Le 17 octobre 2015, Josina Machel a été agressée par son partenaire, Rofino Licuco, et souffre depuis d’une perte de la vision de l’œil droit.
Le 17 octobre 2015, Josina Machel a été violemment agressée par son partenaire au moment des faits, Rofino Licuco, et souffre depuis d’une perte de la vision de l’œil droit. En février 2017, son agresseur a été déclaré coupable de graves violences physiques et psychologiques au titre des articles 246(b), 171(e) et 247(i) du Code pénal mozambicain par le tribunal de district de Ka-Pfumu. Il a été condamné à trois ans et quatre mois de prison, peine assortie d’un sursis à condition qu’il verse 2 800 000 dollars des États-Unis de dommages et intérêts.
Le 12 juin 2020, l’affaire a été jugée en appel devant la deuxième chambre pénale du tribunal judiciaire de Maputo, la capitale du Mozambique, qui a annulé la déclaration de culpabilité au motif que les preuves étaient insuffisantes. Les magistrats ont estimé que les éléments médicaux attestant de l’agression n’étaient pas crédibles et que les SMS envoyés par Rofino après celle-ci témoignaient davantage de la « préoccupation » d’un ami que d’une reconnaissance de culpabilité. Ils ont également souligné l’absence de témoins pour corroborer les faits de violence physique et psychologique ajoutant que, à la lumière des éléments médicaux produits, il ne pouvait être exclu que la blessure de Josina fasse suite à une « simple chute » ou à un « objet contendant ». Le 5 août 2020, Josina a saisi la Cour suprême du Mozambique, qui devrait rendre une décision très prochainement.
Après son agression en octobre 2015, Josina a été la cible d’une campagne d’intimidation et de harcèlement destinée à la dissuader de porter plainte contre Rofino. En juillet 2016, une vitre de la voiture d’une de ses amies a été brisée alors qu’elles se trouvaient dans un restaurant dans le centre de Maputo, et une lettre de menace a été déposée dans le véhicule à l’intention de Josina. La dernière manœuvre d’intimidation la visant remonte au 12 août 2020 : Josina a reçu une lettre de la part des avocats de Rofino, la mettant en garde et lui enjoignant de ne plus mentionner leur client, ni utiliser son nom dans des documents électroniques ou papier, des enregistrements ou du matériel de campagne.
Pourquoi maintenant ?
Josina Machel est une défenseure des droits humains bien connue : elle est la fille de Graça Machel, célèbre militante des droits des femmes et des enfants, et de Samora Machel, premier président du Mozambique, et la belle-fille de Nelson Mandela. La décision du 12 juin, par laquelle Rofino Licuco a été jugé non coupable des violences liées au genre dont a été victime Josina, porte un coup dur aux femmes et à toutes les personnes qui luttent contre ce type de violences. Cette affaire indique clairement que même les femmes les plus puissantes ne sont pas protégées contre les violences mais que, a contrario, le système judiciaire aggrave encore les atteintes aux droits humains contre les victimes de violences liées au genre, ainsi que leurs souffrances.
Le 5 août, Josina a saisi la Cour suprême du jugement rendu le 12 juin ; celle-ci devrait se prononcer dans les prochaines semaines. Par le biais d’un travail de pression accrue sur les autorités mozambicaines, nous comptons obtenir justice pour Josina et amener Rofino à rendre des comptes. L’inclusion de ce cas dans les Appels mondiaux contribuera à attirer l’attention sur le caractère profondément injuste de la décision rendue par la juridiction d’appel du Mozambique, qui a annulé la déclaration de culpabilité de Rofino. Nous craignons qu’en l’absence de ces pressions accrues, une issue favorable ne soit pas garantie dans cette affaire devant la Cour suprême. Rofino est issu d’une ancienne famille aisée du Mozambique, qui jouit d’une influence politique sur le pouvoir judiciaire. Ce dernier n’est pas indépendant, et une action ciblant la ministre de la Justice garantira le respect des obligations nationales et internationales en matière d’équité des procès. Dans de précédentes affaires, le gouvernement mozambicain s’est révélé sensible à l’opinion de la communauté internationale. En conséquence, le but de notre action est de veiller à l’équité de la procédure judiciaire, afin que soient garantis la justice, l’obligation de rendre des comptes et l’accès de Josina à tous les moyens de recours utiles.