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©UNHCR/D.Kashavelov

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Bulgarie

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Bulgarie en 2024.

Les journalistes et les organes de presse indépendants ont eu à faire face à de nombreux procès en diffamation. Le Parlement a adopté des modifications législatives interdisant la « propagande LGBTI » dans les établissements scolaires. Il a en revanche rejeté d’autres propositions qui auraient eu des répercussions négatives supplémentaires sur les droits des personnes LGBTI. Les agressions contre des immigré·e·s se sont multipliées. Un militant saoudien était menacé d’expulsion. Le système de soins psychiatriques souffrait toujours de profondes carences. Des mesures destinées à renforcer la protection des victimes de violences domestiques étaient en attente d’adoption.

CONTEXTE

Les Bulgares ont été appelés aux urnes en octobre pour la septième fois en trois ans. Conséquence de cette instabilité politique durable, le poste de défenseur·euse des droits était vacant depuis le mois d’avril.

Une forte vague de chaleur a entraîné des incendies de forêt et une pénurie d’eau.

LIBERTÉ D'EXPRESSION

Des journalistes et des organes de presse indépendants qui travaillaient sur la criminalité organisée et la corruption ont été la cible de procès-bâillons.

En janvier, le tribunal de la ville de Sofia a rejeté une plainte en diffamation déposée par une compagnie d’assurances, qui réclamait des dommages et intérêts d’un montant record (un million de leva, soit environ 500 000 euros) au média en ligne Mediapool, pour un article que celui-ci avait publié concernant le système de la « carte verte » en Bulgarie. La rédactrice en chef de Mediapool a qualifié cette décision (qui pouvait encore faire l’objet d’un appel) d’« importante victoire » pour la liberté de la presse.

En avril, le ministre de l’Intérieur, Kalin Stoyanov, a porté plainte en diffamation contre le Bureau for Investigative Reporting and Data, qui avait diffusé des informations concernant des faits présumés de corruption au sein de son ministère. Selon l’organisation Media Freedom Rapid Response, cette plainte était destinée à « faire taire celles et ceux qui pratiquaient en toute légitimité le journalisme d’investigation ».

Dans un arrêt qui fera date, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé en juin que la Bulgarie n’avait pas respecté le droit à un procès équitable et à la liberté d’expression de Rossen Bossev, un journaliste déclaré coupable de diffamation par la justice pénale en 2019. La Cour a conclu que la condamnation n’avait pas été prononcée par un « tribunal impartial » et qu’elle portait atteinte à la liberté d’expression du requérant.

LIBERTÉ D'ASSOCIATION

Soumise pour la quatrième fois par le parti prorusse Renaissance, la proposition de loi sur les « agents de l’étranger » a été rejetée en septembre par une commission parlementaire. Ce texte visait à interdire aux organisations recevant des fonds de l’étranger de se livrer à des activités au sein des établissements d’enseignement et de certains ministères.

Une ONG de la ville de Stara Zagora s’est vue privée de subvention de la part de la municipalité après que son fondateur eut dénoncé les mauvais traitements infligés aux migrant·e·s par la police des frontières.

DROITS DES PERSONNES LGBTI

En juillet, la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré irrecevable, à titre rétroactif, la requête formulée dans le cadre de l’affaire Y.T. c. Bulgarie par un homme trans dont l’identité de genre n’avait pas été reconnue à l’état civil. La Cour a néanmoins prié instamment la Bulgarie de mettre en place un cadre transparent et accessible permettant la reconnaissance juridique de l’identité de genre des personnes.

En août, le Parlement a adopté en urgence une série de modifications de la Loi sur l’enseignement scolaire et préscolaire interdisant toute information concernant les « orientations sexuelles non traditionnelles » et « les identités de genre distinctes du sexe biologique » dans les établissements d’enseignement. Des organisations de défense des droits humains se sont fermement opposées à ces dispositions, qu’elles ont dénoncées comme constituant une attaque frontale contre les libertés fondamentales de la communauté LGBTI. Dans tout le pays, des enseignant·e·s en désaccord avec ces modifications ont fait l’objet de menaces. Le chef de Renaissance, le parti à l’origine de ces textes, a menacé de poursuivre en justice les enseignant·e·s qui entendaient « propager la propagande homosexuelle ».

Le Parlement a rejeté en septembre une série de modifications de la Loi sur la protection de l’enfance qui visaient à ériger en infraction pénale les soins d’affirmation de genre destinés aux mineur·e·s et à imposer de lourdes amendes aux professionnel·le·s de la santé assurant de tels soins.

Selon une enquête de l’Agence des droits fondamentaux de l’UE, 72 % des personnes LGBTI vivant en Bulgarie disaient avoir fait l’objet de brimades pendant leurs études en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre.

En 2024, l’ONG de défense des droits des personnes LGBTI ILGA-Europe a classé la Bulgarie au troisième rang des pays de l’UE les plus en retard en termes de protection de ces droits.

DISCRIMINATION

Les Roms étaient toujours en butte à des discriminations dans tous les domaines. En juillet, la Cour administrative suprême a jugé Krasimir Karakatchanov coupable de harcèlement discriminatoire. L’ancien chef du Mouvement national bulgare avait proféré en 2019 des déclarations hostiles aux Roms, qui avaient déclenché une vague de violences contre cette communauté.

Un certain nombre de personnalités politiques ont multiplié les tentatives de désinformation et les discours hostiles à l’approche des élections européennes, qui ont eu lieu au mois d’avril. On a enregistré dans ce contexte une augmentation des actes xénophobes, et notamment des agressions contre des demandeurs·euses d’asile et des personnes de nationalité étrangère.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Alors que le nombre de personnes empruntant la route dite des Balkans pour rejoindre l’Europe de l’Ouest avait nettement diminué, des renvois forcés illégaux (pushbacks) et des violences ont cette année encore été signalés à la frontière avec la Turquie.

Abdulrahman al-Khalidi, militant saoudien qui attendait qu’une décision définitive soit prise concernant sa demande d’asile en Bulgarie, risquait d’être expulsé vers l’Arabie saoudite. Bien qu’un tribunal ait ordonné sa remise en liberté, il se trouvait toujours en détention administrative au centre de Bousmantsi, près de Sofia, privé des soins médicaux et du soutien psychosocial dont il avait besoin. Plusieurs organisations de défense des droits fondamentaux ont averti que, s’il était expulsé, il risquait de subir de graves violations des droits humains, y compris des actes de torture.

DROITS DES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants [Conseil de l’Europe] a déploré en janvier que les personnes internées dans des établissements psychiatriques ne disposent toujours pas des soins psychosociaux nécessaires, ce qui constituait « une négligence et une atteinte à la santé des patients ». Il a reproché au ministère de la Santé de ne pas empêcher les mauvais traitements sur les patient·e·s et de ne pas en punir les responsables.

Plusieurs organisations de défense des droits fondamentaux ont dénoncé en avril les très nombreuses atteintes aux droits humains dont étaient victimes les personnes en situation de handicap dans certains établissements (y compris dans des foyers à effectifs réduits) : actes de torture et autres formes de mauvais traitements, violences financières et verbales, manque de soins, isolement, etc.

Un patient âgé de 57 ans est mort en août dans un incendie survenu dans un hôpital psychiatrique de Varna. L’enquête menée par le Bureau de la défenseuse des droits a établi que la victime était immobilisée et sans surveillance au moment du drame, et que le complexe hospitalier était très fortement en sous-effectifs, un seul médecin étant en service ce jour-là.

VIOLENCES FONDÉES SUR LE GENRE

La coalition Ensemble contre la violence, regroupant 37 organisations de défense des droits fondamentaux, a demandé en mars aux autorités de mettre en œuvre de toute urgence les modifications apportées en 2023 à la Loi relative à la protection contre les violences domestiques, notamment en améliorant la procédure d’évaluation des risques et la coordination entre les institutions.

Le Conseil national de prévention des violences domestiques et de protection des victimes a officiellement démarré ses activités. Le gouvernement a adopté en septembre un Programme de prévention des violences domestiques et de protection des victimes pour la période 2024-2026, qui comportait des mesures destinées à renforcer les programmes d’éducation et de prévention et à apporter un soutien aux victimes de violences au foyer.

Selon plusieurs organisations de défense des droits des femmes, au moins 18 femmes seraient mortes des suites de violences domestiques en 2024.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Malgré les engagements pris antérieurement en faveur d’une accélération de l’abandon progressif des centrales à charbon, le Parlement a décidé en avril de remettre à plus tard le vote sur la Feuille de route pour la neutralité carbone. L’opposition des travailleuses et travailleurs du secteur, qui craignaient de perdre leur emploi, ralentissait la transition verte prévue par la Bulgarie.

Le ministère de l’Environnement et de l’Eau a caché à la population que le système de contrôle de la qualité de l’air à Sofia ne rendait pas correctement compte des niveaux de pollution.

La Bulgarie a reculé de la 36e à la 46e place dans le classement de l’Indice de performance climatique.

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