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© Sølve Sæther

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Égypte

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Égypte en 2023.

L’élection présidentielle s’est tenue dans un climat de répression. Les véritables candidat·e·s de l’opposition n’ont pas pu se présenter et les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique ont été fortement restreints. Les autorités ont libéré 834 personnes détenues pour des raisons politiques, mais elles ont arrêté plus de trois fois plus de monde en 2023. Plusieurs milliers de personnes perçues, à tort ou à raison, comme critiques à l’égard du gouvernement étaient toujours détenues de manière arbitraire ou poursuivies injustement. Les disparitions forcées et la pratique de la torture et autres mauvais traitements étaient toujours monnaie courante. Des condamnations à mort ont été prononcées à l’issue de procès manifestement iniques, mais le rythme des exécutions a nettement ralenti. L’impunité restait la règle pour les atteintes graves aux droits humains commises en 2023 et au cours des années précédentes. Des femmes et des filles, des membres de minorités religieuses et des personnes LGBTI ont subi des discriminations, des violences et des poursuites pour avoir exercé leurs droits fondamentaux. Les autorités ne se sont pas attaquées au problème des droits économiques et sociaux mis à mal par l’aggravation de la crise économique et n’ont pas protégé les travailleuses et travailleurs contre les licenciements abusifs dans les entreprises privées. Les expulsions forcées se sont poursuivies dans les quartiers informels et les autorités ont empêché des dizaines de milliers d’habitant·e·s du gouvernorat du Sinaï-Nord de réintégrer leur foyer. Des personnes réfugiées ou demandeuses d’asile ont été arrêtées arbitrairement pour entrée ou séjour irréguliers sur le territoire égyptien. Des expulsions ont eu lieu.

CONTEXTE

Le « dialogue national » a débuté en mai. Des personnalités politiques de l’opposition et des défenseur·e·s des droits humains ont cependant interrompu leur participation après de nouvelles arrestations d’opposant·e·s au gouvernement. Le dialogue a été suspendu en septembre à l’approche de l’élection présidentielle. Celle-ci s’est tenue en décembre sur fond d’aggravation de la crise financière et économique. Le président sortant, Abdel Fattah al Sissi, a remporté l’élection, à laquelle les véritables candidat·e·s d’opposition n’ont pas pu se présenter.

Le président a annoncé des festivités en l’honneur de la « fin du terrorisme » en janvier, alors que des attaques continuaient de se produire sporadiquement dans le gouvernorat du Sinaï-Nord. En août, la Fondation du Sinaï pour les droits humains, une organisation de défense des droits, a signalé que des enfants soldats avaient participé à des opérations militaires dans ce gouvernorat. Dans un rapport établi pour le Comité des droits de l’enfant [ONU] qui a été publié en mars, l’Égypte a confirmé que l’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées était de 16 ans.

À partir du 9 octobre, Israël a attaqué à plusieurs reprises le point de passage frontalier de Rafah, entre l’Égypte et la bande de Gaza assiégée, et limité rigoureusement l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza depuis l’Égypte.

LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Les autorités ont continué de réprimer la dissidence et d’asphyxier la société civile. Parmi les personnes prises pour cible figuraient des responsables de l’opposition et leurs sympathisant·e·s, des proches de dissident·e·s vivant à l’étranger, des syndicalistes, des avocat·e·s et des personnes qui critiquaient le bilan des autorités en matière de droits humains, leur gestion de la crise économique et les interventions de l’armée.

Après un procès manifestement inique, la Cour suprême de sûreté de l’État, instaurée par la législation d’exception, a condamné en janvier 82 personnes du gouvernorat de Suez, dont 23 étaient mineur·e·s au moment des faits qui leur étaient reprochés, à des peines allant de cinq ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité pour des manifestations contre le gouvernement tenues en septembre 2019.

Les forces de sécurité ont arrêté au moins quatre journalistes en raison de leur travail ou de leurs opinions. L’un d’entre eux, Hisham Kassem, éditeur et président du Courant libre, une coalition de partis libéraux de l’opposition, a été condamné en septembre à six mois d’emprisonnement et une amende pour « diffamation », parce qu’il avait dénoncé en ligne des pratiques présumées de corruption d’un ancien ministre, et pour « outrage » à des fonctionnaires.

Au moins 21 journalistes étaient toujours en prison à la suite d’une condamnation ou dans l’attente des conclusions d’une enquête pour « diffusion de fausses informations », appartenance à un groupe « terroriste » ou « utilisation abusive des réseaux sociaux ».

Plus de 600 sites Internet, notamment des sites d’information et de défense des droits humains, étaient toujours bloqués. Les autorités ont notamment bloqué le site de l’Institut du Caire pour les études des droits de l’homme (ICEDH, une ONG) en janvier et les sites d’actualités Soulta 4 et Masr 360 en juin. Elles ont en revanche rétabli l’accès au site d’information de l’opposition Daarb en avril.

Des membres du personnel de Mada Masr, une plateforme d’information indépendante, faisaient l’objet de poursuites et d’enquêtes motivées par des considérations politiques concernant, entre autres, la publication en octobre d’un reportage sur le point de passage frontalier de Rafah.

Agissant en dehors de toute procédure légale, le gouvernement a ajouté en 2023 les noms de 820 personnes, dont des défenseur·e·s des droits humains, des syndicalistes et des journalistes, à sa « liste de terroristes », privant ainsi les intéressé·e·s de leurs droits civiques et politiques.

La période d’enregistrement prévue par la Loi sur les ONG de 2019 est arrivée à son terme en avril. Les ONG non inscrites risquaient dès lors de fermer.

Au moins 20 défenseur·e·s des droits humains étaient toujours arbitrairement frappés, du fait de leurs activités, d’une interdiction de voyager ou d’un gel de leurs avoirs.

Les forces de sécurité ont empêché des personnes d’enregistrer leur soutien à de potentiels candidat·e·s de l’opposition à l’élection présidentielle. Elles ont arrêté arbitrairement au moins 137 sympathisant·e·s et proches d’Ahmed Altantawy, un membre de l’opposition qui souhaitait se présenter. Citizen Lab a indiqué en septembre que le téléphone d’Ahmed Altantawy était infecté par le logiciel espion Predator, pointant avec un « degré de certitude élevé » l’implication du gouvernement.

En octobre, les forces de sécurité du Caire et d’Alexandrie ont arrêté des dizaines de personnes, dont des mineur·e·s, qui avaient manifesté en solidarité avec le peuple palestinien de Gaza. À la fin de l’année, selon la Commission égyptienne des droits et des libertés, au moins 67 d’entre elles étaient toujours en détention provisoire pour des charges liées à la participation à des manifestations ou à des actes de terrorisme.

DÉTENTIONS ARBITRAIRES ET PROCÈS INÉQUITABLES

Au cours de l’année, 834 personnes incarcérées pour des motifs politiques ont été libérées. Le service du procureur général de la sûreté de l’État a interrogé au moins 2 504 opposant·e·s ou critiques présumés du régime arrêtés en 2023 au motif que ces personnes auraient été impliquées dans des infractions liées au terrorisme, à la cybercriminalité, à des manifestations ou à la diffusion de « fausses nouvelles ».

Les forces de sécurité ont refusé de relâcher 251 détenu·e·s pour lesquels le parquet ou un·e juge avait rendu un non-lieu ou une décision de remise en liberté provisoire, ou qui avaient purgé leur peine de prison.

En juin, le président Abdel Fattah al Sissi a loué l’intérêt des détentions pour « sauver l’Égypte ».

Des procureurs du service du procureur général de la sûreté de l’État et des juges renouvelaient régulièrement la détention provisoire de milliers de personnes, sans leur permettre de réellement contester la légalité de leur privation de liberté. Des détenu·e·s ont assisté à l’audience de prolongation de leur détention par visioconférence depuis leur prison, ce qui les privait de leur droit à une défense adéquate et les exposait à des représailles s’ils signalaient de mauvais traitements devant les gardiens.

Les garanties en matière de procès équitable étaient systématiquement bafouées dans les affaires politiques. À l’issue d’un procès inique, la Cour suprême de sûreté de l’État a condamné en mars 30 personnes, dont le responsable de la Coordination égyptienne pour les droits et les libertés, à des peines allant de cinq ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité sur la base de charges absurdes liées à leur travail en faveur des droits humains ou à leur dissidence pacifique.

DISPARITIONS FORCÉES, TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Les forces de sécurité, dont l’Agence de sécurité nationale, ont continué de soumettre des dissident·e·s à des disparitions forcées. D’après la campagne Halte aux disparitions forcées, au moins 70 personnes arrêtées en 2023 ont été victimes de disparition forcée ; à la fin de l’année, on ignorait toujours tout du sort de six d’entre elles.

La torture et d’autres formes de mauvais traitements étaient toujours couramment pratiquées dans les prisons, les postes de police et les centres gérés par l’Agence de sécurité nationale.

En janvier, les forces de sécurité ont arrêté l’avocat Shaaban Mohamed dans une rue de Guizeh et l’ont soumis à une disparition forcée dans un bâtiment de l’Agence de sécurité nationale pendant six semaines. Il a été suspendu par les membres et a reçu des coups et des décharges électriques.

Des personnes étaient toujours incarcérées dans des conditions constituant une violation de l’interdiction absolue de la torture et des autres formes de mauvais traitements : refus de soins de santé et de visites des familles, détention à l’isolement prolongée, exposition à des lumières vives et vidéosurveillance 24 heures sur 24. Dans le centre pénitentiaire de Badr (gouvernorat du Caire) et dans la prison de la ville de Dix-de- Ramadan (gouvernorat de Sharqiya), où des centaines de prisonnières et prisonniers politiques ont été transférés à partir de la mi-2022 et de la mi-2023, respectivement, des dizaines de personnes détenues ont organisé des grèves de la faim pour protester contre leurs conditions d’incarcération.

PEINE DE MORT

Des juridictions pénales, dont des chambres spécialisées dans les affaires de terrorisme, et des tribunaux militaires ont prononcé des condamnations à mort à l’issue de procès inéquitables.

En janvier, un tribunal pénal du Caire a condamné plusieurs hommes à la peine capitale pour des infractions liées au terrorisme après un procès entaché d’allégations de disparition forcée et d’« aveux » extorqués sous la torture.

Le nombre d’exécutions a baissé par rapport aux années précédentes.

IMPUNITÉ

L’impunité restait la règle pour les homicides illégaux, la torture, les disparitions forcées et d’autres atteintes graves aux droits humains commises en 2023 et au cours des années précédentes. Dix ans après l’homicide illégal d’au moins 900 personnes le 14 août 2013, lors de la dispersion violente de sit-in organisés par des sympathisant·e·s du président destitué Mohamed Morsi, aucun agent de l’État n’avait été amené à rendre des comptes.

Les autorités n’ont pas enquêté comme elles le devaient sur les causes et les circonstances de la mort d’au moins 47 personnes en détention, alors que des informations faisaient état d’actes de torture ou de refus de soins médicaux. Les forces de sécurité ont menacé d’arrestation ou autre persécution leurs proches en quête de vérité et de justice.

Aucun agent de l’État n’a été amené à rendre de comptes pour la mort de Mahmoud Abdel Gawad au poste de police de Nabaroh (gouvernorat de Daqahliya) en juillet, quatre jours après son arrestation, alors que, selon des informations crédibles, la police l’aurait frappé violemment et lui aurait fait subir des décharges électriques.

Aucune enquête n’a été ouverte sur la mort de l’avocat Ali Abbas Barakat le 26 juin. Atteint d’une maladie du foie, il s’était effondré et avait perdu connaissance le 10 juin dans la prison d’Al Qanater, dans le Grand Caire. Les autorités avaient toutefois attendu 48 heures avant de le transférer dans un hôpital pénitentiaire.

En septembre, la Cour constitutionnelle italienne a autorisé la tenue en Italie du procès par contumace de quatre officiers égyptiens accusés d’avoir torturé et tué l’étudiant italien Giulio Regeni en Égypte en 2016. La procédure était auparavant au point mort car l’Égypte gardait secrètes les coordonnées des suspects pour qu’ils ne puissent pas être informés des poursuites engagées à leur encontre.

DISCRIMINATION ET VIOLENCES SEXUELLES OU FONDÉES SUR LE GENRE

Les femmes faisaient toujours l’objet de discriminations en droit et en pratique, notamment concernant le mariage, le divorce, la garde des enfants et les fonctions politiques. Attendue de longue date, la modification de la Loi sur le statut personnel était dans une impasse et l’absence de consultation véritable des défenseur·e·s des droits des femmes suscitait des inquiétudes.

Les autorités n’ont pas pris de mesures suffisantes contre la perpétration de violences fondées sur le genre par des acteurs étatiques et non étatiques, et les médias égyptiens se sont fait l’écho d’un nombre croissant d’homicides de femmes commis par des membres de leur famille ou des prétendants éconduits.

Des femmes ont été poursuivies pour avoir dénoncé publiquement les violences sexuelles ou pour des motifs liés à la « morale ».

En novembre, un tribunal d’appel ayant compétence dans les affaires économiques a annulé la condamnation à deux ans d’emprisonnement prononcée contre la mannequin et influenceuse TikTok Salma Elshimy et lui a infligé une amende pour un contenu « immoral » jugé « contraire aux valeurs de la famille égyptienne ». Trois influenceuses au moins étaient toujours incarcérées sur la base d’accusations sans fondement, notamment liées à la « morale ».

Les autorités ont cette année encore harcelé et poursuivi des hommes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre réelle ou supposée. Plusieurs d’entre eux ont signalé avoir été frappés et avoir subi d’autres mauvais traitements pendant leur garde à vue.

DROITS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

La crise économique grave qui secouait l’Égypte a eu des effets dévastateurs sur les droits socioéconomiques de la population.

L’État a alloué près de la moitié du budget national de l’exercice 2023/2024 au remboursement de la dette et n’a pas respecté l’obligation constitutionnelle de consacrer respectivement au moins 3 % et 6 % du PIB à la santé et à l’éducation de base et l’enseignement supérieur.

Après un accord passé avec le Fonds monétaire international fin 2022 visant à laisser flotter la livre égyptienne, la devise a perdu une grande partie de sa valeur. En février, l’inflation annuelle oscillait autour de 40 %. Selon l’Agence centrale pour la mobilisation du public et la statistique (CAPMAS), les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 68 % entre août 2022 et juillet 2023. D’après une cadre de la CAPMAS, le taux de pauvreté est monté en flèche en 2022/2023. Il devenait donc encore plus urgent que le gouvernement adapte ses programmes de protection sociale.

L’État n’a pas pris de mesures satisfaisantes pour atténuer les incidences de la crise économique sur les droits de la population, en particulier sur le droit à un niveau de vie suffisant. En septembre, le président a annoncé une augmentation du salaire minimum mensuel dans le secteur public de 3 500 à 4 000 livres égyptiennes (soit de 114 à 130 dollars des États-Unis), ce qui, selon les spécialistes des droits économiques, était sans commune mesure avec l’inflation. Les autorités n’ont par ailleurs rien fait pour obliger les entreprises privées à respecter le salaire minimum.

Le chef de l’État a déclaré en septembre que « la faim et les privations » étaient des sacrifices acceptables pour permettre le développement et le progrès.

DROITS DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS

Les autorités ont continué à intimider les travailleuses et travailleurs qui faisaient grève pour obtenir une hausse de salaire ou de meilleures conditions de travail et à entraver leurs actions.

En octobre, les forces de sécurité ont empêché des grévistes de Universal Group for Home Appliances de se rassembler près du siège de l’entreprise, dans la ville de Six- Octobre, et les ont mis en garde contre toute action éventuelle auprès du ministère du Travail. L’Agence de sécurité nationale a par ailleurs convoqué et interrogé plusieurs membres du personnel au sujet de cette grève.

Au moins 14 enseignant·e·s étaient toujours en détention dans l’attente des conclusions d’une enquête pour des charges liées au « terrorisme » après avoir manifesté en octobre dans la nouvelle capitale administrative (gouvernorat du Caire) contre leur exclusion des affectations. Des candidat·e·s à des postes dans la fonction publique se sont plaints de s’être vu refuser, pour des motifs de sécurité, de grossesse ou de surpoids, le certificat de réalisation d’une formation à l’école militaire rendue obligatoire en 2023 pour toute affectation.

DROITS EN MATIÈRE DE LOGEMENT

Les autorités ont continué de procéder à des expulsions forcées et des démolitions de logements, en particulier dans les quartiers informels du Caire et dans la nécropole historique de la Cité des morts, dont la population s’élevait à plusieurs dizaines de milliers d’habitant·e·s. Des personnes qui protestaient contre ces expulsions ont été arrêtées.

En mars, un tribunal administratif a débouté de leur demande des habitant·e·s de l’île de Warraq (gouvernorat de Guizeh) qui avaient contesté la décision prise en 2021 par le gouvernement de s’approprier leurs terres pour « l’intérêt public » sans compensation suffisante. En février, les forces de sécurité ont dispersé une manifestation de dizaines d’habitant·e·s de l’île de Warraq à l’aide de gaz lacrymogènes et procédé à des arrestations.

D’après la Fondation du Sinaï pour les droits humains, des démolitions de logements et des expulsions forcées ont eu lieu à Al Arish, dans le gouvernorat du Sinaï-Nord.

En octobre, l’armée a tiré illégalement à balles réelles pour disperser des centaines de manifestant·e·s pacifiques qui avaient organisé un sit-in à Sheikh Zuweid. Les protestataires demandaient de pouvoir se réinstaller dans leurs domiciles de Sheikh Zuweid et Rafah, deux villes du gouvernorat du Sinaï-Nord, d’où ils avaient été déplacés de force depuis 2014 en raison d’opérations militaires menées contre des groupes armés, dont Province du Sinaï, affilié à l’État islamique.

LIBERTÉ DE RELIGION ET DE CONVICTION

Les chrétien·ne·s étaient toujours, en droit et en pratique, la cible de discriminations.

Personne n’a été amené à rendre de comptes pour les attaques sectaires perpétrées en janvier contre la population chrétienne du village d’Ashruba (gouvernorat d’El Minya), qui ont fait des blessés et des dégâts matériels.

Le droit de construire ou de réparer des églises continuait de faire l’objet de restrictions en vertu d’une loi de 2016 instaurant l’obligation d’obtenir une autorisation des services de sécurité et d’autres organes de l’État. Le Premier ministre a annoncé en mai que depuis l’entrée en vigueur de cette loi, le gouvernement avait accepté la légalisation de 2 815 églises, soit environ la moitié des demandes déposées.

Un fait positif était cependant à noter : en mars, un tribunal des affaires familiales siégeant au Caire a appliqué les règles chrétiennes orthodoxes dans une affaire d’héritage portée par Huda Nassralla, une avocate de l’Initiative égyptienne pour les droits de la personne. Habituellement, les juges appliquaient la Loi sur le statut personnel visant les personnes musulmanes, qui était discriminatoire à l’égard des femmes en matière d’héritage.

Des membres de minorités religieuses, des personnes athées et d’autres n’embrassant pas les convictions religieuses autorisées par l’État ont été convoqués et interrogés par l’Agence de sécurité nationale. D’autres ont été menacés ou harcelés, notamment par leur établissement d’enseignement et en ligne.

Le Yéménite Abdul Baqi Saeed Abdo, ancien musulman converti au christianisme, était toujours détenu dans le cadre d’une enquête du service du procureur général de la sûreté de l’État sur des accusations de « diffamation de la religion islamique » et d’appartenance à un « groupe terroriste » en lien avec des publications sur les réseaux sociaux concernant ses convictions.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Environ 370 000 Soudanais·e·s se sont réfugiés en Égypte entre le mois d’avril et la fin de l’année, selon le HCR. Les autorités ont durci les restrictions d’entrée et exigeaient de tous les ressortissant·e·s soudanais qu’ils obtiennent un visa auprès de leur consulat, ainsi, pour les garçons et les hommes âgés de 16 à 50 ans, qu’un avis favorable des services de sécurité. Des ressortissant·e·s soudanais, érythréens et syriens se sont vu interdire l’entrée aux frontières terrestres et au moins un demandeur d’asile a été renvoyé de force au Soudan parce qu’il n’avait pas de permis de séjour valide.

Les forces de sécurité ont arrêté des dizaines de personnes en quête d’asile venues d’Afghanistan, de Syrie, d’Afrique subsaharienne ou de Chine (des Ouïghours) pour entrée ou séjour irrégulier en Égypte. Le réfugié tchadien Alfred Djasnan a été expulsé en mai vers le Rwanda. Ce journaliste et président de l’Initiative africaine pour les droits des personnes réfugiées avait été arrêté par la police après une manifestation de personnes d’Afrique subsaharienne qui protestaient contre leurs conditions de vie devant le bureau du HCR dans la ville de Six- Octobre.

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