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©Rafalia Henitsoa/Anadolu Agency/Getty Images

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Madagascar

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains à Madagascar en 2023.

Les conditions de détention demeuraient mauvaises. Les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique restaient soumis à des restrictions et les forces de sécurité ont fait usage d’une force excessive pour disperser des manifestant·e·s. L’État n’a pas protégé les défenseur·e·s de l’environnement contre les menaces, les manœuvres d’intimidation, le harcèlement et les arrestations arbitraires. Les phénomènes climatiques extrêmes et la sécheresse ont entraîné des déplacements internes de grande ampleur et l’insécurité alimentaire s’est accentuée. Des femmes, des personnes LGBTI et des personnes atteintes d’albinisme ont été victimes de discrimination.

CONTEXTE

La réélection du président Andry Rajoelina a été confirmée par la Haute Cour constitutionnelle le 1er décembre.

DROITS DES PERSONNES DÉTENUES

Les conditions de détention demeuraient mauvaises, que ce soit dans les prisons, dans les postes de police et de gendarmerie ou dans les centres psychiatriques. En mai, le Sous-comité pour la prévention de la torture [ONU] a visité des établissements pénitentiaires malgaches et s’est de nouveau dit préoccupé par la surpopulation carcérale.

La Commission nationale indépendante des droits de l’homme, qui faisait office de mécanisme national de prévention (organisme chargé de réaliser un suivi et de faire des recommandations pour protéger les droits des personnes détenues), manquait toujours de personnel et de ressources. Sa capacité à suivre et à améliorer la situation sur le plan des droits humains dans les lieux de détention était donc limitée.

LIBERTÉ DE RÉUNION ET D’ASSOCIATION

Pendant la période préélectorale, les forces de sécurité ont empêché les partis d’opposition de mener leurs activités de campagne. Le 4 avril, le ministère de l’Intérieur a déclaré que les réunions politiques ne pouvaient pas être organisées en extérieur, et que la tenue de toute manifestation publique était soumise à une autorisation au titre de l’ordonnance n° 60-082 du 13 août 1960. Ce texte, appliqué tout au long de la campagne électorale, n’était pas conforme aux normes internationales relatives au droit de réunion pacifique.

Avec cette déclaration, le ministère a voulu restreindre la possibilité pour les partis d’opposition d’exercer leur droit de se réunir pacifiquement. Entre le 10 octobre et le 16 novembre, dates de début et de fin de la campagne électorale en vue de la présidentielle, au moins 20 cas de violation des droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique ont été recensés.

En octobre, la préfecture d’Antananarivo a interdit à des manifestant·e·s appartenant à des partis d’opposition l’accès à plusieurs secteurs clés de la capitale. Des journalistes ont été arrêtés et des candidat·e·s à la présidentielle ont été blessés. Certaines informations ont en outre fait état d’arrestations arbitraires de militant·e·s politiques et de passant·e·s.

Les autorités ont recouru de façon abusive au droit pénal en vue d’arrêter, de placer en détention ou de menacer des personnes exprimant des opinions différentes de celles du pouvoir en place. Le HCDH s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation des droits humains dans le pays, notant que les forces de sécurité avaient eu recours à une force illégitime et disproportionnée contre des manifestant·e·s.

Il a également été porté atteinte aux droits à la liberté de réunion pacifique et d’association de défenseur·e·s de l’environnement. Les autorités n’ont pas protégé ces personnes contre les menaces et les attaques de la part d’autres membres de la population locale ou des forces de sécurité.

Le 5 juillet, la militante écologiste Angélique Decampe a été menacée de mort par un voisin en raison des actions qu’elle menait pour protéger la forêt de Vohibola contre les braconniers et la déforestation. Le même mois, dans la région Anôsy, les forces de sécurité ont arrêté plus de 80 manifestant·e·s de l’association LUSUD (Lutte pour le Sud) qui bloquaient une route pour empêcher la compagnie minière Rio Tinto (opérant sous le nom de sa filiale QIT Madagascar Minerals [QMM]) de poursuivre ses activités d’extraction.

En août, l’ensemble de ces personnes avaient été remises en liberté. Toutefois, les dirigeants de l’association LUSUD, Eugène Chrétien et Laurent Manjary, qui n’avaient pas été arrêtés pendant la manifestation, étaient toujours visés par un mandat d’arrêt.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Le 23 mars, les autorités ont arrêté Lôla Rasoamaharo, propriétaire du journal La Gazette de la Grande île, pour tentative d’extorsion de fonds, diffamation, menaces et injures, après avoir mené une perquisition dans les bureaux du quotidien et confisqué du matériel. Cette arrestation survenait à la suite d’un différend de longue date entre Lôla Rasoamaharo et le maire d’Antananarivo, qui s’affrontaient à travers les pages de leurs journaux respectifs.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

D’après le Bureau national de gestion des risques et des catastrophes, le cyclone Cheneso a entraîné le déplacement de quelque 90 870 personnes et fait au moins 33 morts dans le sud-est du pays en janvier. Puis, en février, le cyclone Freddy a détruit des cultures commerciales, accentuant l’insécurité alimentaire dans la région. L’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones sinistrées a été entravé par les dégâts occasionnés aux infrastructures, notamment à des centres de santé, et par le fait que les secteurs concernés étaient isolés.

La situation dans la région du Grand Sud, frappée par la sécheresse, s’est quelque peu stabilisée au cours de l’année, avec une amélioration de l’accès à l’aide humanitaire. La sécurité alimentaire restait cependant précaire. La dépendance des populations locales envers l’assistance humanitaire renforçait leur vulnérabilité face à de nouveaux phénomènes météorologiques extrêmes liés au changement climatique.

Pendant l’année, le gouvernement a pris des mesures de prévention des catastrophes causées par les cyclones, en diffusant des alertes et en évacuant les zones concernées. Cependant, Madagascar n’ayant pas reçu suffisamment de fonds de la part des États développés, en dépit des obligations de ces derniers au regard de l’Accord de Paris, il était difficile pour le pays de s’adapter aux changements climatiques et de faire face aux pertes et préjudices qui en résultaient.

DROITS DES PERSONNES DÉPLACÉES

Les déplacements forcés dus à des phénomènes à évolution lente, tels que l’élévation du niveau de la mer ou la hausse des températures, et à des phénomènes à évolution rapide se sont multipliés. D’après l’Observatoire des situations de déplacement interne (une ONG internationale) et des informations parues dans les médias, plus de 2 000 personnes de la région du Grand Sud ont dû s’installer dans des zones urbaines et rurales du nord du pays pour fuir la sécheresse.

Faute de protection accordée par le gouvernement aux personnes déplacées, des cas de violences sexuelles contre des femmes, de traite d’êtres humains et de tensions entre les populations d’accueil et les personnes déplacées, souvent liées à des différends relatifs à l’utilisation des terres, ont été signalés.

DISCRIMINATION

Les femmes et les filles, les personnes LGBTI et les personnes atteintes d’albinisme faisaient partie des groupes en butte à la discrimination et à l’inégalité.

Les droits reproductifs des femmes et leur accès aux soins de santé étaient restreints ; l’avortement restait illégal en toutes circonstances. La discrimination liée au genre était très répandue et touchait de manière disproportionnée les femmes et les filles, en particulier dans le milieu éducatif. En effet, selon des informations parues dans les médias, des idées préconçues sur les rôles attribués à chaque genre y circulaient, faisant le lit de l’inégalité et de la discrimination à l’égard des filles.

Les personnes LGBTI étaient la cible de discrimination et de marginalisation, en droit comme en pratique. En mai, une femme transgenre de 56 ans a subi des violences physiques de la part de militaires en raison de son identité.

Des personnes atteintes d’albinisme ont été prises pour cible de façon récurrente, et plusieurs ont été victimes d’agressions et de meurtres rituels. Au moins 12 cas d’enlèvements de personnes atteintes d’albinisme ont été recensés au cours de l’année, motivés par de fausses croyances selon lesquelles l’utilisation de parties de leur corps pouvait porter bonheur.

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