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© Jorge Adorno/Reuters

© Jorge Adorno/Reuters

Paraguay

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Paraguay en 2024.

Le déficit de financement des soins de santé publics a entraîné des retards, des pénuries et des dépenses pour les patient·e·s et leur famille. La liberté d’association et d’expression des organisations de la société civile et des médias était menacée par un nouveau texte législatif et une commission d’enquête parlementaire. Dix procès relatifs à la reconnaissance par l’état civil du nom de personnes transgenres étaient encore en attente d’une décision. Les violences fondées sur le genre étaient extrêmement préoccupantes. Cette année encore, des enfants ont été victimes de violences sexuelles et de maltraitance. Le nombre élevé de grossesses adolescentes demeurait alarmant. Les catastrophes climatiques et environnementales, ainsi que les expulsions forcées, touchaient de manière disproportionnée les peuples autochtones.

CONTEXTE

La hausse soudaine de la criminalité organisée a suscité de vives inquiétudes à l’échelle nationale et internationale, entraînant le déploiement des forces militaires dans quatre départements afin d’assurer la sécurité intérieure.

Les inégalités persistaient. Selon l’Institut national de la statistique, 17,2 % de la population était en proie à une pauvreté multidimensionnelle, qui avait des répercussions sur le droit au travail, à la sécurité sociale, à un logement convenable, à la santé, à un environnement sain et à l’éducation des personnes concernées. En outre, 22,7 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté monétaire et 4,9 % sous le seuil d’extrême pauvreté, une situation portant atteinte au droit à l’alimentation et à un niveau de vie suffisant. En 2024, les 10 % les plus riches de la population gagnaient près de 20 fois plus que les 10 % les plus pauvres.

En février, Eusebio Torres Romero, un ancien policier, a été condamné à 30 ans d’emprisonnement pour des actes de torture commis en 1976, sous le régime militaire.

Des organisations de la société civile ont dénoncé des violations du droit à une procédure régulière lors de la destitution d’une sénatrice de l’opposition.

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Le gouvernement n’a pas alloué suffisamment de ressources au système de santé publique, mettant en péril le droit à la santé, en particulier celui des groupes exposés à la discrimination, notamment les peuples autochtones et les femmes transgenres. Les dépenses de santé publique s’établissaient à 4 % du PIB, en deçà de la recommandation de l’Organisation panaméricaine de la santé, qui préconisait de consacrer 6 % du PIB à la couverture universelle.

Le gouvernement n’a pas rendu la fiscalité plus progressive ni renforcé la fourniture de soins de santé primaires, laissant à la charge des familles 38,4 % de l’ensemble des frais de santé. Parmi les pays ayant un niveau de développement similaire, le Paraguay était l’un de ceux où la part des dépenses de santé assumée par les ménages était la plus élevée.

Le parlement a rejeté un projet de loi proposant d’augmenter de 6 % la taxe sur le tabac afin de financer les soins de santé des patient·e·s atteints de cancer, une mesure qui aurait pu participer à la réalisation du droit à la santé.

En avril, des étudiant·e·s ont organisé des manifestations et occupé des universités pour protester contre la décision du gouvernement visant à modifier le financement de l’exonération des frais de scolarité et des programmes de bourses au sein des universités publiques. Ils demandaient à être davantage consultés sur ce point et réclamaient un nouvel accord fiscal permettant de financer des politiques sociales, notamment dans l’enseignement supérieur.

LIBERTÉ D'EXPRESSION, D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Le Congrès a approuvé un projet de loi rédigé en termes vagues qui menaçait la liberté d’association et risquait d’accroître le contrôle exercé sur les organisations de la société civile et de conduire à des restrictions arbitraires, y compris la suspension de leurs activités.

Le Syndicat des journalistes du Paraguay a fait savoir que des journalistes et des organisations qui enquêtaient sur le pouvoir politique avaient été la cible de manœuvres de harcèlement et de diffamation. Des sénateurs et sénatrices avaient diffusé des informations fallacieuses à leur sujet pendant l’examen de ce projet de loi.

Une commission d’enquête parlementaire sur le blanchiment d’argent a été instaurée en août dans le but d’enquêter sur les organisations de la société civile et les médias. Ses auditions se tenaient à huis clos, ce qui suscitait des préoccupations quant à la transparence de ce nouveau mécanisme de contrôle.

Trois militants inculpés d’incendie volontaire et de troubles à l’ordre public en lien avec des manifestations pendant la pandémie de COVID-19 ont été acquittés à l’issue d’un procès de huit mois.

DROITS DES PERSONNES LGBTI

La justice n’avait toujours pas rendu de décision finale dans 10 procédures engagées par des personnes transgenres qui réclamaient la reconnaissance par l’état civil d’un nom conforme à leur identité de genre. Deux d’entre elles, les femmes transgenres Yren Rotela et Mariana Sepúlveda, qui avaient engagé des poursuites devant des tribunaux civils pour obtenir une telle reconnaissance en 2016, attendaient que le Comité des droits de l’homme des Nations unies se prononce sur des communications soumises au titre du Protocole facultatif se rapportant au PIDCP.

DROITS DES FEMMES

Les violences fondées sur le genre demeuraient très fréquentes. Le ministère des Femmes a recensé 31 féminicides et 52 tentatives de féminicides en 2024, contre 37 féminicides en moyenne chaque année entre 2019 et 2023.

Alexa Torres, victime de harcèlement sexuel commis par un prêtre catholique, a déposé plainte devant le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes après l’annulation par la justice de la condamnation de son agresseur présumé au motif que le délai de prescription s’était écoulé.

DROITS DES ENFANTS

Les droits des enfants ont cette année encore été bafoués. En 2024, le ministère public a enregistré 3 524 plaintes pour violences sexuelles contre des enfants et 1 679 plaintes pour maltraitance infantile, contre 3 543 et 1 559 plaintes respectivement l’année précédente.

Le nombre de grossesses d’adolescentes restait élevé et des filles ayant été violées continuaient d’être forcées de mener leur grossesse à terme en raison de l’interdiction presque totale de l’avortement. Le ministère de la Santé publique et du Bien-être social a enregistré 8 578 naissances chez des adolescentes âgées de 15 à 19 ans, dont 602 étaient indigènes, et 339 naissances chez des fillettes de 10 à 14 ans, dont 82 étaient indigènes.

Le Comité des droits de l’enfant a demandé au Paraguay d’introduire une éducation à la santé sexuelle et reproductive et une éducation aux questions de genre dans les écoles. Il a également appelé le Paraguay à veiller, entre autres, à ce qu’une approche multisectorielle et adaptée aux enfants soit adoptée par la justice pénale dans les affaires de violences, notamment sexuelles, contre des enfants, dans le souci de ne pas raviver le traumatisme.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Les catastrophes climatiques et environnementales touchaient de manière disproportionnée les peuples autochtones. La coordonnatrice des leaders indigènes du Bajo Chaco a signalé en juillet que les réserves d’eau potable des communautés locales étaient épuisées et que les populations ne recevaient pas d’assistance humanitaire. En septembre, un incendie de forêt a frappé le parc national Cerro Chovoreca, territoire ancestral du peuple indigène ayoreo, qui vivait volontairement isolé du reste du monde.

Les expulsions forcées de populations indigènes se sont poursuivies. La communauté tekoha sauce du peuple avá guaraní paranaense attendait toujours la restitution de ses terres ancestrales, saisies en violation de ses droits par l’entreprise Itaipú Binacional, chargée de l’exploitation d’un barrage hydroélectrique. La communauté était toujours visée par une procédure d’expulsion, sur laquelle une cour d’appel devait se prononcer.

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