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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

Une femme de la communauté Mro © RICHARD SARGENT/AFP/Getty Images
Conflits armés et protection des civils

Myanmar : les civils payent le prix

L’armée mène une campagne violente en bloquant l’accès aux denrées alimentaires et en bombardant des villages dans l’Etat d’Arakan. Depuis décembre, plus de 5000 civils ont été déplacés.

Dans un contexte de répression depuis les attaques menées par le groupe armé appelé Armée d’Arakan début janvier, les forces de sécurité du Myanmar bombardent des villages et empêchent les civils d’accéder à une assistance humanitaire. Les forces de sécurité se servent aussi de lois vagues et répressives pour arrêter des civils dans la région.

Plus de 5200 déplacés après les attaques

Le 4 janvier 2019, Jour de l’indépendance du Myanmar, un groupe armé ethnique rakhine, appelé l’Armée d’Arakan, a procédé à des attaques coordonnées contre quatre postes de police dans le nord de l’État d’Arakan, et aurait tué 13 policiers. L’Armée d’Arakan combat l’armée birmane au sein d’une alliance de groupes armés dans le nord du Myanmar ety affronte sporadiquement les forces de sécurité.

Quelques jours après les attaques du 4 janvier, le gouvernement civil du Myanmar a ordonné une opération militaire afin d’« écraser » l’Armée d’Arakan, qualifié d’« organisation terroriste ». Des équipements et des troupes en grand nombre ont alors été déployés dans la région dont, selon des militants locaux et des médias, des soldats de la 99e division d’infanterie légère. D’après nos recherches, cette division a participé à des atrocités commises contre les Rohingyas en 2017 et contre les minorités ethniques dans le nord de l’État chan en 2016.

Selon l’ONU, au 28 janvier, plus de 5 200 hommes, femmes et enfants avaient été déplacés par les combats. Ils sont pour la plupart issus de minorités ethniques majoritairement bouddhistes, notamment les Mros, Khamis, Daingnets et Rakhines.

Nous avons interviewé au téléphone 11 personnes touchées par les combats, ainsi que des responsables humanitaires et des militants locaux de l’État d’Arakan. La plupart ont déclaré avoir fui leurs villages après que les forces de sécurité ont bombardé les alentours ou restreint la circulation des denrées alimentaires.

La marque de fabrique de l’arméeTrois personnes originaires d’Auk Pyin Nyar, ont déclaré que deux obus d’artillerie ou de mortier ont explosé à une centaine de mètres de leur village, le 21 décembre 2018. Lorsqu’ils ont pris la fuite tôt le lendemain matin, ils ont entendu d’autres obus exploser dans le secteur.

J’ai entendu des explosions d’artillerie lourde et certaines personnes ont même eu des vertiges

Un paysan âgé de 64 ans.

Un autre paysan du même village, qui y est retourné quelques jours plus tard pour prendre des affaires, a déclaré que de l’argent avait été dérobé dans les maisons après la fuite de leurs occupants. Il en attribuait la faute aux soldats birmans, aperçus dans le village et aux alentours à ce moment-là.

Les médias ont relaté plusieurs autres épisodes violents. The Irrawaddy et Radio Free Asia.

Bien que nous n’ayons pu établir avec certitude la responsabilité de l’armée birmane dans chaque attaque ayant causé des blessés ou endommagé ou détruit des biens civils, ces tactiques illégales sont depuis longtemps la marque de fabrique des opérations que mène l’armée contre les groupes armés .

Voir notre portfolio : souvenirs sauvés des flammes

Restrictions sur les denrées alimentaires et l’accès à l’aide

Une femme âgée de 34 ans originaire d’un village reculé de l’ethnie mro, dans la municipalité de Kyauktaw, a déclaré que des soldats et des policiers birmans limitaient la quantité de riz pouvant être amenée dans son village.

Les habitants souffraient déjà des pénuries de denrées de base, car les affrontements ayant éclaté non loin en décembre 2018 les empêchaient de récolter le riz ou le bambou, une culture marchande.

Le village s’est vidé de ses habitants, tout comme plusieurs localités voisines qui se trouvaient dans une situation analogue.

Les autorités du Myanmar ont imposé d’autres restrictions à l’accès à l’aide humanitaire dans l’État d’Arakan. Le 10 janvier, le gouvernement de l’État d’Arakan a interdit à toutes les agences de l’ONU et aux organisations humanitaires internationales, à l’exception du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Programme alimentaire mondial (PAM), de mener leurs activités dans cinq municipalités touchées par le conflit. Beaucoup ont dû interrompre leur assistance humanitaire, compromettant la réponse d’urgence et les efforts de secours dans l’une des régions les plus pauvres et les plus sous-développées du Myanmar.

Les autorités de l’État d’Arakan ont fourni, avec le CICR et le PAM, de l’argent et de l’aide en nature aux personnes déplacées par les combats, mais les bénéficiaires ont jugé cette aide insuffisante et mal adaptée. Plusieurs responsables humanitaires ont affirmé que les restrictions sont aussi un moyen de détourner l’attention de la communauté internationale des opérations de l’armée.

Les autorités du Myanmar jouent délibérément avec la vie et les moyens de subsistance des civils. Comme nous l’avons constaté maintes fois, la priorité des militaires n’est pas de protéger les habitants pris entre deux feux, mais plutôt de dissimuler aux yeux de la communauté internationale les violations des droits humains qu’ils commettent.

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