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Intérieur d'une cellule © Fedorov Oleksiy

Intérieur d'une cellule © Fedorov Oleksiy

Peine de mort et torture

Égypte : l'isolement pour torturer

De nombreux journalistes, défenseurs des droits humains et membres de l'opposition sont détenus à l'isolement de façon prolongée et soumis à d'épouvantables conditions de détention.

Mise à jour : L'isolement en détention : la réponse du gouvernement égyptien

« La première fois que j'ai revu Hisham, après son arrestation, ça a été à l'hôpital. Il m'a décrit la cellule où il avait été placé à l'isolement. Il ne pouvait rien distinguer du fait de l'obscurité dans cette cellule. Il avait du mal à respirer, car il n'y avait pas de fenêtre ni d'autre aération. Il a dit qu'il avait l'impression d'avoir été enterré vivant. Quand les gardiens l'ont finalement fait sortir de cette cellule, cela a été comme une renaissance pour lui. Mais au bout de quelques mois seulement passés à l'hôpital de la prison, il a de nouveau été placé en détention à l'isolement », a indiqué Manr el Tantawie, l'épouse de Hisham Gaafar, détenu à l'isolement dans la prison d'al Aqrab.

Les détenus placés à l'isolement sont soumis à des passages à tabac, à des humiliations, à une restriction de leurs déplacements et ils ne reçoivent pas de nourriture suffisante, dans certains cas plusieurs années de suite.

Le maintien en détention à l'isolement de façon prolongée est utilisé pour obliger les prisonniers à faire des aveux et pour les sanctionner s'ils protestent contre les mauvais traitements infligés par les autorités de la prison.

Des opposants torturés

Nos dernières recherches révèlent que de nombreux militants des droits humains, journalistes et membres de l'opposition placés en détention à l'isolement sont soumis à de terribles violences physiques : ils sont frappés par les gardiens de prison, et on leur plonge à plusieurs reprises la tête dans un récipient rempli d'eau polluée par des excréments humains, notamment.

Les souffrances psychiques et physiques qui leur sont infligées de façon intentionnelle causent des crises de panique, des troubles paranoïaques, une hypersensibilité aux stimuli, et des difficultés de concentration et de mémorisation.

Comprendre : Qu'est-ce qu'un prisonnier d'opinion ?

Le droit international prévoit que la détention à l'isolement ne peut être utilisée à titre de mesure disciplinaire qu'en dernier recours, mais les autorités égyptiennes l'utilisent pour infliger aux prisonniers politiques une terrible sanction "supplémentaire", de façon cruelle et arbitraire, et dans le but d'écraser leur humanité et de leur faire perdre tout espoir en un avenir meilleur.

En Égypte, les conditions de détention ont toujours été mauvaises, mais la cruauté délibérée de ces agissements témoigne du mépris généralisé des autorités égyptiennes à l'égard des droits humains et de la dignité humaine.

Des conditions d’enfermement inhumaines

Nous avons rassemblé des informations sur 36 cas de prisonniers soumis à une détention à l'isolement prolongée et pour une durée indéterminée. Six d'entre eux sont détenus de façon illégale et coupés du monde extérieur depuis 2013.

D'anciens prisonniers interrogés ont expliqué qu'ils avaient été frappés par des responsables de la prison pendant de longues périodes, puis détenus dans des pièces exiguës, seuls, plusieurs semaines de suite.

Ils sont soumis à des conditions d'hygiène déplorables et n'ont pas de matériel de couchage digne de ce nom. D'anciens prisonniers qui ont été longtemps maintenus en détention à l'isolement, ont déclaré que cette expérience les a profondément marqués psychologiquement.

Ils souffrent de dépression, d'insomnie et ne veulent pas fréquenter les autres détenus ou parler avec eux quand ils sont réintroduits au sein de la population carcérale.

Parmi les personnes ciblées figurent également des membres de tout un ensemble de partis politiques et de mouvements de l'opposition, notamment les Frères musulmans et le Mouvement de la jeunesse du 6 avril.

Tous les cas examinés suivent le même schéma, avec des détenus enfermés dans leur cellule plus de 22 heures par jour, et un temps d'exercice quotidien de 30 minutes à une heure. Les contacts avec les autres prisonniers ne sont pas autorisés, les prisonniers sont privés de visites régulières de leurs proches, et l'un d'entre eux n'avait pas reçu une seule visite depuis octobre 2016.

Lire aussi : Portrait de Shawkan, un journaliste enfermé en Égypte

L’isolement pour éradiquer la dissidence

La détention à l'isolement est parfois utilisée pour sanctionner les prisonniers qui se plaignent de mauvais traitements, et ceux dont on sait qu'ils ont envoyé des lettres faisant état de mauvaises conditions de détention.

Les responsables des prisons égyptiennes utilisent illégalement la détention à l'isolement pour éradiquer la dissidence ou tout comportement des détenus perçu comme répréhensible, alors qu'un grand nombre d'entre eux ont été emprisonnés sur la base d'accusations mensongères.

En Égypte, les défenseurs des droits humains, les journalistes et les membres de l'opposition sont non seulement pris pour cible pour avoir exprimé leurs opinions pacifiquement dans le monde extérieur, mais aussi victimes de nouvelles persécutions derrière les barreaux.

En raison de la gravité des faits découverts, nous avons soumis aux autorités égyptiennes, le 16 avril, un document présentant un résumé de ses recherches. À ce jour, aucune réponse.

Depuis que l'ancien président Mohamed Morsi a été remplacé, le 3 juillet 2013, par le président Abdelfattah al Sissi, qui a entamé un second mandat, les autorités égyptiennes ont arrêté des dizaines de milliers de personnes sur la base d'accusations motivées par des considérations politiques.

Les situations de 36 prisonniers étudiées

Cette enquête examine la situation dans 14 prisons situées dans sept gouvernorats distincts en Égypte, notamment la prison de Liman Tora, la maison d’arrêt de Tora et la prison de sécurité maximale n° 1 de Tora (plus connue sous le nom de prison d'al Aqrab, ou prison Scorpion).

Sur les 36 cas de prisonniers étudiés dans le rapport, 20 concernent des personnes maintenues en détention à l'isolement de façon prolongée dans des prisons du complexe pénitentiaire de Tora.

Ces prisons sont situées dans des gouvernorats où les forces de sécurité ont arrêté et incarcéré plusieurs milliers de personnes sur la base d'accusations motivées par des considérations politiques.

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