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L’UE doit reconnaître la réalité du crime d’apartheid en Israël

Début mars, une délégation de diplomates européens s’est rendue à Huwara et Zatara, deux villes palestiniennes du gouvernorat de Naplouse, où des colons israéliens se sont livrés à de violentes attaques.

Les violences à Huwara et alentour ont choqué par leur ampleur et leur intensité, des centaines de colons israéliens y prenant part. Toutefois, pour les Palestinien·ne·s de Cisjordanie occupée, ces agressions soutenues par l’État font depuis longtemps partie de la vie quotidienne. L’absence quasi-totale d’obligation de rendre des comptes, la participation étayée de soldats israéliens à certains actes de violence et le fait même que les colonies continuent de s’étendre au mépris du droit international sont autant de manifestations du système d’apartheid imposé aux Palestinien·ne·s.

Au lendemain de leur visite, les diplomates européens ont condamné les attaques visant des Palestinien·ne·s à Huwara, ainsi que l’homicide de deux colons israéliens par un tireur palestinien ce même jour, et ont souligné la nécessité de « protéger tous les civils et de garantir l’obligation de rendre des comptes ».

Ces objectifs, certes louables, ne pourront être atteints tant que l’apartheid ne sera pas démantelé. L’Union européenne doit reconnaître la réalité du système qu’Israël impose aux Palestinien·ne·s ; tant qu’elle s’y refuse, ces déclarations resteront au stade de paroles en l’air.

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale définit l’apartheid comme un crime contre l’humanité, caractérisé par des « actes inhumains », comme le meurtre, la torture et le transfert forcé, commis dans l’intention de maintenir un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe racial.

Dans un rapport publié en février 2022, Amnesty International a conclu que le traitement réservé aux Palestiniennes et Palestiniens par les autorités israéliennes s’apparente à un crime d’apartheid au regard de cette définition.

Partout où les Palestinien·ne·s vivent sous le contrôle effectif d’Israël – que ce soit en Israël, dans les territoires palestiniens occupés ou dans d’autres pays en tant que réfugié·e·s – ils sont soumis à une oppression et à une domination systématiques. Le rapport d’Amnesty International apporte des preuves détaillées de cette situation, en montrant que les lois et les politiques d’Israël sont spécifiquement conçues pour les priver de leurs droits, de leurs terres et de leurs ressources.

Elle n’est pas la seule à tirer une telle conclusion : des organisations palestiniennes, israéliennes et internationales, deux rapporteurs spéciaux de l’ONU, le gouvernement sud-africain et plusieurs anciens responsables israéliens disent la même chose. Bien qu’elle condamne les outils de l’apartheid – meurtres, expansion des colonies, démolitions de bâtiments et suppression de la liberté d’expression des Palestiniens – l’UE refuse encore de reconnaître ce système. En janvier dernier, la Commission européenne a affirmé catégoriquement qu’il n’est « pas approprié » d’utiliser le terme d’apartheid à propos de l’État d’Israël. Cette réponse écrite, apportée à une question soumise par des parlementaires européens, a été donnée par le haut représentant Joseph Borrell au nom de la Commission.

Fruit de longues négociations entre les commissaires, cette réponse commence par indiquer que la Commission accorde « l’attention voulue » au rapport d’Amnesty, avant de rejeter la conclusion d’apartheid en laissant entendre que cette critique à l’égard d’Israël est antisémite.

On ignore encore précisément quels aspects des éléments de preuves ou des analyses d’Amnesty sont contestés par la Commission, car la réponse ne fait pas écho aux questions de fond mises en avant dans le rapport, préférant un sophisme, en citant la définition opérationnelle juridiquement non contraignante de l’antisémitisme élaborée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) comme fondement de sa position.

La Commission a maintes fois souligné l’importance du droit international et l’a fait tout en promouvant le Statut de Rome. Pourtant, elle omet de mentionner dans sa réponse la définition de l’apartheid inscrite dans ce traité.

Douze organisations israéliennes de défense des droits humains ont depuis exprimé leur « vive préoccupation » face aux volontés d’associer le rapport d’Amnesty à l’antisémitisme, et ont dénoncé le fait que la Commission ne reconnaisse pas l’apartheid en Israël. Elles font valoir que l’instrumentalisation de l’antisémitisme pour faire taire les critiques légitimes compromet les initiatives de lutte contre la montée de l’antisémitisme. Ceux qui suivent de près ce dossier n’ignorent pas la diversité des opinions et des positions des 27 commissaires et pays membres de l’UE. Josep Borrell, par exemple, est très conscient de la souffrance de la population palestinienne. Dans un récent discours, au sujet des crimes contre l’humanité, il a fait spécifiquement référence aux homicides de Palestinien·ne·s imputables aux forces de sécurité israéliennes, soulignant que « nous devons nous souvenir de ce qui se passe en Palestine ».

En revanche, Margaritis Schinas, commissaire chargé de la Promotion du mode de vie européen, et Oliver Várheliy, commissaire à l’Élargissement et à la Politique européenne de voisinage, ont tous deux assimilé la critique d’Israël à de l’antisémitisme. Margaritis Schinas, chargé de diriger la lutte de l’UE contre l’antisémitisme, est allé encore plus loin, appuyant et réclamant l’application de la définition controversée de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA). La stratégie de l’UE en matière de lutte contre l’antisémitisme, élaborée sous sa supervision, a fait l’objet de critiques portées par 54 universitaires travaillant sur ce sujet, car elle « ignore les inquiétudes croissantes concernant les lacunes et l’instrumentalisation de la définition de l’IHRA ».

L’antisémitisme est un problème grave, en Europe et ailleurs dans le monde, et l’UE doit prendre au sérieux la lutte contre ce fléau. Toutefois, les critiques formulées à l’encontre d’Israël sur la base des normes internationales reconnues en matière de droits humains, qui obligent tous les pays à rendre des comptes, ne peuvent être rejetées en invoquant l’emploi général du terme, ou une définition non contraignante d’un point de vue juridique.

Parallèlement, du fait des actions du gouvernement israélien, il est de plus en plus difficile d’ignorer cette réalité. En effet, il s’est récemment engagé à étendre les colonies et à restreindre la visibilité du drapeau palestinien. Il a apporté des modifications discriminatoires aux lois sur la nationalité et le statut de résident. Et, plus inquiétant encore, il a récemment conféré des pouvoirs très étendus en Cisjordanie occupée au ministre des Finances Bezalel Smotrich, qui a essuyé le feu des critiques lorsqu’il a déclaré, en réaction aux violences commises par des colons, que c’est l’État israélien qui devrait « anéantir » la ville d’Huwara. Tous ces éléments ont suscité une rare déclaration de profonde préoccupation au nom de l’ensemble des 27 États membres, le 8 mars.

L’UE ne s’engage pas à respecter ses principes et ne s’intéresse guère aux études et recherches juridiques, ce qui encourage Israël à commettre de nouveaux crimes contre le peuple palestinien, mais nuit également à la lutte contre l’antisémitisme.

Si la Commission souhaite réellement que la paix et la justice progressent, elle doit reconnaître que les autorités israéliennes commettent le crime d’apartheid et se servir de tous les outils politiques et diplomatiques dont elle dispose pour faire pression en vue d’y mettre un terme.

Eve Geddie est directrice du Bureau d’Amnesty International auprès des institutions européennes, qui supervise le travail d’Amnesty auprès de l’UE et du Conseil de l’Europe.

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