoires afin de les aligner sur une approche fondée sur les droits en matière de déplacements climatiques. Le gouvernement doit à cette fin élaborer et mettre en œuvre des politiques conformes au Traité de Waitangi (Te Tiriti o Waitangi) et aux droits des populations autochtones », a déclaré Agnès Callamard.
Le Pacifique tire la sonnette d’alarme. Si le monde n’agit pas ici, il échouera partout.
Agnès Callamard
Cela inclurait l’octroi de visas humanitaires spécifiques accordant la priorité aux personnes qui ne remplissent pas les conditions existantes en matière de migration, afin de garantir les droits, y compris en ce qui concerne la cellule familiale, des personnes migrantes. Des mécanismes de protection spécifiques contre l’expulsion sont également nécessaires, notamment la suspension des expulsions pour les ressortissant·e·s des Tuvalu et de Kiribati.
« La Nouvelle-Zélande – et la communauté internationale dans son ensemble – doit agir dès maintenant pour protéger, respecter et promouvoir les droits et la dignité des populations du Pacifique face à la crise climatique, tant dans leur pays d’origine que dans leur pays de destination. Ne pas agir en ce sens reviendrait à trahir notre responsabilité commune de défendre les droits humains et de garantir la justice climatique », a déclaré Agnès Callamard.
« Prendre des mesures contre le changement climatique et les déplacements de population n’est plus un choix politique, mais une obligation juridique. Le Pacifique tire la sonnette d’alarme. Si le monde n’agit pas ici, il échouera partout. »

Alieta : « J’ai très peur du changement climatique. »
Alieta, 55 ans, est une enseignante des Tuvalu qui souffre d’une déficience visuelle. En 2016, elle n’a eu d’autre choix que de retirer son nom de la demande de visa PAC de sa famille afin de permettre à sa fille de six ans et à son mari de partir en Nouvelle-Zélande. Elle n’a jamais pu aller voir sa fille en Nouvelle-Zélande, toutes ses demandes de visa de visiteur ayant été rejetées.
En 2015, nous avons déposé une demande de visa PAC, et en 2016, mon mari est parti avec notre fille. Nous sommes allés jusqu’aux Fidji, mais je suis restée bloquée sur place. J’y ai séjourné pour tenter de redemander un visa pour moi. La première fois, dans le cadre de la demande de visa PAC, je n’ai pas été acceptée en raison de mon handicap. Ma vision est très basse ; je ne vois que de près.
Le premier formulaire à remplir ne fait pas mention des handicaps. Ce n’est qu’à la deuxième étape que le formulaire indique que les personnes en situation de handicap ne sont pas éligibles. J’ai pris connaissance de cette information qui m’a fait de la peine pendant le processus de demande. Je n’aurais pas déposé de demande pour que ma famille parte si j’avais su qu’ils n’accepteraient pas les personnes en situation de handicap. Je ne voulais pas que notre famille soit séparée.
J’ai un handicap, mais je voulais que ma fille soit fière de moi. Je me disais que si j’allais en Nouvelle-Zélande, je ferais de mon mieux pour trouver un bon travail sur place, afin qu’elle soit fière de moi, de ce que je ferais pour elle.
Quand la marée haute est arrivée, elle a inondé toute la route et aussi la maison.
Je voulais que [mon mari] ait un bon travail pour scolariser notre fille et je pense aux effets du changement climatique ici. J’ai très peur du changement climatique.
Le changement climatique et les personnes en situation de handicap […]. C’est très difficile pour nous. J’habitais à un endroit très proche de la mer, entre l’océan et le lagon. Quand la marée haute est arrivée, elle a inondé toute la route et aussi la maison. La pluie est entrée dans la maison. Dans ce type de situation, il est difficile pour nous, les personnes en situation de handicap, de nous déplacer mais nous ne sommes pas non plus en sécurité si nous restons chez nous. Par mauvais temps, nous restons à l’intérieur […] c’est pour cela que je veux m’éloigner de la mer.
J’essayais d’être forte pour ma fille.
Lorsque ma fille m’a dit au revoir, au moment d’embarquer, elle pleurait et disait : « Maman, je ne veux pas y aller, je veux que tu viennes ! » J’essayais d’être forte pour ma fille, je voulais qu’elle parte pour bénéficier d’une éducation. Je voulais qu’elle ait une belle vie pour son avenir. [En tant qu’enseignante], j’avais suivi des cours d’enseignement préscolaire, donc je savais à quel point ce serait difficile pour mon enfant. Je ne lui montrais pas comme je me sentais faible.
Après leur départ en 2015, je ne les ai revus qu’une fois, aux Fidji, en 2017 pendant un séjour d’un mois. J’appelle ma fille et je lui parle, mais depuis, nous ne nous sommes jamais revues. Je parle à ma fille, mais mon mari m’a bloquée […]. La première fois, avec la demande de visa PAC, je ne pouvais pas y aller. Je suis allée au bureau du médiateur, ici aux Tuvalu, et on m’a dit de redéposer une demande de visa. J’ai demandé un visa de visiteur depuis les Fidji en 2017 et celle-ci a quand même été rejetée. J’ai déposé deux ou trois demandes et toutes ont été refusées. J’ai payé 200 à 300 dollars australiens pour chaque demande.
Au début, je n’étais pas en colère contre la Nouvelle-Zélande. J’ai continué à demander un visa… Mais je suis triste pour ma fille. Je ne voulais pas être séparée d’elle. C’est difficile pour les enfants. »

La crise climatique menace des familles, leur avenir et leur dignité.
Accordez des visas climatiques pour les habitant·e·s du Pacifique
Appelez les autorités de Nouvelle-Zélande à accroître leur soutien, pour un avenir plus sûr et juste, en accordant à ces familles des visas humanitaires fondés sur les droits humains.
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