Chacun de vos dons rend possible nos enquêtes sur le terrain dans plus de 150 pays

©AP/Press Association Images
Iran
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Iran en 2024.
Cette année, les autorités ont réprimé encore davantage les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique. Les femmes et les filles, les personnes LGBTI et les membres de minorités ethniques ou religieuses étaient victimes de discrimination et de violences systémiques. Les autorités ont intensifié la répression à l’encontre des femmes qui bravaient les lois imposant le port du voile, de la communauté baha’ie et des personnes réfugiées ou migrantes d’Afghanistan. Des milliers de personnes ont été détenues arbitrairement, interrogées, harcelées et/ou injustement poursuivies en justice pour avoir exercé leurs droits humains. Les procès demeuraient invariablement inéquitables. Les disparitions forcées, la torture et les autres formes de mauvais traitements étaient généralisées et systématiques. Des châtiments cruels et inhumains, notamment des flagellations et des amputations, ont été infligés. La peine de mort était appliquée arbitrairement et visait de manière disproportionnée les minorités ethniques et les personnes migrantes. L’impunité concernant les crimes de droit international passés et présents était systémique, en particulier pour les crimes contre l’humanité relatifs aux massacres commis dans les prisons en 1988.
CONTEXTE
En avril, le Conseil des droits de l’homme [ONU] a renouvelé le mandat du rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran et de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République islamique d’Iran. Ces instances et d’autres expert·e·s indépendants des Nations unies, ainsi que des observateurs et observatrices internationaux spécialistes des droits humains, se sont vu interdire l’entrée sur le territoire iranien.
En mai, le président Ebrahim Raïssi est mort dans un accident d’hélicoptère. Il a été remplacé par Massoud Pezeshkian en juillet, à l’issue d’une élection dont le taux de participation a été faible et pour laquelle le Conseil des gardiens n’avait approuvé que six des 80 candidatures déposées.
L’Iran a continué à soutenir le Hamas, d’autres groupes armés palestiniens et le Hezbollah. En avril, le pays a tiré plus de 300 munitions en direction d’Israël à titre de représailles après une frappe sur le consulat d’Iran en Syrie, qui a tué sept pasdaran (gardiens de la révolution). En octobre, l’Iran a lancé près de 200 missiles balistiques sur Israël en réaction aux homicides d’Ismaïl Haniyeh, chef politique du Hamas, et d’Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah. Un civil palestinien est mort dans cette attaque en Cisjordanie (territoire palestinien occupé). Le même mois, Israël a mené des frappes aériennes contre 20 cibles situées sur le territoire iranien, tuant un civil et quatre militaires.
L’Iran a fourni un appui militaire au régime de Bachar el Assad en Syrie, avant l’éviction de celui-ci le 8 décembre.
Le pays a procuré à la Russie des drones et des missiles balistiques, qui ont été utilisés contre des infrastructures civiles en Ukraine.
LIBERTÉ D'EXPRESSION, D'ASSOCIATION ET DE RÉUNION
Les autorités ont censuré des médias, brouillé des chaînes de télévision par satellite et continué à bloquer ou filtrer des applications mobiles et des réseaux sociaux.
Les partis politiques indépendants, les organisations de la société civile et les syndicats étaient toujours interdits, et des travailleuses et travailleurs, notamment des infirmières et infirmiers, des enseignant·e·s et des défenseur·e·s des droits du travail ayant participé à des grèves et à des rassemblements pacifiques, ont subi des représailles.
Le projet de loi relatif à la protection des internautes, qui, s’il entrait en vigueur, bafouerait encore davantage le droit au respect de la vie privée et restreindrait l’accès au réseau internet mondial, était toujours en cours d’examen au Parlement. En janvier, le Guide suprême a approuvé un décret interdisant le recours aux réseaux privés virtuels (VPN) et obligeant les internautes à n’utiliser que l’Internet local.
En juin, des poursuites pénales ont été engagées à l’encontre de centaines de personnes qui avaient critiqué publiquement Ebrahim Raïssi après sa mort. Des centaines d’autres ont reçu des appels menaçants, des avertissements ou des convocations après que les pouvoirs publics ont déclaré qu’« encourager » sur Internet le boycott de l’élection présidentielle constituait une infraction.
Les autorités ont violé les droits humains de familles de victimes qui tentaient d’obtenir justice pour leurs proches tués illégalement lors des manifestations de novembre 2019 ainsi que du soulèvement « Femme, Vie, Liberté » de 2022.
Les autorités ont porté atteinte aux droits humains de manifestant·e·s, de femmes et de filles qui avaient bravé les lois relatives au port obligatoire du voile, de journalistes, d’artistes, d’écrivain·e·s, d’universitaires, d’étudiant·e·s, de personnes LGBTI, de membres de minorités ethniques ou religieuses et de défenseur·e·s des droits humains qui n’avaient fait qu’exercer leurs droits fondamentaux, notamment à l’approche du deuxième anniversaire du soulèvement de 2022, en septembre. Ces violations étaient diverses : interrogatoires, détentions arbitraires, disparitions forcées, poursuites judiciaires injustes aboutissant à des peines d’emprisonnement, des flagellations ou des amendes, renvois temporaires ou définitifs du système éducatif, mises à pied ou licenciements.
DISPARITIONS FORCÉES ET TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS
Les autorités ont régulièrement soumis des personnes incarcérées à des disparitions forcées et des détentions au secret. Le recours à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements était généralisé et systématique. La télévision d’État diffusait des « aveux » entachés de torture.
Plusieurs personnes détenues arbitrairement pour des motifs politiques dans des établissements psychiatriques ont été soumises à des actes de torture et d’autres mauvais traitements. Certaines se sont notamment vu administrer de force des produits pharmaceutiques.
L’administration carcérale et le ministère public privaient souvent les détenu·e·s des traitements médicaux dont ils avaient besoin, y compris pour soigner des blessures causées par la torture.
Plusieurs personnes sont mortes en détention dans des conditions suspectes et des informations dignes de foi faisaient état de torture et d’autres formes de mauvais traitements, y compris de coups et de privation de soins médicaux. Parmi ces personnes figurait Mohammad Mirmousavi, qui est décédé le lendemain de son arrestation, en août. Les autorités ont initialement attribué sa mort à une crise cardiaque et les médias d’État ont insinué qu’il avait succombé à des blessures causées par une altercation avant son arrestation. Les autorités n’ont admis leur responsabilité qu’après le tollé suscité dans l’opinion publique par une vidéo montrant son corps blessé. Cinq policiers ont été arrêtés, mais aucune information concernant d’éventuelles poursuites engagées à leur encontre n’a été communiquée.
Les personnes privées de liberté étaient détenues dans des conditions cruelles et inhumaines : surpopulation, manque d’hygiène, mauvaise ventilation, infestations de souris ou d’insectes, accès insuffisant, voire inexistant, à de la literie, des toilettes ou des installations pour se laver.
Le Code pénal islamique prévoyait toujours des peines s’apparentant à des actes de torture (flagellation, aveuglement, amputation, crucifiement, lapidation).
Selon le Centre Abdorrahman Boroumand pour les droits humains en Iran, au moins 186 personnes ont été condamnées à la flagellation. Des peines de flagellation et d’amputation ont été appliquées.
DÉTENTIONS ARBITRAIRES ET PROCÈS INÉQUITABLES
L’iniquité des procès était systématique, ce qui aboutissait à des détentions arbitraires. Parmi les violations des règles de procédure figuraient la privation du droit à un·e avocat·e dès le moment de l’arrestation, le fait de considérer comme recevables à titre de preuve des « aveux » obtenus sous la torture et les procès sommaires.
Le pouvoir judiciaire, qui n’était pas indépendant, jouait un rôle central s’agissant de faire de l’impunité la règle en cas de torture, de disparition forcée ou d’autres crimes de droit international.
L’impunité était de mise lorsque les autorités détenaient arbitrairement des personnes étrangères ou binationales afin de disposer d’un moyen de pression, ce qui, dans certains cas, constituait un crime de prise d’otage.
Les dissident·e·s Mehdi Karroubi, Mir Hossein Mousavi et Zahra Rahnavard étaient arbitrairement assignés à résidence depuis 14 ans.
DROITS DES FEMMES ET DES FILLES
Les autorités continuaient de traiter les femmes comme des citoyennes de seconde zone, notamment en ce qui concernait le mariage, le divorce, la garde des enfants, l’emploi, la succession et l’accès aux fonctions politiques.
L’âge minimum légal du mariage pour les filles était toujours fixé à 13 ans. En outre, un père pouvait obtenir du pouvoir judiciaire l’autorisation de marier de force sa fille encore plus jeune.
Les autorités ont accusé des défenseures des droits humains d’infractions à caractère politique passibles de la peine capitale. Sharifeh Mohammadi a été condamnée à mort en juin et Pakhshan Azizi en juillet.
En avril, les autorités ont appliqué le plan Noor pour intensifier la répression contre les femmes et les filles qui bravaient l’obligation de revêtir le voile, y compris au moyen de méthodes de surveillance électronique comme la reconnaissance faciale, portant encore plus atteinte à leurs droits sociaux, économiques, culturels, civils et politiques et restreignant leur droit de circuler librement. Le renforcement des patrouilles de sécurité exposait les femmes et les filles au harcèlement et à la violence dans les lieux publics. La répression prenait plusieurs formes : exclusion des étudiantes de l’enseignement supérieur, dangereuses courses-poursuites pour immobiliser des conductrices sur la route, saisie en masse de véhicules appartenant à des femmes, cours de « morale » obligatoires, emprisonnement et flagellation.
En juillet, des policiers qui tentaient de saisir la voiture d’une femme pour appliquer la législation rendant le port du voile obligatoire ont tiré sur le véhicule à balles réelles, blessant grièvement la passagère, Arezou Badri.
En août, les autorités ont infligé à la défenseure des droits humains Narges Mohammadi et à d’autres femmes détenues à la prison d’Evin des actes de torture et d’autres mauvais traitements, leur occasionnant des blessures, et les ont privées de soins médicaux.
En septembre, le Conseil des gardiens a approuvé la proposition de loi sur le soutien à la famille par la promotion de la culture de la chasteté et du hijab, renforçant encore davantage la discrimination et les violences à l’égard des femmes et des filles. Ce texte devait être signé par le président et entrer en vigueur le 13 décembre, mais sa promulgation a été suspendue temporairement.
En novembre, les autorités ont annoncé qu’elles prévoyaient d’ouvrir un centre de santé à Téhéran, la capitale, « pour faire cesser la pratique de retrait du voile » en dispensant un « traitement scientifique et psychologique » aux femmes et aux filles ne respectant pas l’obligation du port du voile.
Celles qui ne se conformaient pas à cette obligation risquaient d’être emprisonnées, condamnées à des amendes exorbitantes et privées d’accès à l’éducation et aux services publics.
Le projet de loi visant à prévenir les violences faites aux femmes et à améliorer la sécurité de celles-ci face aux mauvais comportements était toujours en cours d’examen au Parlement. Il n’érigeait pas en infraction la violence domestique, le viol conjugal, ni les mariages d’enfant, et ne prévoyait pas une peine proportionnée pour les hommes qui assassinaient une femme ou une fille de leur famille.
DISCRIMINATION
Minorités ethniques
Les minorités ethniques – arabe ahwazie, azérie, baloutche, kurde et turkmène, notamment – étaient en butte à des atteintes aux droits humains généralisées, dont une discrimination qui entravait leur accès à l’éducation, à l’emploi, à un logement décent et aux fonctions politiques. Les régions où vivaient des minorités ethniques souffraient toujours d’un manque d’investissement qui accentuait la pauvreté et la marginalisation de ces populations.
Malgré les appels répétés en faveur d’une plus grande diversité linguistique, l’enseignement primaire et secondaire n’était toujours assuré qu’en persan.
Les forces de sécurité ont tué illégalement et blessé en toute impunité de nombreux porteurs et porteuses de marchandises kurdes (kulbars) et transporteurs et transporteuses de carburant baloutches (soukhtbars) qui se déplaçaient sans armes entre le Kurdistan iranien et le Kurdistan irakien et dans la province du Sistan-et-Baloutchistan, respectivement.
Minorités religieuses
Les minorités religieuses, parmi lesquelles les baha’i·e·s, les chrétien·ne·s, les derviches gonabadis, les personnes de confession juive, les musulman·e·s sunnites et les yarsans, étaient victimes de discrimination en droit et dans la pratique, notamment en matière d’éducation, d’emploi, d’adoption et d’accès aux fonctions politiques et aux lieux de culte. Des membres de minorités religieuses ont été visés par des détentions arbitraires, des poursuites judiciaires injustes, ainsi que des actes de torture et d’autres mauvais traitements, pour avoir professé ou pratiqué leur foi.
Les personnes dont les parents étaient considérés comme musulmans par les autorités risquaient, quant à elles, d’être détenues arbitrairement, soumises à des actes de torture et d’autres mauvais traitements ou condamnées à mort pour « apostasie » si elles choisissaient une autre religion ou l’athéisme.
Les autorités ont effectué des incursions dans des églises et détenu arbitrairement des personnes converties au christianisme.
Les adeptes de la religion baha’ie faisaient l’objet de violations généralisées et systématiques de leurs droits pour le simple fait de pratiquer leur foi. Ils subissaient notamment des détentions arbitraires, des descentes de police à leur domicile, des exclusions de l’enseignement supérieur, des licenciements, des fermetures forcées d’entreprises, des saisies et des destructions de biens, des poursuites judiciaires injustes et de longues peines d’emprisonnement. Les femmes baha’ies étaient particulièrement visées : des dizaines d’entre elles ont été soumises à des interrogatoires et emprisonnées.
En janvier, les autorités ont saisi des terres agricoles appartenant à des familles baha’ies de la province du Mazandéran. En mai, elles ont détruit leurs rizières au moyen de bulldozers, réduisant à néant les cultures et les digues d’irrigation.
Les autorités ont empêché les Baha’i·e·s de procéder à des enterrements dans un cimetière qu’ils utilisaient depuis des décennies. En mars, elles ont détruit plus de 30 tombes baha’ies sur le site des fosses communes de Kharavan. En août, elles n’ont pas enquêté sur le saccage d’un cimetière baha’i à Ahvaz (province du Khuzestan).
Personnes LGBTI
Les personnes LGBTI subissaient une discrimination et une violence systémiques. Les relations librement consenties entre personnes de même sexe constituaient toujours une infraction passible de peines allant de la flagellation à la condamnation à mort.
Les « thérapies de conversion » approuvées par l’État, qui s’apparentaient à de la torture ou à d’autres formes de mauvais traitements, demeuraient courantes ; elles étaient même appliquées à des enfants. Une thérapie hormonale et certaines opérations chirurgicales, y compris la stérilisation, étaient obligatoires pour les personnes souhaitant faire modifier leur genre à l’état civil.
Des personnes qui ne se conformaient pas aux normes de genre ont été poursuivies en justice et privées d’accès à l’éducation et à l’emploi.
DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES
Les ressortissant·e·s afghans étaient victimes de discriminations fréquentes, qui prenaient notamment la forme d’obstacles entravant leur accès à l’éducation, au logement, à l’emploi, aux soins de santé et aux services bancaires et les empêchant de jouir du droit de circuler librement. Des représentants de l’État les déshumanisaient publiquement, alimentant les discours de haine et les violences contre ces personnes.
Les autorités ont procédé avec violence à des arrestations collectives et des renvois forcés : elles se sont targuées d’avoir expulsé 850 000 « ressortissant·e·s en situation irrégulière » (probablement des citoyen·ne·s afghans et des personnes d’origine afghane) entre mars et novembre, en dehors de toute procédure légale.
En octobre, les autorités ont nié les allégations selon lesquelles les forces de sécurité avaient utilisé des armes à feu contre de nombreux ressortissant·e·s afghans à la frontière entre l’Iran et le Pakistan, faisant des morts et des blessés. Elles n’ont pas non plus mené d’enquête digne de ce nom à ce sujet.
PEINE DE MORT
Des centaines de personnes ont été exécutées de façon arbitraire.
Des condamnations à mort ont été prononcées à l’issue de procès manifestement iniques, notamment pour des infractions comme le trafic de stupéfiants, qui n’appartenaient pas à la catégorie des « crimes les plus graves » (impliquant un homicide volontaire).
La peine de mort était toujours en vigueur pour des actes protégés par le droit au respect de la vie privée et le droit à la liberté d’expression, de religion ou de conviction, notamment la consommation d’alcool et les relations librement consenties entre personnes de même sexe. L’« adultère » (relation sexuelle hors mariage) était toujours passible de la lapidation à mort.
Les autorités ont utilisé la peine capitale comme instrument de répression politique contre des manifestant·e·s, des dissident·e·s et des minorités ethniques.
Les minorités opprimées, dont les Baloutches et les ressortissant·e·s afghans, étaient représentées de manière disproportionnée parmi les personnes exécutées.
Deux personnes poursuivies pour des faits en lien avec le soulèvement de 2022, dont un jeune homme en situation de handicap mental, ont été exécutées en janvier et en août à l’issue de procès inéquitables et sur la base d’« aveux » entachés de torture. Plusieurs autres ont été condamnées à mort.
Les autorités ont continué de condamner à la peine capitale et d’exécuter des personnes qui avaient moins de 18 ans au moment des faits qui leur étaient reprochés ; ces personnes étaient nombreuses dans l’antichambre de la mort.
IMPUNITÉ
L’impunité restait la règle pour les fonctionnaires impliqués dans les homicides illégaux, les actes de torture, les disparitions forcées et les autres crimes de droit international et violations graves des droits humains commis en 2024 et au cours des années précédentes.
Une proposition de modification de la loi relative à l’utilisation d’armes à feu était toujours en cours d’examen au Parlement, et de hauts représentants de l’État appelaient à accélérer son adoption. S’il était adopté, ce texte autoriserait davantage d’organes chargés de la sécurité ou du renseignement à être dotés d’armes à feu et ne ferait qu’ancrer encore plus l’impunité en cas d’usage abusif.
Les forces de sécurité ont tiré illégalement et en toute impunité sur des personnes en voiture, faisant des morts et des blessés, en particulier au sein de la minorité baloutche.
En mars, les autorités ont réagi à un rapport publié par Amnesty International en décembre 2023 en niant toute participation de leurs agents à des violences sexuelles contre des manifestant·e·s lors du soulèvement de 2022. Elles ont aussi réagi à un rapport de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République islamique d’Iran en se défendant d’avoir commis des crimes contre l’humanité (meurtre, emprisonnement, torture, viol et autres formes de violences sexuelles, persécution, disparition forcée et autres actes inhumains) pendant le soulèvement.
Toujours en mars, le Comité spécial chargé d’examiner le soulèvement de 2022, créé par le président défunt Ebrahim Raïssi, a publié un rapport dissimulant les violations perpétrées et attribuant les homicides illégaux à « des émeutières et émeutiers et des terroristes ». À la connaissance d’Amnesty International, hormis trois représentants de l’État jugés à huis clos, personne n’a fait l’objet de poursuites pour les homicides illégaux et les actes de torture infligés à des manifestant·e·s et des passant·e·s lors du soulèvement de 2022.
En janvier, la Cour suprême a annulé une condamnation à mort prononcée par un tribunal militaire à l’encontre de Jafar Javanmardi, commandant de la police de Bandar Anzali (province du Gilan), pour l’homicide d’un manifestant. L’affaire a été renvoyée devant une juridiction inférieure en vue d’un nouveau procès. En mars, un tribunal militaire de la province de Qazvin a de nouveau condamné le policier à la peine capitale. Les médias d’État ont fait pression sur le pouvoir judiciaire pour qu’il le libère, arguant qu’il avait protégé la sécurité nationale. Ils ont ensuite indiqué que la justice allait réexaminer l’affaire en raison de « multiples irrégularités ».
Les autorités ont continué de cacher la vérité concernant le vol 752 d’Ukraine International Airlines, abattu par un missile en janvier 2020. Cette frappe avait fait 176 morts. En août, la Cour suprême a annulé la décision d’un tribunal militaire qui avait condamné 10 représentants de l’État à des peines d’emprisonnement. Invoquant des irrégularités dans l’enquête, la Cour a renvoyé l’affaire devant une juridiction inférieure afin qu’elle soit réexaminée.
En mars et en août, les autorités ont empêché des familles de se rendre sur le site des fosses communes de Kharavan, qui contiendrait les dépouilles d’une partie des milliers de dissident·e·s politiques victimes de disparition forcée et d’exécution extrajudiciaire en 1988. Certains des fonctionnaires impliqués dans des crimes contre l’humanité passés ou en cours liés aux massacres perpétrés dans les prisons en 1988 occupaient toujours des postes élevés dans la fonction publique.
En juin, à la faveur d’un accord d’échange de prisonniers entre l’Iran et la Suède, l’ancien responsable pénitentiaire iranien Hamid Nouri, condamné à la réclusion à perpétuité par un tribunal suédois en raison de son rôle dans les massacres de 1988, a pu rentrer en Iran. Cet accord a contribué à l’impunité dont jouissaient les autorités iraniennes pour les prises d’otage et d’autres crimes de droit international.
DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN
Les autorités n’ont pas pris de mesures pour lutter contre la crise environnementale dans le pays. Celle-ci se caractérisait par l’assèchement de lacs, de cours d’eau et de zones humides, l’épuisement de nappes phréatiques, la déforestation, la pollution des sources d’eau urbaines causée par le déversement d’eaux usées, des affaissements de terrain et la pollution de l’air. Cette dernière était en partie imputable à l’utilisation de combustibles de mauvaise qualité dans l’industrie et a fait des milliers de morts, selon le ministère de la Santé, et entraîné la fermeture d’écoles et d’entreprises en décembre.
L’Iran a continué de subventionner largement la production massive de combustibles fossiles et n’a pas protégé les populations marginalisées des effets du changement climatique.
La mauvaise gestion des ressources en eau par les autorités a conduit à des pénuries, en particulier dans les provinces du Khuzestan et du Sistan-et-Baloutchistan, où vivaient respectivement les minorités arabe ahwazie et baloutche. La précarité des infrastructures d’approvisionnement en eau dans la province du Sistan-et-Baloutchistan a entraîné la noyade de plusieurs villageois·es baloutches, dont des enfants, dans des fosses où la population locale puisait de l’eau dans des conditions dangereuses.

En Iran, la répression contre les femmes et celles et ceux qui défendent leurs droits se durcit

En Iran, une loi prévoit la peine de mort contre les femmes qui militent contre le port obligatoire du voile

Iran : violente arrestation d'une étudiante qui se dénude pour s'opposer au port du voile obligatoire

3 choses à faire pour soutenir l’abolition universelle de la peine de mort

Tourné en secret en Iran, un film sur le soulèvement « Femme, Vie, Liberté »
