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Bosnie-Herzégovine

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Bosnie-Herzégovine en 2024.

La criminalisation de la diffamation en Republika Srpska et les mesures plus répressives progressivement adoptées au niveau national se sont traduites par un net recul du pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse. Les Roms et les personnes de retour après la guerre de 1992-1995 se heurtaient toujours fréquemment à de la discrimination. Les conditions d’accueil des réfugié·e·s et des migrant·e·s se sont améliorées. Le paysage politique restait marqué par la négation du génocide et la glorification d’individus reconnus coupables de crimes de guerre.

CONTEXTE

La Bosnie-Herzégovine restait profondément divisée et politiquement fragile. La Republika Srpska a décidé en mai de rédiger un accord concernant une « séparation pacifique » de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Elle a également adopté une série de lois mettant en place des cadres juridique et institutionnel parallèles à l’échelle de l’entité, en violation de la Constitution de la Bosnie-Herzégovine. Christian Schmidt, le haut représentant de l’ONU pour la Bosnie-Herzégovine, a accusé les autorités de la Republika Srpska de continuer à « pervertir activement » l’État.

L’UE a ouvert en mars des négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine. Cette décision prise malgré l’absence de progrès concernant certaines réformes essentielles constituait une étape majeure. Les autorités n’ayant pas adopté le projet de programme de réforme 2024-2027, la Bosnie-Herzégovine était le seul pays des Balkans occidentaux à ne pas bénéficier du Plan de croissance de l’UE.

Les grandes formations nationales ont remporté la plupart des mairies aux élections municipales qui ont eu lieu en octobre, mais les partis d’opposition ont obtenu de meilleurs résultats dans les centres urbains.

Après une longue vague de chaleur pendant l’été, les pluies torrentielles du mois d’octobre ont entraîné des inondations et des glissements de terrain, qui ont fait 26 morts et détruit des centaines d’habitations dans plusieurs municipalités.

LIBERTÉ D'EXPRESSION ET D'ASSOCIATION

Des journalistes ont souvent été la cible de menaces et d’attaques verbales, y compris de la part de responsables des pouvoirs publics.

Un certain nombre de modifications du Code pénal de la Republika Srpska faisant de la diffamation une infraction sont entrées en vigueur au mois de janvier.

Selon un reportage d’investigation diffusé en juin, la récente évolution de la législation et les mesures de plus en plus répressives progressivement adoptées sous prétexte de lutte contre la désinformation ont eu pour effet de réduire la liberté d’expression, en particulier sur les réseaux sociaux, aussi bien en Republika Srpska que dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine.

Le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association a appelé en avril les autorités à revenir de toute urgence sur les lois et pratiques répressives qui menaçaient l’espace civique, la cohésion sociale et les institutions démocratiques.

Des manifestations de soutien à la Palestine se sont déroulées tout au long de l’année sans restrictions.

En mai, le gouvernement de la Republika Srpska a retiré du processus parlementaire le projet de loi sur l’enregistrement spécial des ONG et la publicité concernant leur action. Ce texte controversé aurait contraint les organisations à but non lucratif à s’inscrire dans un registre particulier et les aurait soumises à un contrôle juridique accru, avec la possibilité de les classer « agents sous influence étrangère ». Le président de la Republika Srpska, Milorad Dodik, a déclaré que ce projet de loi serait de nouveau présenté aux parlementaires après « harmonisation » avec les normes européennes.

La Bosnie-Herzégovine a reculé de la 64e à la 81e place dans le Classement mondial de la liberté de la presse publié par l’ONG Reporters sans frontières.

DISCRIMINATION

Au niveau de l’État, un certain nombre de dispositions discriminatoires de la Constitution et du Code électoral privaient toujours de réelle représentation politique les personnes qui ne se revendiquaient pas de l’un des « peuples constitutifs » de la Bosnie-Herzégovine (Bosniaques, Croates et Serbes).

Rien n’a été fait pour appliquer les arrêts et les recommandations de la Cour européenne des droits de l’homme, qui estimait que les modalités de répartition des pouvoirs dans le pays étaient discriminatoires.

Les Roms ont cette année encore fait l’objet d’exclusion sociale et de discrimination. La plupart vivaient dans la misère. Mal logés, ils étaient en grande partie exclus du marché du travail officiel et n’avaient qu’un accès limité aux services publics, notamment en matière de santé et d’éducation. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] a instamment prié les autorités de prendre des mesures d’urgence pour lutter contre la discrimination raciale systémique dont étaient victimes les Roms.

La Fédération de Bosnie-Herzégovine n’avait toujours pas renoncé au système, en place depuis des années, des « deux écoles sous un même toit », avec deux structures distinctes au sein d’un même bâtiment et deux programmes scolaires différents, pour les élèves bosniaques d’un côté et les élèves croates de l’autre, malgré les nombreuses décisions de justice estimant que cette pratique était discriminatoire.

Les cas de violences contre des personnes rentrées chez elles après la guerre de 1992-1995 ou déplacées lors du conflit se sont multipliés à l’approche du 11 juillet, date retenue pour commémorer les événements survenus à Srebrenica en 1995. En outre, les personnes rentrées après la guerre se heurtaient toujours à des obstacles en matière d’accès à l’éducation, aux soins de santé, à la protection sociale et à l’emploi.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

Les violences fondées sur le genre restaient très répandues. Au moins 11 femmes ont été tuées cette année par leur conjoint ou compagnon ou par un autre membre de leur famille.

Le Parlement de la Fédération de Bosnie-Herzégovine a adopté en juin une stratégie de prévention et de lutte contre les violences domestiques pour la période 2024-2027. Cette stratégie était destinée à renforcer les mesures de prévention de la violence, à apporter un meilleur soutien aux victimes et à mettre en place des programmes d’action auprès des auteur·e·s de violences.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

En août, un bateau transportant 30 réfugié·e·s et migrant·e·s, pour la plupart originaires de Syrie, a chaviré sur la Drina, la rivière marquant la frontière avec la Serbie. Au moins 11 personnes, dont un bébé de neuf mois, ont trouvé la mort dans ce naufrage.

Les pouvoirs publics ont considérablement amélioré les conditions d’hébergement des personnes réfugiées ou migrantes dans les centres d’accueil. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale s’est toutefois inquiété du maintien de la pratique de la détention administrative des migrant·e·s, y compris mineurs.

DROIT À LA VÉRITÉ, À LA JUSTICE ET À DES RÉPARATIONS

L’Assemblée générale des Nations unies a adopté en mai une résolution faisant du 11 juillet la Journée internationale de réflexion et de commémoration du génocide commis à Srebrenica en 1995. Un certain nombre de responsables politiques de la Republika Srpska continuaient de nier publiquement qu’un génocide et des crimes de guerre aient été commis et de glorifier des personnes condamnées pour de tels crimes. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a demandé aux autorités de Bosnie-Herzégovine d’enquêter sur tous les cas de discours de haine et d’engager des poursuites contre leurs auteur·e·s présumés.

Les tribunaux de la Republika Srpska continuaient d’appliquer des délais de prescription empêchant de nombreuses victimes de crimes de guerre de demander des réparations, notamment dans des affaires de violences sexuelles. Ils exigeaient en outre des victimes qu’elles règlent les frais de justice en cas de rejet de leur plainte.

Plus de 7 500 personnes étaient toujours portées disparues depuis la guerre qui a sévi de 1992 à 1995.

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