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© Esteban Biba/epa/Corbis
Guatemala
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Guatemala en 2024.
Des défenseur·e·s des droits humains, des journalistes et des opposant·e·s politiques ont été la cible d’actes de harcèlement et de poursuites. Le recours à des procédures pénales non fondées témoignait du manque d’indépendance de la justice. Des signes de progrès ont été constatés quant à l’attitude de l’État envers les peuples autochtones, mais cette année encore, des dirigeant·e·s qui défendaient les territoires et les droits de leur peuple ont fait l’objet de poursuites. Les procédures relatives aux crimes contre l’humanité perpétrés pendant le conflit armé qui a touché le pays entre 1960 et 1996 ont été retardées. Le gouvernement a pris des mesures pour reconnaître les violations des droits des femmes, réglementer les services de santé et améliorer la qualité de l’eau. Le mariage entre personnes de même sexe était toujours illégal.
LIBERTÉ D'EXPRESSION ET D'ASSOCIATION
Des défenseur·e·s des droits humains, des procureur·e·s, des juges, des journalistes et des opposant·e·s politiques qui avaient dénoncé l’impunité et la corruption ont fait l’objet cette année encore de poursuites basées sur des motifs politiques, de même que leurs avocat·e·s respectifs. Des poursuites pénales infondées ont entraîné de multiples violations des garanties d’une procédure régulière, souvent caractérisées par des préjugés sexistes à l’encontre des femmes accusées.
Après presque deux ans de détention arbitraire, la prisonnière d’opinion Virgina Laparra, une ancienne procureure, a finalement été libérée en janvier. En juillet, un tribunal l’a déclarée coupable à l’issue d’une seconde procédure pénale infondée, ce qui l’a contrainte à s’exiler. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a recommandé en mars la libération de Jose Rubén Zamora, considérant que son incarcération était arbitraire. Après plus de 800 jours en détention dans l’attente de son procès, le journaliste a été libéré de prison et assigné à domicile. Les poursuites lancées contre des dirigeant·e·s du Mouvement Semilla, parti politique suspendu, ont continué. À la fin de l’année, l’ancien procureur Stuardo Campo était encore en détention dans l’attente de son procès.
DROIT À UN PROCÈS ÉQUITABLE
Le ministère public et une grande partie du système judiciaire engageaient de nombreuses poursuites pénales injustifiées. Lors d’une visite au Guatemala en juillet, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a souligné que cette pratique témoignait d’un manque d’indépendance de la justice.
Le Congrès a nommé en octobre plus de 300 nouveaux et nouvelles magistrat·e·s dans les cours d’appel et à la Cour suprême. Selon les médias, plusieurs de ces personnes étaient impliquées dans des affaires de corruption ou avaient engagé des poursuites pénales contre des personnes qui s’étaient montrées critiques vis-à-vis des autorités. Des expert·e·s internationaux ont signalé que cette procédure de nomination n’était pas conforme aux normes internationales et qu’elle avait été influencée par les intérêts de puissantes parties prenantes.
DÉFENSEUR·E·S DES DROITS HUMAINS
L’Unité de protection des défenseures et défenseurs des droits humains au Guatemala (UDEFEGUA), une organisation locale, a recensé 2 763 attaques contre des militant·e·s entre janvier et octobre.
L’organe chargé d’analyser les risques concernant les défenseur·e·s des droits humains qui avait été instauré par le ministère de l’Intérieur a été réactivé. À la fin de l’année, la politique publique relative à la protection des défenseur·e·s des droits humains n’était pas encore approuvée et l’État n’avait toujours pas ratifié l’Accord d’Escazú.
DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES
Pour la première fois depuis de nombreuses années, le gouvernement a établi un dialogue direct avec plusieurs autorités indigènes et s’est engagé à promouvoir un programme de développement complet qui tenait compte de leurs besoins. Dans de nombreuses régions du pays, cependant, des dirigeant·e·s autochtones ont fait l’objet de poursuites pour avoir cherché à protéger les territoires et les droits de leur peuple. Des dizaines de communautés paysannes et indigènes risquaient d’être expulsées de force dans le cadre de conflits fonciers.
IMPUNITÉ
Des retards et des irrégularités entravaient la quête de justice pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre perpétrés lors du conflit armé interne qui a touché le pays de 1960 à 1996, notamment dans l’affaire du « Diario militar ». Un tribunal a annulé la décision rendue dans l’affaire du CREOMPAZ (ancien centre de détention militaire) et libéré les officiers de l’armée à la retraite qui étaient accusés. En novembre, alors que le procès pour génocide ouvert contre l’ancien général Benedicto Lucas avait commencé, le procureur général a révoqué sans raison les procureur·e·s chargés des droits humains auxquels l’affaire avait été confiée. Quelques jours plus tard, une juridiction supérieure a annulé le procès en cours.
VIOLENCES FONDÉES SUR LE GENRE
Le gouvernement a reconnu la responsabilité de l’État dans les féminicides de María Isabel Véliz Franco et Claudina Velásquez au début des années 2000, conformément aux décisions rendues en 2014 et 2015 par la Cour interaméricaine des droits de l’homme. Il s’est par ailleurs engagé à offrir une indemnisation pour la mort dans un incendie, en 2017, de 41 jeunes filles qui étaient enfermées dans le foyer d’accueil Hogar Seguro Virgen de la Asunción, géré par l’État. Des poursuites pénales contre les auteurs présumés étaient en cours.
Le projet de loi sur l’éducation complète à la sexualité était toujours en attente d’approbation à la fin de l’année.
L’Association LAMBDA a recensé 35 homicides de personnes LGBTI entre janvier et novembre. Le mariage entre personnes de même sexe était toujours illégal.
DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
Selon les données officielles, le niveau de malnutrition sévère chez les enfants est resté élevé. Les autorités ont déposé plusieurs dizaines de plaintes contre le gouvernement précédent pour détournement de fonds destinés aux services publics, notamment à la santé et à l’éducation. Il a annoncé des mesures pour réglementer l’achat d’équipements médicaux et empêcher les pénuries qui affectaient l’accès à des soins de santé de qualité.
DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN
Le gouvernement a publié en mars un plan national d’action sur le genre et le changement climatique. Il a créé en septembre le « cabinet de l’eau », chargé de coordonner la gestion des ressources hydriques, dans un climat d’inquiétude quant à l’accès à une eau propre.