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© Sølve Sæther

© Sølve Sæther

Égypte

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Égypte en 2024.

Les autorités ont continué de réprimer les critiques, d’étouffer la société civile et de restreindre les manifestations de rue. Elles ont procédé à des arrestations collectives pour empêcher la tenue de rassemblements anti-gouvernementaux prévus et ont dispersé de force les quelques manifestations pacifiques de faible ampleur qui ont eu lieu. Elles ont libéré 934 personnes détenues pour des raisons politiques, mais en ont arrêté 1 594 autres. Parmi les personnes visées figuraient des journalistes, des avocat·e·s, des manifestant·e·s, des dissident·e·s, des personnalités politiques de l’opposition ainsi que des hommes et des femmes qui critiquaient le bilan des autorités en matière de droits humains et la gestion de la crise économique par les pouvoirs publics. Des dizaines de personnes ont été victimes de disparition forcée. La torture et d’autres formes de mauvais traitements restaient monnaie courante. Des condamnations à mort ont été prononcées, y compris pour des infractions autres que des « homicides volontaires », à l’issue de procès d’une iniquité flagrante. Il a été procédé à des exécutions. L’impunité demeurait la règle pour les atteintes graves aux droits humains commises en 2024 et au cours des années précédentes. Des femmes et des filles, des membres de minorités religieuses et des personnes LGBTI ont fait l’objet de discriminations, de violences et de poursuites judiciaires pour avoir exercé leurs droits fondamentaux. Les autorités n’ont pas protégé les droits économiques et sociaux dans le contexte de la crise économique, ajusté comme il se devait les mesures de sécurité sociale, ni veillé à ce que les entreprises privées offrent une rémunération au moins égale au salaire minimum obligatoire. Le gouvernement a fait adopter une loi qui compromettait l’accessibilité des soins de santé et rendait ceux-ci moins abordables. Les expulsions forcées dans des quartiers informels se sont poursuivies. Des milliers de personnes réfugiées ou demandeuses d’asile, principalement originaires du Soudan, ont été détenues arbitrairement et expulsées.

CONTEXTE

Abdel Fattah al Sissi a prêté serment pour un troisième mandat présidentiel en avril, après avoir remporté une élection dont ses véritables adversaires avaient été écartés.

Suspendu en septembre 2023, le dialogue national entre le gouvernement et l’opposition a repris en février, mais des voix critiques déploraient l’absence de résultats tangibles et de mise en œuvre des réformes politiques ou relatives aux droits humains qui avaient été recommandées.

Face à l’aggravation de la crise économique et financière en Égypte, le Fonds monétaire international, l’UE, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont promis environ 57 milliards de dollars des États-Unis sous la forme d’investissements, de prêts et d’aide financière. L’UE a annoncé en mars un bouquet de financement de 7,4 milliards d’euros (8 milliards de dollars) en faveur de l’Égypte, non assorti de critères en matière de droits humains. En septembre, les États-Unis ont fourni 1,3 milliard de dollars d’aide, sans imposer non plus d’exigences du point de vue des droits fondamentaux. La crise du coût de la vie a persisté, l’inflation annuelle atteignant 24,9 % en septembre.

Le point de passage de Rafah, entre l’Égypte et Gaza, est resté fermé à partir du mois de mai après que les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien de la frontière et qu’un militaire égyptien a été tué par un tir dans la zone frontalière.

LIBERTÉ D'EXPRESSION, D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Les autorités ont continué de sanctionner pénalement l’expression de la dissidence et les réunions pacifiques, en visant des journalistes, des avocat·e·s, des manifestant·e·s, des dissident·e·s, des responsables politiques de l’opposition ainsi que des hommes et des femmes qui critiquaient le bilan des autorités en matière de droits humains et la gestion de la crise économique par les pouvoirs publics.

Entre janvier et mars, les forces de sécurité ont arrêté arbitrairement au moins quatre personnes qui s’étaient plaintes de la hausse des prix dans des commentaires sur les réseaux sociaux.

Le 31 juillet, les autorités ont arrêté arbitrairement le responsable politique d’opposition Yehia Hussein Abdelhady à la suite d’une publication sur Facebook dans laquelle il critiquait le président et l’armée et réclamait un changement de régime. Cet homme était toujours détenu arbitrairement à la fin de l’année pour des charges controuvées liées au terrorisme et à la publication de « fausses informations ».

La défenseure des droits des femmes et journaliste Rasha Azab, qui a vivement critiqué la réaction des pouvoirs publics égyptiens face à l’offensive israélienne contre Gaza, a fait l’objet de menaces et d’actes de harcèlement répétés après le début des hostilités, le 7 octobre 2023. Elle a notamment été suivie à plusieurs reprises par un groupe de trois hommes non identifiés et a reçu des avertissements par le truchement d’intermédiaires quant à sa possible arrestation par les services de sécurité.

Au moins 14 professionnels des médias étaient toujours emprisonnés en raison de leur travail, notamment pour avoir publié des contenus critiquant le gouvernement. Parmi eux figuraient Ashraf Omar, arrêté en juillet après avoir publié un dessin humoristique critiquant le projet des autorités de vendre des actifs publics, et Khaled Mamdouh, un journaliste du site internet Arabic Post. Ces deux hommes étaient toujours détenus arbitrairement pour des charges controuvées liées au terrorisme et à la publication de « fausses informations ».

Au moins 562 sites internet de défense des droits humains, d’information ou d’autres catégories restaient bloqués par les autorités, selon l’Association pour la liberté de pensée et d’expression, un groupe indépendant de défense des droits.

Les autorités ont procédé à des arrestations avant des manifestations antigouvernementales prévues, pour les empêcher de se tenir, et ont dispersé de force les quelques rassemblements pacifiques de faible ampleur qui ont eu lieu. En mars, les forces de sécurité sont intervenues par la force contre une petite manifestation à Alexandrie et ont arrêté arbitrairement des manifestant·e·s qui brandissaient des pancartes accusant le président, Abdel Fattah al Sissi, d’« affamer » les pauvres.

En juillet, les autorités ont arrêté arbitrairement des dizaines d’hommes, au moins sept femmes et un enfant en lien avec des appels en ligne à manifester et à évincer le gouvernement en raison de la hausse des prix. Des dizaines de personnes étaient toujours détenues pour avoir exprimé leur solidarité avec la population palestinienne de Gaza par des manifestations pacifiques, des commentaires en ligne, des pancartes ou des slogans sur les murs.

À l’issue de 13 années d’enquête, les autorités ont annoncé le 20 mars la clôture de l’affaire 173/2011, dite « des financements étrangers », dans le cadre de laquelle un gel des avoirs et des interdictions de voyager avaient été imposés à des membres du personnel d’ONG. Cependant, l’interdiction de voyager frappant l’avocate spécialiste des droits humains Hoda Abdelwahab n’a pas été levée.

DÉTENTIONS ARBITRAIRES ET PROCÈS INÉQUITABLES

Entre janvier et octobre, les autorités ont libéré au moins 934 personnes détenues pour des motifs politiques, souvent au-delà de la durée maximale de deux ans autorisée pour la détention provisoire. Dans le même temps, elles ont arrêté 1 594 personnes, dont cinq mineur·e·s, pour des motifs politiques, selon la Commission égyptienne des droits et des libertés, une ONG indépendante. Le service du procureur général de la sûreté de l’État et des juges ont renouvelé systématiquement le placement en détention provisoire de milliers de personnes sans leur permettre de contester véritablement la légalité de leur détention.

En février, un tribunal a condamné le responsable politique Ahmed Al Tantawy, son directeur de campagne et 21 de ses sympathisant·e·s à un an d’emprisonnement en lien avec sa tentative infructueuse de se présenter à l’élection présidentielle de 2023. Cette décision a été confirmée en appel en mai et par la Cour de cassation en décembre.

Le 26 juin, le tribunal pénal de la cour de sûreté de l’État, juridiction instaurée par la législation d’exception, a condamné le manifestant Mahmoud Hussein à trois ans d’emprisonnement parce qu’il avait porté un tee-shirt dénonçant la torture. Cet homme a été libéré en octobre car il avait déjà passé deux ans et 10 mois en détention provisoire.

Des débats parlementaires ont débuté en août sur un projet de Code de procédure pénale qui n’offrirait aucune protection contre le recours abusif à la détention provisoire prolongée et permettrait de graves violations du droit à un procès équitable, dont le droit à une défense adéquate.

Le militant de premier plan Alaa Abdel Fattah a achevé de purger en septembre la peine d’emprisonnement de cinq ans qui lui avait été injustement infligée, mais les autorités ne l’ont pas libéré.

En décembre, un tribunal militaire a condamné 62 habitants du gouvernorat du Sinaï-Nord à des peines allant de trois à 10 ans d’emprisonnement pour avoir endommagé des véhicules militaires et employé la force contre des fonctionnaires. Ce procès était lié au sit-in organisé en octobre 2023 par des habitant·e·s de la ville de Sheikh Zuwayed, qui avaient été dispersés de force par l’armée. Les habitant·e·s demandaient à regagner leurs logements, dont les autorités les avaient expulsés. Le 24 décembre, le président a gracié 54 des personnes condamnées.

DISPARITIONS FORCÉES, TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Les forces de sécurité, dont l’Agence de sécurité nationale, ont soumis des dizaines de personnes détenues pour des motifs politiques à des disparitions forcées pendant des périodes allant de quelques jours à plusieurs semaines.

La torture et d’autres formes de mauvais traitements étaient toujours couramment pratiquées dans les prisons, les postes de police et les centres gérés par l’Agence de sécurité nationale. En février, des membres de l’Agence de sécurité nationale ont roué de coups un homme et lui ont administré des décharges électriques tout en le soumettant à une disparition forcée pendant huit jours ; cet homme avait été arrêté pour avoir publié des vidéos critiquant le gouvernement.

Des personnes étaient toujours incarcérées dans des conditions constituant une violation de l’interdiction absolue de la torture et des autres mauvais traitements (privation délibérée de soins de santé et détention prolongée à l’isolement, entre autres). À la prison de Badr 1 et à celle de Dix-de-Ramadan, des dizaines de prisonniers ont entamé une grève de la faim début juin pour protester contre leurs conditions de détention cruelles et inhumaines, le manque d’accès à des soins de santé adéquats, la réduction du temps d’exercice en dehors des cellules et les restrictions des visites familiales. Les autorités pénitentiaires ont procédé au transfert d’un certain nombre de ces détenus dans d’autres établissements et en ont placé plusieurs autres à l’isolement, ce qui a contraint beaucoup des protestataires à mettre un terme à leur mouvement.

PEINE DE MORT

Des tribunaux pénaux, y compris ceux chargés des affaires de terrorisme, ont prononcé des condamnations à mort à l’issue de procès inéquitables. Certaines des infractions passibles de la peine capitale ne constituaient pas un « homicide volontaire », comme le trafic de drogue et le viol, ce qui allait à l’encontre du droit international et des normes connexes. Des exécutions ont eu lieu durant l’année.

IMPUNITÉ

L’impunité restait la règle pour les homicides illégaux, la torture, les disparitions forcées et d’autres atteintes graves aux droits humains commises en 2024 et au cours des années précédentes, notamment les homicides illégaux d’au moins 900 personnes le 14 août 2013, lorsque des sympathisant·e·s du président déchu Mohamed Morsi rassemblés dans des sit-in avaient été dispersés violemment.

Les autorités n’ont pas enquêté comme elles le devaient sur les causes et les circonstances de la mort d’au moins 43 personnes en détention, alors que des informations faisaient état d’actes de torture physique et d’autres mauvais traitements ou de privation de soins médicaux. Aucune enquête n’a été ouverte sur la mort d’Ibrahim al Ajeery, survenue le 1er janvier à la prison de Badr 3 après des années de négligence médicale, notamment la privation de médicaments contre le diabète.

Des procureurs, en particulier ceux du service du procureur général de la sûreté de l’État, ont rejeté ou ignoré la plupart des plaintes déposées pour torture policière. Dans une affaire connue d’Amnesty International qui faisait figure d’exception, un procureur d’une juridiction ordinaire a ouvert une enquête sur une plainte déposée par une manifestante qui affirmait avoir été frappée par un policier, mais aucune information sur l’état d’avancement des investigations n’avait été communiquée à la fin de l’année.

Le 23 mai, un groupe de femmes qui avaient été arrêtées dans une manifestation en faveur de la Palestine a annoncé avoir porté plainte auprès du procureur général, alléguant que certaines d’entre elles avaient été victimes d’agressions sexuelles lors de fouilles au corps, ainsi que de harcèlement pendant leur détention. Le ministère public a renvoyé la plainte au service du procureur général de la sûreté de l’État, qui n’a pas ouvert d’enquête.

DROITS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

La crise économique avait de lourdes conséquences sur les droits économiques et sociaux, notamment sur les droits à un niveau de vie suffisant et à la santé. L’État n’a pas respecté l’obligation lui incombant en vertu de la Constitution d’allouer au moins 3 % du PIB à la santé et 6 % à l’éducation.

Les hausses répétées des prix des combustibles se sont répercutées sur ceux des aliments et des services essentiels. En juin, les autorités ont quadruplé le prix subventionné du pain. Les pouvoirs publics n’ont pas atténué comme il se devait les effets de l’inflation sur les personnes en situation de pauvreté, les dépenses relatives à la protection sociale ne représentant que 0,2 % du PIB.

Le gouvernement a annoncé en septembre la fin des coupures d’électricité quotidiennes, mesure en place depuis juillet 2023.

En juin, le président, Abdel Fattah al Sissi, a promulgué une loi privatisant les soins de santé, qui mettait en péril l’accessibilité et la disponibilité des services de santé, en particulier pour celles et ceux qui n’avaient pas d’assurance maladie ou vivaient dans la pauvreté.

DROITS DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS

En février, le président, Abdel Fattah al Sissi, a fait passer le salaire minimum mensuel dans le secteur public de 4 000 livres égyptiennes (environ 82,5 dollars des États-Unis) à 6 000 (environ 125 dollars). En avril, le gouvernement a également porté le salaire minimum dans le secteur privé à 6 000 livres égyptiennes, mais n’a pris aucune mesure à l’encontre des entreprises qui accordaient une rémunération inférieure.

En février, des fonctionnaires de l’Agence de sécurité nationale ont arrêté deux employés de Ghazl al Mahalla, une entreprise publique, après avoir interrogé des dizaines de salarié·e·s qui avaient observé une grève pour réclamer le salaire minimum. Ces hommes ont obtenu une libération provisoire en mai, dans l’attente des résultats de l’enquête du service du procureur général de la sûreté de l’État sur les charges d’« adhésion à un groupe terroriste » et de publication de « fausses informations ».

Le 17 août, les salarié·e·s d’une autre entreprise publique, Samanoud Weaving and Textile, ont organisé une grève pour réclamer le salaire minimum. Le 25 août, les autorités ont arrêté cinq hommes et quatre femmes et ouvert une enquête contre eux sur la base de diverses charges, notamment l’« incitation au blocage intentionnel de moyens de production ». Ces personnes ont été libérées dans les deux semaines, selon l’Initiative égyptienne pour les droits de la personne (EIPR, une ONG indépendante).

Afin de remédier à la pénurie persistante d’enseignant·e·s, le ministère de l’Éducation a annoncé en septembre qu’il allait embaucher 50 000 enseignant·e·s sous contrat horaire à durée déterminée, moyennant une rémunération mensuelle bien inférieure au salaire minimum.

Les tribunaux administratifs égyptiens ont commencé en avril à examiner les appels interjetés par l’EIPR au nom des enseignant·e·s n’ayant pas été nommés dans des écoles publiques pour des motifs tels que la grossesse ou le « surpoids ».

DROITS EN MATIÈRE DE LOGEMENT

Sans avoir consulté les habitant·e·s au préalable ni leur avoir proposé d’indemnisation, les autorités ont commencé en février à procéder à des expulsions forcées et des démolitions de logements dans le quartier d’El Gamil, à Port-Saïd, où vivaient quelque 2 500 familles. Pour justifier ces démolitions, elles ont invoqué des projets visant à développer cette zone. Un homme a perdu la vie au cours de ces opérations, mais les autorités n’ont pas mené d’enquête impartiale et indépendante sur les causes et les circonstances de sa mort.

L’État a annoncé en juillet un partenariat entre des investisseurs émiriens et locaux dans le cadre d’un projet immobilier à Al Warraq, une île située sur le Nil. Le 26 septembre, la police a tiré des balles en caoutchouc et du gaz lacrymogène pour disperser des habitant·e·s qui protestaient contre des violences policières. Au moins sept d’entre eux ont été blessés, selon le média indépendant Mada Masr. En octobre, des habitant·e·s de l’île ont réclamé publiquement une indemnisation suffisante. Les forces de sécurité ont bouclé l’île, empêchant les habitant·e·s de faire venir des matériaux de construction pour bâtir de nouveaux logements ou agrandir les leurs. Les autorités maintenaient fermé l’unique centre de santé de l’île depuis 2021, restreignant l’accès de la population locale aux soins.

En février, les Émirats arabes unis et l’Égypte ont signé un accord d’un montant de 35 milliards de dollars pour l’aménagement d’environ 16 430 hectares à Ras al Hekma, un village situé sur la côte méditerranéenne de l’Égypte. Les habitant·e·s ont ignoré les avis d’expulsion des autorités car ils estimaient que l’indemnisation offerte par l’État était insuffisante. Les autorités ont contraint les médias au silence sur cette question. Le 10 mars, elles ont arrêté Rana Mamdouh, journaliste à Mada Masr, alors qu’elle était en déplacement pour couvrir la situation à Ras al Hekma. Cette femme a été libérée sous caution plus tard dans la journée, après avoir été interrogée par le service du procureur général de la sûreté de l’État au sujet de plaintes selon lesquelles elle aurait incité des habitant·e·s au terrorisme.

En avril, des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des accrochages entre des habitant·e·s et des membres des forces de sécurité qui avaient tenté de pénétrer dans des habitations pour inventorier les biens s’y trouvant. Le 16 décembre, le Premier ministre, Moustafa Madbouly, a annoncé que l’État avait versé 5,5 milliards de livres égyptiennes (environ 108 154 millions de dollars) aux habitant·e·s qui devaient quitter leur logement. Il n’a pas précisé si cette somme englobait toutes les personnes concernées.

DISCRIMINATION

Femmes

Les femmes faisaient toujours l’objet de discriminations en droit et dans la pratique, notamment concernant le mariage, le divorce, la garde des enfants et les fonctions politiques. Attendue de longue date, la modification de la Loi sur le statut personnel était dans une impasse et l’absence de consultation véritable des défenseur·e·s des droits des femmes suscitait des inquiétudes.

En octobre, la Direction générale des passeports, de l’immigration et de la nationalité a établi des directives discriminatoires exigeant que les femmes appartenant aux « classes inférieures » obtiennent la permission des autorités pour se rendre en Arabie saoudite. Selon l’EIPR, les communications envoyées par le ministère de l’Intérieur aux agences de voyage indiquaient que les femmes des « classes inférieures » étaient les femmes au foyer, les chômeuses et les travailleuses occupant des emplois peu qualifiés.

Au moins quatre femmes ont été arrêtées arbitrairement et poursuivies en justice pour des charges floues en rapport avec la morale parce qu’elles avaient publié certains contenus sur TikTok.

Personnes LGBTI

Les autorités ont, cette année encore, harcelé et poursuivi en justice des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre réelle ou supposée.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Dans sa deuxième CDN, publiée en juin 2023, l’Égypte s’est engagée à réduire les émissions de carbone en faisant en sorte que 42 % de son électricité provienne de sources d’énergie renouvelable d’ici à 2030. Cependant, l’État a continué à délivrer de nouvelles licences de prospection pour le gaz, ce qui était susceptible de compromettre ses efforts de décarbonation.

LIBERTÉ DE RELIGION ET DE CONVICTION

Le droit de construire ou de réparer des églises continuait de faire l’objet de restrictions en vertu d’une loi de 2016 instaurant l’obligation d’obtenir une autorisation des services de sécurité et d’autres organes de l’État. En octobre, un porte-parole de l’État a déclaré que les pouvoirs publics avaient approuvé la légalisation de 3 453 églises sur les 5 540 demandes déposées depuis la promulgation de la loi.

Des attaques sectaires ont eu lieu en avril contre la communauté chrétienne copte de deux villages du gouvernorat d’El Minya, sans que les forces de sécurité fassent le nécessaire pour protéger les personnes visées. Ces attaques faisaient suite à des informations sur la création de lieux de culte coptes dans les deux localités et étaient le fait d’habitant·e·s musulmans, qui ont défilé, entonné des slogans antichrétiens et endommagé les logements des coptes.

En juillet, un tribunal militaire a condamné un conscrit copte à trois ans d’emprisonnement pour des messages électroniques qu’il avait envoyés à un musulman et qui étaient jugés « offensants à l’égard de l’islam », selon l’EIPR.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Les forces de sécurité égyptiennes, notamment les gardes-frontières financés par l’UE, ont procédé à des arrestations collectives de milliers de personnes réfugiées du Soudan pour entrée ou séjour illégal en Égypte. Elles les ont détenues dans des conditions sordides, avant de les renvoyer de force au Soudan sans leur permettre d’avoir accès aux procédures d’asile (voir Soudan). Les autorités ont aussi continué à arrêter des personnes demandeuses d’asile ou réfugiées d’autres pays, dont l’Érythrée, en raison de leur situation au regard de la législation relative à l’immigration.

En septembre, l’État a prolongé d’un an le délai accordé à toutes les personnes étrangères pour régulariser leur situation moyennant le parrainage d’une personne de nationalité égyptienne et des frais de 1 000 dollars des États-Unis.

Le 16 décembre, le président, Abdel Fattah al Sissi, a ratifié la première loi du pays relative à l’asile, qui n’interdisait pas le « refoulement », ne prévoyait pas de garantie de procédure et autorisait la détention arbitraire de personnes réfugiées ou demandeuses d’asile.

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