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Libye. Un an après, on ignore toujours ce qu’il est advenu d’une femme politique enlevée, dans un contexte de disparitions forcées

L’Armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée doit révéler le sort réservé à Siham Sergiwa, ainsi que le lieu où se trouve cette femme politique libyenne et défenseure des droits des femmes, violemment enlevée chez elle il y a un an jour pour jour, a déclaré Amnesty International. Le cas de Siham Sergiwa rappelle avec force que toutes les parties à ce conflit, y compris les forces gouvernementales, les autorités de facto, leurs milices et groupes armés affiliés, se livrent à des enlèvements, des disparitions forcées et des privations illégales de liberté.

Le 17 juillet 2019, des dizaines d’hommes armés portant des masques et en tenue militaire ont pris d’assaut le domicile de Siham Sergiwa à Benghazi, dans l’Est de la Libye, contrôlé de facto par l’ANL. Ils ont battu violemment son fils de 16 ans et ont tiré une balle dans la jambe de son époux, avant de l’emmener de force. La nuit précédant son enlèvement, Siham Sergiwa avait publiquement réclamé la fin de l’offensive menée contre Tripoli par l’ANL.

« Personne n’a eu de nouvelles de Siham Sergiwa depuis la nuit terrifiante où elle a été emmenée loin de sa famille. Le sort qui lui a été réservé est un rappel brutal des conséquences auxquelles s’exposent celles et ceux qui émettent des critiques pacifiques en Libye aujourd’hui, a déclaré Diana Eltahawy, directrice adjointe pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International.

« Nous engageons l’ANL à apaiser l’angoisse de la famille de Siham Sergiwa et à dévoiler immédiatement ce qui lui est arrivé et le lieu où elle se trouve. Les enlèvements et les disparitions forcées sont devenus la marque de fabrique du conflit en Libye, les civil·e·s étant à la merci des milices et des groupes armés. »

D’après des témoins de l’enlèvement de Siham Sergiwa et des photos examinées par Amnesty International, un graffiti sur le mur de sa maison démontre la responsabilité d’Awliya al Dam, une brigade armée affiliée à l’ANL. Ce graffiti disait : « Awliya al Dam » (vengeurs du sang) et « L’armée est une ligne rouge ». En outre, la présence de plusieurs postes de contrôle de la police militaire autour de la maison de Siham Sergiwa et les récits de témoins selon lesquels les assaillants sont arrivés à bord de véhicules portant l’inscription « Police militaire » désignent l’ANL comme complice ou directement responsable. Si l’ANL nie toute responsabilité, elle n’a pas mené d’enquête exhaustive, impartiale et indépendante sur l’enlèvement de Siham Sergiwa et n’a pas assuré sa libération.

Depuis que l’ANL a pris le contrôle de la majeure partie de l’Est de la Libye en 2014, Amnesty International a recensé de multiples enlèvements d’opposant·e·s réels ou présumés. Certains finissent en détention arbitraire prolongée, tandis que le sort réservé à d’autres demeure inconnu, avivant les craintes pour leur sécurité, et que des informations font état de morts en détention.

Dans la ville d’Ajdabiyah, contrôlée par l’ALN et située à environ 150 km à l’ouest de Benghazi, Amnesty International a recensé l’enlèvement d’au moins 11 personnes de la tribu Magharba, en raison de leurs liens présumés avec Ibrahim Jadran, ancien chef de la Garde des installations pétrolières, un groupe armé en désaccord avec l’ALN. D’anciens détenus ont affirmé qu’ils ont été torturés, soumis à des conditions inhumaines et privés de tout contact avec le monde extérieur durant leur détention dans les prisons de Gernada et Al Kuwafiya contrôlées par des groupes armés alliés à l’ALN. Au moins quatre membres de la tribu Magharba ont « disparu » sans laisser de traces après avoir été embarqués entre avril et mai 2020 par des hommes armés appartenant à l’Agence de sûreté intérieure-Ajdabiyah, un groupe allié à l’ALN.

Des familles en détresse qui recherchent leurs proches dans les prisons et d’autres lieux de détention et d’anciens détenus ont exprimé leur frustration face à l’absence de recours en justice, répétant que « Dieu est suffisant pour nous et Il est le meilleur pour s’occuper de nos affaires ».

« Aucune autorité n’est au-dessus de celle de Radaa »

Dans l’Ouest de la Libye, région que contrôle le gouvernement d'union nationale (GUN) reconnu par l’ONU, plusieurs milices affiliées au ministère de l’Intérieur ont soumis des personnes à une disparition forcée en raison de leurs affiliations réelles ou présumées ou de leurs critiques. Ces milices englobent les tristement célèbres forces Radaa, la Brigade des révolutionnaires de Tripoli, la Brigade de Bab Tajoura et la Brigade d'Abou Salim. Certaines personnes « disparaissent » pendant des mois, voire des années, avant d’être libérées ou autorisées à contacter leur famille pour la première fois.

Les forces Radaa s’emparent de personnes uniquement parce qu’elles sont nées dans l’Est. Une fois, un homme dont le passeport indiquait qu’il était de Benghazi a été arrêté à l’aéroport de Mitiga, contrôlé par les forces Radaa et conduit en prison, où il a été torturé et soumis à une disparition forcée pendant près de quatre ans. Il a été libéré mi-2019 sans avoir jamais comparu devant une autorité judiciaire.

D’après d’anciens détenus, des familles de détenus et des défenseur·e·s des droits humains, les forces Radaa répondent constamment aux familles en détresse qu’elles ignorent où se trouvent les victimes.

Les forces Radaa sont payées par le gouvernement et sont officiellement placées sous la supervision du ministère de l’Intérieur.

Tout comme dans l’Est du pays, les proches des victimes de disparitions forcées et de détentions arbitraires déplorent n’avoir que peu d’options pour trouver des réponses ou obtenir la libération de leurs proches. Selon d’anciens détenu·e·s, des familles, des défenseur·e·s des droits humains et de précédentes recherches, les forces Radaa tiennent rarement compte des demandes du procureur s’agissant de déférer les détenus devant les autorités judiciaires ou de les libérer. Le 29 juin 2020, les familles de plusieurs personnes détenues arbitrairement à la prison de Mitiga ont organisé une manifestation. Le lendemain, le ministre de l’Intérieur a rencontré le leader des forces Radaa et a salué les efforts de ce groupe pour « lutter contre les menaces qui planent sur l’État et les citoyens ». Les familles ont expliqué qu’elles sont à la merci des milices et qu’« aucune autorité n’est au-dessus de celle de Radaa ».

Amnesty International demande à toutes les parties au conflit de mettre fin sans attendre à la vague de disparitions forcées, d’enlèvements, de détentions arbitraires et autres pratiques illégales similaires. Elles doivent ordonner aux milices et groupes armés affiliés de dévoiler le sort réservé à toutes les victimes de disparitions forcées et de pratiques analogues, ainsi que le lieu où elles se trouvent, et garantir la libération de toutes les personnes maintenues en détention arbitraire. Les auteurs présumés d’infractions pénales doivent être détenus uniquement dans le respect de la loi et dans des conditions humaines, sous protection de la loi. Toute personne inculpée d’une infraction pénale prévue par la loi doit être poursuivie dans le cadre de procédures respectant les normes internationales d’équité.

« Le cas de Siham Sergiwa montre que personne n’est en sécurité en Libye, pas même une femme politique de renom. Au lieu d’encenser des milices puissantes qui commettent de graves violations des droits humains et d’autres crimes en toute impunité, les belligérants qui se livrent à des disparitions forcées et des pratiques analogues doivent répondre aux demandes des familles en détresse et révéler le lieu où se trouvent toutes les personnes disparues et portées disparues et les protéger contre tout autre préjudice », a déclaré Diana Eltahawy.

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