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© Jorge Adorno/Reuters

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Paraguay

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Paraguay en 2023.

La Cour interaméricaine des droits de l’homme a condamné l’État pour des actes de torture. Des cas d’usage illégal de la force, de détention arbitraire et de criminalisation de mouvements sociaux ont été signalés après les élections générales. Des communautés paysannes et indigènes ont subi des expulsions forcées et ont été exposées à des substances toxiques. Le pouvoir judiciaire a rejeté les demandes de changement de nom de six personnes transgenres. Les violences sexuelles perpétrées contre des enfants et des adolescent·e·s et les grossesses forcées de mineures demeuraient très préoccupantes, de même que les violences faites aux femmes.

CONTEXTE

Le Paraguay et le Brésil ont entamé un processus de révision du traité d’Itaipú, 50 ans après sa signature. Les négociations concernant la vente de l’énergie produite par les installations hydroélectriques sur le fleuve Paraná n’incluaient pas de mécanismes participatifs.

En avril, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a considéré que l’État s’était conformé à sa décision dans l’affaire Ríos Ávalos et autres c. Paraguay, qui concernait des violations de l’indépendance judiciaire liées à la révocation de deux juges de la Cour suprême en 2003.

LIBERTÉ DE RÉUNION ET D’EXPRESSION

Cette année encore, la liberté d’expression et de réunion a subi des restrictions. Selon le Mécanisme national de prévention de la torture, des personnes ayant participé aux manifestations qui ont suivi l’élection en mai auraient été victimes de détention arbitraire, d’un usage illégal de la force et d’actes de torture. En juin, un manifestant de 22 ans, Rigoberto Luis Duarte Ríos, est mort d’une balle dans la tête.

En février, Alexander Álvarez Ramírez, producteur et animateur d’un programme radiophonique de la ville de Pedro Juan Caballero, a été tué. Sa mort serait liée à son travail en tant que diffuseur, mais aucune information relative à l’enquête n’avait été révélée à la fin de l’année.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

L’impunité persistait pour des actes de torture et d’autres mauvais traitements. En mai, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a condamné l’État pour la détention arbitraire et la torture subies par Jorge Luis López Sosa en 2000. Elle a ordonné le versement d’indemnités financières et la mise en œuvre d’un programme de formation sur l’interdiction et la prévention de la torture et sur les enquêtes en la matière.

Miguel Ángel Correa, victime de détention arbitraire et de torture dans le contexte du massacre de Curuguaty – une opération d’expulsion forcée qui s’est déroulée en 2012 et s’est soldée par une fusillade qui a fait 17 morts, dont six policiers – a soumis une communication au Comité contre la torture [ONU], dans laquelle il dénonçait l’État paraguayen pour l’inaction du ministère public, qui n’a pas inculpé les responsables présumés de ces actes.

Le parquet général n’a fait état d’aucune avancée dans l’identification des responsables d’actes de torture et d’autres mauvais traitements infligés à 35 personnes sur la base navale de Ciudad del Este en 2020.

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Les ressources insuffisantes du système de santé publique ont donné lieu à des plaintes et des actions en justice répétées de la part de patient·e·s, notamment en oncologie.

Aucun progrès n’a été réalisé dans la mise en place d’une commission chargée d’examiner les moyens juridiques qui permettraient la restitution de plus de huit millions d’hectares de terres destinés à la réforme agraire et indûment attribués à des sympathisant·e·s du régime pendant la dictature militaire. La création de cette commission était pourtant prévue par la loi. La réforme agraire accorderait à des milliers de personnes le droit à un niveau de vie suffisant, et notamment à une nourriture en quantité suffisante.

Les expulsions forcées de populations paysannes et indigènes ont continué. Le Comité de coordination des droits humains du Paraguay a signalé que la communauté indigène 15 de Enero du peuple avá guaraní, installée dans le département de Caaguazú, avait été expulsée. En conséquence, 20 familles, dont 41 enfants, se retrouvaient sans domicile au bord de la route, où elles étaient exposées à d’autres violations des droits humains.

En juin, une loi a été adoptée autorisant le transfert de terres de Marina Kue aux paysans et paysannes qui les occupaient et qui en revendiquaient la propriété depuis des décennies. Malgré cette restitution, 11 ans après le massacre de Curuguaty en 2012, les familles des victimes attendaient toujours que justice leur soit rendue (voir Torture et autres mauvais traitements).

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

La mise en œuvre du Plan national pour les peuples indigènes a été entravée par un manque persistant de financement.

La communauté tekoha sauce du peuple avá guaraní paranaense attendait toujours la restitution de ses terres ancestrales, saisies il y a plusieurs années par l’entreprise d’énergie hydroélectrique Itaipú Binacional en violation des droits des peuples autochtones. L’entreprise a fait appel d’une décision de justice invalidant une ordonnance d’expulsion de la communauté d’une autre partie de ses terres ancestrales.

En juillet, des groupes armés non étatiques ont envahi le territoire Tekoha Guasu Yvy Pyte, considéré comme sacré par le peuple indigène pai tavyterã, et s’y sont installés de force. Des responsables indigènes ont dénoncé des faits d’exploitation forestière illégale et des menaces de mort en janvier.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXES

La discrimination et la profusion d’appels à la haine contre les personnes LGBTI ont perduré en toute impunité. Le pouvoir judiciaire a rejeté les plaintes de cinq personnes transgenres qui réclamaient la reconnaissance juridique de leur nom correspondant à leur identité de genre. En septembre, une cour d’appel a annulé une décision qui reconnaissait le changement d’identité de Mariana Sepúlveda, une femme transgenre qui avait entrepris une action en justice pour obtenir cette reconnaissance en 2016.

Aucune avancée n’a été enregistrée dans l’enquête pénale concernant les agressions physiques subies en 2019 par des personnes LGBTI pendant une marche des fiertés à Hernandarias. La Cour suprême n’avait toujours pas statué sur l’action en inconstitutionnalité déposée en 2019 par Amnesty International et l’organisation Diversxs Alto Paraná contre l’interdiction de ce défilé.

DROITS DES ENFANTS

Les droits des enfants ont cette année encore été bafoués. Le ministère de la Santé publique et du Bien-être social a enregistré 8 900 naissances chez des adolescentes âgées de 15 à 19 ans, dont 593 étaient indigènes, et 326 naissances chez des fillettes de 10 à 14 ans, dont 85 étaient indigènes.

DROITS DES FEMMES

Le ministère des Femmes a recensé 45 féminicides et 42 tentatives de féminicides en 2023. Dans certains cas, les victimes avaient déjà signalé leurs agresseurs à la police et des mesures de protection judiciaire étaient en place.

Le Congrès a examiné un projet de loi visant à supprimer la prise en compte d’une perspective de genre dans les politiques publiques, y compris dans le domaine éducatif.

En septembre, le Sénat a approuvé une proposition de loi déclarant un état d’urgence sociale face aux violences contre les femmes, les filles et les adolescentes. Cette proposition de loi établissait une série de mesures applicables dans les domaines de l’éducation, de la communication institutionnelle et de la formation des fonctionnaires, dans le but de promouvoir un changement des modèles socioculturels alimentant les inégalités de genre. Elle prévoyait que ces mesures restent en vigueur pendant cinq ans, mais n’allouait aucun budget pour les financer.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Un rapporteur spécial des Nations unies a fait remarquer que les populations paysannes et indigènes étaient exposées à des niveaux alarmants de substances toxiques en raison d’une utilisation non contrôlée d’agents agrochimiques. Il a également identifié d’importants obstacles à l’accès à la justice environnementale.

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