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Julián Carrillo a été tué le 24 octobre 2018 à Coloradas de la Virgen, dans l'État de Chihuahua au Méxique. © Amnesty International / Marianne Bertrand

Julián Carrillo a été tué le 24 octobre 2018 à Coloradas de la Virgen, dans l'État de Chihuahua au Méxique. © Amnesty International / Marianne Bertrand

Liberté d'expression

Mexique : l’État aurait dû protéger Julián Carrillo

Julián Carrillo a été tué à cause de son combat pour les droits humains et l’environnement. L’État mexicain a manqué à son obligation de lui garantir une protection efficace. Trois mois après sa mort, justice n’est toujours pas faite.

Le 24 octobre 2018, des hommes armés sont arrivés à Coloradas de la Virgen, dans l’État de Chihuahua (dans le nord du Mexique), et ont tué Julián Carrillo, dirigeant de la communauté locale du peuple indigène rarámuri.

Depuis des années, les Rarámuris de Coloradas font l’objet d’attaques et de menaces parce qu’ils se battent pour défendre leurs terres ancestrales.

Cet assassinat témoigne de la façon la plus évidente et scandaleuse du non-respect de la part des autorités mexicaines de leur obligation de garantir une protection efficace contre toute violence, menace et représailles dues au travail de défense des droits humains.

Focus : Qu'est-ce qu'un défenseur des droits humains ?

C’est la conclusion de notre rapport sur les défenseurs des droits humains au Mexique, intitulé « Caught between bullets and neglect: Lack of protection for defenders of the territory in the Sierra Tarahumara ».

Des mesures de protection insuffisantes

Julián avait déjà été victime de menaces et de harcèlement à cause de ses activités de défense des terres ancestrales dans la Sierra Tarahumara. Ces dernières années au moins cinq membres de sa famille ont aussi été tués, probablement pour les mêmes raisons.

En 2014, après avoir examiné les graves menaces auxquelles Julián Carrillo était confronté, le Mécanisme de protection des défenseurs des droits humains et des journalistes du ministère de l’Intérieur lui avait accordé des mesures de protection.

Lire aussi : Amérique latine : Un accord pour protéger les défenseurs de l'environnement.

Cependant, ces mesures – qui comprenaient l’octroi de téléphones satellitaires, de « boutons d’urgence » et d’une escorte policière en cas de déplacements – n’ont pas été suffisantes pour empêcher son assassinat.

Les autorités n’ont pas tenu compte du climat de pauvreté, de marginalisation et de discrimination dans lequel Julián vivait, ni de l’absence d’accès aux services de base, de la présence du crime organisé et des difficultés d’accès à la Sierra.

En conséquence, ces mesures n’ont été ni adaptées ni suffisantes pour faire face aux causes structurelles de la violence à Coloradas de la Virgen et pour garantir la sécurité de ceux qui défendent les droits humains et le territoire des Rarámuris.

Mais la défense de l’environnement ne devrait pas conduire à un arrêt de mort.

Le gouvernement doit adopter sans plus attendre une politique publique capable d’apporter une solution aux causes structurelles à l’origine des dangers auxquels sont confrontés les défenseurs des droits humains.

Un meurtre qu’on aurait pu éviter

Plusieurs semaines avant son assassinat, Julián Carrillo avait déclaré lors d’un entretien avec Amnesty International que ce qui le préoccupait le plus, c’était le niveau élevé de la violence à Coloradas dû à la présence du crime organisé et aux dissensions au sein de la communauté causées par l’octroi de droits d’ejido (possession de terres communales) à des personnes n’appartenant pas à la communauté.

Selon Julián, des réseaux du crime organisé se sont emparés de territoires indigènes pour cultiver des plantes illicites, en particulier du cannabis et des pavots à opium.

De nombreux membres de la communauté ont été déplacés et se sont réinstallés dans des villes des alentours; des dirigeants indigènes et leurs familles ont reçu des menaces de mort.

Lire aussi : Les défenseurs des droits de l'environnement attaqués.

Deux semaines environ avant l’assassinat de Julián Carrillo, une concession minière a été accordée sur le territoire des Rarámuris. Des membres de la communauté l’ont signalé aux autorités fédérales et de l’État de Chihuahua en demandant que des mesures soient prises d’urgence pour garantir leur sécurité..

Plusieurs jours après, lors d’une réunion de la communauté à laquelle Amnesty International a assisté, Julián exprimait son opposition à cette concession minière à cause de ses effets négatifs sur l’environnement et sur les risques de violence dans la région.

Mettre fin à l’impunité

Trois mois se sont écoulés depuis l’assassinat de Julián Carrillo, et les autorités mexicaines n’ont toujours pas identifié et déféré à la justice les responsables.

Lire aussi : La disparition des 43 étudiants au Mexique reste impunie

Des mesures doivent être prises de toute urgence pour mettre fin à l’impunité. Des enquêtes exhaustives, indépendantes et impartiales doivent être menées pour faire la lumière sur l’assassinat de Julián Carrillo et des autres membres de sa famille.