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Yémen. Les Houthis « étouffent » les femmes en leur imposant un tuteur masculin

Les autorités houthies de facto doivent mettre fin à l’obligation faite aux femmes d’être accompagnées d’un mahram (tuteur masculin) ou munies de son autorisation écrite pour voyager dans les gouvernorats sous le contrôle des Houthis et d’autres zones au Yémen, a déclaré Amnesty International jeudi 1er septembre.

Depuis le mois d’avril, les restrictions de plus en plus lourdes imposées par les Houthis empêchent de nombreuses femmes yéménites de travailler, en particulier celles qui doivent se déplacer dans le cadre de leur profession. Les contraintes liées au tutorat masculin s’appliquent aussi aux travailleuses humanitaires yéménites qui luttent pour mener à bien leurs missions de terrain, ce qui a des conséquences directes sur l’accès à l’aide de la population, notamment pour les femmes et les filles.

« Les autorités houthies de facto doivent supprimer immédiatement la règle du mahram. Cette exigence stricte constitue une forme de discrimination fondée sur le genre et renforce les discriminations subies quotidiennement par les femmes au Yémen. Les femmes yéménites ont besoin de toute urgence de pouvoir se déplacer librement dans le pays pour travailler, accéder aux soins de santé et fournir ou recevoir de l’aide humanitaire, a déclaré Diana Semaan, directrice adjointe par intérim pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International.

« La communauté internationale doit faire pression sur les Houthis pour que cessent les restrictions qui sont imposées aux femmes par la règle du mahram. Le Yémen est déjà confronté à une situation humanitaire catastrophique, à laquelle s’ajoute maintenant un risque réel que les femmes et les filles cessent de recevoir de l’aide si les travailleuses humanitaires continuent d’être soumises à l’interdiction de circuler sans tuteur masculin. »

Selon le droit international humanitaire, toutes les parties au conflit armé au Yémen, y compris les Houthis, doivent permettre aux convois humanitaires neutres d’accéder rapidement et sans entrave aux personnes civiles dans le besoin et garantir la liberté de mouvement des personnels humanitaires sans faire de discrimination. La règle du mahram est contraire à cette obligation.

Cette règle, qui n’est pas inscrite dans le droit yéménite, est appliquée par les Houthis au moyen de directives orales.  Depuis avril, les autorités houthies de facto insistent de plus en plus sur l’interdiction de circuler sans mahram pour restreindre les déplacements des femmes dans les zones du nord du Yémen qui sont sous leur contrôle, notamment les gouvernorats de Saada, Dhamar, Hodeida et Hajjah ainsi que la ville de Sanaa.

[La règle du mahram] constitue une forme de discrimination fondée sur le genre et renforce les discriminations subies quotidiennement par les femmes au Yémen

Diana Semaan, Amnesty International

Amnesty International s’est entretenue avec cinq militantes et membres d’organisations locales, toutes confrontées à la règle du mahram lorsqu’elles ont tenté de se déplacer pour leur travail entre avril et août, et avec sept experts et expertes connaissant bien l’impact de ces restrictions sur l’acheminement de l’aide humanitaire.

« Ils nous étouffent »

Au début du mois d’août, plusieurs entreprises de location de voitures ont indiqué à Afrah*, 36 ans, qu’elle ne pourrait pas louer un véhicule afin de se rendre de Sanaa au gouvernorat d’Aden pour son travail si elle n’était pas accompagnée d’un tuteur masculin.

« Mon mari a dû s’absenter de son travail et j’ai dû retirer ma fille de son école pour respecter la règle du mahram et pouvoir me rendre à Aden pour mon travail, a-t-elle déclaré à Amnesty International. Nous avons dû présenter aux autorités des copies de nos pièces d’identité, le document prouvant que nous sommes mariés et un acte de naissance de ma fille pour pouvoir louer une voiture et nous déplacer.

« La règle du mahram confère aux hommes un pouvoir accru sur nos vies et leur permet de maîtriser nos déplacements et nos activités. Ils nous étouffent. »

Noura*, 48 ans, n’a pas pu louer de véhicule pour circuler d’un gouvernorat à l’autre en juillet jusqu’à ce qu’elle soit en mesure de présenter une autorisation écrite de son frère cadet.

« Mon frère, qui est censé être mon mahram, a 10 ans de moins que moi, a-t-elle expliqué à Amnesty International. Quand il m’a donné son autorisation écrite, il s’est excusé de devoir faire cela pour moi. »

En avril, alors qu’elle voyageait dans une voiture de location entre Sanaa et le gouvernorat d’Aden, Eman*, 35 ans, a été retenue à un point de contrôle à Sanaa pendant six heures. Bien qu’elle ait présenté l’autorisation écrite de son mahram, l’agent qui tenait le point de contrôle l’a harcelée verbalement et menacée de l’agresser physiquement si elle sortait du véhicule.

Elle a déclaré à Amnesty International : « L’homme responsable du point de contrôle me criait dessus. Il disait : “Où est ton mahram ? N’as-tu pas honte de voyager seule ? Comment tes parents ont-ils pu t’y autoriser ?” […] Ensuite, il a pris tous mes papiers et mon sac et m’a demandé où j’allais et si je travaillais pour une ONG […]. Il a dit : “Je ne te laisserai pas partir sans problème.” »

Accès entravé des travailleuses humanitaires

D’après sept experts et expertes connaissant bien la situation humanitaire, et selon un récent rapport du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies sur l’acheminement de l’aide humanitaire au Yémen, la règle du mahram est devenue prévalente dans les zones contrôlées par les Houthis au cours du deuxième trimestre de 2022, ce qui a compliqué grandement les déplacements des employées yéménites pour tous les organismes humanitaires et entraîné de multiples annulations de livraisons d’aide humanitaire.

Les experts et expertes ont indiqué à Amnesty International que les travailleuses humanitaires n’ayant pas de mahram pour leurs déplacements peuvent de moins en moins mener à bien leurs missions. Cette réalité limite particulièrement l’accès des femmes et des filles à une aide et des services de santé dont elles ont absolument besoin et qui ne sont fournis que par des travailleuses humanitaires. La règle du mahram pourrait amener des employées d’organisations humanitaires à devoir quitter leur poste et à rencontrer des difficultés à faire vivre leur propre famille.

L’un des experts a déclaré à Amnesty International : « La règle du mahram entrave la capacité des organisations humanitaires à acheminer l’aide en temps voulu à l’ensemble de la population et du pays. Elle a des incidences sur toute l’action humanitaire, qui nécessite que les employées d’organisations humanitaires travaillent au plus près des femmes et des filles. Si le personnel féminin ne peut pas accéder à différentes parties du pays, non seulement il ne pourra pas faire son travail vital, mais la qualité de la réponse humanitaire en sera également dégradée. »

Un autre expert a ajouté : « La règle du mahram nuit aux programmes de protection ainsi qu’à ceux concernant les soins de santé en général, la santé reproductive et toute aide humanitaire pour laquelle il faut des travailleuses locales sur place pour fournir l’aide aux femmes et aux filles. »

Complément d’information

Selon l’organisation yéménite de défense des droits humains Mwatana for Human Rights, les restrictions imposées aux femmes par les Houthis sont de plus en plus répressives depuis 2017. Les femmes et les filles sont ainsi privées d’accès aux soins de santé reproductive, interdites de travailler dans certains gouvernorats, forcées à la ségrégation entre hommes et femmes dans les lieux publics et obligées de suivre la règle du mahram.

*Les noms ont été modifiés afin de protéger l’identité des personnes citées.

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