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Porto Rico

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains à Porto Rico en 2023.

Le gouvernement a souvent fait usage d’une force excessive contre des manifestant·e·s. Des propositions de loi présentées pendant l’année ont menacé l’accès à l’avortement. Les personnes LGBTI demeuraient en butte à la discrimination et avaient plus difficilement accès au logement que le reste de la population. Des féminicides ont continué d’être commis en toute impunité. Les personnes d’ascendance africaine faisaient toujours l’objet de discriminations. La hausse des prix des denrées alimentaires et de l’électricité risquait de mettre à mal les droits de la population.

LIBERTÉ D’EXPRESSION ET DE RÉUNION

Cette année encore, le gouvernement a intimidé des manifestant·e·s et fait un usage excessif de la force pendant des manifestations. Les violences commises par la police sont souvent restées impunies. Au moins 17 personnes qui protestaient contre des déplacements de population et des destructions de l’environnement ont été arrêtées au cours de manifestations.

Le 29 janvier, la police a arrêté cinq femmes et un homme pendant une manifestation organisée pour réclamer l’application d’une décision de justice ordonnant la démolition d’une construction illégale dans une zone côtière de la municipalité d’Aguadilla. En juillet, cinq manifestant·e·s ont été inculpés d’« entrave à l’exercice de l’autorité publique ».

Le 4 mars, la police a arrêté trois défenseur·e·s de l’environnement pendant des manifestations en faveur de la démolition et du retrait des débris d’un site de construction illégale à proximité d’une plage de la municipalité de Rincón. Ce chantier de construction soulevait des protestations depuis 2021 car il empiétait sur le domaine public, et un tribunal avait ordonné sa démolition.

Le 6 juillet, des résident·e·s de l’île de Vieques ont protesté contre la mise aux enchères de terrains publics, au motif qu’elle allait aggraver le problème des déplacements de population en augmentant le prix de l’immobilier. Selon l’organisation locale Colmena Cimarrona, la police a agressé physiquement des manifestantes.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

Plusieurs tentatives d’adoption de lois visant à restreindre le droit à l’avortement ont fait suite à l’arrêt de 2022 de la Cour suprême des États-Unis mettant fin à la reconnaissance du droit à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. En mars, la proposition de loi n° 1644 de la Chambre des représentants, finalement retirée, visait à punir de 25 ans de prison les femmes qui avortaient à Porto Rico. Soumise en 2021, la proposition de loi n° 495, qui prévoyait d’obliger toute personne de moins de 18 ans à obtenir l’autorisation d’au moins un parent ou tuteur ou tutrice légal avant de pouvoir avorter, était toujours débattue au Sénat.

En mai, des députées siégeant à l’Assemblée législative ont demandé l’intervention du gouvernement dans une affaire concernant quatre centres offrant des services d’interruption volontaire de grossesse qui n’auraient pas notifié aux autorités des procédures pratiquées sur des personnes de moins de 15 ans. Ce type de réglementation ciblée risquait d’être utilisé pour jeter le discrédit sur ces centres et entraver l’accès à l’avortement.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXES

Les personnes transgenres ont continué d’être la cible de discrimination. En juin, la Chambre des représentants a rejeté la proposition de loi n° 764, qui entendait limiter la participation d’athlètes transgenres à des compétitions dans la catégorie correspondant au genre auquel ces personnes s’identifiaient.

Toujours en juin, des membres de l’Assemblée législative ont tenté de censurer un atelier de lecture destiné à des enfants, au motif que des artistes travestis et des personnes transgenres devaient y participer. L’atelier a finalement pu se dérouler après un changement de lieu. En août, la Chambre des représentants a présenté sa proposition de loi n° 1821, qui visait à ériger en infraction les activités artistiques et les spectacles destinés aux enfants ou aux familles dans lesquels se produisaient des artistes travestis.

Le Sénat a approuvé la proposition de loi n° 427 visant à instaurer une politique publique contre la discrimination à l’égard des personnes âgées LGBTI qui cherchaient à accéder à un logement ou qui vivaient en maison de retraite. Une enquête du Centre de journalisme d’investigation et de l’organe de presse El Nuevo Día avait mis en évidence la discrimination subie par ces personnes au sein des établissements de soins de longue durée, faute de formations et de procédures appropriées pour un traitement digne.

D’après le dernier recensement, réalisé en 2020, Porto Rico était le territoire des États- Unis comptant le plus faible pourcentage de personne LGBTI (0,5 %) ou de couples de même sexe (0,2 %) ayant indiqué être propriétaires d’un logement.

DROITS DES FEMMES ET DES FILLES

D’après l’Observatoire de l’équité de genre de Porto Rico, une ONG, au moins 72 féminicides présumés ou avérés ont été signalés en 2023. En avril, l’Institut de la statistique de Porto Rico a ajouté à sa plateforme statistique une section sur les féminicides. À la fin de l’année, 19 féminicides y avaient été signalés.

En juin, la Chambre des représentants a approuvé la proposition de loi n° 1583, qui reconnaissait que la strangulation, la suffocation et l’asphyxie posturale non létales, infligées à des femmes sans intention de donner la mort, étaient des formes aggravées de maltraitance fondée sur le genre. Ces actes étaient déjà considérés comme des infractions pénales, mais sans que la dimension de genre soit prise en compte. À la fin de l’année, la proposition de loi était toujours en instance devant le Sénat.

Dans une enquête close en mai, la Commission des affaires féminines de la Chambre des représentants est parvenue à la conclusion que le Bureau de la police n’avait pas correctement enquêté sur des cas de violence domestique dans lesquels étaient impliqués des policiers.

Les femmes et les filles risquaient toujours d’être victimes de la traite des êtres humains, un crime rarement puni sur l’île. Le gouvernement et l’Assemblée législative ont continué de débattre de la proposition de loi n° 1237, présentée en juin par le Sénat, qui prévoyait la création d’un observatoire de la traite des êtres humains et d’un plan stratégique de lutte contre cette pratique.

DISCRIMINATION

La discrimination raciale restait préoccupante, et des actes de racisme contre des personnes noires étaient toujours régulièrement commis et banalisés. Une loi de 2021 prévoyait la collecte de statistiques sur le racisme et le lancement d’une campagne éducative de sensibilisation à la lutte contre le racisme et de reconnaissance de l’ascendance africaine à Porto Rico, mais elle n’avait pas été pleinement mise en œuvre.

La violence raciste s’est intensifiée et les autorités n’ont pas mené dans les meilleurs délais d’enquêtes indépendantes, impartiales et efficaces sur de possibles motifs discriminatoires. En août, un tribunal a déclaré un homme non coupable des faits de trouble à l’ordre public qui lui étaient reprochés dans une affaire de violence raciste présumée. Celle-ci concernait un différend entre voisins dans lequel l’une des parties aurait exercé une discrimination raciale à l’égard de l’autre partie et l’aurait harcelée depuis au moins 2019.

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

La situation économique et le coût de la vie ont eu une incidence sur la capacité de la population à exercer ses droits. D’après l’indice des prix à la consommation de Porto Rico, l’inflation des prix des denrées alimentaires a atteint 5,1 % en octobre.

En juin, le Bureau du recensement des États-Unis a publié des estimations de la capacité de résilience de la population portoricaine, sur la base de données de 2019. D’après ces chiffres, 46,1 % de la population portoricaine avait au moins trois facteurs de risque, relatifs, entre autres, à la pauvreté, au handicap, à l’emploi et à l’âge, et serait donc moins en mesure de résister à une catastrophe et de s’en remettre après coup.

En février, pour aider l’Autorité de l’énergie électrique de Porto Rico à s’acquitter de sa dette auprès de créanciers publics et privés, un nouveau mode de facturation a été annoncé aux consommateurs et consommatrices (avec un taux fixe et un tarif basé sur la consommation). Ce nouveau système a entraîné une hausse du coût de l’électricité, qui a donné lieu à un certain nombre de manifestations. Plusieurs coupures d’électricité ont perturbé l’île au cours de l’année.