Aller au contenu
Agir
Faire un don
ou montant libre :
/mois
Grâce à la réduction d'impôts de 66%, votre don ne vous coûtera que : 5,1 €/mois
A man with a face mask reading " Bolivia does not shut up" attends a rally demanding Bolivia's President Jeanine Anez's (not pictured) resignation, while the Bolivian Union Workers (COB) declare a pause to protests according to local media, amid the coronavirus disease (COVID-19), in El Alto, on the outskirts of La Paz, August 14, 2020. REUTERS/David Mercado
Un manifestant qui porte un masque "La Bolivie ne se tait pas!" participe à un rassemblement en faveur de la démission de la Présidente Jeanine Anez. Août 2020, © REUTERS/David Mercado

Un manifestant qui porte un masque "La Bolivie ne se tait pas!" participe à un rassemblement en faveur de la démission de la Présidente Jeanine Anez. Août 2020, © REUTERS/David Mercado

Liberté d'expression

Bolivie : 10 mois après les élections, la crise est maintenant sociale, politique et sanitaire

La crise post-électorale en Bolivie a été marquée par la répression des manifestations et l’utilisation excessive et inutile de la force par la police nationale et les forces armées. 2 mois avant les élections présidentielles, quelle est la situation dans le pays ? Nous avons mené l’enquête.

Au moins 35 personnes ont perdu la vie et 833 été blessées dans le contexte des manifestations depuis les élections du 20 octobre 2019.

Alors que la Bolivie se prépare à une nouvelle élection présidentielle ce 18 octobre, après deux reports et la démission d’Evo Morales en novembre dernier, le pays traverse une grave crise. Autant sociale, politique qu’en matière de droits humains, cette crise a été aggravée par la pandémie de Covid-19.

Lire aussi : Tout savoir sur le Covid-19 et les droits humains

Le ministère bolivien de la Santé recensait à la date du 13 août 3 800 décès et 96 000 cas de personnes testées positives dans le contexte de la situation d’urgence sanitaire.

La colère de la population face à l’impunité

Les manifestations, y compris les barrages routiers, organisées pour protester contre le report des élections, se sont intensifiées ces derniers jours. Ils ont été accusés d’empêcher l’acheminement de matériel indispensable pour lutter contre la Covid-19. Parfois, des violences ont été commises par les manifestants, entraînant l’intervention des forces de sécurité. De cette colère se dégage un profond sentiment d’injustice. Ces dernières années, de nombreuses violations des droits humains sont restées impunies.

Lire aussi : Amériques : les dérives autoritaires des gouvernements contre leur population

En novembre 2019 à Sacaba et à Senkata, au moins 18 personnes ont été tuées par balle lors de manifestations et du blocage de l’entreprise publique YPBF. Des événements devenus emblématiques de la crise dans le pays. Nous avons rencontré des proches de victimes, des témoins, des journalistes et des défenseurs des droits humains. Ces témoignages cumulés à d’autres éléments de preuve font état d’un usage disproportionné et inutile de la force de la part de la police nationale et de l’armée. Des menaces et actes de harcèlement ont été promulgués à l’encontre de défenseurs des droits humains. En réponse, aucune mesure n’a été prise par les autorités compétentes. Nous demandons aux nouveaux candidats à l’élection présidentielle de s’engager à rendre justice en mettant fin à l’impunité : des enquêtes indépendantes, impartiales et urgentes doivent être ouvertes et les droits des victimes garantis. Sans vérité ni justice, ces violations risquent de se répéter.

L’appel à la violence de certains haut-dirigeants est inquiétant

Aujourd’hui, l’heure n’est pas à l’apaisement au sein de la classe politique. À différents moments de la crise post-électorale, de hauts représentants du précédent gouvernement ont fait des déclarations comportant des appels à la violence et menacé de boucler des villes si les grèves se poursuivaient. De son côté, le gouvernement par intérim a harcelé et menacé des opposants politiques et les autorités ont menacé publiquement des dirigeants de l’opposition et des journalistes. Ce harcèlement restreint la liberté d'expression en provoquant la censure de dirigeants politiques, de journalistes et de défenseurs des droits humains, notamment de professionnels de santé.

Dans ce contexte de polarisation et d’absence de confiance, la mise en place du Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants (GIEI), avec l’appui de la commission inter-américaine des droits de l’homme est nécessaire. La présidente par intérim Jeanine Añez s’était engagée à sa mise en place. En vain. Nous appelons les candidats à la présidentielle à s’engager à leur tour pour garantir sa mise en œuvre.

 

Nos recommandations

Face à la crise sociale, politique et sanitaire, nous appelons les autorités boliviennes à :

Mettre fin à l’impunité et garantir les droits des victimes : en ouvrant des enquêtes indépendantes sur les violations commises

Prendre les mesures nécessaires pour éviter que de nouvelles violations ne se reproduisent

Respecter leurs obligations de garantir le droit à la santé et le droit de manifester

Débloquer l’acheminement de matériel pour lutter contre la propagation de Covid-19

Placer les droits humains au cœur du débat est la seule façon de sortir de la crise. Faute de quoi, la population – notamment les groupes marginalisés – est condamnée à s'enfoncer dans une spirale de violence et de violations de ses droits.