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Alain Pitton / NurPhoto / NurPhoto via AFP

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France : interdire la chasse aux "écureuils"

Le rapporteur spécial de l’ONU pour les défenseurs de l’environnement n’y va pas de main morte : les gendarmes qui ont réprimé les manifestations anti-A69 ont mis la vie de ces activistes en danger.

Extrait de la Chronique de mars # 448

Par Léna Bjurström

On les surnomme les « écureuils ». Depuis plusieurs semaines, les forces de l’ordre multiplient les interventions pour déloger ces activistes perchés dans les arbres de la zone à défendre (ZAD) dite de la Crem’Arbre, sur le tracé de l’autoroute A69, dans le Tarn. Des opérations critiquées par le rapporteur spécial de l’Onu pour les défenseurs de l’environnement 1 . Le 29 février, après sa visite sur place, Michel Forst 2 exige « une enquête et des sanctions pour les actes de privation de sommeil, de combustion de matériaux, d’allumage de feux et de déversement de produits a priori inflammables par les forces de l’ordre, qui ont pu mettre en danger la vie des écureuils » De telles pratiques relèvent des traitements cruels, inhumains ou dégradants interdits par la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention contre la torture des Nations unies, rappelle le rapporteur. Lequel réclame à la France des « mesures immédiates » afin d’assurer la protection des militants. Dans la foulée, les activistes ont déposé une requête en urgence à la Cour européenne des droits de l’homme.

La visite de Michel Forst dans le Tarn faisait suite à des plaintes qui lui ont été adressées. Si le rapporteur ne dispose d’aucun pouvoir de contrainte, sa voix porte loin dans les antichambres du pouvoir. D’autant qu’il se soucie plus largement de la « nette augmentation » de la répression des militants écologistes en Europe, dans un autre document présenté, celui-ci, le 28

février 2024. Après plus d’un an de collecte d’informations dans les pays européens signataires de la convention d’Aarhus, le rapporteur s’alarme de la « réponse disproportionnée » des États – dont la France – aux mobilisations environnementales. En juin 2023, le rapporteur et d’autres experts de l’Onu s’étaient déjà inquiétés d’un « usage excessif de la force » par les autorités française lors des manifestations contre les mégabassines de Sainte-Soline et « d’une tendance à la stigmatisation et à la criminalisation » des militants par le gouvernement. Fin 2022, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait ainsi qualifié les actions de certains opposants aux mégabassines d’« écoterrorisme » et engagé la dissolution du mouvement des Soulèvements de la Terre, avant que celle-ci ne soit annulée par le Conseil d’État. Une telle rhétorique permet « aux autorités publiques de justifier plus facilement l’utilisation de mesures répressives, notamment destinées à lutter contre le crime organisé et le terrorisme », note Michel Forst dans son rapport du 28 février 2024. « Les États créent un climat de peur et d’intimidation », écrit-il, au lieu de « s’attaquer aux causes profondes de la mobilisation ».

1— Nommé en 2022, dans le cadre de la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, il doit s’assurer que « les personnes exerçant leurs droits » ne soient pas « pénalisées, persécutées ou harcelées de quelque manière que ce soit en raison de leur implication ».

2— Michel Forst a été directeur d’Amnesty International France de 1989 à 1999.

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