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Action d'Amnesty International France à Paris © P-Y Brunaud/Picturetank

Action d'Amnesty International France à Paris © P-Y Brunaud/Picturetank

Contrôle des armes

Ventes d'armes à la coalition au Yémen : l’Élysée refuse de recevoir Amnesty International

Nous avons lancé en 2015 une pétition appelant le Président de la République à cesser les transferts d’armes de la France à la coalition militaire menée par l’Arabie saoudite au Yémen. Mais en mars 2017, l’Élysée a refusé de nous recevoir pour qu’on la lui remette.

En janvier 2017, nous avons sollicité par courrier un rendez-vous à la Présidence de la République afin de lui remettre les 18.375 signatures recueillies l’exhortant à faire cesser tous les transferts d’armes de la France à la coalition militaire engagée au Yémen sous la direction de l’Arabie saoudite.

Amnesty International s’est vivement préoccupée du conflit au Yémen dès son déclenchement en 2015. Fort de ses premiers constats sur les attaques ciblant les populations civiles, le mouvement a décidé de lancer un appel à tous les pays qui fournissent des armes, ou envisagent de le faire, à l'une quelconque des parties au conflit. Ces pays doivent suspendre immédiatement tout transfert d'armes jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de risque sérieux qu’elles soient utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire ou relatif aux droits humains au Yémen.

La France fait partie de ces pays, comme le Royaume-Uni ou les États-Unis qui fournissent la coalition, et rien n’indique qu’elle a cessé de le faire à ce jour, malgré nos recommandations.

Lire aussi : retour sur 2 ans de conflit au Yémen

Un rendez-vous refusé, des réponses insatisfaisantes

Après une relance, nous avons reçu le 6 mars une réponse de la Présidence de la République faisant écho à nos préoccupations mais pas à notre demande de rendez-vous. Or les réponses qui nous ont été apportées sont loin de lever nos inquiétudes.

Si la France rappelle simplement qu’elle respecte les obligations du Traité sur le commerce des armes (2014) et de la Position commune 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008 définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires, son argumentaire apparaît peu convaincant.

Action d'Amnesty International France à Paris © P-Y Brunaud

Action d'Amnesty International France à Paris © P-Y Brunaud/Picturetank

Vendre des armes malgré tout

Ainsi, nous déplorons tout d’abord que la réponse qui nous a été faite ne fasse pas figurer parmi les critères retenus pour octroyer ou refuser une lience d’exportation, le risque de violations graves du droit international humanitaire. Or, au cours de cinq missions sur le terrain au Yémen entre mai 2015 et novembre 2016, nous avons recueilli des informations indiquant que toutes les parties au conflit, tant la coalition menée par l'Arabie saoudite que les Houthis et leurs alliés, avaient commis des violations graves du droit international humanitaire, et relatif aux droits humains, lors d’attaques terrestres et aériennes, dont certaines devraient faire l'objet d'enquêtes pour crimes de guerre.

Au terme, de la réponse qui nous est faite, nous sommes également préoccupés par la mise en balance que semble faire la France d’une part, entre les différents critères à l’exportation (respect des droits humains, du droit international humanitaire,…) qu’elle doit prendre en compte dans son évalution du risque et d’autre part, le soutien qu’elle entend apporter à la lutte contre le terrorisme. En effet, le Traité sur le commerce des armes, de même que la Position commune de l’Union européenne (UE), prévoient une évaluation approfondie des risques à l’exportation, à l’exclusion de toute forme de considération. Au terme de cette évaluation, la France doit en tirer les conclusions et décider si l'exportation s'avère soit illégale soit trop dangereuse pour être autorisée.

Enfin, si la réponse faite nous indique que la sécurité des civils est prise en compte lorsque la France décide d’exporter des armes ou non, il convient de s’interroger. Que faut-il entendre par là ? Cela signifie-t-il que le droit international humanitaire serait pris en compte dans une certaine mesure pour refuser ou octroyer une autorisaiton d’exportation ? La France a-t-elle déjà refusé des demandes d’exportation sur la base de ce motif ? Si oui lesquelles et pour quels types d’équipements ?

L’Arabie saoudite, meilleur client de la France

La France a octroyé pour un peu plus de 16 milliards d’euros de licences pour la seule Arabie saoudite en 2015.

La France a livré à ce pays pour 900 millions d’euros d’équipements militaires la même année dont 115 véhicules blindés ainsi que plus de 700 fusils de précision.

À aucun moment, le gouvernement n’a indiqué ces deux dernières années qu’il avait refusé, révoqué ou supendu des autorisations d’exportation. Selon le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute), la France aurait fourni des véhicules blindés à l’Arabie saoudite en 2016.

En 2016, des navires intercepteurs auraient été livrés aux gardes côtés saoudiens, dans un contexte de blocus maritime partiel du Yémen.

La France doit cesser d’être complice

Un an après le début du conflit, le secrétaire général des Nations unies déclarait que le « Yémen brûle et croûle sous les armes ». Fournir des armes et des équipements à des parties connues pour avoir porté atteinte de manière répétée aux lois de la guerre rend les exportateurs d’armes complices des crimes commis et alimente les atrocités. La communauté internationale, dont la France, a l’obligation de prendre des mesures afin de faire respecter le droit international humanitaire ainsi que les droits humains.

À aucun moment, la réponse qui nous a été faite n’indique que la France à cesser ses transferts. Nous renouvelons aussi notre appel pour que la France cesser ses transferts d’armes jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de risque sérieux qu’elles soient utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire ou relatif aux droits humains au Yémen.