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Illustration : Lola Bögelmann

Illustration : Lola Bögelmann

En France, un tiers des victimes de féminicides conjugaux ont été tuées par arme à feu

En France, un tiers des féminicides conjugaux sont perpétrés par arme à feu, et dans un cas sur deux, l’homme n’avait aucune raison évidente de posséder cette arme. Tuer sa compagne par arme à feu reste un mode opératoire courant. Malgré le renforcement de l’arsenal législatif, les violences conjugales ne donnent pas encore lieu à des perquisitions ou à des saisies systématiques. Pour affiner leur enquête, nos journalistes ont créé une base de données inédite. Celle-ci retrace l’origine des armes utilisées lors des féminicides et montre qu’elles sont souvent liées au monde de la ruralité.

Par Laurène Daycard et Fanny Marlier. Illustrations de Lola Bögelmann.

Un an après, sur le parking du centre-ville de Monéteau, commune de l’agglomération d’Auxerre (Yonne), il ne subsiste plus aucune trace du meurtre d’Angélique Clere, si ce n’est un bouquet de roses fanées, enseveli sous des herbes folles. Le 11 juin 2021, cette vendeuse à domicile de 32 ans a été tuée par son ex-compagnon, Kevin P. Elle venait d’installer son fils de deux ans sur le siège auto, pour récupérer l’aînée à la maternelle, quand leur père a surgi, armé d’un Sabatti calibre 12 à canon superposé. C’est un fusil de chasse pour « le gros gibier », indique l’armurerie où il se l’était procuré en 2014. Une première cartouche transperce le bras de son ancienne compagne. Kevin P. déclenche une seconde fois la détente pour viser la tête, ne lui laissant aucune chance de survie. Angélique Clere avait déposé quatre plaintes au cours des deux dernières années. Il n’avait jamais été question de réquisitionner les armes de ce chasseur.

« Personne n’aurait pu prévoir qu’il allait la tuer », se persuade aujourd’hui Florian Grigis, l’avocat des parties civiles. Angélique Clere a été sa première cliente, quand il s’est installé à Auxerre, après ses études de droit, en 2019. La trentenaire l’avait sollicité pour la garde alternée. « Elle ne m’avait pas tout de suite parlé des violences », se souvient-il, assis à son bureau. Angélique Clere a déposé une première plainte en août 2019, après deux épisodes de violences physiques ‒ ayant entraîné cinq et deux jours d’ITT1. « Je pense qu’il est capable de tuer Monsieur X. [son nouveau compagnon] et moi-même, puis il pourrait se tuer également », avait-elle alors expliqué aux gendarmes. Une composition pénale2 est proposée à Kevin P. : son casier restera vierge, mais il s’engage à ne pas prendre contact avec elle pendant six mois et à payer une amende de 500 euros. « Mon client a respecté toutes ses obligations et a également pris part à un groupe de parole avec d’autres auteurs de violences conjugales, certifie Me Fanny Vial, l’avocate de la défense. Il reconnaissait des violences mais pas dans les termes retenus par la justice, ce qui a nourri un sentiment de frustration. »

Angélique Clere porte plainte en avril 2020 lorsqu’il lui crache dessus, en pleine période de pandémie ‒ ce qui entraîne un simple rappel à la loi. En juin 2020, elle dépose une quatrième plainte contre X, parce que sa voiture a explosé. Elle n’a pas de preuves, mais elle soupçonne son ex. « Était-il dangereux ? », s’interroge Me Grigis, quand il referme le dossier. « Oui », glisse-t-il. Puis persiste : « Mais pas au point de se servir de ses armes de cette manière-là. Non, c’était inconcevable. » Enfin, en février 2021, elle retournera au poste de gendarmerie alors que Kevin P. a forcé le passage chez elle « en menaçant plusieurs fois qu’il allait me tuer ». Dans l’attente du procès, en décembre 2023, Kevin P. bénéficie de la présomption d’innocence.

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Des radars officiels défaillants

Plusieurs des éléments permettant de détecter un éventuel passage à l’acte sont réunis dans ce dossier : contexte de séparation et violences répétées avec menaces de mort. La possession d’armes à feu représente un danger exponentiel qui aurait dû élever l’alerte au niveau maximal. Il s’agit du mode opératoire dans 30 % des 606 féminicides conjugaux, enregistrés entre 2018 et 2022, selon les données de la Délégation aux victimes (DAV). Ce qui en fait l’arme privilégiée, après les objets contondants – type couteau de cuisine – utilisés dans 35 % de ces crimes.

L’une des promesses du Grenelle contre les violences conjugales de 2019 avait été de retirer des armes à feu dès le dépôt de plainte. Dans ce contexte, une grille d’évaluation du danger commune aux forces de l’ordre a été diffusée, par la circulaire du 28 janvier 2020. Elle devait permettre de mieux auditionner les dépôts de plaintes pour violences conjugales. Vingt-trois questions sont listées dont : « Votre partenaire ou ancien partenaire possède-t-il des armes à feu (déclarées ou non) ? » Rien de tel n’est encore systématisé, comme le rappellent le meurtre d’Angélique Clere et les trop nombreux assassinats qui lui ont succédé.

« Cela va faire deux ans, mais, pour nous, c’est comme si c’était hier », souffle sa mère, quand elle nous reçoit dans son pavillon avec vue sur les collines du Morvan. Les parents Clere élèvent leurs deux petits-enfants orphelins, dans la maison où ils avaient vu grandir Angélique, puis se lier avec son futur bourreau, originaire du village voisin. Ils estiment que les violences physiques ont démarré au moment de la première grossesse ; moment de bascule fréquent dans le parcours d’une victime. « Mais elle ne nous disait pas tout », raconte le père, assis dans leur cuisine, avant de sombrer dans le silence, le regard clair brouillé de larmes.

Malgré une législation réputée pour être l’une des plus strictes d’Europe, les armes à feu passent sous les radars dans les statistiques ministérielles. Le rapport sur les morts violentes au sein du couple, publié chaque année depuis 2006 par la DAV, est une véritable mine d’informations. Mais il n’apporte aucun élément précis sur le type d’armes à feu ni sur leur provenance, en dehors du ratio d’armes détenues légalement ou non, une donnée ajoutée sous l’impulsion du Grenelle. La DAV n’a pas été en mesure de nous fournir plus de détails, invoquant l’absence de remontées d’informations de la part des personnels de la police et de la justice. Même impasse du côté d’Interstat, incapable, pour un motif identique, de nous renseigner.

Pour pallier ce manque, nous avons entrepris la création d’une base de données inédite sur l’origine des armes (voir p. 20-21). Premier constat : les engagements du Grenelle énoncés plus haut n’ont pas un impact évident, puisque les années records sont 2019 et 2021, avec respectivement 47 et 40 féminicides conjugaux perpétrés par arme à feu.

De manière générale, aux assises, la question de la possession comme celle de la provenance d’une arme à feu par l’accusé semble peu approfondie : nous n’avons répertorié qu’un seul cas de mise en examen pour « détention d’armes et de munitions de catégorie B », après le féminicide d’une jeune Danoise dans le sud de la France. À la différence des autres modes opératoires, lors des procès, la défense avance très souvent la thèse du tir par accident. Mais la plupart du temps, il n’y a pas de procès : 69 % des hommes se suicident à l’issue du passage à l’acte, entraînant la clôture de l’action publique. Selon nos données, une moitié des hommes n’avaient aucune raison évidente de posséder une arme à feu, n’étant ni chasseur, ni membre des forces de sécurité, ni tireur sportif.

Les « armes de grenier »

Dans l’ensemble, les armes semblent davantage provenir d’une opportunité transmise par le bouche-à-oreille que du « grand banditisme ». Certaines sources nous ont raconté que le suspect s’était procuré l’arme par le réseau des connaissances, parfois le voisinage, sous des prétextes divers ; mais aussi sur Internet, via les réseaux sociaux ou des sites comme marche.fr. Cette plateforme, dans son lot de petites annonces, propose en effet des armes à la revente, tel ce calibre 12 vendu à 280 euros, ou cet internaute qui cherche à échanger un vélo de course contre un fusil. L’autre cas de figure typique, c’est l’héritage familial ou l’acquisition à une époque où la législation était plus souple. Ce que les autorités recouvrent sous l’étiquette, un peu fourre-tout « d’armes de grenier », des fusils ou des carabines – parfois des antiquités, héritées des aïeux – qui reposent dans les foyers, jusqu’à devenir des armes « d’opportunité » quand le schéma criminel se concrétise. Difficile de donner un nombre précis, mais l’Union française des amateurs d’armes estime qu’entre 5 et 10 millions d’armes civiles sont détenues illégalement. « À partir des années 1950, la réglementation a commencé à se renforcer dans un contexte d’attentats et de guerres coloniales, détaille son président Jean-Pierre Bastié. Dans les années 1980, seules les armes de chasse ne sont pas encore tout à fait régulées, ce qui sera finalement rattrapé dès 2010. »

C’est l’exemple de ce fusil à pompe Maverick Arms dont s’est emparé Dominique G., le 17 décembre 2020, pour tuer Cécile Piquet, avec qui il était en instance de divorce, à Domont (Val-d’Oise). C’était un legs familial, acheté par le père de l’assassin, alors que ce fusil était encore en vente libre, jusqu’en 1996, souligne le rapport de l’enquête de police. Consciente du danger, son ex-compagne avait alerté à de multiples reprises la gendarmerie locale. En vain. Le jour de l’assassinat, Cécile Piquet venait de boucler une journée de travail, au siège de Verte entreprise, florissante société spécialisée dans l’aménagement paysager. Avec la séparation, et surtout à cause des violences qu’il lui infligeait, l’ambiance était devenue irrespirable pour elle, comme pour les employés. Cécile Piquet travaillait d’arrache-pied pour racheter les parts de son mari et associé. Armé de son fusil, Dominique G. s’est frayé un passage par le grillage pour contourner les caméras de surveillance. En chemin, il blesse un salarié, avant de tuer Cécile Piquet, dissimulée sous un bureau, et de retourner l’arme contre lui. L’assaut dure une partie de la soirée. Les trois adolescentes du couple le découvrent en direct à la télévision. Elles sont aujourd’hui élevées par leurs grands-parents, Pierre et Véronique Piquet, qui nous reçoivent chez eux, une maison de maître dominant un terrain arboré. « Nous vivions dans la peur permanente depuis des années », s’en souvient son père, assis dans un bureau entouré de portraits de sa fille aux yeux rieurs.

Elle déposera au total 22 plaintes et mains courantes. L’arme ne sera jamais saisie.

Sur le chemin qui mène à l’entrée, posé contre une haie, un panneau orné de l’insigne d’un sanglier annonce : « Chasse en cours ». Face à l’invasion répétée des sangliers dans le jardin, leur ex-gendre, armé de son fusil, était déjà venu prêter main-forte. Le souvenir de cette arme avait refait surface en novembre 2018 quand Cécile Piquet s’était réfugiée chez ses parents, avec les filles. Elle demande le divorce. Elle récupère alors à son ancien domicile, des vêtements et les manuels scolaires abandonnés dans la précipitation. Des dizaines de cartouches jonchent le sol de la salle de bains. C’est une menace évidente. Elle le dénonce à la gendarmerie, les douilles à la main. « C’est très angoissant pour moi d’imaginer qu’il puisse encore la détenir, confie-t-elle dans un procès-verbal du 1er décembre 2018. Il est très dangereux, quand il dit qu’il va faire quelque chose, il le fait. Il est déterminé. » Soutenue par l’association de Sarcelles « Du côté des femmes », elle déposera au total 22 plaintes et mains courantes. L’arme ne sera jamais saisie.

L’une des promesses du Grenelle contre les violences conjugales de 2019 avait été de retirer des armes à feu dès le dépôt de plainte.

 

Le système de classification des armes à feu

Catégorie A

Armes de guerre, interdites aux particuliers.

Catégorie B

Soumises à autorisation, armes de poing et certaines d’épaule, pour des professionnels (forces de sécurité intérieure ou convoyeurs de fonds par exemple) et des tireurs sportifs.

« L’autorisation s’obtient auprès de la préfecture, suivant une procédure encadrée, nécessitant de fournir un certificat médical et de justifier d’un an de pratique dans un club de tir », indique Jean-Pierre Bastié de l’Union française des amateurs d’armes (UFA).

Catégorie C

Soumises à déclaration : armes à verrou, à air comprimé, etc. Cela concerne certains tireurs sportifs et les chasseurs licenciés. Cette catégorie apparaît le plus dans notre base de données.

Catégorie D

Armes de collection et historiques, en vente libre. « Ce sont essentiellement des armes dont les systèmes d’alimentation sont obsolètes », note l’UFA.

Selon les données de la DAV, dans deux cas sur cinq, les armes utilisées par un conjoint ou un ex-conjoint pour tuer n’étaient ni déclarées ni détenues légalement. Sous l’impulsion du Grenelle, cette mention figure, depuis 2019, sur les rapports annuels des morts violentes au sein du couple. La part d’armes non déclarées a décru ces dernières années, passant de 36 % des féminicides conjugaux en 2019 à 21 % de ces crimes en 2022, peut-être grâce à la campagne nationale d’abandon de ces armes, orchestrée du 25 novembre au 2 décembre 2022, par le ministère de l’Intérieur. Quelque 150 000 armes ont été déposées dans les gendarmeries et les commissariats par des particuliers qui en avaient souvent hérité sans trop savoir comment les conserver : pistolet allemand, fusil de chasse du grand-père, carabine du grenier. La plupart d’entre elles ont été détruites, à de rares exceptions près réservées aux vitrines de musées ; 76 000 armes ont été déclarées au sein d’un nouveau module du système d’information sur les armes (SIA), qui trace numériquement toutes celles achetées depuis 2011. Autre avancée, la procédure de dépôt des armes, dans le cadre d’une ordonnance de protection, a été simplifiée par une circulaire du 22 juillet 2021. En cas de refus, la justice peut perquisitionner le domicile pour procéder à la saisie, et en informer le procureur.

Le Maverick Arms de Dominique est malgré tout passé entre les gouttes. L’ancien domicile du couple est perquisitionné, mais les gendarmes repartent bredouilles. Cécile en est persuadée, l’arme a été déplacée chez sa belle-mère où vit Dominique. « Malgré toutes les plaintes, les gendarmes continuaient de réduire les violences à un minable conflit de ménage et ont aggravé les choses », dénonce son père, Pierre Piquet, contraint d’escorter sa fille jusqu’à son bureau. En janvier 2019, l’avocate de la victime, Me Sonia El Midouli, insiste pour que sa cliente soit placée sous ordonnance de protection et obtienne un téléphone « grave danger ». Le parquet de Pontoise, chargé de l’instruction, et réputé pour être pionnier dans la lutte contre les violences intrafamiliales en France, oppose pourtant un refus au motif que « la question se pose sur le danger actuel et imminent auquel Mme Piquet serait exposée », étant donné qu’elle n’habite plus sous le même toit que son ex-mari. Dominique G. sera condamné à deux reprises. Le 25 novembre 2019, date symbolique puisque c’est la Journée internationale contre les violences faites aux femmes, Dominique écope d’un an de prison avec sursis pour violences sur Cécile Piquet, avec une mise à l’épreuve de deux ans. Il est automatiquement inscrit sur le fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes (Finiada), ce qui n’enclenche toujours aucune perquisition effective. Par ailleurs, il lui est interdit d’entrer en contact avec son ex-femme « sauf au sein de l’entreprise », au motif que la justice ne peut l’empêcher de travailler. Le conjoint violent ne respecte pas ses obligations, il est condamné en septembre 2020 à trois mois ferme aménageables, pour avoir récidivé et craché sur Cécile Piquet dans leur bureau. Mais au moment de l’assaut, le 17 décembre, la peine n’était toujours pas entrée en application. Contacté, le parquet de Pontoise n’a pas donné suite à notre demande d’interview. D’après nos informations, un « retex » (retour d’expérience) a été mené, sans que nous en connaissions les conclusions. Pour que le drame qu’a subi leur fille « n’arrive pas à d’autres », les parents Piquet préparent aujourd’hui un dossier de plainte contre l’État pour faute lourde. Si les décisions sont encore rares, ces procédures se multiplient depuis quelques années. Les parents d’Angélique Clere n’ont pas envisagé cette possibilité. Ils attendent avec appréhension le procès aux assises de l’Yonne (6, 7 et 8 décembre), durant lequel ils vont faire face à leur ancien gendre. Il encourt la perpétuité. À Monéteau, dans un parc situé à quelques dizaines de mètres du parking, la mairie a fait apposer une plaque à la mémoire de la victime, sur laquelle a été gravé « à toutes les femmes victimes de violences ». Dans le Morvan, la mère d’Angélique nous salue. Elle a tatoué sur son avant-bras : « Tu n’es plus là où tu étais, mais tu es toujours là où je suis. » 

 

1— Incapacité temporaire de travail.

2— Procédure permettant de proposer des sanctions à une personne qui a commis certaines infractions, souvent de faible gravité.

3— Le service statistique ministériel de la Sécurité intérieure produit un rapport annuel sur les homicides en France : environ un tiers des victimes sont des femmes.

Une collecte de données inédite sur les féminicides par arme à feu

Féminicides par arme à feu 2018-2022

Un travail de fourmi

À ce jour, aucune statistique officielle ne répertorie dans le détail les féminicides par arme à feu. Tout repose sur le travail bénévole. Un décompte inter-organisation a commencé pour visibiliser l’ensemble des féminicides, notamment des personnes trans. En attendant, pour pallier ce manque, nous avons entrepris la création d’une base de données inédite en identifiant 168 féminicides perpétrés par arme à feu de 2018 à 2022, en France. Pour ce travail de fourmi, nous avons consulté de multiples sources : actes de décès en ligne, mairies, proches de victimes et avocats des parties civiles ou de la défense, brigades de gendarmerie et de police. Nous avons bénéficié de l’aide de journalistes de la presse locale et compulsé des articles de presse recensés par les bénévoles de la page Facebook « Féminicides par compagnons ou ex ». Enfin, nous avons adressé une demande écrite aux quelque 100 parquets pour obtenir des éléments sur le modèle d’armes utilisées, le profil des meurtriers et les éventuels antécédents de violences. Une vingtaine de parquets ont répondu favorablement. Ces croisements d’informations nous ont permis d’établir la première base de données française retraçant l’origine des armes et le profil des meurtriers. Les fins de non-recevoir sont toutes aussi informatives : certains parquets n’ont pas donné suite, car le contenu du dossier ne permettait pas d’apporter d’éclairages précis sur l’arme utilisée. En outre, près de 70 % des cas de féminicides perpétrés par armes à feu ne sont pas jugés, parce que l’homme se suicide à l’issue du passage à l’acte.

Les profils des meurtriers

Les armes répertoriées par nos soins sont souvent associées à l’univers de la chasse et de la ruralité, avec une prégnance de carabines 22 long rifle et de fusils calibre 12. La pratique de la chasse est le premier motif ouvrant un droit au port d’armes dans la législation française. La Fédération nationale des chasseurs enregistre plus de 5 millions de porteurs de permis. Pour les civils, l’autre exception est relative aux tireurs sportifs : 250 000 licenciés, d’après la Fédération française de tir. Ces deux profils ne sont pas majoritaires dans cette base, où nous avons identifié les profils des auteurs dans 104 des 168 affaires. Cet échantillon comprend 35 % de chasseurs (dont 8 % d’anciens chasseurs) et 8 % de tireurs sportifs. Nous avons aussi recensé 6 % de féminicides par arme à feu perpétrés par des membres des forces de sécurité intérieure, dotés d’armes de service. Pour le reste, soit 51 %, mis à part quelques cas éventuels de collectionneurs, ces hommes n’avaient pas de raison évidente de posséder une arme à feu.

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