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 	Personnel of the South Sudan People's Defence Forces (SSPDF), formerly named Sudan People's Liberation Army (SPLA), assigned as South Sundan's presidential guard, take part in a drill at their barracks in Rejaf, about 15km south of Juba, South Sudan, on April 26, 2019. - Though the guard is supposed to be comprised of an even share of former SPLA soldiers and former Sudan People's Liberation Army in Opposition (SPLA-IO) soldiers, the two armies have still not commenced training together despite the deadline for the formation of a unity government fast approaching on May 12. (Photo by Alex McBride / AFP) (Photo credit should read ALEX MCBRIDE/AFP via Getty Images)
Le personnel des Forces de défense du peuple du Soudan du Sud (SSPDF) participe à un exercice dans leur caserne à Rejaf, à environ 15 km au sud de Juba, au Soudan du Sud, le 26 avril 2019 // Credit : ALEX MCBRIDE/AFP via Getty Images

Le personnel des Forces de défense du peuple du Soudan du Sud (SSPDF) participe à un exercice dans leur caserne à Rejaf, à environ 15 km au sud de Juba, au Soudan du Sud, le 26 avril 2019 // Credit : ALEX MCBRIDE/AFP via Getty Images

Contrôle des armes

Les forces de sécurité sud-soudanaises violent l’embargo sur les armes

Nous apportons la preuve que les forces de sécurité n’ont pas respecté l’embargo sur les armes imposé par l’ONU. Enquête.

En début d’année, notre équipe d’enquête est parvenue à accéder, aux quatre coins du pays, à 12 sites militaires d’entraînement et de cantonnement dirigés par des membres de forces autrefois opposées, notamment les Forces de défense populaires du Soudan du Sud (FDPSS), l’Armée populaire de libération du Soudan-Opposition (APLS-O) et l’Alliance d’opposition du Soudan du Sud (AOSS), ainsi que les « forces organisées » (police, pompiers et services de protection de la faune et de la flore).

Nous avons découvert des éléments prouvant l’importation récente d’armes légères et de munitions, le recel d’armes et le détournement de véhicules blindés à des fins militaires non approuvées dans le cadre des licences de transfert d’armes.

Lire aussi : Au Soudan du Sud, un embargo sur les armes

Les preuves de violations de l’embargo

La plupart des centaines de fusils et autres armes légères que notre équipe d’enquête a observé entre les mains de soldats ont été obtenus avant l’embargo imposé par le Conseil de sécurité de l’ONU sur l’ensemble du territoire sud-soudanais depuis juillet 2018.

Cependant, plusieurs gardes du corps d’importants généraux, appartenant aussi bien au gouvernement qu’aux forces d’opposition, étaient équipés d’armes d’Europe de l’Est qui n’avaient jamais été recensées dans le pays. Nous avons donc la ferme conviction que ces armes sont arrivées au Soudan du Sud en violation de l’embargo.

Par ailleurs, nous nous sommes procurés des photographies vérifiées de munitions utilisées par le Service national de la sûreté (NSS) à Luri, une base extrêmement secrète située à proximité de Djouba, la capitale. Ces images montrent des cartouches chinoises produites en 2016, après la dernière vente reconnue par la Chine au Soudan du Sud. Par conséquent, il y a trois possibilités : ces cartouches ont été fournies en violation de l’embargo, elles ont été vendues clandestinement avant son instauration ou elles ont été acquises auprès d’un tiers ayant enfreint l’embargo ou détourné illicitement ces munitions.

Les importations d’armes légères ne sont pas les seules violations probables. Selon plusieurs sources, au moment où l’embargo sur les armes a été instauré, la flotte d’hélicoptères d’attaque Mi-24 du Soudan du Sud était en panne et clouée au sol. Depuis lors, l’État s’est procuré des pièces détachées pour réparer ces appareils, violant ainsi l’embargo.

Un seul de ces hélicoptères d’attaque coûte 36 millions de dollars des États-Unis, et les pièces détachées et l’entretien sont extrêmement onéreux, surtout lorsqu’ils impliquent d’enfreindre l’embargo de l’ONU sur les armes. Compte tenu des immenses difficultés que connaissent les systèmes de santé et de protection sociale sous-financés du Soudan du Sud, en particulier face à la pandémie de Covid-19, la priorité doit être donnée à la protection de la santé et des moyens d’existence de la population, et non à l’achat et à l’importation d’armes.

De la nécessité d’un embargo

Depuis le 13 juillet 2018, le Soudan du Sud fait l’objet d’un embargo complet de l’Union européenne (UE) sur les armes depuis qu’il s’est séparé du Soudan, en juillet 2011. Cet embargo englobe non seulement l’approvisionnement en armes par les États membres de l’UE, leurs ressortissants et les navires et aéronefs battant leur pavillon, mais aussi la fourniture de conseils et d’assistance techniques en rapport avec des armes sous embargo et l’aide financière à l’achat d’armes.

Comprendre : Qu'est-ce qu'un embargo sur les armes ?

L’Union africaine s’est fixé comme objectif pour 2020 de “faire taire les armes” sur le continent, ce qui, comme elle l’a précisé, implique de prendre des mesures visant à prévenir les violations des embargos de l’ONU sur les armes. La prolongation de l’embargo au Soudan du Sud est donc un volet essentiel de cette démarche. Des armes sont utilisées pour commettre d’effroyables violations des droits humains et des crimes de guerre depuis le début du conflit.

L’embargo de l’ONU sur les armes n’est pas la solution ultime mais il est quasiment certain que la situation serait encore pire sans cette mesure. Le cessez-le-feu continue d’être enfreint sporadiquement, la mise en œuvre d’arrangements cruciaux en matière de sécurité, de gouvernance et de redevabilité ne cesse d’être repoussée et le Soudan du Sud, inondé d’armes légères, doit aussi faire face à la crise de santé publique liée au Covid-19. Ce n’est pas le moment de laisser davantage d’armes affluer dans ce contexte volatile.

Comprendre : Qu’est-ce que le Traité sur le commerce des armes ?

Recours aux enfants soldats

Au cours de notre enquête, nous avons constaté que des enfants soldats étaient présents sur au moins deux sites d’entraînement et de cantonnement, aussi bien dans les rangs des forces gouvernementales soudanaises que dans ceux des forces d’opposition.

Selon les estimations du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), 19 000 enfants étaient utilisés par les militaires et des groupes armés au Soudan du Sud en juillet 2019.

Au 7 février 2020, seuls 53 avaient été autorisés à quitter des baraquements, des bases et des sites de cantonnement.

En février 2020, l’État a signé un plan d’action avec l’ONU en vue de faire cesser toutes les graves atteintes infligées à des enfants et de prévenir ces atrocités. L’APLS-O et l’AOSS ont approuvé ce plan, qui s’appliquera aussi aux forces d’opposition quand elles s’unifieront aux forces gouvernementales.

Le 26 février, soit deux semaines après la signature du plan d’action, 15 enfants associés aux militaires et à des groupes armés ont été relâchés. Néanmoins, il est indispensable de déployer davantage d’efforts pour faire cesser les atteintes visant des enfants dans le contexte