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Destruction de la rue principale à Saada au Yémen © Amnesty International

Destruction de la rue principale à Saada au Yémen © Amnesty International

Contrôle des armes

Espagne : une occasion à ne pas manquer

Le gouvernement espagnol avait annoncé qu’il allait éventuellement suspendre un transfert d’armes vers l’Arabie saoudite puis il a fait marche arrière. Mais tout n’est pas perdu.

France, Royaume-Uni, États-Unis… Les États qui continuent de fournir des armes à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite risquent de s’inscrire dans l’histoire comme complices des crimes de guerre commis au Yémen.

Entre 2015 et 2017, l'Espagne a exporté vers l'Arabie saoudite des armes pour un montant de 932 millions d'euros et autorisé des licences pour un montant de 1 235 millions d'euros.

Lire aussi : Yémen : le débat européen sur les ventes d'armes

L’Espagne fait marche arrière

Le 4 septembre 2018, le gouvernement espagnol a annoncé qu'il allait annuler la vente de 400 bombes à guidage laser à l'Arabie saoudite, à la suite du tollé international soulevé par la frappe aérienne qui a touché un bus scolaire au Yémen, tuant quarante enfants.

Il est ensuite revenu sur cette décision le 12 septembre, invoquant la nécessité d'« honorer ce contrat ». Tous les contrats conclus avec l'Arabie saoudite sous le précédent gouvernement espagnol sont passés en revue depuis quelques semaines, et une décision finale doit être prise mercredi 19 septembre au sujet de l'annulation des licences d’exportation existantes et de la suspension de nouvelles licences.

Des munitions à guidage de précision comme celles que l'Espagne s'apprête à livrer à l’Arabie saoudite ont été utilisées au Yémen, avec des effets dévastateurs. Elles ont frappé des hôtels, des hôpitaux, des puits d'eau, des bâtiments d'habitation, des usines et récemment un bus scolaire, faisant de nombreuses victimes civiles et détruisant des infrastructures civiles.

Lire aussi : Le rapport de l'ONU sur les ventes d'armes

L’intérêt financier avant l’intérêt humain

Nous espérons que l’Espagne prendra position le 19 septembre et suspendra les transferts d'armes à destination de l'Arabie saoudite et d'autres membres de la coalition susceptibles d'être utilisées au Yémen.

Toute autre mesure adresserait un message limpide : le gouvernement espagnol préfère protéger ses intérêts financiers que la vie des civils yéménites.

L'Espagne a ratifié le Traité sur le commerce des armes (TCA), qui interdit le transfert d'armes, de munitions et d'articles connexes entre États, lorsque l'on sait qu'ils serviront à commettre des crimes de guerre.

La loi espagnole sur les exportations d'armes interdit les transferts d'armes lorsqu'il existe des doutes raisonnables qu'elles puissent servir à commettre des violations des droits humains.

Aux termes des Conventions de Genève, l'Espagne est également tenue de respecter et de faire respecter le droit international humanitaire, y compris en s'abstenant de fournir des armes utilisées pour violer les Conventions.

Lire notre dossier : Le conflit au Yémen

Une vague de protestation mondiale

De nombreux États, dont la France, continuent de fournir des armes à la coalition dirigée par l'Arabie saoudite, malgré des années d'une guerre dévastatrice au Yémen. Pourtant, depuis quelques semaines, la pression a augmenté vis-à-vis des principaux fournisseurs.

Lire aussi : Yémen et ventes d'armes françaises : nous avons le droit de savoir

Le 11 septembre 2018, des députés britanniques ont organisé un débat d'urgence sur cette question, au cours duquel le gouvernement britannique a défendu la poursuite des ventes d'armes. D’après un sondage publié le même jour, 13 % seulement de la population britannique soutient les ventes d'armes à l'Arabie saoudite.

Le 12 septembre, le Congrès des États-Unis a obtenu la tenue d’un débat pour déterminer si l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis prennent des mesures suffisantes afin de protéger les civils au Yémen. Le gouvernement de Donald Trump a déclaré que les deux pays « prennent des mesures manifestes pour réduire le risque de dommages aux civils et aux infrastructures civiles », donnant le feu vert au soutien inchangé des États-Unis.

La tendance s’inverse

Des signes encourageants ont récemment montré que la tendance s'inverse. L'an dernier, de nombreux pays comme la Belgique, l'Allemagne, la Norvège et la Grèce ont réagi à la pression de l'opinion publique en suspendant partiellement ou totalement les transferts d'armes vers l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et d'autres membres de la coalition.

Des recours juridiques sont en cours au Royaume-Uni, en France et en Italie pour obliger ces gouvernements à respecter leurs obligations légales et à cesser de fournir des armes pouvant être utilisées au Yémen.

De plus en plus de pays prennent conscience du fait qu'armer l'Arabie saoudite et la coalition qui bombarde le Yémen est incompatible avec le droit international et les principes humanitaires, et des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni et la France semblent en décalage par rapport au consensus international qui se renforce.

En France, 90 députés de tous bords politiques soutiennent la mise en place d'une commission d'enquête sur les ventes d'armes françaises à la coalition menée par l’Arabie saoudite Mais celle-ci est pour l’instant bloquée au niveau de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale.

Lire aussi : Ventes d'armes : en route vers la transparence

Cette semaine, le gouvernement espagnol doit faire un choix. Nous demandons à l'Espagne de montrer l'exemple et de clore ce chapitre honteux de son histoire.

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