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URGENCE PROCHE ORIENT

 Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles

Gambie

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Gambie en 2024.

Le Parlement a maintenu l’interdiction des mutilations génitales féminines, mais cette pratique restait répandue. La traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle et le travail des enfants dans la rue demeuraient des sources de préoccupation. Les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique étaient toujours soumis à de sévères restrictions. Plus d’un quart de la population se trouvait en situation d’insécurité alimentaire. Des avancées ont eu lieu en matière d’obligation de rendre des comptes pour les crimes commis alors que l’ancien président Yahya Jammeh était au pouvoir.

CONTEXTE

En août, le gouvernement a rendu public un projet de nouvelle constitution, sur fond de critiques lui reprochant un manque de transparence et de consultation. Le texte a été déposé à l’Assemblée nationale en décembre.

Cette année encore, de nombreux migrant·e·s ont péri en mer. Durant les cinq premiers mois de l’année, près de 5 000 personnes migrantes, dont des Gambien·ne·s, ont trouvé la mort en tentant d’atteindre les îles Canaries.

DROITS DES FEMMES ET DES FILLES

La Loi sur les infractions sexuelles ne reconnaissait toujours pas le viol conjugal comme une infraction pénale, malgré les appels en ce sens de militant·e·s des droits humains.

Une proposition de loi visant à annuler l’interdiction des mutilations génitales féminines a été présentée au Parlement en mars. Le Parlement a rejeté ce texte le 15 juillet, après une campagne de militant·e·s et de victimes pour dénoncer les conséquences néfastes de cette pratique sur la santé. L’UNICEF a indiqué que, selon les estimations, 73 % des femmes et des filles gambiennes âgées de 15 à 49 ans avaient subi des mutilations génitales féminines.

La mortalité maternelle restait élevée, avec 289 décès pour 100 000 naissances vivantes d’après les statistiques les plus récentes (2019-2020) du Programme d’enquêtes démographiques et de santé. En février, le conseil d’administration de l’hôpital général de Bansang, dans la division de Central River, a annoncé que 146 femmes enceintes étaient mortes de complications liées à leur grossesse entre 2016 et 2020.

Le Rapport 2024 sur les inégalités femmes-hommes dans le monde publié par le Forum économique mondial a fait état de lents progrès en matière de parité de genre dans le pays. La Gambie est ainsi passée en un an de la 119e à la 110e place sur 146 pays. Toutefois, la parité de genre était toujours loin d’être atteinte dans les domaines de l’éducation, de la participation politique et de la santé. En novembre, le président a affirmé l’engagement de son gouvernement en faveur de l’égalité femmes-hommes en lançant la politique nationale sur le genre 2025-2034.

DROITS DES ENFANTS

En janvier, la ministre du Genre, de l’Enfance et de la Protection sociale a réaffirmé l’engagement du gouvernement à agir en faveur des droits des enfants et a annoncé la deuxième phase du Projet en faveur de la protection des enfants victimes de violations de leurs droits, qui prévoyait notamment d’aider les mineur·e·s en situation de handicap et de renforcer les mécanismes régionaux de protection de l’enfance. Néanmoins, les enfants travaillant dans la rue restaient exposés à un risque d’atteintes aux droits humains et étaient privés de scolarité. En septembre, la directrice de Samaritana Gambia, une ONG intervenant auprès des victimes de traite des êtres humains, a aussi alerté sur une résurgence de la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle dans le pays.

LIBERTÉ D'EXPRESSION, D'INFORMATION ET DE RÉUNION PACIFIQUE

Selon le Classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières, la Gambie a reculé en un an de la cinquième à la 10e place en Afrique et de la 46e à la 58e place dans le monde. Des lois draconiennes sur les médias restreignant le droit à la liberté d’expression, comme la Loi relative à la sédition, restaient en vigueur.

En mars, le Syndicat de la presse de Gambie a exprimé sa préoccupation au sujet du projet de loi de 2023 sur la cybercriminalité, estimant qu’il contenait des dispositions vagues susceptibles de porter atteinte au droit à la liberté d’expression en ligne et de le restreindre. Le texte était toujours en attente d’examen par l’Assemblée nationale à la fin de l’année. Le gouvernement a créé en avril la Commission sur l’accès à l’information et les commissaires ont été investis en septembre.

En avril également, huit militant·e·s ont été arrêtés et détenus pendant sept heures, avant d’être inculpés de « troubles à l’ordre public », « rassemblement illégal » et « refus d’obéir à un ordre légal » pour avoir programmé un sit-in de protestation contre l’interruption de services de ferry et contre des faits présumés de corruption.

Deux journalistes de The Voice ont été inculpés de publication et diffusion de fausses informations après la publication par le journal d’un article affirmant que le chef de l’État avait choisi son successeur pour la future élection présidentielle. Le président s’est désisté en novembre de l’action civile en diffamation qu’il avait intentée contre l’un des journalistes et contre le journal. L’affaire pénale a été classée en décembre.

Le défenseur des droits humains Madi Jobarteh était toujours sous le coup d’une enquête pénale à la fin de l’année, notamment pour « publication et diffusion de fausses informations ». Il lui était reproché d’avoir publié sur Facebook des commentaires critiques à l’égard du gouvernement en 2023.

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Les personnes marginalisées étaient les plus touchées par le manque de logements abordables. En juillet, le ministre du Territoire, du Gouvernement régional et des Affaires religieuses a annoncé un projet de construction de 10 000 logements abordables d’ici décembre 2025, et de 200 000 au total dans les 10 années à venir, afin de résoudre la crise.

Des militant·e·s et des parlementaires se sont inquiétés des effets croissants du kush, une drogue de synthèse bon marché, sur la santé des jeunes, et ont demandé au gouvernement d’intervenir.

L’insécurité alimentaire demeurait problématique. Selon le rapport de l’Enquête nationale 2023 sur la sécurité alimentaire, 29 % de la population en Gambie était en situation d’insécurité alimentaire en 2023, soit 3 % de plus qu’en 2022. Par ailleurs, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée pratiquée par des chalutiers étrangers compromettait les moyens de subsistance des pêcheurs locaux et entraînait une pénurie de poisson pour la consommation locale. En mars, huit chalutiers industriels ont été interceptés pour violation des lois sur les zones de pêche. En août, le gouvernement a organisé un séminaire avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture et créé un Groupe de travail technique destiné à faciliter la communication entre les différents organismes concernés afin d’essayer de régler ce problème.

DROIT À LA VÉRITÉ, À LA JUSTICE ET À DES RÉPARATIONS

Des avancées ont eu lieu en matière d’obligation de rendre des comptes pour les crimes commis sous la présidence de Yahya Jammeh.

L’Assemblée nationale a adopté en avril la Loi sur le Mécanisme spécial d’obligation de rendre des comptes faisant suite aux travaux de la Commission vérité, réconciliation et réparation (TRRC), ainsi que la Loi portant création du Bureau du procureur spécial. Ces deux textes ouvraient la voie à des poursuites judiciaires dans les affaires de graves violations des droits humains identifiées dans le rapport de la TRRC. Le 15 décembre, la Conférence des chefs d’État et de gouvernement des États membres de la CEDEAO a approuvé la création d’un Tribunal spécial pour la Gambie, une juridiction hybride dotée de personnel gambien et international qui aura pour mandat de poursuivre les crimes contre l’humanité, les actes de torture et autres crimes graves commis lorsque Yahya Jammeh était au pouvoir. En mai, le Tribunal fédéral suisse a condamné l’ancien ministre de l’Intérieur Ousman Sonko à 20 ans de réclusion pour crimes contre l’humanité.

En août, la Cour de justice de la CEDEAO a rendu un arrêt demandant au gouvernement ghanéen de rendre publiques des informations essentielles sur la torture et les homicides dont avaient été victimes des ressortissant·e·s d’Afrique de l’Ouest en Gambie en 2005.

Le Centre gambien des victimes de violations des droits humains a exprimé sa frustration face au manque de spécialistes médicolégaux pour identifier les corps, exhumés en 2019, des victimes du coup d’État du 11 novembre 1994, entre autres.

Un ancien général et membre présumé des junglers, unité paramilitaire soupçonnée d’avoir commis des exécutions extrajudiciaires sous le gouvernement de Yahya Jammeh, a été arrêté au mois d’août.

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