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©AP/Press Association Images
Corée du Nord
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Corée du Nord en 2024.
Le gouvernement conservait la mainmise totale sur tous les aspects de la vie et restreignait fortement les droits à la liberté d’expression, à l’accès à l’information et à la liberté de circulation. Des milliers de personnes, notamment celles accusées de dissidence ou d’avoir tenté de fuir le pays, étaient incarcérées dans des camps pénitentiaires. Des personnes détenues ont été soumises à la torture et à d’autres mauvais traitements. Des exécutions publiques ont été signalées. Le travail forcé était utilisé de manière systématique à des fins de contrôle et pour faire fonctionner l’économie. Les pénuries alimentaires se sont aggravées, mais le gouvernement a continué de refuser l’aide internationale.
CONTEXTE
De graves inondations survenues en juillet ont détruit des milliers d’habitations et auraient fait jusqu’à 1 500 victimes (mortes ou portées disparues). Les relations diplomatiques entre la Corée du Nord et la Corée du Sud sont devenues de plus en plus tendues.
LIBERTÉ D'EXPRESSION
Les restrictions du droit à la liberté d’expression se sont intensifiées. Le gouvernement contrôlait strictement toutes les formes de communication, notamment en surveillant les appels téléphoniques, les SMS et l’activité en ligne et en interdisant les contacts avec le monde extérieur. L’accès aux informations émanant de sources extérieures restait également prohibé. Les médias étrangers, en particulier la presse, la télévision et la musique sud-coréennes, étaient interdits ; les autorités imposaient des sanctions sévères, notamment des peines de plusieurs années de « rééducation par le travail », aux personnes qui consultaient ou faisaient circuler de tels contenus. Des personnes ayant fui la Corée du Nord ont indiqué que la moindre critique, même minime, émise contre le gouvernement lors d’une conversation privée pouvait entraîner une arrestation et un placement en détention, ce qui contribuait à un climat de peur généralisée.
ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES
Les arrestations et détentions arbitraires étaient toujours monnaie courante. Des milliers de personnes, dont des familles entières, étaient semble-t-il incarcérées dans des camps pénitentiaires politiques (kwanliso) pour avoir tenté de fuir le pays, pratiqué leur religion ou adopté « une idéologie et une culture réactionnaires », entre autres infractions. Les Nord-Coréen·ne·s renvoyés de force par la Chine risquaient de subir de graves violations de leurs droits humains (détention arbitraire, travail forcé, torture ou autres mauvais traitements), voire d’être exécutés.
La torture et d’autres formes de mauvais traitements étaient couramment pratiquées contre les personnes incarcérées, et de façon particulièrement systématique dans les kwanliso. Des personnes ayant réussi à quitter le pays cette année ont fait état de coups et d’autres violences physiques ou psychologiques infligés aux détenu·e·s, à titre de sanction ou dans le but de leur arracher des « aveux ». Les femmes emprisonnées étaient particulièrement exposées au risque de violences sexuelles. Les personnes incarcérées risquaient aussi de graves préjudices physiques et psychologiques en raison des conditions inhumaines régnant dans les camps et notamment du manque de nourriture et de la privation de soins médicaux. Le gouvernement continuait de nier l’existence de ces camps.
TRAVAIL FORCÉ
Dans un rapport publié en juillet, le HCDH a indiqué que le travail forcé était généralisé et institutionnalisé, précisant que ce système de grande ampleur et multidimensionnel était utilisé pour contrôler et exploiter la population. Le Haut-Commissariat a identifié six types de travail forcé, parmi lesquels les emplois obligatoires attribués par l’État, la conscription militaire, l’envoi d’enfants scolarisés en « voyage de travail » et l’affectation de personnes à des « brigades de choc ». Selon ce rapport, le recours généralisé au travail forcé dans les prisons, où les personnes détenues étaient systématiquement soumises à l’obligation de travailler sous la menace de violences physiques, pourrait dans certains cas être constitutif du crime contre l’humanité de réduction en esclavage. Le travail forcé concernait le plus souvent les secteurs du bâtiment, de l’agriculture, de l’exploitation forestière et des mines. Il s’exerçait dans des conditions rudes et dangereuses lors de longues journées de labeur et ne faisait pas l’objet d’une indemnisation suffisante.
PEINE DE MORT
De nombreuses infractions étaient, semble-t-il, passibles de la peine de mort, parmi lesquelles le fait de tenter de fuir le pays, de consulter des médias étrangers ou de critiquer le gouvernement. On ignorait quelle était exactement l’ampleur du recours à la peine capitale, mais les informations recueillies auprès de personnes ayant fui le pays et d’organisations de défense des droits humains en Corée du Sud semblaient indiquer que les exécutions étaient fréquentes. Selon des informations non confirmées, jusqu’à 30 responsables publics ont été exécutés pour corruption et manquement à leurs obligations lors des graves inondations de juillet. Déclarées coupables d’avoir tenté d’aider des personnes à quitter le pays, deux femmes auraient été exécutées en public en août dans la ville de Chongjin (nord-est du pays).
DROIT À L'ALIMENTATION
Les pénuries alimentaires se sont aggravées en raison d’une sécheresse prolongée et d’inondations de grande ampleur qui ont endommagé les cultures et les infrastructures agricoles dans les comtés de Sinuiju et d’Uiji, dans la province du Pyongan du Nord. Selon des informations parues dans la presse, l’absence de réforme du système centralisé de distribution des denrées alimentaires, la priorité donnée à l’approvisionnement en nourriture des dirigeants politiques et militaires au détriment de la population et les sanctions internationales ont exacerbé la crise alimentaire. D’après les estimations des Nations unies, 10,7 millions de personnes, soit plus de 40 % de la population, étaient sous-alimentées. Les enfants et les personnes âgées souffraient de malnutrition, en particulier dans les zones rurales. Le gouvernement minimisait l’ampleur des pénuries de nourriture et a refusé les propositions d’aide alimentaire et d’autres formes de soutien formulées par des États et des organismes humanitaires internationaux.