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© Majdi Fathi / NurPhoto / NurPhoto via AFP

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Israël doit mettre fin aux attaques indiscriminées, lever son blocus illégal et annuler l'ordre d’évacuation de Gaza

Après l'effroyable attaque du 7 octobre 2023 menée par des groupes armés palestiniens, Gaza est soumise à une campagne massive de bombardements de l'armée israélienne. Israël a annoncé le siège total de Gaza et ordonné "l'évacuation" du nord de Gaza et de la ville de Gaza vers le sud de la bande de Gaza. Cela s'apparente à une sanction collective, ce qui constitue un crime de guerre.

20 octobre 2023

De nouvelles preuves de crimes de guerre

Nous avons enquêté sur cinq attaques israéliennes contre la bande de Gaza, qui ont eu lieu entre le 7 et le 12 octobre 2023. Nous avons analysé des images satellite, vérifié des photos et vidéos et parlé avec des survivants ou témoins oculaires.

Voici les résultats de nos recherches.

Le 7 octobre 2023, une effroyable attaque était menée par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens de Gaza : tirs aveugles de roquettes, envoi de combattants dans le sud d’Israël... Cette attaque a fait plus de 1 200 morts, essentiellement civils, et blessé plus de 2 700 personnes. Les groupes armés ont aussi pris des otages, dont de nombreux civils. Rien ne saurait justifier les attaques terrifiantes commises par les groupes armés palestiniens, dont le Hamas. Les groupes armés palestiniens doivent rendre des comptes pour les atrocités commises. Mais pas la population civile de Gaza.

Les terribles massacres de civils israéliens et autres graves exactions perpétrés par les groupes armés palestiniens ne dispensent pas Israël de se conformer à ses obligations de respecter le droit international humanitaire et de protéger la population civile. Les sanctions collectives infligées aux civils de Gaza ne rendront pas justice aux victimes des crimes de guerre commis par le Hamas et d’autres groupes armés et n’apporteront pas la sécurité à la population civile en Israël.

Agnès Callamard, notre secrétaire générale

Ce que nous dénonçons

👉 Les bombardements incessants sur Gaza, l'une des zones les plus densément peuplée du monde, qui ont fait plus de 5000 morts (chiffres du 24 octobre 2023) et plus de 9 024 blessés (chiffres du 16 octobre 2023), dont de nombreux civils.

Nous avons notamment récolté des preuves accablantes de crimes de guerre dans notre enquête sur cinq attaques israéliennes contre la bande de Gaza, qui ont eu lieu entre le 7 et le 12 octobre.

👉 Le siège total imposé à Gaza privant la population gazaouie d'eau, de nourriture et d'électricité, sur l’ordre du ministre de la Défense, le 9 octobre 2023.

👉 La fermeture de la seule centrale électrique de Gaza a exacerbée la crise humanitaire déjà catastrophique que subissent les plus de 2,2 millions de personnes piégées dans la bande de Gaza et sous blocus illégal depuis 16 ans.

👉 L'ordre d'évacuation du nord de Gaza et de la ville de Gaza vers le sud de la bande de Gaza qui ne peut être considéré comme un avertissement efficace et peut constituer un déplacement forcé de population civile, en violation du droit international humanitaire.

Tout ceci s'apparente à une punition collective, ce qui constitue un crime de guerre.

Le déplacement forcé de plus de 1,1 million de personnes

Avec cet ordre, les forces israéliennes déclenchent le déplacement forcé et massif de plus de 1,1 million d’habitant·es de la ville de Gaza et de toute la partie nord de la bande de Gaza.

L’annonce initiale donnait 24 heures à la population pour quitter le nord de Gaza « pour leur sécurité et leur protection » — une demande impossible qui, de l’aveu même du porte-parole de l’armée israélienne, ne peut être mise en œuvre en un jour. Quel que soit le délai, Israël ne peut pas considérer, après avoir donné cet ordre d’évacuation, que le nord de la bande de Gaza est une zone de tir. Ses forces armées ont l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour réduire au minimum les dommages causés aux civils, où qu’ils se trouvent à Gaza.

Cette décision a semé la panique au sein de la population, et des milliers de Palestinien·nes déplacés à l’intérieur de leur territoire dorment désormais dans les rues, ne sachant pas où fuir ni où se mettre à l’abri face à la campagne de bombardements menée par Israël et aux mesures de sanction collective impitoyables.

Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International

D’après le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), le nombre de personnes déplacées à Gaza avait atteint 1 million au 19 octobre, dont plus de 527 500 hébergées dans des centres d’urgence de l’UNRWA, dans le centre et le sud de Gaza.

"Tout le monde court pour survivre"

Un habitant a décrit les scènes de chaos et de panique lorsque les gens ont tenté de fuir à travers les rues détruites du nord de Gaza : « Un trajet d’une heure nous a semblé durer 30 ans. Nous avons dû changer plusieurs fois d’itinéraire… Tout le monde court pour survivre, c’est au-delà de l’horreur. Les enfants pleurent, terrorisés. »

Nous avons déjà rassemblé des informations sur le fait que plusieurs familles ont fui leurs maisons pour se rendre dans des zones qu’elles pensaient plus sûres, mais qui ont ensuite été bombardées. Nous avons recueilli le témoignage d'un homme qui a fui Beit Hanoun avec sa famille à pied, à l’aube du 8 octobre, pour se réfugier dans une école gérée par l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), à Jabalia. Son fils de 19 ans a ensuite été tué lors d’une attaque contre une rue du marché de Jabalia, alors qu’il allait acheter du pain pour sa famille.

Parmi les personnes déjà déplacées figurent des personnes en situation de handicap ou souffrant de maladies chroniques. Nous avons parlé avec des femmes et des filles en situation de handicap qui ont fui leur maison à pied. Elles ont marché des heures, dans la peur des bombardements, pour trouver refuge dans des écoles gérées par l’UNRWA, dans le nord de la bande de Gaza. Elles ne sont pas en mesure de parcourir à pied la longue distance jusqu’au sud de Gaza, où de nombreux abris ont déjà atteint leur capacité d’accueil.

Un travailleur humanitaire en poste à Gaza a déclaré à Amnesty International : « Ils [l’armée israélienne] doivent me dire comment nous pouvons évacuer des hôpitaux avec des patients en soins intensifs et tous les blessés des récentes attaques. C’est absurde, totalement impossible. »

Les frappes aériennes israéliennes ont par ailleurs gravement endommagé les routes dans le nord de Gaza, les transports publics sont inexistants et le carburant est rare du fait du durcissement du blocus en place.

La communauté internationale ne doit pas rester silencieuse alors que les forces israéliennes chassent illégalement plus d’un million de Palestinien·nes de chez eux. Les déplacements forcés de civils gazaouis par Israël doivent cesser immédiatement

Agnès Callamard

La crainte d’une « seconde Nakba »

La majorité de la population de Gaza se compose de descendants de réfugié·es qui ont été déplacés ou contraints de fuir leurs maisons pendant le conflit de 1947-1949, au cours duquel plus de 750 000 Palestinien·nes ont été déplacés de force de leurs villes et villages — un épisode connu sous le nom de Nakba (qui signifie "la catastrophe" en arabe) au sein de la population palestinienne.

Si de nombreux Palestinien·nes du nord de la bande de Gaza tentent de fuir, d’autres ont déclaré à Amnesty International qu’ils préfèrent rester, redoutant une « seconde Nakba », tant le traumatisme générationnel du déplacement est gravé dans la mémoire collective de nombreux Gazaouis.

« Nos parents ont été expulsés de chez eux en 1948 lors de la Nakba. Nous avons perdu notre maison, détruite lors de l’offensive d’août 2022. Nous l’avons reconstruite, pour la voir à nouveau détruite… Toute notre vie se résume à un enchaînement de déplacements », a déclaré Munir Radwan, professeur d’université.

Un autre habitant de Gaza a raconté : « Nous sommes allés nous coucher en 2023 et nous nous sommes réveillés en 1948. »

Aller plus loin : Qu'est-ce que la Nakba ?

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Gaza plongée dans l'obscurité

Les restrictions renforcées imposées sur l’ordre du ministre de la Défense, le 9 octobre 2023, ont conduit à une panne générale d’électricité qui a plongé la bande de Gaza dans l’obscurité. Les coupures de courant vont limiter encore davantage les communications et l’accès à Internet. Elles vont avoir de graves répercussions sur les services essentiels et l’accès à l’eau potable, et vont provoquer un désastre en matière de santé publique, privant les hôpitaux gazaouis, déjà très démunis, d’équipements médicaux vitaux, tandis que les médecins s’évertuent à soigner les milliers de personnes grièvement blessées par les attaques israéliennes. Cela va exacerber la catastrophe humanitaire déjà en cours.

La panne générale d’électricité a plongé la bande de Gaza dans l’obscurité et va exacerber la catastrophe humanitaire déjà en cours. Elle va limiter encore davantage les communications et l’accès à Internet.

Elles vont aussi mettre en péril la vie des patient·es hospitalisés, notamment pour des pathologies chroniques ou en soins intensifs, dont les bébés en couveuse.

Un ministre israélien a déclaré le 12 octobre que les autorités n’allaient pas rétablir l’électricité ni permettre l’approvisionnement en eau ou en carburant tant que le Hamas n’aurait pas libéré les otages. Cela confirme explicitement que ces mesures ont été prises en vue de punir la population civile de Gaza pour les actes commis par les groupes armés palestiniens.

Nous rappelons que les civils palestiniens ne sont pas responsables des crimes du Hamas et des autres groupes armés palestiniens et que, en vertu du droit international, Israël ne doit pas leur infliger des souffrances pour des actes dans lesquels ils ne jouent aucun rôle et sur lesquels ils n’ont aucun contrôle.

Briser immédiatement le cycle des violences

« Les terribles massacres de civils israéliens et autres graves exactions perpétrés par les groupes armés palestiniens ne dispensent pas Israël de se conformer à ses obligations de respecter le droit international humanitaire et de protéger la population civile. Les sanctions collectives infligées aux civils de Gaza ne rendront pas justice aux victimes des crimes de guerre commis par le Hamas et d’autres groupes armés et n’apporteront pas la sécurité à la population civile en Israël », a déclaré Agnès Callamard.

Nous nous inquiétons également des attaques répétées contre le poste-frontière de Rafah.

Nos demandes

📌 Nous lançons un appel urgent à un cessez-le-feu immédiat de toutes les parties afin de mettre fin aux crimes de guerre, de protéger les civil.es et de faire en sorte que l’aide humanitaire puisse parvenir à Gaza. 

📌 Nous demandons aux autorités israéliennes, ainsi qu’aux groupes armés palestiniens, de respecter strictement le droit international humanitaire : en prenant les précautions nécessaires pour réduire au minimum les dommages causés aux populations civiles et aux biens à caractère civil, et en s’abstenant de lancer des attaques illégales et d’infliger des sanctions collectives aux populations civiles.

📌 La communauté internationale doit tout mettre en œuvre pour que les parties au conflit respectent le droit international humanitaire, assurent la protection de tous les civil·es et exiger la libération de tous les otages.  

📌 Nous exhortons tous les groupes armés palestiniens de Gaza à libérer tous les otages civils immédiatement et sans condition, et à ne plus procéder à des tirs de roquettes sans discernement sur Israël.

📌 Israël doit se conformer aux principes du droit international, notamment aux principes de proportionnalité et de distinction, et ne doit pas imposer de sanction collective, se livrer à des représailles, ni déplacer des populations.

📌 Nous appelons Israël à s’abstenir de mener des attaques illégales qui tuent ou blessent des civils et détruisent des habitations et des infrastructures de caractère civil.

📌 Nous appelons Israël à faciliter la mise en place de couloirs humanitaires pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza, et à laisser passer en toute sécurité les personnes blessées et les civils qui souhaitent fuir le conflit armé.

📌 Le gouvernement israélien doit par ailleurs s’abstenir d’inciter à la violence et d’alimenter les tensions en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, et garantir la sécurité de tous les civils vivant sous son contrôle.

📌 Nous demandons une nouvelle fois à Israël de mettre fin au blocus illégal de Gaza, instauré depuis 16 ans, ainsi qu'à tous les autres aspects du système d'apartheid israélien imposé à tous les Palestiniens et Palestiniennes.  

📌 Nous appelons à ce que les responsables des crimes répondent de leurs actes devant les juridictions compétentes. 

Ce communiqué de presse fait partie d’une série d’articles publiés par Amnesty International à propos de l’escalade de la violence et des atteintes aux droits humains en Israël, à Gaza et ailleurs dans les territoires palestiniens occupés. Amnesty International a publié ses premières conclusions sur les crimes de guerre commis par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens, notamment les exécutions sommaires massives, les prises d’otages et les tirs de roquettes par nature non discriminantes.

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Signez notre pétition

Demandez à Emmanuel Macron d’appeler à un cessez-le-feu immédiat de toutes les parties afin de mettre fin aux crimes de guerre, de protéger les civil.es et de faire en sorte que l’aide humanitaire puisse parvenir à Gaza.