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Maisons civiles détruites par des frappes aériennes de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite dans la vieille ville de Saada, 2015 [de gauche à droite : Jean-Yves Le Drian, Emmanuel Macron, Florence Parly] // credit : Amnesty International

Maisons civiles détruites par des frappes aériennes de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite dans la vieille ville de Saada, 2015 [de gauche à droite : Jean-Yves Le Drian, Emmanuel Macron, Florence Parly] // credit : Amnesty International

Contrôle des armes

La France continue d’alimenter en armes le conflit au Yémen

« Une sale guerre ». C’est ce que déclarait, le 28 mai 2019, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères pour parler du conflit au Yémen. Pourtant, cela n’a pas empêché la France de poursuivre ses livraisons de matériels de guerre aux principaux pays impliqués : l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.

En 2019, la France a continué de violer ses engagements internationaux. Alors que le conflit au Yémen fait toujours rage, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis restent des clients privilégiés, selon le rapport au Parlement sur les exportations d’armement, publié le 2 juin 2020, par le ministère des Armées.

Comprendre : Ventes d'armes, quels sont les engagements internationaux de la France

La France a livré pour un montant de 1,379 milliards d’euros de matériels de guerre à l’Arabie saoudite et pour un montant de plus de 287 millions d’euros aux Emirats arabes unis. Ainsi, ces deux pays sont respectivement aux 2ème et 5ème rangs des pays clients de la France, en matière de livraisons de matériels de guerre.

Alertes, courriels, plaidoyer, campagne, rapports de recherche, enquêtes de journalistes, les autorités françaises sont parfaitement au courant de ce qu’il se passe au Yémen.

Lire aussi : La France toujours l'un des principaux fournisseurs de l'Arabie saoudite

De multiples alertes sur le Yémen

Depuis cinq ans, nous faisons campagne en faveur de la suspension des ventes d’armes à la coalition menée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Notre organisation a recueilli des informations sur les atteintes commises par toutes les parties au conflit, notamment des attaques aveugles, des bombardement illégaux, des détentions arbitraires, des disparitions forcées, des actes de torture, des violences sexuelles et l’entrave à l’aide humanitaire. Certains de ces agissements sont des crimes de guerre.

Dès lors, les exportations d’armes françaises constituent une violation flagrante du Traité international sur le commerce des armes (TCA). De plus, l’aide humanitaire est sollicitée à l’extrême, et les personnes en situation de handicap sont encore plus touchées que d’ordinaire. Plus récemment, la situation s’est aggravée avec la propagation du virus Covid-19.

Nous ne sommes pas seuls à alerter le gouvernement sur le sujet. Le groupe d’experts éminents du Conseil des droits de l’homme sur le Yémen, a fait état de violations généralisées du droit international commises en toute impunité, par toutes les parties au conflit, pouvant être des crimes de guerre. Le 3 septembre 2019, il énonçait que « la légalité des transferts d’armes effectués par la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et d’autres États reste douteuse ».

Voir aussi : L'industrie de l'armement expliquée par Simon Puech

Toujours dans le déni

Si l’on en croit le ministère des Armées, la France ne devrait pas exporter de matériels de guerre à l’Arabie saoudite ni aux Emirats arabes unis. En effet, celui-ci indique aux parlementaires en mai 2020, que toute décision de transfert d’armes prend notamment en compte le risque que les transferts d’armes en cause puissent servir à commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire soit « […] l'interdiction de dommages collatéraux disproportionnés par rapport à l'avantage militaire attendu ; le principe d'humanité selon lequel il faut chercher à limiter les dommages collatéraux d'une attaque. » Et d’ajouter que « ce critère préalable constitue un verrou. » .

Le gouvernement français fait, ainsi, l’inverse de ce qu’il déclare, tout en ignorant les différentes alertes sur la situation au Yémen. En effet, le projet «Armed Conflict location & Event Data Project» (ACLED) a enregistré plus de 100 000 décès depuis le début de la crise, dont plus 12 000 civils tués dans des attaques directes. Plus de deux-tiers des tués sont le fait d’attaques aériennes de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite. Selon un rapport des Nations unies ce sont plus de 233 000 personnes qui auraient été tuées et blessées.

Toujours en mai 2020, le ministère des Armées indique que la Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG) « veille au respect des embargos et des mesures restrictives décidées par les États de l'Union européenne. » Le fait que les Emirats arabes unis violent l’embargo sur les armes des Nations unies ainsi que celui de l’Union européenne, ne semble pas être un obstacle aux livraisons françaises à destination de ce pays, ni aux prises de commande de celui-ci qui ont explosé en 2019, avec un montant de plus de 1,5 milliards d’euros.

Lire aussi : Ventes d'armes françaises, ce que l'on veut nous cacher

Des livraisons massives

Selon les données du rapport 2020 au TCA, la France a livré en 2019 à l’Arabie saoudite, 555 véhicules blindés de combat et 20 systèmes d’artillerie de gros calibre de 105mm. Au total, depuis 2015, ne serait-ce que pour ces deux catégories d’armes la France a livré 1944 blindés de combat et 63 systèmes d’artillerie de gros calibre de 105mm.

Quant aux Emirats arabes unis, malgré le blocus maritime infligé au Yémen, la France poursuit ses transferts en concluant un contrat pour la vente de navires de combat, des corvettes Gowind (un contrat entré en vigueur en 2019). Or le blocus imposé se traduit par des restrictions sévères à l’entrée de biens de première nécessité et à l’aide humanitaire,  qui pourraient constituer un crime de guerre. La livraison future de tels navires comme la livraison en 2019 à l’Arabie saoudite de 3 intercepteurs maritimes HSI 32, font courir le risque de voir ces navires utilisés pour le blocus mis en place par la coalition militaire.

Par ailleurs, le rapport annuel au Parlement sur les exportations d’armes françaises nous dit que le gouvernement a délivré, de 2015 à 2019, 68 licences d’exportations de matériels de guerre pour un montant de 14 milliards d’euros à l’Arabie saoudite et 116 licences d’exportations pour un montant de 20 milliards d’euros aux Emirats arabes unis.

Enfin, l’Egypte qui fait partie de la coalition militaire engagée au Yémen, s’est vue délivrée une licence d’exportation d’un montant de 239 millions d’euros dans la catégorie ML6 (véhicules blindés). Et cela, alors même qu’en 2018 nous dénoncions l’exportation de tels équipements car ils avaient été utilisés dans de cadre de la répression sanglante des manifestants en Egypte.

Les droits humains, les vies et les obligations de la France au titre du droit international doivent être réellement des critères essentiels lors de la validation d’exportations d’armes. Le profit et les intérêts financiers doivent passer en second plan.

Agir

STOP À LA COMPLICITÉ DE LA FRANCE

Interpellez Emmanuel Macron pour exiger le respect des engagements internationaux en matière de contrôle et de transparence sur les ventes d'armes de la France