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Les nasses, cette pratique qui vise à confiner des manifestants pour les empêcher de manifester ou de rejoindre une manifestation © Yann Lévy / Hans Lucas

Les nasses, cette pratique qui vise à confiner des manifestants pour les empêcher de manifester ou de rejoindre une manifestation © Yann Lévy / Hans Lucas

Liberté d'expression

État d'urgence : le tour de passe-passe pour le rendre permanent

Le 2 juillet 2017, le président Emmanuel Macron a annoncé son intention de sortir de l’état d’urgence à l’automne. Une bonne nouvelle ? Non, un tour de passe-passe : les principales mesures de l’état d’urgence sont en effet intégrées dans le droit commun par le biais d’une nouvelle loi bientôt en discussion. Un danger désormais permanent pour les libertés, sans garantie supplémentaire pour notre sécurité.

Mise à jour 04/10/2017 : L'Assemblée nationale a adopté la loi antiterroriste

Mise à jour 29/09/2017 : Jeudi 28 septembre, les députés ont terminé l'examen du projet de loi. Le texte qui sera soumis à un vote solennel le 3 octobre ne tient pas compte des alertes lancées par la société civile ainsi que 2 Rapporteurs spéciaux des Nations Unies, s’inquiétant des conséquences graves à de ce projet de loi. Le projet de loi sera ensuite soumis à une commission mixte composée de députés et sénateurs, qui devra trancher sur les différents entre les deux chambres.

Mise à jour 25/09/2017 : le projet de loi est débattu à l'Assemblée nationale

Mise à jour : 19/07/2017 : le Sénat a adopté le projet de loi antiterrorisme

Au moment même où Emmanuel Macron annonce la fin de l’état d’urgence, deux projets de loi doivent être étudiés par les parlementaires dans les prochains jours et semaines pour rendre les mesures les plus problématiques de l’état d’urgence permanentes.

Comme sous le précédent quinquennat pour le vote des précédentes lois antiterroristes, c’est à chaque fois la procédure accélérée qui a été retenue pour faire voter ces deux projets en un temps record, empêchant toute concertation véritable avec la société civile, et tout débat de fond, basé sur un travail d’évaluation réel, au Parlement et dans l’opinion publique.

L’état d’urgence renouvelé à la va-vite une 6ème fois

Le 12 juillet, l’état d’urgence est entré officiellement en vigueur pour la sixième fois depuis le 13 novembre 2015, prolongeant ce régime exceptionnel jusqu’au 1er novembre 2017. La France aura alors vécu deux ans, soit la plus longue période de son histoire depuis la guerre d’Algérie, sous ce régime d’exception, par définition conçu pour être temporaire et réactif. Pourtant, de très nombreuses organisations, dont Amnesty International, ont alerté depuis deux ans sur les dérives et abus commis sous l’état d’urgence. Pourtant, de nombreux experts de la sécurité et des parlementaires responsables du suivi de l’état d’urgence ont à de nombreuses reprises alerté sur la très faible efficacité de l’état d’urgence aujourd’hui, et la nécessité d’en sortir.

Retrouvez notre argumentaire collectif envoyé à tous les parlementaires.

Lire aussi : le droit de manifester menacé en France

Las. Le 4 juillet 2017, le Sénat a voté sa reconduction à l’identique, par 312 voix pour et 22 contre. Le 6 juillet, l’Assemblée nationale a fait de même, par 137 voix contre 13. Même les interdictions individuelles de manifester, pourtant censurées par le Conseil constitutionnel le 9 juin 2017 ont été réintroduites dans cette 6ème loi de renouvellement de l’état d’urgence. Les préfets pourront donc continuer d’interdire à des personnes de manifester, sur des bases très vagues et floues.

Une nouvelle loi pour rendre permanente la logique de l’état d’urgence

Fin juin, le gouvernement a dans le même temps transmis au Parlement un nouveau projet de loi renforçant la sécurité et la lutte antiterroriste. Celui-ci doit être discuté et adopté par le Parlement vraisemblablement d’ici septembre.

Ce projet de loi, présenté comme permettant de sortir de l’état d’urgence, ne fait en réalité que transposer ses principales mesures dans le droit commun.

Ainsi, le ministère de l’intérieur et les préfets pourront désormais prendre des mesures restreignant considérablement les libertés : perquisitions, assignations à résidence, fermeture de lieux de culte, pourront être prises sur la foi de simples soupçons peu ou pas étayés des services de renseignement.

Seules les perquisitions bénéficieront d’une autorisation préalable du juge des libertés et de la détention.

Les préfets pourront prendre des mesures de fouilles systématiques des personnes et véhicules dans des périmètres déterminés, sans avoir besoin de justifier d’un quelconque motif à l’encontre de la personne visée.

Bienvenue dans l’ère du soupçon

Les personnes visées le seront sur des critères flous, d’appartenance à l’entourage de personnes ou d’organisations ou d’adhésion privée à des idées, sans exiger la preuve de la commission ou la préparation d’un acte de terrorisme, d’une infraction pénale donc.

Quant au contrôle par la justice, il risque, comme pour l’état d’urgence, d’être peu effectif, dans la mesure où les juges auront à se baser sur des motifs flous et des incriminations très vagues pour rendre leur décision.

En rendant permanente la logique de l’état d’urgence, qui est celle du soupçon, cette nouvelle loi antiterroriste produira vraisemblablement les mêmes effets : des mesures abusives, disproportionnées, voire arbitraires, contre des personnes et des groupes.

Lire notre analyse détaillée du projet de loi.

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