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AP/Press Association Images

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Malaisie

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Malaisie en 2024.

Le gouvernement a continué d’utiliser les lois en vigueur pour étouffer la dissidence et a introduit des modifications législatives limitant davantage la liberté d’expression. Des personnes réfugiées ou migrantes ont été maintenues en détention illimitée. Le nombre de condamnations à mort a diminué depuis que l’application de la peine capitale a été laissée à l’appréciation des juges, mais ce châtiment continuait d’être prononcé pour des infractions liées aux stupéfiants. Cette année encore, des informations ont fait état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements dans les centres de détention pour migrant·e·s, et des morts en détention ont été signalées.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Le gouvernement a étendu des lois qui restreignaient excessivement la liberté d’expression et annoncé qu’il ne modifierait pas la Loi relative à la presse écrite et aux publications et qu’il ne modifierait ni n’abrogerait la Loi relative à la sédition. En décembre, il a fait adopter à la hâte des modifications de la Loi sur les communications et le multimédia (CMA) qui, loin de supprimer les restrictions pesant sur la liberté d’expression, les ont accrues. Il avait promis, lors de la campagne pour les élections générales de 2022, une réforme de toute cette législation. Les autorités ont continué d’appliquer des lois répressives, dont la CMA et la Loi relative à la sédition, pour faire taire les voix dissidentes.

Le réalisateur et le producteur du film interdit Mentega Terbang ont été inculpés en janvier d’« atteinte aux sentiments religieux », une infraction définie dans le Code pénal. À la fin de l’année, il n’avait pas été statué sur leur demande de réexamen judiciaire de l’interdiction du film.

Le défenseur des droits humains Mukmin Nantang a été arrêté en juin pour sédition après avoir exprimé ses préoccupations quant à l’expulsion de populations bajaus lauts de leurs habitations. Remis en liberté, il était toujours sous le coup d’une enquête à la fin de l’année.

En décembre, l’artiste Fahmi Reza a été arrêté pour sédition et placé en détention pendant une journée. Il était mis en cause pour une caricature du nouveau gouverneur de l’État du Sabah, Musa Aman, un homme qui a fait l’objet dans le passé de poursuites pénales pour corruption.

Le gouvernement a continué d’imposer des restrictions concernant les contenus publiés sur les réseaux sociaux en adressant des « demandes de suppression » à ces plateformes. Les autorités ont adopté un projet de loi sur la sécurité en ligne, dont les dispositions visaient en partie à lutter contre le cyberharcèlement mais suscitaient des inquiétudes quant à de possibles censures. Des groupes de défense des droits humains ont dénoncé en décembre l’attitude du gouvernement, qui a fait adopter à la hâte des modifications de la CMA étendant ses pouvoirs de contrôle arbitraire des contenus.

LIBERTÉ DE RÉUNION PACIFIQUE

Les autorités ont continué d’utiliser la Loi relative aux rassemblements pacifiques (PAA), le Code pénal et la Loi sur les infractions mineures pour limiter les manifestations pacifiques. Des personnes qui avaient organisé des rassemblements et d’autres qui y avaient pris part ont fait l’objet d’enquêtes et de placements en détention injustifiés, et ont subi dans certains cas le déploiement d’une force inutile.

Malgré le soutien aux droits du peuple palestinien affiché par le gouvernement, la police a enquêté, en vertu de la PAA, sur des personnes qui organisaient des manifestations propalestiniennes ou qui y participaient. En octobre, elle a arrêté sept manifestant·e·s propalestiniens près de l’ambassade des États-Unis. La société civile a condamné cette utilisation de la PAA, qu’elle considérait comme abusive, inquiétante et contraire aux droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’expression.

En mars, quatre personnes qui avaient organisé la marche des femmes de Malaisie ou participé à ce rassemblement qui se tenait à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes ont été interrogées par la police. Elles faisaient l’objet d’une enquête au titre de la PAA et de la Loi sur les infractions mineures, bien que le rassemblement ait dûment été déclaré à la police au préalable.

Huit étudiant·e·s autochtones apatrides appartenant au peuple Bajau Laut, dont trois au moins étaient mineurs, ont été arrêtés en juin par les autorités de l’État du Sabah. Ils ont été détenus pendant sept jours en vertu de la Loi sur l’immigration à la suite d’une manifestation pacifique devant les locaux du Premier ministre de l’État.

En juillet, la police a eu recours à une force excessive pour interpeller des manifestant·e·s pacifiques de la Teoh Beng Hock Association for Democratic Advancement, une organisation locale de défense des droits humains, lors d’une marche organisée pour réclamer justice pour les personnes mortes en détention. L’organisation a porté plainte auprès de la Commission indépendante de contrôle du comportement de la police (IPCC).

PEINE DE MORT

Entre le 1er janvier et 14 octobre, la Cour fédérale a commué 814 condamnations à mort obligatoires en peines de flagellation et en peines d’emprisonnement allant de 30 à 40 ans, selon les chiffres officiels. Au cours de la première année après l’adoption de la Loi de 2023 portant abolition de l’application obligatoire de la peine de mort, qui a laissé l’application à l’appréciation des juges, le nombre de condamnations à mort prononcées ou confirmées en appel a nettement baissé, ce qui a réduit de plus des deux tiers le nombre de personnes sous le coup de la peine capitale. Cependant, les tribunaux ont continué de prononcer la peine de mort pour des infractions liées aux stupéfiants, en violation du droit international et des normes internationales.

Le pouvoir exécutif a confirmé devant le Parlement en mars que le moratoire sur les exécutions continuerait d’être observé. En décembre, la Malaisie a voté pour la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies en faveur de l’instauration d’un moratoire sur les exécutions, dans l’attente de l’abolition de la peine de mort.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

En janvier, des organisations de la société civile, dont Amnesty International, ont lancé un appel demandant que l’IPCC soit dotée de pouvoirs et d’une indépendance accrus afin de pouvoir traiter efficacement les comportements répréhensibles de la police.

Selon les déclarations des autorités, 24 personnes sont mortes en garde à vue entre 2022 et le 25 mai 2024. Tous ces décès ont été attribués officiellement à des raisons médicales. Vingt autres décès sont intervenus entre janvier et juin 2024 dans des centres de détention pour migrant·e·s.

Le Premier ministre a annoncé en septembre que la police et la Commission malaisienne des droits humains (Suhakam) allaient mener des enquêtes sur les cas de personnes blessées ou mortes en garde à vue.

Un détenu de la prison de Pokok Sena qui avait vu sa condamnation à mort commuée en peine de flagellation est décédé en octobre d’une infection bactérienne après avoir reçu les coups de fouet.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Des personnes réfugiées ou migrantes ont été maintenues en détention illimitée dans des conditions pénibles. Le gouvernement a démenti en mars des informations faisant état d’actes de torture commis dans des centres de détention pour migrant·e·s. Il a ouvert le même mois de nouveaux lieux de détention pour les enfants et les familles en situation irrégulière. Dans ce contexte, des préoccupations ont été exprimées quant à la détention illimitée de quelque 170 enfants dont la remise en liberté n’était pas planifiée. Les autorités ont indiqué en juin que 17 326 personnes étaient détenues, dans 25 centres. Le HCR n’a pas eu accès aux centres de détention du pays depuis 2019.

En février, 131 détenus se sont échappés du centre pour migrants de Bidor. Deux d’entre eux sont morts. En octobre, un rapport de la commission d’intégrité des services répressifs malaisiens a confirmé que de graves atteintes aux droits humains avaient lieu dans ce centre.

Les expulsions de migrant·e·s placés en détention se sont poursuivies, alors même que certaines de ces personnes risquaient de subir des violations des droits humains à leur retour. Une haute cour a suspendu l’expulsion d’un responsable de l’opposition bangladais et d’un défenseur égyptien des droits humains. En revanche, une travailleuse domestique cambodgienne a été renvoyée dans son pays en octobre après avoir critiqué les dirigeants cambodgiens.

La police a mené cette année encore de nombreuses opérations coup de poing ciblant les migrant·e·s en situation irrégulière.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Les terres et les moyens de subsistance des peuples autochtones restaient menacés par les plantations de palmiers à huile, l’exploitation forestière et la construction de barrages. Dans l’État de Pahang, sept personnes appartenant au peuple autochtone temoq ont lancé en juillet une action en justice contre une plantation de palmiers à huile à qui elles reprochaient d’empiéter sur leurs terres coutumières. En septembre, un tribunal a suspendu les activités d’une entreprise d’énergie hydroélectrique sur les terres du peuple autochtone semai, dans l’État de Perak, en raison d’une absence de consentement valide.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Le gouvernement a annoncé en juin un plan destiné à réduire à 50 % maximum la part du charbon dans la production totale d’énergie d’ici à 2035, et à l’éliminer complètement d’ici à 2044. La démarche impliquait toutefois de s’appuyer davantage sur le gaz naturel pendant la phase de transition, ce qui pourrait prolonger la dépendance du pays aux combustibles fossiles.

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