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Guo Qiang, a 29-year-old deliveryman for Dada-JD Daojia, checks his phone showing update of the novel coronavirus outbreak, outside a JD.com's 7Fresh chain, in Yizhuang town, Beijing, China February 8, 2020. Picture taken February 8, 2020. REUTERS/Tingshu Wang
Un jeune homme regarde l'évolution du COVID-19 en Chine sur son smartphone, février 2020 ©REUTERS/Tingshu Wang

Un jeune homme regarde l'évolution du COVID-19 en Chine sur son smartphone, février 2020 ©REUTERS/Tingshu Wang

Liberté d'expression

Coronavirus : une nouvelle langue contre la censure en Chine

Afin d’échapper au système de cybercensure le plus sophistiqué au monde, les internautes chinois n’ont d’autre choix que d’inventer leur propre vocabulaire afin de débattre de « sujets sensibles ». Notamment la gestion de l’épidémie de coronavirus par le gouvernement. 

 Ce langage ne cesse d’évoluer au fur et à mesure que le gouvernement interdit de nouveaux sujets et de nouveaux termes. Depuis le début de l’épidémie du coronavirus, les internautes chinois redoublent de créativité et étoffent un peu plus cette langue virtuelle. Pour apprécier pleinement les conversations sur les réseaux sociaux en Chine, savoir parler chinois ne suffit plus.

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L’épidémie de coronavirus déclenche une nouvelle vague de censure

Depuis le début de l’épidémie, le gouvernement chinois a été vivement critiquée. Les internautes lui reprochent notamment sa tentative initiale de dissimuler l’épidémie et certaines informations d’intérêt général. En réaction à l’explosion des critiques en ligne, une multitude de nouveaux termes a été classée « sensible » et donc censurée. 

En janvier, des utilisateurs du réseau social chinois Weibo se sont ainsi plaints que les mots « Wuhan » et « Hubei » - foyers de l’épidémie- faisaient l’objet de restrictions. Seule une petite proportion des utilisateurs pouvait voir les posts contenant ces mots. Les critiques visant les autorités dans ces régions ont été muselées. Sur WeChat, autre réseau social très prisé, des combinaisons comme « Xi Jinping va à Wuhan » et « Wuhan + PCC + crise + Pékin » étaient systématiquement censurées, a confirmé un récent rapport du laboratoire de recherches Citizen Lab. Les internautes se sont mis à utiliser « wh » et « hb », les initiales de Wuhan et Hubei, en remplacement – c’est tout simple. Mais cela tend à se compliquer.

Se cacher derrière un boys band pour parler des hommes politiques

Cette liste de termes censurés évolue constamment et n’est jamais révélée publiquement. Dans un contexte de censure accrue au sujet de l’épidémie du coronavirus, de nouveaux mots sont interdits chaque jour. Mais les internautes chinois ont l’habitude de substituer des alternatives aux « mots sensibles », et chacun s’autocensure en permanence, dans le but de battre le système. La Croix-Rouge chinoise et sa capacité à distribuer les ravitaillements ayant été remises en cause, les internautes ont anticipé que « Croix-Rouge » allait être censuré et l’ont remplacé par « dix rouge » (le caractère chinois pour 10, « 十 Shí », ressemble à une croix). Lorsque la population a douté du fait que la Croix-Rouge nationale avait mal géré les ravitaillements, des hashtags comme « les ravitaillements sont rouges » ont connu un franc succès.

Autre exemple, l’usage de « F4 ». Boys band taïwanais des années 2000, l’acronyme désigne désormais quatre hommes politiques régionaux : le gouverneur de la province du Hubei, le secrétaire du Comité du Parti communiste du Hubei, le maire de Wuhan et le secrétaire du parti de Wuhan. Pour beaucoup, ces quatre hommes sont les principaux responsables de l’épidémie massive. Pour accéder à des sites Internet étrangers bloqués en Chine (comme Facebook et Twitter), les internautes doivent utiliser des VPN – des logiciels qui leur donnent la possibilité de « passer par-dessus la Grande muraille pare-feu de Chine ». « Échelle » (pour passer par-dessus) et « nouilles pho vietnamiennes » (expression qui ressemble à « passer de l'autre côté du mur ») sont donc couramment utilisés pour faire référence aux VPN.

Génie lyrique ou créativité gâchée ?

La suppression d’une publication sur ZhiHu (version chinoise de Quora) demandant « comment laver minutieusement les goulots de bouteille étroits » peut sembler déconcertante à première vue. En fait, en chinois, au niveau de la sonorité, « goulots de bouteille étroits » ressemble à « président Xi Jinping » – un fait qui n’a pas échappé aux censeurs. De même, la plainte d’un parent sur Weibo concernant son enfant « qui a du mal à apprendre » a été supprimée instantanément. Pourquoi ? Parce qu’en chinois, le nom de famille du président signifie « apprendre ». Dans ce contexte, dire « qui a du mal à apprendre » mérite d’être censuré.

Comment échapper au sentiment lancinant que cette mine de sagesse et d’imagination pourrait être mieux employée, à des fins plus productives, que ce combat permanent pour se faire entendre.

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