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Le régime de détention antiterroriste des Pays-Bas porte atteinte aux droits humains

Les autorités néerlandaises maintiennent des personnes en détention dans des conditions inhumaines dans les prisons de De Schie et Vught, réservées aux personnes accusées et reconnues coupables d’infractions liées au terrorisme, écrivent Amnesty International et le Projet de justice Société ouverte dans un rapport rendu public mardi 31 octobre.

Si les autorités ont indiqué qu’elles étaient disposées à introduire plusieurs réformes, ces dernières ne répondent pas totalement aux inquiétudes relatives aux droits humains soulevées dans le rapport. C’est pour cette raison que le rapport recommande que des améliorations considérables soient apportées aux lois et réglements en vigueur, et préconise une inspection exhaustive, indépendante et impartiale dans les meilleurs délais, ainsi qu’un suivi renforcé de ces établissements, afin de garantir que leur fonctionnement et la manière dont les détenus y sont traités soient conformes aux obligations des Pays-Bas au regard du droit international.

Les conclusions livrées dans le rapport s’appuient sur des entretiens réalisés auprès de 50 personnes - dont 19 ayant connu l’incarcération dans une unité de détention spéciale - et sur une analyse approfondie des engagements pris par les Pays-Bas à l’échelon international en matière de droits humains.

D’anciens détenus, mais également des responsables de l’application des lois, ont déclaré que les mesures de haute sécurité systématiques prévalant dans ces unités de détention spéciales vont à l’encontre du but affiché de protéger la sécurité publique. Il est arrivé que le ministère public aille jusqu’à envisager de ne pas inculper quelqu’un d’une infraction à la législation antiterroriste, afin prévenir les effets néfastes d’un placement en détention dans une de ces unités.

Le rapport, intitulé Inhuman and unnecessary: Human rights violations in Dutch high-security prisons in the context of counterterrorism [version abrégée disponible en français], révèle les diverses mesures employées dans deux établissements, connus en néerlandais sous le nom de Terroristenafdeling (TA) ou « unités terroristes », notamment l’enfermement systématique de personnes dans des cellules individuelles, souvent entre 19 et 22 heures par jour, tandis que les contacts avec d’autres personnes à l’extérieur de ces cellules sont limités.

Dans trois des cas étudiés, ces conditions constituaient un placement à l’isolement prolongé, ce qui est strictement interdit par le droit international relatif aux droits humains. Des gardiens de prison effectuent par ailleurs systématiquement et fréquemment des fouilles à nu intrusives et humiliantes. Entre autres manquements aux normes, des personnes seulement soupçonnées d’avoir commis une infraction terroriste, sans pour autant avoir encore été jugées, sont détenues au sein des unités TA aux côtés de condamnés et dans les mêmes conditions. Cela porte atteinte au droit des suspects à la présomption d’innocence tant qu’ils n’ont pas été reconnus coupables.

Une des failles majeures du sytème des unités TA réside dans le fait que toute personne soupçonnée ou reconnue coupable d’une infraction liée au terrorisme est automatiquement placée dans un de ces établissements. Les autorités n’évaluent pas si un détenu particulier représente véritablement une menace justifiant un placement en détention au sein d’une unité TA. Les détenus n’ont par ailleurs pas véritablement la possibilité de remettre en cause leur placement initial en détention, leur maintien en détention, ni aucune des mesures systématiques de haute sécurité employées contre eux.

Les autorités responsables des unités TA ont fait savoir qu’elles étaient disposées à laisser les détenus passer plus de temps hors de leur cellule avec d’autres personnes, et à introduire des mesures de sécurité et des programmes de réinsertion personnalisés. Les réformes envisagées semblent toutefois ponctuelles, et peut-être également arbitraires, puisque certains changements sont laissés à l’initiative des seules autorités carcérales, et qu’un manque de transparence est à déplorer concernant les critères objectifs permettant de déterminer quels changements adopter au sein du régime TA de détention de haute sécurité.

« Nous nous félicitons que les autorités aient accepté de réfléchir à certaines modifications positives concernant les unités TA », a déclaré Jonathan Horowitz, du Projet de justice Société ouverte. « Toute réforme doit cependant être soigneusement élaborée et mise en œuvre, dans une optique de transparence optimale et de respect des engagements des Pays-Bas en matière de droits humains. Les mesures de sécurité ne doivent pas être excessives ni arbitraires. »

Le régime des unités TA est également caractérisé par une surveillance constante qui porte atteinte aux droits des détenus à une vie privée et à une vie de famille. De nombreux détenus ont déclaré qu’ils faisaient l’objet d’une surveillance constante si envahissante qu’ils refusaient de parler de sujets personnels ou de questions familiales privées lors des visites de leurs proches. Cette surveillance audio, vidéo et physique, associée aux autres mesures de sécurité dans le cadre de ce régime, a fait des visites de leurs enfants et conjoint-e-s des rencontres superficielles, ce qui compromet leur capacité à construire et entretenir des relations familiales.

Cette surveillance de grande ampleur a par ailleurs mis en péril voire violé le principe du secret médical, dans des cas où des gardiens étaient présents lors de consultations médicales, et eu pour effet supplémentaire de limiter la possibilité pour les détenus et leurs avocats de s’entretenir en toute confidentialité.

Rares sont les opportunités de formation et de réinsertion au sein des unités TA, ce qui complique d’autant plus la tâche des détenus souhaitant se préparer à véritablement réintégrer la société.

« La rudesse des traitements infligés dans les unités TA, associée à un manque d’opportunités de réinsertion risquent fort d’aliéner encore davantage les détenus et de les empêcher de se préparer à un retour au sein de la société », a déclaré Jonathan Horowitz. « Le régime des unités TA fait fi des responsabilités des institutions pénales néerlandaises sur le plan de la réinsertion sociale. Ce système est au contraire susceptible d’avoir des effets opposés au but affiché, qui est d’accroître la sécurité. »

Recommandations

Amnesty International et le Projet de justice Société ouverte demandent au gouvernement de veiller à ce qu’aucune personne ne soit automatiquement placée dans une unité TA sur la seule base des charges retenues contre elle. Les organisations exhortent en outre le gouvernement à cesser de recourir à des mesures de sécurité draconiennes contre les détenus, telles que des placements à l’isolement prolongés et restrictifs et des fouilles à nu intrusives, sans déterminer au préalable si elles sont requises et proportionnées. Les détenus doivent par ailleurs se voir proposer de véritables recours afin de pouvoir contester leur placement initial et leur maintien en détention dans ces unités, ainsi que les mesures de haute sécurité utilisées contre eux, de sorte que celles-ci soient mises en conformité avec le droit international relatif aux droits humains et les normes s’y rapportant. Amnesty International et le Projet de justice Société ouverte appellent aussi de leurs vœux la tenue dans les meilleurs délais d’une inspection exhaustive, indépendante et impartiale visant à déterminer dans quelle mesure le régime des unités TA respecte le droit international relatif aux droits humains.

Complément d’information

La première unité de détention TA spécialisée de haute sécurité a ouvert aux Pays-Bas en 2006 au sein de l’établissement carcéral de Vught (Penitentiaire Inrichting Vught). Une autre a été créée en 2007 à la prison de De Schie (Penitentiare Inrichting De Schie), à Rotterdam. À ce jour, plus de 160 personnes sont passées par les unités TA. À elles deux, elles peuvent accueillir 48 personnes.

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