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Chili 

deux ans de violences policières en toute impunité

En octobre 2019, des manifestations ont gagné tout le Chili. Ce mouvement de protestation sociale a été réprimé violemment par la police. Des milliers de manifestants ont été gravement blessés. Deux ans après, les crimes restent impunis.

Il y a deux ans, un mouvement massif de protestation éclatait au Chili. Ce mouvement a été réprimé dans la violence par les autorités. À l’occasion du deuxième anniversaire de ce soulèvement social, nos équipes ont présenté au parquet chilien un rapport sur la responsabilité des dirigeants de la police - Policías bajo la Lupa: cinco claves para la supervisión y la rendición de cuentas de la policía en las Américas - qui compile les normes internationales relatives à la responsabilité pénale du commandement des carabineros, la police nationale chilienne.

Aujourd’hui encore, le gouvernement chilien nie ou minimise les violences commises par l’armée et la police pendant les manifestations de 2019. Deux ans après cette répression violente, les enquêtes ont à peine avancé.

C’est pour cela qu’aujourd’hui, nous appelons à ce que lumière soit faite sur les violations perpétrées et à une réforme profonde du système de police chilien. Nous espérons que ce rapport aidera à mettre un terme à cette impunité prolongée et inacceptable.

Lire aussi : Le Chili à corps et à cris, témoignages de victimes

Lire aussi : Chili, le passage à tabac de manifestants

Daniel Espinoza / manifestations Chili

Manifestation à Santiago sur la place d'Italie, renommée place de la Dignité par les manifestants / © Daniel Espinoza

Que s’est-il passé au Chili ?

En octobre 2019, au Chili, d’immenses manifestations ont éclaté. 

Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est l’annonce de la hausse du prix des tickets de métro. Cette annonce a ouvert la voie à toute une série de revendications : à la mi-octobre 2019, des milliers de chiliens sont courageusement descendus dans la rue afin de réclamer plus de justice sociale, d’égalité et de respect pour les droits humains. Parmi leurs revendications, ils demandaient une pension de retraite décente, un meilleur accès au logement, à l’éducation et une politique de santé publique de qualité.  

Les protestations prenant de l’ampleur, le Président Sebastian Pinera a décrété l’état d’urgence. C’est à partir de là qu’a commencé le « soulèvement social », dit « estallido social» en espagnol.

Lire aussi : Lettre ouverte au président Sebastián Piñera

Un manifestant brandit un drapeau chilien à Santiago, sur la place d'Italie, renommée place de la Dignité par les manifestants / © Pablo Ubilla

L’exécutif a diabolisé les actions de protestation en qualifiant les manifestants d’« ennemis puissants ». Mais cela ne les a pas découragés.

Le 25 octobre 2019, une immense manifestation, qualifiée comme « la plus importante du Chili », a eu lieu : plus d’un million de personnes sont descendues dans la rue pour défendre leurs droits. Cette marche a été violemment réprimée par les forces de sécurité. 

Des violences policières toujours impunies

Face à ce soulèvement, les autorités ont réagi par une répression violente et ont érigé la protestation sociale en infraction. Nos équipes de vérification numérique ont pu certifier plus de 200 abus commis par les carabineros, entre le 18 octobre et le 30 novembre 2019. 

Un manifestant court après un tir, à Santiago, sur la place d'Italie, renommée place de la Dignité par les manifestants / ©Mateo Lanzuela

Selon des chiffres communiqués par le parquet et par l’Institut national des droits humains, on recensait, en mars 2021, plus de 8 000 victimes de la violence d’État et plus de 400 cas de traumatisme oculaire au Chili.

Face à la gravité de ces faits, l’impunité règne.

À ce jour, aucun membre du commandement stratégique n’a été poursuivi, et un grand nombre de fonctionnaires ayant commis des violations des droits humains sont toujours en exercice et continuent de maintenir l’ordre lors des manifestations. Le parquet doit établir sans délai les responsabilités de toute la chaîne de commandement, y compris au plus haut niveau. 

« J'ai donné mes yeux pour que le peuple ouvre les siens » 

Le 8 novembre 2019, Gustavo Gatica, étudiant chilien de 21 ans, participe à une manifestation à Santiago contre l’augmentation des prix. Un policier tire sur des manifestants lors d’une violente dispersion. Des projectiles atteignent le jeune homme aux yeux. C’est le trou noir.  Gustavo Gatica restera à jamais aveugle. Deux ans après le drame, il réclame encore justice. 

Pour le deuxième anniversaire des manifestations chiliennes de 2019, nous avons lancé une campagne intitulée « Des rues pour se souvenir ». Avec plusieurs victimes, nous sommes revenus sur les lieux exacts où elles avaient été attaquées.

Vue Google Maps. Gustavo Gatica pose dans une rue à Santiago, la rue même où il a reçu des tirs au visage, en 2019. Sur sa pancarte, on peut lire : « Ici, des carabineros m’ont tiré sur le visage. J’ai perdu mes deux yeux. Je n’ai toujours pas obtenu justice » / image dans le cadre de notre campagne Streets with memory.

Nous les avons photographiées, demandant justice, à l’endroit même où des violations des droits humains ont été perpétrées. Pour que ces événements ne tombent pas dans l’oubli, nous avons téléchargé ces photos sur Google Maps afin que toutes celles et ceux qui naviguent en ligne dans les rues chiliennes soient informés sur les événements tragiques qui s’y sont produits.

Nous mènerons cette campagne, jusqu’à ce que justice soit rendue. Car sans justice, il ne peut pas y avoir de changement.

Notre campagne « Des rues pour se souvenir », expliquée en vidéo. 👇

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Une réforme des carabineros s’impose 

Il est nécessaire de mener une réforme de grande ampleur de l’institution des carabineros  au Chili, afin que les forces de l’ordre se conforment aux normes internationales relatives à l’emploi de la force. 

À ce jour, le gouvernement accorde aux carabineros un soutien sans faille. Les autorités nient la gravité de ce qui s’est passé il y a deux ans, ainsi que la nécessité de s’attaquer aux problèmes structurels qui y ont contribué.

Nous tenons à rappeler que la seule manière de mettre un terme aux violences policières est d’engager un processus de réforme structurelle des institutions concernées. Cela pourrait être fait par le biais d’un large dialogue avec la société civile, qui permettrait d’identifier des schémas récurrents de violence et de créer des mécanismes indépendants, transparents et participatifs d’enquête et de reddition de comptes, notamment en ce qui concerne la responsabilité des supérieurs hiérarchiques.

Des carabineros, police chilienne, à Santiago, rue Merced - Parque Forestal / © Pablo Ubilla

Notre rapport propose cinq mesures clés  : 

des mécanismes indépendants et efficaces de suivi des agissements de la police ;  

des mécanismes de participation pour la société civile et les organisations de victimes ;  

des protocoles adaptés afin d’enquêter sur les abus policiers ;  

la reconnaissance d’agissements policiers illégaux comme un problème structurel ;

la reconnaissance de la responsabilité des supérieurs hiérarchiques, y compris au plus haut niveau. 

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