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Photo d'une zone du chantier du projet de pipeline de TC Energie sur la terre de la nation autochtone Wet’suwet’en / © Amnesty International

Photo d'une zone du chantier du projet de pipeline de TC Energie sur la terre de la nation autochtone Wet’suwet’en / © Amnesty International

Comment le Canada harcèle la nation autochtone Wet’suwet’en pour protéger l'industrie fossile

Dans un nouveau rapport, nous mettons en lumière les démarches inquiétantes et concertées menées par les gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique pour éliminer tout obstacle à la construction d’un immense gazoduc traversant le territoire ancestral des Wet'suwet'en, non cédé au Canada. Enquête.

Notre rapport intitulé «Criminalisation, intimidation et harcèlement des défenseur.e.s des terres Wet'suwet'en» dénonce les violations des droits humains infligées aux membres de la nation Wet'suwet'en et à leurs sympathisants par les autorités canadiennes et de la Colombie-Britannique. Les autorités harcèlent, arrêtent arbitrairement et dépossèdent les Wet'suwet'en de leur terre pour protéger les intérêts de l'industrie fossile. Pourquoi ? Parce que les entreprises CGL Pipeline Ltd et TC Energy ont décidé de construire un gazoduc sur le territoire ancestral de la nation autochtone, avec l'appui de Forsythe Security, une société de sécurité privée engagée par CGL Pipeline Ltd. Les travaux de ce projet de gazoduc ont débuté sans le consentement préalable des Wet'suwet'en.

Lire aussi : Qui sont les Wet'suwet'en

Soutenir les Wet'suwet'en en signant notre pétition

Nous avons enquêté sur quatre raids particulièrement violents menés par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) sur le territoire autochtone des Wet'suwet'en. Nous avons recueilli de nombreux témoignages de chef.fes héréditaires de la nation autochtone et d'autres personnes présentes lors de ces raids. Nos conclusions : la violence des raids menés était disproportionnée, et des défenseurs des terres des Wet'suwet'en ainsi que des sympathisants ont été arrêtés arbitrairement simplement pour avoir défendu leurs terres et fait valoir les droits des peuples autochtones.

 Les mesures prises à l'encontre des défenseurs des terres des Wet'suwet'en et de leurs sympathisants s'inscrivent dans le cadre d'une action concertée et inquiétante menée par les gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique pour éliminer tout obstacle à la construction du gazoduc sur un territoire ancestral et non cédé.

Ana Piquer, directrice du programme Amériques d'Amnesty International

Une criminalisation de longue date 

« Depuis la colonisation, les peuples autochtones du Canada ont été soumis à toute une série de politiques gouvernementales visant à les déposséder de leurs territoires et à les assimiler à la société des colons", explique Ketty Nivyabandi, secrétaire générale de la section anglophone d'Amnesty International Canada. « Forcer la construction du gazoduc sans le consentement libre, préalable et éclairé de la nation - et criminaliser les défenseurs des terres qui exercent leurs droits - n'est pas une injustice isolée mais fait partie de la violence coloniale permanente du Canada à l'égard des peuples autochtones. » 

Les intérêts de l'industrie fossile garantis

En décembre 2019, un juge a accordé une injonction judiciaire interdisant aux défenseurs des terres des Wet'suwet'en et à leurs sympathisants de bloquer le chemin de service forestier (FSR) de Morice sur le territoire autochtone. L'injonction comprend une clause d'exécution qui « autorise la Gendarmerie Royale Canadienne à arrêter toute personne dont elle a des motifs raisonnables et probables de penser qu'elle contrevient à l'injonction ».  

Cette injonction judiciaire, demandée par CGL Pipeline Ltd. et accordée par la Cour suprême de la Colombie-Britannique, a servi de justification juridique aux descentes de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et aux autres formes de criminalisation subies par les défenseurs des terres Wet'suwet'en et par leurs sympathisants. Par cette décision juridique excessivement large, plus de 75 défenseurs des Wet'suwet'en et d'autres défenseurs de l’environnement ont été arrêtés. 

Lire aussi : Dérèglement climatique : la menace sur nos droits humains

Photographie du territoire Wet'suwet'en

Hélicoptères, armes, drones : les descentes disproportionnées de la Gendarmerie royale du Canada

Notre rapport analyse les tactiques utilisées par la Gendarmerie royale du Canada lors de quatre descentes militarisées contre des défenseurs des terres Wet'suwet'en. Notre constat : elles étaient disproportionnées par rapport à la situation à laquelle elles répondaient. Il n'y avait pas d'informations indiquant que les défenseurs ont eu recours à la violence ou ont représenté une menace.

Des raids très violents ont eu lieu contre les Wet'suwet'en présents sur le chantier du gazoduc qui tentaient simplement de manifester leur désaccord au projet. La première descente a eu lieu en janvier 2019. Dispositif déployé : une cinquantaine d'agents lourdement armés, des hélicoptères et des drones de surveillance. La cible : des défenseurs de l’environnement qui tentent de sauver leurs terres ancestrales. Autres descentes : février 2020 et novembre 2021.  Dispositif déployé : des dizaines d'agents armés de fusils de précision semi-automatiques, accompagnés de chiens, de bulldozers et d'hélicoptères. Contre des défenseurs des terres.

Les témoignages recueillis dans notre rapport décrivent la violence de ces arrestations  : « Ils se sont acharnés sur deux des hommes indigènes, leur donnant des coups de pied et des coups de poing à la tête », explique Sleydo' (Molly Wickham), l’une des cheffes Wet'suwet'en. 

Les Wet'suwet'en témoignent

Les Wetʼsuwetʼen vivent en territoire autochtone, non cédé au Canada, depuis des milliers d'années. Aujourd’hui, ils sont environ 5000 à y vivre. Le nouveau projet de gazoduc de l’entreprise TC Energie, de plus de 670 km qui traverse rivières et montagnes du territoire ancestrale des Wetʼsuwetʼen, suscite de profondes inquiétudes pour la nation autochtone. Plusieurs chef.fes de la nation et autres défenseurs de la terre wetʼsuwetʼen évoquent leur dépendance vitale à leur terre, le combat à mener pour les générations futures et leur incompréhension de la politique de criminalisation à leur encontre. 

Lire aussi : Le combat des Wet’suwet’en pour sauver ses terres


Anna Holland
Je fais cela pour mes enfants et nos petits-enfants. Nous dépendons de notre terre pour tout. L’eau, la pêche, la chasse, pour nous soigner, nous abriter... Que ferons-nous quand tout cela ne sera plus ? Nous n’irons nulle part où aller.

Molly Wickam
Je ressens une telle connexion à mes ancêtres sur ce territoire. Ce sentiment d’appartenance et cette connexion sont vraiment importants pour moi. Cette connexion à la terre, c’est ce qui fait ce que nous sommes.

Aunty Janet
Qui parle d’argent ? Nous nous préoccupons de la terre. Nous sommes inquiets pour notre rivière, la Wedzin Kwa. Nous sommes inquiets pour nos saumons, pour la vie sauvage. Voilà ce qui nous inquiète.

K’eltiy Brenda Michell
Le Canada est supposément un pays où les gens veulent vivre parce que c’est un beau pays où les gens sont libres, mais ce n’est pas le cas pour les communautés autochtones et les défenseur.e.s de la terre.

Chef Na’moks
Ils continuent de parler de réconciliation. Nous on vit cette réconciliation chaque jour. Ça ressemble à ça : ils ont toujours un doigt sur la gâchette.

Virginia Pierre
C’est triste de voir comment le gouvernement traite notre peuple. Je ne comprends pas comment fonctionne la police. Comment font-ils leur travail ? Ne sont-ils pas censés protéger les êtres humains ? 

Les discriminations subies par les Wet'suwet'en  

Les Wet'suwet'en et d'autres défenseurs des terres autochtones ont été victimes de discriminations. Les femmes défenseurs ont également fait l'objet de menaces et d'actes de violence et de discrimination fondés sur le genre.

« Je me sens moins en sécurité maintenant que ma fille joue dehors en sachant qu'il y a un homme étrange de l'autre côté de la rivière qui la surveille et qu'il y a des drones dans le ciel », nous a déclaré Karla Tait, une matriarche Wet'suwet'en et directrice des programmes du Centre de guérison Unist'ot'en. 

La construction du gazoduc ajoutée au harcèlement, à l'intimidation, à la surveillance illégale et à la criminalisation que subissent les défenseurs de la terre Wet'suwet'en crée une atmosphère de peur et de violence au sein de la nation autochtone. Certains membres ne se sentent plus en sécurité sur le Yin'tah (leur terre ancestrale non cédée), ce qui entraîne une perte de lien avec leurs territoires ancestraux. Le tout a un impact négatif sur la transmission de la culture aux générations futures.

Les militant·es d'Amnesty International France devant l'Ambassade du Canada en France. Deux représentant·es de notre délégation ont été reçu·es par les autorités canadiennes et ont pu leur présenter les recommandations de notre rapport sur la situation des Wet'suwet'en / Le 11 décembre à Paris - Photo ©Benjamin Girette

Nos demandes

1.

Nous demandons aux gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique, ainsi qu'à Coastal GasLink Pipeline Ltd. et TC Energy de mettre immédiatement un terme à la construction et à l'utilisation du gazoduc dans les territoires non cédés de la nation Wet'suwet'en.  

2.

Nous demandons aux deux gouvernements d'abandonner immédiatement les poursuites pénales pour outrage à l'encontre des Wet'suwet'en et d'autres défenseurs de la terre.  

3.

Nous demandons à la Gendarmerie royale du Canada, à son unité d'intervention et à Forsythe Security de cesser immédiatement le harcèlement, l'intimidation et la surveillance illégale des défenseurs des terres de la nation Wet'suwet'en et de se retirer de leur territoire. 

Au lieu de protéger le droit des peuples autochtones, les autorités canadiennes protègent l’industrie fossile. Il est temps que cela change, il en va de la survie d’une nation et de la défense de l’environnement. 

Agir

Soutenez les Wet'suwet'en !

Pour l’abandon immédiat des poursuites engagées contre les défenseur.e.s de la terre qui s’opposent à la construction du gazoduc Coastal GasLink et que cesse l’exploitation des terres des Wet’suwet’ens sans leur consentement préalable, libre et éclairé, interpellez les autorités canadiennes.