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Emmanuel Macron et le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi saluent la presse depuis les escaliers de l'Elysée, avant leur déjeuner de travail dans le cadre de la Conférence internationale pour la Libye, à Paris, le 12 novembre 2021
Amnesty International France
Emmanuel Macron et le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi saluent la presse depuis les escaliers de l'Elysée, avant leur déjeuner de travail dans le cadre de la Conférence internationale pour la Libye, à Paris, le 12 novembre 2021 © LUDOVIC MARIN / AFP

Emmanuel Macron et le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi saluent la presse depuis les escaliers de l'Elysée, avant leur déjeuner de travail dans le cadre de la Conférence internationale pour la Libye, à Paris, le 12 novembre 2021 © LUDOVIC MARIN / AFP

Contrôle des armes

Révélations Disclose : les dérives meurtrières du partenariat franco-égyptien

Une complicité d’homicides illégaux, des ventes d’armes à tout prix, des technologies de surveillance françaises pour cibler des militants… La semaine du 21 novembre 2021, le média "Disclose" a publié une série de révélations d’une extrême gravité concernant les relations franco-égyptiennes . Ces informations dessinent les contours d’un scandale d’État. Retour sur les « mémos de la terreur ».

Septembre 2023

Mise en garde à vue et perquisition du domicile de la journaliste Ariane Lavrilleux par la DGSI

Le 19 septembre 2023, la DGSI a placé en garde à vue la journaliste de Disclose Ariane Lavrilleux et a perquisitionné son domicile. La journaliste a notamment contribué aux révélations sur l'opération Sirli en Égypte. Suite à son arrestation, Agnès Callamard, la secrétaire générale d'Amnesty International a déclaré : "Il est très inquiétant que, presque deux ans après les révélations selon lesquelles la France se serait rendue complice de l’exécution extrajudiciaire de centaines de personnes en Égypte, ce soit la journaliste qui soit visée plutôt que les responsables présumés". Ariane Lavrilleux a été libérée le 21 septembre 2023, après 39 heures de garde à vue où elle était entendue par la DGSI. Elle n'aurait JAMAIS dû être arrêtée.

La déclaration complète d'Agnès Callamard ici

Le média d’investigation Dcislose a obtenu un grand nombre de documents classés « confidentiel-défense ». La source anonyme qui a transmis ces informations a précisé que « Ce qui fait rompre le silence, ce sont les dérives de l’action politico-militaire française qui entaillent profondément ce pour quoi des hommes et des femmes sont au service de la France. »

Ainsi, grâce à ces documents, le média explique pourquoi et comment la France maintient coûte que coûte son partenariat stratégique avec l’Égypte.

L’opération Sirli

Au nom de la lutte conjointe contre le terrorisme, une mission aurait été initiée par la France et l’Égypte en 2015 : l’opération Sirli. Le rôle de la France ? Être les yeux et les oreilles des forces égyptiennes à la frontière égypto-libyenne, grâce à un avion de surveillance et de reconnaissance.

L’avion, d’origine luxembourgeoise mais piloté par des Français, est censé scruter le désert occidental pour détecter toute menace terroriste en provenance de la Libye. Les données collectées seraient ensuite envoyées aux forces armées égyptiennes. Par exemple, elles permettraient de communiquer la localisation de pickups traversant le désert.

Rapidement, l’équipe française aurait compris que les données étaient utilisées pour cibler et détruire les pickups. Or, d’après les informations révélées par Disclose, les véhicules étaient conduits par des contrebandiers transportant du riz, des drogues, de l'essence, des armes, du tabac ou encore du maquillage. Un officier français aurait averti la Direction du renseignement militaire que la véritable priorité de la mission Sirli était la lutte contre le terrorisme et non pas la lutte contre la contrebande et l’immigration. Les autorités françaises auraient donc bien su quel était le véritable objectif de l’opération Sirli et l’auraient poursuivie en toute connaissance de cause. Dans tous les cas, le recours à des exécutions extrajudiciaires est illégal.

En 2020, l’Égypte s’est félicitée de la destruction de « 10 000 voitures remplies de terroristes et de trafiquants ». Les documents qui ont fuité appuieraient cette déclaration car ils révèleraient que, sous la présidence de François Hollande, l’Égypte aurait procédé à 121 bombardements contre des pickups dans le désert occidental. Ainsi, des centaines de personnes auraient été tuées, dont une partie potentiellement grâce à la complicité des autorités françaises.

Selon Disclose, la France aurait maintenu cette opération, malgré ses dérives, dans le but de pouvoir continuer à vendre des armes et des technologies de surveillance à l’Égypte.

La satisfaction du client égyptien avant tout.

Les ventes d’armes à tout prix

Pendant des années, Jean-Yves Le Drian, alors ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, a permis à la France de décrocher des contrats d’armement se chiffrant en milliards d’euros avec l’Égypte. Il serait devenu le « leader de la diplomatie des armes », précise Disclose. En 2015, c’est lui qui aurait également initié l’opération Sirli avec son homologue égyptien.

La France a signé et ratifié le Traité sur le commerce des armes (TCA). Un traité juridiquement contraignant qui interdit aux États parties de fournir du matériel de guerre dès lors qu’il existe un risque qu’il soit utilisé pour commettre ou faciliter des atrocités ou encore concourir à la répression interne. La France est également liée par des engagements européens du même ordre que le TCA.

Or, en 2018 déjà, nous prouvions que des véhicules blindés français s’étaient retrouvés au cœur de la répression des manifestations égyptiennes du 14 août 2013. Une sanglante répression qui a fait près de 1000 morts en seulement une journée. Selon Disclose, après ce tragique événement, le Quai d’Orsay aurait rendu un avis défavorable à la vente de nouveaux véhicules blindés en 2016. Sa crainte ? « L'utilisation potentielle de ce type de véhicules pour des missions de maintien de l'ordre ». Ignorant cet avis, les ventes auraient été réalisées.

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Ainsi, le soutien de la France au régime répressif du président égyptien al-Sissi semble sans faille. Pourtant, ni l’alliance stratégique avec l’Égypte, conclue au nom de la lutte contre le terrorisme, ni les intérêts économiques liés aux ventes d’armes et de technologies de surveillance ne sauraient justifier que la France bafoue ses engagements internationaux.

Ventes d'armes françaises : stop à la complicité de la France !

Une surveillance « Made in France »

Disclose a également révélé que trois entreprises de surveillance françaises – Nexa Technologies, Dassault Systèmes et Ercom-Suneris – auraient vendu leurs technologies de surveillance à l’Égypte, avec la bénédiction de l’État français. Ces outils auraient facilité la répression de la société civile. Pour rappel, utiliser des technologies de surveillance pour cibler des représentants ou des membres de la société civile est illégal.

Non à la surveillance numérique illégale !

La réponse de l’État doit être à la hauteur !

Les révélations de Disclose sont d'une extrême gravité et exigent des réponses claires et sans délai au plus haut niveau de l’État. Depuis de nombreuses années, nous dénonçons la pratique des exécutions extrajudiciaires dans le nord du Sinaï, en Égypte, et dans le gouvernorat de Behira.

Nous appelons donc le rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires à se saisir des faits rapportés. Il ne peut pas y avoir d'impunité si des crimes ont été commis par les forces égyptiennes. Au-delà, la responsabilité de la France pourrait être engagée devant le juge administratif pour aide ou assistance à un autre État dans la commission d’un fait internationalement illicite. En effet, sans les informations que la France aurait fournies, les frappes égyptiennes n’auraient jamais été possibles.

En outre, nous demandons l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière sur ces révélations. Le Parlement doit jouer son rôle de contrôle de l'action du gouvernement et donc demander à ce dernier de rendre des comptes sur une action qui aurait facilité la commission de violations graves des droits humains par l'Égypte.

Ces révélations confirment, une nouvelle fois, le besoin impératif et urgent d’un contrôle parlementaire sur les ventes d’armes françaises. Le Parlement doit pouvoir jouer ce rôle et s'assurer que des armes françaises ne servent pas à commettre ou à faciliter des violations des droits humains. Pour cela, on doit lui en donner les moyens.

Il y a un an, les députés Jacques Maire et Michèle Tabarot ont acté la nécessité de ce contrôle. Or, toujours selon Disclose, les autorités françaises se seraient opposées purement et simplement à « une implication des députés ». Une réponse que l’on ne peut tolérer ! Il est plus que temps que la France respecte ENFIN ses engagements internationaux et fasse preuve de transparence et de contrôle sur ses ventes d’armes.

Agir

VENTES D'ARMES FRANÇAISES : FAITES PRESSION SUR VOS DÉPUTÉS !

Il y a un an, les députés Michèle Tabarot et Jacques Maire publiaient un rapport pointant le besoin impératif d’un contrôle parlementaire sur les ventes d’armes françaises. Une initiative inédite que nous avions saluée mais qui, depuis, est restée lettre morte. Interpellez vos parlementaires pour qu’ils rendent des comptes sur le sujet !