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© Stringer/AFP/Getty Images

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Congo

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Congo en 2024.

Des centaines de personnes ont été arrêtées de façon arbitraire dans le cadre d’une opération policière. Des figures de l’opposition ont été maintenues en détention arbitraire. Des ONG ont dénoncé l’absence de données publiques sur les violences liées au genre et l’impunité dans les affaires de violences sexuelles. Les autorités ont accordé un permis d’exploration pétrolière dans un parc naturel protégé. Le ministère de l’Environnement a suspendu les activités d’une entreprise de recyclage du plomb à Vindoulou en raison de risques sanitaires et ordonné son démantèlement. Le droit à la santé était compromis par le faible avancement des projets dans ce domaine. Les autorités ont réinstallé de force des habitant·e·s du village de Mpili pour laisser la place à une activité d’extraction de potasse.

CONTEXTE

En septembre, des partis d’opposition ont demandé au président, Sassou Nguesso, d’ouvrir un dialogue politique national avant l’élection présidentielle de 2026.

Le même mois, le Fonds monétaire international a approuvé un prêt de 43 millions de dollars des États-Unis destiné à soutenir l’économie congolaise, mais a demandé au pays davantage d’efforts pour améliorer la transparence des finances publiques et du secteur des hydrocarbures, ainsi que la poursuite du travail de lutte contre la corruption. En mars, le parquet fédéral des États-Unis a indiqué que des « fonds détournés des caisses de l’État » avaient servi à acheter un luxueux appartement dans l’immeuble Trump International Hotel and Tower à l’usage de la fille de Sassou Nguesso.

Le pays a connu de nombreuses coupures d’électricité, plongeant souvent dans le noir des arrondissements de Brazzaville, la capitale, et de Pointe-Noire.

DÉTENTION ARBITRAIRE

Les autorités de Brazzaville ont lancé en mai une opération de lutte contre la criminalité baptisée Opération coup de poing. En juin, le procureur de la République a annoncé dans une déclaration publique que 580 personnes avaient été interpellées, dont 247 avaient été remises en liberté par la suite. Le Centre d’actions pour le développement, ONG congolaise, a qualifié ces arrestations d’arbitraires et a critiqué le fait que les personnes détenues ne pouvaient pas bénéficier d’une assistance juridique et subissaient des mauvais traitements.

André Okombi Salissa et Jean-Marie Michel Mokoko étaient toujours emprisonnés. Candidats à l’élection présidentielle de 2016, les deux hommes avaient été condamnés à 20 ans de réclusion en 2019 et 2018, respectivement, pour « atteinte à la sécurité intérieure de l’État » et « détention illégale d’armes et munitions de guerre ». Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a dénoncé le caractère arbitraire de leur incarcération.

DROITS DES FEMMES ET DES FILLES

Un rapport remis par plusieurs ONG au Conseil des droits de l’homme de l’ONU à l’occasion de la session de janvier de l’EPU a souligné que, malgré les avancées apportées par la Loi Mouebara no 19-2022 portant lutte contre les violences faites aux femmes, d’importants obstacles demeuraient, en particulier dans l’accès des victimes à la justice. Ces ONG ont dénoncé l’absence de statistiques officielles compilant les données sur les violences liées au genre, ventilées par genre, âge ou type de violence, et ont déploré le nombre toujours faible de poursuites judiciaires dans ce type d’affaires.

Selon les données recueillies entre 2020 et 2022 par Actions de solidarité internationale à Brazzaville et à Pointe-Noire, sur les 332 victimes de violences liées au genre dont les cas ont été suivis par l’organisation, seules 130 ont porté plainte auprès des services de police ou de gendarmerie. Sur ces 130 affaires, 46 ont donné lieu à un procès, et seulement sept ont abouti à une condamnation (2 %). Soixante autres (18 %) se sont conclues par un règlement à l’amiable. L’organisation a aussi dénoncé le manque de formation du personnel judiciaire et hospitalier pour s’occuper des victimes, en particulier des mineures.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

En janvier, plusieurs dizaines d’organisations congolaises et internationales ont dénoncé l’attribution par les autorités de l’État d’un permis d’exploration pétrolière à China Oil Natural Gas Overseas Holding United dans le parc national de Conkouati-Douli. Ce permis a été octroyé en dépit d’un accord de protection des forêts de 50 millions de dollars des États-Unis conclu récemment avec des bailleurs de fonds internationaux. Le parc, connu pour la richesse de sa biodiversité et ses villages de pêcheurs utilisant des méthodes traditionnelles, était protégé par un décret de 1999 interdisant l’extraction de pétrole.

En juin, le ministère de l’Environnement a ordonné la suspension des activités de l’entreprise de recyclage Metssa Congo dans le quartier de Vindoulou, à Pointe-Noire, en raison de risques pour l’environnement et la santé de la population aux alentours de l’usine. Le ministère a ouvert en août une « enquête technique » sur la pollution de l’air provoquée par les activités de cette usine. Dans ce cadre, des tests sanguins ont été réalisés sur des employé·e·s et des habitant·e·s. En décembre, une fois l’enquête achevée, l’entreprise a commencé son démantèlement et les autorités ont annoncé leur intention de mettre sur pied une commission chargée d’identifier les victimes de l’usine et de faire en sorte qu’elles soient indemnisées.

L’entreprise, qui fabriquait des lingots de plomb, n’avait pas réalisé d’évaluation de l’impact environnemental de son usine avant sa mise en activité en 2013, en violation du droit congolais, et des tests sanguins effectués à l’initiative des habitant·e·s ont révélé des niveaux de plomb dépassant largement les limites recommandées par l’OMS.

DROIT À LA SANTÉ

Le 24 avril, la coalition congolaise Publiez ce que vous payez a rendu public un rapport révélant que, sur les 55 projets d’investissement dans le domaine de la santé qu’elle avait suivis entre 2020 et 2022, dont le total s’élevait à 160 milliards de francs CFA (environ 268 millions de dollars des États-Unis), seulement 2 % avaient été menés à terme. Selon le rapport de la coalition, 51 % de ces projets n’avaient même pas commencé. Seules 17 % des femmes enceintes atteintes de paludisme léger recevaient un traitement gratuit, et seulement 6 % des femmes ayant eu besoin d’une césarienne ont pu en bénéficier sans frais, bien que la gratuité de cette opération ait été instaurée par décret présidentiel en 2021.

EXPULSIONS FORCÉES

En juillet, plusieurs habitant·e·s de Mpili, dans le département du Kouilou, ont dénoncé leur réinstallation forcée, qui visait à laisser la place à l’entreprise chinoise Luyuan des Mines Congo pour y extraire de la potasse. La population a été relogée sur des terrains plus petits, dans des maisons sans électricité. Les personnes qui disposaient auparavant de terrains plus grands qu’elles utilisaient pour l’agriculture et l’exploitation forestière ont perdu leurs moyens de subsistance. Les autorités ont affirmé que la procédure d’expropriation et de réinstallation avait été menée en consultation avec les habitant·e·s de Mpili et dans le respect du droit congolais. Cependant, pour la Commission justice et paix du Congo, il pourrait s’agir d’expulsions forcées.